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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/824/2021

ATAS/735/2021 du 29.06.2021 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/824/2021 ATAS/735/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 juin 2021

9ème Chambre

 

En la cause

A______ SÀRL - RESTAURANT B______, sise à COLOGNY

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L’EMPLOI, sis Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A.      A______ Sàrl (ci-après : la société), avec siège à Cologny, a pour but social les activités dans le domaine de l’événementiel, du divertissement et du tourisme, de même que l’exploitation d’établissements publics, tels que cafés, restaurants, discothèques, etc. (cf. registre du commerce).

La société exploite notamment le Restaurant B______.

B.       a. Par décision du 27 mars 2020, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) a octroyé à la société la réduction de l’horaire de travail (ci-après : RHT) pour la période allant du 18 mars 2020 au 17 juin 2020.

b. Par courriel du 21 décembre 2020, la société, soit pour elle Monsieur C______, a transmis à l’OCE un formulaire de préavis de RHT, annonçant une perte de travail de 100 % pour toute l’entreprise, à partir du 2 novembre 2020.

c. Par décision du 21 décembre 2020, l’OCE a accepté la demande de la société du 31 décembre 2020 au 30 mars 2021. Pour autant que toutes les autres conditions du droit étaient remplies, la caisse pouvait octroyer l’indemnité en cas de RHT.

d. Le 29 décembre 2020, la société a formé opposition à cette décision, en faisant valoir que son restaurant avait dû fermer le 2 novembre 2020, de sorte que l’indemnité était requise dès cette date. La société a indiqué avoir formé une demande, au début du mois de novembre, auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse). Ce n’était que le 21 décembre 2020 que la caisse l’avait informée qu’il fallait demander une indemnité en cas de RHT auprès de l’OCE. La société a précisé que, de juin à fin octobre 2020, elle n’avait fait aucune demande d’indemnité en cas de RHT alors que la situation était compliquée en raison des mesures sanitaires.

La « demande et décompte d’indemnité en case de RHT » formée par la société, datée du 2 décembre 2020 et reçue par la caisse le 4 décembre 2020, était jointe à son opposition.

e. Par décision sur opposition du 12 février 2021, l’OCE a annulé sa décision du 21 décembre 2020 et octroyé l’indemnisation en cas de RHT du 23 décembre 2020 au 22 mars 2021. Selon les pièces produites, le décompte du mois de novembre 2020 avait été réceptionné par la caisse le 4 décembre 2020. L’employeur avait déposé sa demande tardivement, de sorte que c’était à juste titre que l’OCE n’avait pas octroyé la RHT dès le 2 novembre 2020. Toutefois, dans la mesure où l’employeur avait déposé sa demande auprès de l’OCE le 21 décembre 2020, soit le jour où le Conseil d’État avait ordonné une nouvelle fermeture de son établissement, aucun délai de préavis ne devait être observé. La nouvelle mesure était entrée en vigueur le 23 décembre 2020, de sorte que l’indemnité en cas de RHT pouvait être octroyée dès cette date.

C.       a. Par acte du 4 mars 2021, la société a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) d’un recours à l’encontre de la décision précitée, concluant à l’octroi d’indemnités en cas de RHT dès le mois de novembre 2020. Elle a repris en substance la motivation de son opposition.

b. Par réponse du 19 mars 2021, l’OCE a conclu au rejet du recours, expliquant que la société n’avait apporté aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée.

c. Le 6 avril 2021, la société a persisté dans ses conclusions, faisant valoir que la modification de la loi COVID-19 lui était applicable.

d. Le 3 juin 2021, invitée par la chambre de céans, la caisse a produit la demande et décompte d’indemnités en cas de réduction de l’horaire de travail pour le mois de novembre 2020, portant le tampon de réception de la caisse daté du 6 novembre 2020.

e. Le 15 juin 2021, la société a conclu à ce que les indemnités en cas de RHT lui soient octroyées dès le 6 novembre 2020, compte tenu de la pièce produite par la caisse.

f. Le 17 juin 2021, l’OCE a relevé que les pièces produites par la caisse ne lui permettaient pas de modifier sa position.

EN DROIT

1.        Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la décision par laquelle l’intimé a octroyé l’indemnité en cas de RHT à compter du 23 décembre 2021.

4.        Afin de surmonter des difficultés économiques passagères, un employeur peut introduire, avec l’accord de ses employés, une RHT, voire une suspension temporaire de l’activité de son entreprise (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, ch. 1 relatif aux remarques préliminaires concernant les art. 31ss). En effet, selon l’art. 31 al. 1 let. b et d LACI, les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l’activité suspendue ont droit à l’indemnité en cas de RHT lorsque la perte de travail doit être prise en considération et la réduction de l’horaire de travail est vraisemblablement temporaire, et si l’on peut admettre qu’elle permettra de maintenir les emplois en question. L’indemnité s’élève à 80 % de la perte de gain prise en considération (art. 34 al. 1 LACI).

Selon l’art. 36 al. 1 LACI, lorsqu’un employeur a l’intention de requérir une indemnité en faveur de ses travailleurs, il est tenu d’en aviser l’autorité cantonale par écrit dix jours au moins avant le début de la réduction de l’horaire de travail. Le Conseil fédéral peut prévoir des délais plus courts dans des cas exceptionnels. Le préavis est renouvelé lorsque la réduction de l’horaire de travail dure plus de trois mois.

Compte tenu de l’art. 58 al. 4 OACI, il doit être considéré que le respect des délais de préavis est une condition formelle du droit. Il s’agit d’un délai de déchéance (ATF 110 V 335 ; RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). Le délai de préavis ne peut être ni prolongé ni suspendu mais il peut être restitué en présence d’une raison valable (RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). L’inobservation du délai n’entraîne toutefois pas la péremption générale du droit mais uniquement son extinction pour la période donnée, le début du droit étant reporté de la durée du retard (ATF 110 V 335 ; voir également arrêt du Tribunal fédéral des assurances C_20/98 du 15 septembre 2000 consid. 1c ; RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36). Dans l’hypothèse d’un préavis tardif, il appartient à l’autorité cantonale de s’opposer partiellement au versement de l’indemnité (RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 36 ; Bulletin LACI RHT G7 ad art. 36).

Si une demande ne respecte pas les exigences de forme ou si elle est remise à un organe incompétent, la date à laquelle elle a été remise à la Poste ou déposée auprès de cet organe est déterminante quant à l’observation des délais et aux effets juridiques de la demande (art. 29 al. 3 LPGA).

L’indemnité en cas de RHT doit être avancée par l’employeur (art. 37 let. a LACI) et sera, par la suite, remboursée par la caisse de chômage à l’issue d’une procédure spécifique (art. 36 et 39 LACI), étant précisé qu’un délai d’attente de deux à trois jours doit être supporté par l’employeur (art. 32 al. 2 LACI et 50 al. 2 de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 [ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02], étant précisé que l’art. 50 al. 2 OACI a été supprimé temporairement en raison de la pandémie de Coronavirus).

Le but de l’indemnité en cas de RHT consiste, d’une part, à garantir aux personnes assurées une compensation appropriée pour les pertes