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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4187/2020

ATAS/623/2021 du 16.06.2021 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4187/2020 ATAS/623/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 16 juin 2021

8ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié ______, à Carouge

 

 

 

recourant

contre

 

 

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE, sise Rue de Montbrillant 40, case postale 2293, Genève

 

 

 

 

intimée


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant), né le ______1984, ressortissant suisse, domicilié dans le canton de Genève, a été engagé dès le 1er janvier 2011 à plein temps par la banque B______ SA, au sein de laquelle il a occupé différents postes, en dernier lieu, dès le 1er mai 2019, celui d'Investment Advisor auprès du département "Moyen-Orient" pour les clients domiciliés au Koweït et au Qatar.

2.        Au cours des années 2018 et 2019, en raison d'une fatigue liée à une surcharge de travail et un stress professionnel, l'assuré a consulté son médecin traitant depuis 2014, le docteur C______, spécialiste FMH en médecine générale. Ce dernier l'a adressé à la doctoresse D______, pratiquant l'homéopathie, la naturopathie, la micronutrition et les soins énergétiques ; l'assuré l'a consultée une première fois le 9 octobre 2018, puis les 23 octobre 2018, 4 décembre 2018 et 19 mars 2019.

3.        Sur le plan professionnel, la masse de travail n'a fait que croître pour l'assuré, impliquant de sa part l'accomplissement d'heures de travail supplémentaires et un empêchement de prendre toutes ses vacances (il aura un solde de vacances non prises de 10 jours pour 2019 et de 14.6 jours pour le premier semestre 2020). De plus, en janvier 2020, B______ SA a commencé une nouvelle restructuration touchant l'ensemble de la banque privée et engendrant des licenciements notamment au sein de l'équipe de l'assuré. Un entretien que ce dernier a eu en février 2020 avec son supérieur hiérarchique concernant l'environnement de travail et les nombreuses heures de travail supplémentaires à accomplir n'a pas permis de dégager une solution pour améliorer la situation. Dès la mi-mars 2020, les restrictions dictées par la pandémie de Coronavirus s'étant déclenchées dans l'intervalle ont compliqué la situation. D'une part, la masse de travail et le stress professionnel ont augmenté, notamment du fait de l'instauration du télétravail, qui a favorisé un accroissement des sollicitations de la part des clients et du management en dehors des heures de bureau usuelles ; l'assuré a dû accomplir de nombreuses heures de travail supplémentaires (il en effectuera plus de 150 de janvier à juin 2020), au détriment de sa vie privée et familiale. D'autre part, les possibilités concrètes de chercher et trouver un autre emploi se sont amoindries.

4.        Le 28 avril 2020, se sentant en état d'épuisement émotionnel, physique et mental, l'assuré a démissionné de son emploi, pour le 31 juillet 2020 (soit en respectant son délai de résiliation de trois mois).

5.        L'assuré a consulté le Dr C______ le 5 juin 2020 (il ne l'avait plus vu depuis le 21 mai 2019), et la Dresse D______ le 6 juin 2020 (il ne l'avait plus vue depuis le 19 mars 2019).

6.        Durant son délai de résiliation, l'assuré n'a pas été libéré de son obligation de travailler. Son solde de vacances (24.6 jours pour 2019 et 2020) lui sera accordé finalement entre le 24 juin et le 31 juillet 2020.

7.        L'assuré s'est inscrit au chômage le 25 mai 2020, à la recherche d'un emploi à plein temps et pouvant être placé dès le 1er août 2020.

8.        Le 5 juin 2020, l'assuré a demandé à la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse, la CCGCh ou l'intimée) de lui verser des indemnités de chômage dès le 1er août 2020, en indiquant avoir démissionné de son poste de travail pour le motif figurant sur le certificat médical du Dr C______ du 5 juin 2020 joint à sa demande, à savoir le formulaire de l'assurance-chômage intitulé "Certificat médical en cas de dissolution des rapports de travail pour raisons médicales".

9.        D'après ce formulaire rempli par le Dr C______, ce dernier suivait l'assuré depuis le 31 janvier 2014 (question n° 1). L'assuré lui avait décrit des problèmes de santé survenus en raison de son activité professionnelle auprès de son employeur, à savoir "Surcharge, rythme insurmontable, état de Burn out", sans la précision requise quant au moment où l'assuré l'avait consulté à ce sujet pour la première fois (question n° 2). Ledit médecin répondait "oui" à la question de savoir si, sur la base de ses examens et évaluations médicales, il était parvenu à la conclusion que l'assuré ne pouvait plus rester à son poste de travail pour des raisons de santé (question n° 3), "non, il a toujours travaillé" à celle de savoir si l'assuré n'avait pas été en mesure d'exercer son activité parce que celle-ci avait eu un caractère non convenable (question n° 4), et que l'activité que l'assuré était encore à même d'exercer était la "même dans un milieu plus adapté" (question n° 5), sans faire d'autres remarques (question n° 6).

10.    Le 17 juin 2020, la caisse a indiqué à l'assuré que le Dr C______ n'avait pas répondu complètement à la question n° 2 du formulaire précité.

11.    Dans le cadre de l'instruction de la demande de l'assuré d'être indemnisé, la caisse a enregistré plusieurs documents le 13 août 2020, en particulier les formulaires suivants de l'assurance-chômage :

-          un formulaire intitulé "Attestation de l'employeur" (pce 3 CCGCh), rempli le 4 août 2020 et à teneur duquel le rapport de travail avait été résilié par l'assuré, pour un motif de "Rémunération" ;

-          un formulaire à compléter par l'employeur en cas de démission de l'employé (annexe à pce 10 CCGCh), non daté et non signé (il le sera le 18 août 2020 [pce 14 CCGCh]), à teneur duquel l'assuré avait donné son congé pour cause de "changement de métier" ; il s'agissait d'une "démission volontaire", sans lien avec les conditions d'emploi ; l'assuré n'avait pas fait part de problèmes de santé liés à ses conditions d'emploi ;

-          un formulaire à compléter par l'employé en cas de démission (pce 11 CCGCh), rempli par l'assuré le 12 août 2020 et à teneur duquel l'assuré avait démissionné pour les raisons suivantes : surcharge (environ 150 heures supplémentaires en 12 mois de travail), beaucoup de pression mais peu de reconnaissance, trop de stress ayant engendré de l'insomnie et de l'irritabilité qui avaient fini par peser sur la vie familiale, état de burn out ; l'assuré n'avait pas informé les ressources humaines de la banque mais à plusieurs reprises son supérieur hiérarchique de la problématique avant de démissionner et avait demandé une modification des conditions de travail, sans qu'une alternative ou une modification de ses conditions de travail ne puisse lui être proposée ; l'assuré n'avait pas consulté un médecin avant de démissionner, "en raison du Covid-19 et du semi-confinement", mais il l'avait fait après le "déconfinement" ; l'assuré n'avait pas signé un contrat ou une promesse d'engagement avant de démissionner ; son employeur l'aurait gardé ; l'assuré n'avait pas fait l'objet d'avertissements oraux ou écrits ;

-          le formulaire précité (pce 3 CCGCh) "Certificat médical en cas de dissolution des rapports de travail pour raisons médicales" (pce 12 CCGCh), sur lequel le Dr C______ avait ajouté, à la question n° 2, la mention du "21.05.2020" (recte : "21.05.2019" [pce 2 REC]) comme date de la consultation lors de laquelle l'assuré l'avait consulté pour la première fois pour les problèmes de santé survenus en raison de son activité professionnelle.

12.    Par décision du 21 août 2020 (pce 16 CCGCh), la caisse a prononcé à l'encontre de l'assuré une suspension de son droit à l'indemnité de 35 jours pour le motif qu'il était responsable de sa situation de chômage. Il avait donné sa démission de son poste de travail sans s'être assuré d'un autre emploi, et avait consulté son médecin après avoir pris la décision de démissionner, médecin qui ne pouvait donc attester d'un état de burn out au 28 avril 2020. Les motifs qu'il invoquait ne constituaient pas des raisons valables de rompre son contrat de travail avant d'avoir trouvé une activité de remplacement. Il s'agissait d'une faute grave, à teneur de la législation.

13.    Le 9 septembre 2020, la Dresse D______ a rempli le formulaire précité "Certificat médical en cas de dissolution des rapports de travail pour raisons médicales" (pce 3 REC). Elle y indiquait que l'assuré était son patient depuis octobre 2018 (question n° 1) et que l'assuré l'avait consultée le 6 juin 2020 pour la première fois pour "épuisement suite surcharge de travail, absence de vacances" (question n° 2) ; elle répondait "oui" à la question de savoir si, sur la base de ses examens et évaluations médicales, elle était parvenue à la conclusion que l'assuré ne pouvait plus rester à son poste de travail pour des raisons de santé (question n° 3). Elle ne répondait pas aux autres questions dudit formulaire.

14.    Par recommandé du 16 septembre 2020 (pce 17 CCGCh), l'assuré a formé opposition à la décision précitée de la caisse. Il a exposé ses conditions de travail (cf. supra ch. 3 de la partie "En fait"). Il avait tenté de s'accrocher à son poste, mais, à fin avril 2020, il n'en pouvait plus, se trouvant dans un état d'épuisement émotionnel, physique et mental. La crise sanitaire qui sévissait l'avait empêché de consulter son médecin traitant avant le "déconfinement", d'autant plus que sa compagne, Madame E______, était alors enceinte et donc une personne à risque. L'assuré demandait principalement l'annulation de la décision de la caisse (et la reconnaissance de son droit à l'entier des indemnités de chômage) et subsidiairement la réduction de la suspension de son droit auxdites indemnités à une durée compatible avec une faute légère.

15.    L'assuré et Mme E______ sont devenus père et mère d'une fille, née le 14 novembre 2020.

16.    Par décision sur opposition du 16 novembre 2020 (pce 19 CCGCh), la caisse a admis partiellement l'opposition, réduisant la durée de la suspension prononcée à 31 jours, soit au minimum d'une suspension pour faute grave. L'assuré avait démissionné de son plein gré en raison d'une surcharge de travail ayant provoqué un burn out. Il n'avait consulté un médecin qu'après avoir donné sa démission. Il était responsable de sa situation de chômage, ne laissant d'autres choix à son employeur et à la caisse que d'accepter cette situation. Il n'y avait pas de cas de force majeure permettant de déroger à une sanction pour faute grave lors d'une démission.

17.    Le 11 décembre 2020, l'assuré a recouru contre cette décision sur opposition auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS). Il a repris pour l'essentiel les termes et conclusions de son opposition précitée. Il n'était pas cohérent de retenir, au niveau des faits, qu'il avait démissionné de son plein gré en raison d'une surcharge de travail ayant provoqué un burn out, et, au niveau du droit, qu'il avait commis une faute, de surcroît grave, en démissionnant. Il produisait une attestation sur l'honneur du 10 décembre 2020 (pce 5 REC), par laquelle sa compagne précitée certifiait qu'elle avait constaté une dégradation de l'état de santé de l'assuré durant les dernières années passées chez B______ SA, notamment depuis qu'il y occupait son dernier poste et de façon encore accrue depuis l'instauration du télétravail ; une fois sa journée de travail terminée, il était sans cesse en tracas par rapport à ce qu'il avait fait, à ce qui lui restait à faire ou n'avait pas eu le temps de faire, malgré de nombreuses heures de travail supplémentaires ; il en était résulté pour lui des troubles du sommeil, des problèmes de concentration, de l'irritabilité, une fatigue morale et physique, une perte de confiance en lui-même ; cela avait pesé sur la vie familiale. S'appuyant sur des définition et description du burn out, l'assuré affirmait qu'il s'était trouvé dans la situation de ne pas pouvoir poursuivre ses rapports de travail ; il avait consulté à réitérées reprises les Dr C______ et D______ en 2018 et 2019 déjà, alors qu'il présentait déjà les prémisses d'un burn out ou un burn out avéré. Il y avait lieu de déroger à la règle qu'une démission avant d'avoir un emploi de remplacement impliquait un chômage fautif ou, susbidiairement, un chômage provoqué par une faute grave.

18.    Par réponse du 14 janvier 2021, la caisse a conclu au rejet du recours. Il n'y avait pas de certificat médical attestant que le médecin était parvenu de lui-même, sur la base de ses propres recherches, au résultat formel que la poursuite des rapports de travail n'était plus possible pour des raisons de santé. L'assuré avait démissionné avant de consulter le Dr C______, le 5 juin 2021, et la Dresse D______, le 6 juin 2020. L'attestation de la compagne de l'assuré ne constituait pas un certificat médical.

19.    Par réplique du 18 février 2021, l'assuré a persisté dans les termes et conclusions de son recours. Il avait consulté les deux médecins précités en 2018 et 2019 déjà. Un burn out était un processus qui évoluait lentement, la conséquence d'un stress chronique. S'il susbistait pour elle des doutes, la caisse devait éclaircir la situation auprès desdits médecins, ce qu'elle n'avait pas fait. L'attestation de sa compagne représentait un moyen de preuve admissible.

20.    Dans une duplique du 16 mars 2021, la caisse a souligné que l'assuré n'avait consulté ni le Dr C______ entre le 21 mai 2019 et le 5 juin 2020, ni la Dresse D______ entre le 19 mars 2019 et le 6 juin 2020.

21.    Le 24 mars 2021, les parties ont été informées que la cause serait gardée à juger dès le 14 avril 2021, sans qu'elles ne sollicitent la possibilité de compléter leurs écritures ou l'accomplissement d'actes d'instruction.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0). Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie, dès lors que la décision attaquée est une décision sur opposition rendue en application de ces lois.

Le recours a été interjeté en temps utile (art. 60 LPGA), dans le respect des conditions de forme et de contenu posées par la loi (art. 61 let. b LPGA ; cf. aussi art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 LPA).

Touché par la décision attaquée et ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification, le recourant a qualité pour recourir (art. 59 LPGA ; art. 60 al. 1 let. a et b et 89A LPA).

Le recours est donc recevable.

2.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 83 LPGA ; RO 2020 5137 ; FF 2018 1597).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit à l'indemnité de chômage de 31 jours que l'intimée a prononcée contre le recourant pour le motif que celui-ci se trouvait au chômage par sa faute.

4.        a. Selon l'art. 30 al. 1 let. a LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci est sans travail par sa propre faute. Cette disposition vise à limiter l'obligation de l'assurance-chômage d'allouer des indemnités en couverture d'un chômage qui aurait pu être évité. Elle institue une sanction administrative, dont la fonction est de faire participer la personne assurée au dommage qu'elle a causé à ladite assurance par un comportement fautif (ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; ATAS/1260/2020 du 21 décembre 2020 consid. 4 ; Boris RUBIN, Assurance-chômage et service public de l'emploi, 2019, n. 466 s., 489 ss).

b. L'art. 44 al. 1 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02) énumère les principaux cas de chômage fautif (ATF 122 V 43 consid. 3c/bb p.  45 : liste non exhaustive). A teneur de la let. b de cette disposition, est réputé sans travail par sa propre faute notamment l'assuré qui a résilié lui-même le contrat de travail, sans avoir été préalablement assuré d'obtenir un autre emploi, sauf s'il ne pouvait être exigé de lui qu'il conservât son ancien emploi. C'est sur cette disposition que l'intimée a fondé la décision attaquée.

Il n'est pas contesté que les deux premières des trois conditions cumulatives devant être remplies à teneur de cette disposition pour qu'une suspension du droit à l'indemnité soit prononcée sont réalisées. Il appert en effet que le recourant a lui-même donné son congé et qu'il n'avait pas, au moment de résilier le contrat de travail, d'assurance préalable d'un nouvel emploi. Encore fallait-il qu'aucune circonstance ne s'opposât à la poursuite des rapports de travail. Ce point est litigieux.

5.        a. L'art. 44 al. 1 let. b in fine OACI pose la présomption que l'emploi quitté était convenable, de sorte que la continuation des rapports de service était exigible. Cette présomption peut être renversée par la personne assurée, étant cependant précisé que les circonstances pouvant justifier l'abandon d'un emploi doivent être évaluées de manière restrictive, davantage même que pour déterminer si un emploi est réputé non convenable et peut donc être refusé à teneur de l'art. 16 al. 2 LACI (ATF 124 V 234 consid. 4b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_1021/2012 du 10 mai 2013 consid. 2.2 ; ATAS/69/2020 du 30 janvier 2020 consid. 4c ; ATAS/486/2019 du 3 juin 2019 consid. 4b ; Boris RUBIN, op. cit., n. 505). Il ne peut être renoncé à une sanction que si la résiliation est intervenue en dernier ressort, après que la personne assurée eut pris toutes les mesures exigibles pour que, si cela est en cause, son employeur satisfasse à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral 8C_285/2013 du 11 février 2014 consid. 6.2.2 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 502).

b. Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2017 du 22 février 2018 consid. 3.1 ; ATAS/69/2020 du 30 janvier 2020 consid. 4c ; ATAS/486/2019 du 3 juin 2019 consid. 4b), des désaccords sur le montant du salaire ne suffisent pas à justifier l'abandon d'un emploi ; on doit, au contraire, attendre de l'assuré qu'il fasse l'effort de garder sa place jusqu'à ce qu'il ait trouvé un autre emploi mieux rémunéré (SVR 1997 AlV n° 105 p. 323, C 128/96 consid. 2a ; DTA 1986 n° 23 p. 90, C 202/85 consid. 2b). De même, en cas de modification sensible du contrat par l'employeur, l'assuré doit accepter les nouvelles conditions de travail dans l'attente de retrouver un autre emploi qui corresponde mieux à ses ambitions (arrêt 8C_295/2009 du 15 septembre 2009 consid. 4.1). De même aussi, des conditions de travail difficiles, des relations tendues avec les collègues ou la hiérarchie, une mauvaise atmosphère de travail ne suffisent pas à faire admettre que la continuation des rapports de travail n'était pas exigible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_66/2017 du 9 juin 2017 consid. 2 ; Boris RUBIN, op. cit. n. 503).

En revanche, on ne saurait en règle générale exiger de l'employé qu'il conserve son emploi lorsque les manquements d'un employeur à ses obligations contractuelles atteignent un degré de gravité justifiant une résiliation immédiate au sens de l'art. 337 CO (Boris RUBIN, op. cit. n. 503 s.; Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd., 2016, n° 838 ; Charles MUNOZ, La fin du contrat individuel de travail et le droit aux indemnités de l'assurance-chômage, 1992, p. 182 ; Bulletin LACI ID D27).

c. Selon l'art. 16 al. 2 let. c LACI, une personne assurée n'est pas obligée d'accepter un emploi qui ne convient pas (notamment) à son état de santé. Par analogie mais à des conditions restrictives, il faut admettre, suivant les circonstances, qu'une personne assurée dont l'emploi porte atteinte à sa santé peut être amenée à résilier son contrat de travail alors même qu'elle n'est pas assurée de trouver un autre emploi pour l'échéance du délai de résiliation.

Cependant, lorsque la personne assurée a mis fin d'elle-même aux rapports de travail, estimant ne pas pouvoir rester à son poste de travail pour des raisons de santé, elle doit présenter à la caisse de chômage un certificat médical juridiquement suffisant afin de prouver ses dires (Bulletin LACI IC D26). Si le certificat médical présenté n'est pas ou pas suffisamment probant, la caisse doit effectuer une enquête complémentaire (ATAS/505/2019 du 5 juin 2019 consid. 3d). Ce devoir d'investigation se déduit pour elle de la maxime inquisitoire, toutefois non sans que, de son côté, la personne assurée ne doive satisfaire à son obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut raisonnablement être exigé d'elle, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, au risque, à défaut, de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (art. 43 LPGA ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références citées ; ATAS/505/2019 du 5 juin 2019 consid. 5), étant ajouté qu'elle doit le cas échéant assumer les manquements d'une tierce personne chargée de l'assister dans l'accomplissement de ses obligations (Boris RUBIN, op. cit., n. 487).

6.        a. En l'espèce, les conditions de travail que le recourant avait à B______ étaient sans doute exigeantes, même difficiles et source de stress, d'autant plus depuis que, dès janvier 2020, des restructurations avaient été mises en œuvre au sein de la banque et que le télétravail y avait été instauré dans le contexte de la pandémie de coronavirus survenue vers la mi-mars 2020.

Eu égard au poste que le recourant occupait au sein de ladite banque, il ne saurait cependant être retenu qu'il s'agissait d'un emploi non convenable, nonobstant ces conditions difficiles. Le nombre certes élevé d'heures de travail supplémentaires qu'il a faites (soit quelque 150 de janvier à juin 2020) et le nombre de jours de vacances qu'il n'a pas pris avant juillet 2020 (10 pour l'année 2019 et 14.6 pour le premier semestre 2020) n'autorisent pas à admettre le contraire, pas davantage que les dérangements à son domicile en dehors des heures de travail usuelles depuis l'instauration du télétravail. Ces circonstances ne constituaient pas un motif de résiliation immédiate de son contrat de travail au sens de l'art. 337 du code des obligations ; le recourant ne le prétend d'ailleurs pas.

Force est au demeurant de relever que, du moins dans une certaine mesure, le recourant a consenti à faire autant d'heures supplémentaires, à ne pas prendre toutes ses vacances et à être dérangé à la maison en dehors des heures usuelles de travail. Certes non sans risque d'une détérioration de l'atmosphère de travail et d'une accentuation de la pression de son supérieur, il aurait été en droit et en mesure d'assigner quelques limites aux attentes ressenties comme excessives de son employeur et des clients dont il s'occupait.

Le recourant n'a pas informé les ressources humaines de son employeur de la surcharge et de la pression qu'il ressentait à son poste de travail, se contentant d'en parler à son supérieur hiérarchique, sans obtenir d'évolution positive de la situation.

Il n'est pas non plus établi que le recourant a cherché activement à changer d'emploi, ni avant ni après le déclenchement de la pandémie de coronavirus.

Enfin, s'il n'y a guère de crédit à attribuer à l'indication donnée par l'employeur du recourant, selon laquelle ce dernier avait résilié son contrat de travail pour une question de rémunération ou pour cause de "changement de métier", il se justifie de retenir que le recourant n'était nullement sous la menace d'un licenciement. Lui-même a indiqué que son employeur l'aurait gardé et qu'il n'avait pas fait l'objet d'avertissements oraux ou écrits.

b. Il ne résulte pas de ces considérations que le recourant n'était pas affecté dans sa santé par ses conditions de travail.

aa. L'intimée paraît d'ailleurs avoir admis que le recourant a eu une surcharge de travail ayant provoqué un burn out. Cependant, en plus que cet avis n'a pas valeur de diagnostic médical, il n'en résulte pas – au demeurant même s'il était établi que le recourant avait alors un burn out – que le congé que ce dernier a donné à son employeur sans avoir d'emploi de remplacement ne le plaçait pas dans la situation de se trouver sans travail par sa propre faute au sens de l'art. 30 al. 1 let. a LACI.

bb. On ne saurait considérer que l'état de santé du recourant était alarmant. En effet, ce n'était que le 21 mai 2019 qu'il avait consulté son médecin traitant depuis 2014 pour la première fois pour des problèmes de santé liés à son activité professionnelle, et ledit médecin n'avait alors pas jugé nécessaire de le revoir (jusqu'à ce que le recourant reprenne rendez-vous à son cabinet pour le 5 juin 2020). Antérieurement, en automne 2018, il l'avait simplement adressé à une doctoresse pratiquant l'homéopathie, la naturopathie, la micronutrition et les soins énergétiques, et le recourant n'avait plus consulté cette doctoresse depuis le 19 mars 2019 (jusqu'à ce qu'il reprenne rendez-vous avec elle pour le 6 juin 2020).

Les restrictions sanitaires et le semi-confinement mis en œuvre en Suisse pour lutter contre la pandémie de coronavirus n'empêchaient aucunement le recourant de consulter un médecin, que ce soit le Dr C______ ou la Dresse D______, un autre médecin, dans une permanence, une clinique ou aux Hôpitaux universitaires de Genève, si la nécessité s'en était fait sentir de façon pressante. Le fait que sa compagne était enceinte ne justifiait pas non plus qu'il s'abstienne de consulter un médecin dans une telle hypothèse.

Au surplus, le recourant a été en mesure de continuer à fournir ses prestations de travail après avoir donné son congé, le 28 avril 2020, et s'il a cessé de travailler dès le 24 juin 2020 (et non à l'échéance de son contrat le 31 juillet 2020), ce n'est pas parce qu'il n'en aurait plus eu les forces, mais parce qu'il avait 24.6 jours de vacances à prendre.

cc. Le recourant n'a pas consulté un médecin avant de résilier son contrat de travail.

Le certificat médical qu'a établi le Dr C______ le 5 juin 2020 ne permet pas de retenir, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'une résiliation des rapports de travail pour le 31 juillet 2020 s'imposait pour des raisons de santé, alors qu'il n'apparaît pas que, préalablement, un traitement médical approprié ait été prescrit au recourant ni que celui-ci n'ait été mis au bénéfice d'un arrêt de travail pour cause d'incapacité médicale de travailler (le mettant au demeurant à l'abri d'un licenciement dans son cas durant au moins 180 jours [art. 336c al. 1 let. b et al. 2 CO]), et ce pour autant que la prise de vacances ait vraiment été impossible pour qu'il puisse se reposer et reprendre des forces.

Il appert que le recourant a mis son médecin traitant devant le fait accompli, de surcroît en le consultant plus de cinq semaines après qu'il avait donné son congé et alors qu'il n'était pas venu le voir depuis plus d'une année (sans que par ailleurs il n'ait consulté dans l'intervalle la Dresse D______, à laquelle le Dr C______ l'avait précédemment adressé). La façon lapidaire et légère dont le Dr C______ a rempli, puis complété le formulaire "Certificat médical en cas de dissolution des rapports de travail pour raisons médicales" n'était pas propre à conférer du crédit aux renseignements médicaux que ce médecin était le cas échéant en mesure de fournir à l'intimée. Dans ces conditions, compte tenu de la valeur probante de toute façon moindre reconnue le plus souvent à l'avis du médecin traitant en matière d'assurances sociales du fait que celui-ci est naturellement enclin à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à lui (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc), il était vain pour l'intimée d'effectuer une enquête complémentaire auprès de lui, autrement qu'en sollicitant par l'intermédiaire du recourant un complément à son premier rapport lacunaire (ainsi qu'elle l'a fait le 17 juin 2020). Il en allait de même, pour les mêmes motifs, pour des démarches auprès de la Dresse D______, après que celle-ci, le 9 septembre 2020, avait rempli encore plus négligemment le même formulaire de l'assurance-chômage.

Le recourant n'apparaît pas avoir consulté, ne serait-ce que par la suite (même en cours de procédure), d'autres médecins, dont un avis circonstancié aurait pu être requis.

c. Ainsi, lorsqu'il a donné son congé sans avoir l'assurance d'un emploi de remplacement, le recourant ne se trouvait pas, objectivement, dans la situation de n'avoir pas d'autre solution que de résilier son contrat de travail. Autrement dit, la poursuite des rapports de travail était exigible.

7.        a. Il s'ensuit que la caisse devait le sanctionner pour cause de chômage fautif, par une suspension de son droit à l'indemnité de chômage.

b. La durée d'une suspension du droit à l'indemnité doit être proportionnelle à la faute commise (art. 30 al. 3 phr. 3 LACI). L'art. 45 al. 3 OACI prévoit trois catégories de fautes, soit les fautes légères, les fautes moyennes et les fautes graves, qui sont passibles d'une suspension pour une durée respectivement de 1 à 15 jours, de 16 à 30 jours et de 31 à 60 jours.

Selon l'art. 45 al. 4 OACI, il y a faute grave lorsque, sans motif valable, la personne assurée abandonne un emploi réputé convenable sans être assurée d'obtenir un nouvel emploi (let. a), ou lorsqu'elle refuse un emploi réputé convenable (let. b).

c. Lorsque la personne assurée peut se prévaloir d'un motif valable, il n'y a pas nécessairement faute grave en cas d'abandon d'un emploi convenable ou de refus d'un tel emploi. En présence de circonstances particulières objectives ou subjectives, il est possible de retenir une faute moyenne ou légère, de façon toutefois exceptionnelle et restrictive (ATF 130 V 125 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_342/2017 du 28 août 2017 consid. 4.3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 571).

Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère, un motif qui est lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.2), qui constitue en quelque sorte une circonstance atténuante. Par exemple, à défaut d'avoir atteint un degré de gravité avéré suffisant pour justifier une résiliation immédiate des rapports de service (auquel cas aucune suspension du droit à l'indemnité ne devrait être prononcée), du harcèlement psychologique pourrait justifier une réduction de la durée minimale de 31 jours prévue en cas de faute grave (ATAS/486/2019 du 3 juin 2019 consid. 5b ; Bulletin LACI IC D22).

d. En l'espèce, il apparaît que, le 28 avril 2020, le recourant a résilié son contrat de travail alors que ses conditions de travail, sans avoir fait de son poste de travail un emploi non convenable, étaient difficiles et s'étaient même péjorées du fait d'un télétravail géré sans mise de limites à sa disponibilité en dehors des heures de travail usuelles. Il ne fait pas de doute que le recourant était alors fragilisé, comme cela résulte de l'attestation sur l'honneur de sa compagne, qui n'est pas dépourvue de toute valeur probante, même si elle ne vaut assurément pas certificat médical. Sur le moment, à tort mais de bonne foi, il n'a pas vu d'autre issue raisonnable à la situation stressante dans laquelle il se trouvait que de donner son congé.

Cela n'ôte pas un caractère fautif à son chômage, mais cela atténue la gravité de la faute à imputer au recourant. La chambre de céans estime que, pour des motifs subjectifs liés à la perception que le recourant a eue de sa situation difficile, une faute moyenne doit lui être reprochée dans l'abandon de son emploi convenable, une faute d'une gravité justifiant de fixer la durée de la suspension attaquée un peu au-dessus de la valeur moyenne de la fourchette prévue en cas de faute moyenne (ATF 123 V 150 consid. 3c).

Il se justifie de réduire à 26 jours la durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage infligée au recourant.

8.        a. Le recours sera donc admis partiellement et la décision attaquée réformée dans le sens précité.

b. La procédure est gratuite (art. 61 al. 1 let. a aLPGA ; cf. art. 61 al. 1 let. fbis LPGA).

c. Le recourant plaidant en personne et n'ayant pas fait état de frais particuliers et importants engagés pour la défense de ses intérêts, il n'y a pas lieu de lui allouer une indemnité de procédure, en dépit du fait qu'il obtient partiellement gain de cause.

* * * * * *

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Réforme la décision de la Caisse cantonale genevoise de chômage du 16 novembre 2020, dans le sens que la suspension du droit à l'indemnité de chômage infligée à Monsieur A______ est réduite de 31 à 26 jours.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

Le président suppléant

 

 

 

 

Raphaël MARTIN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le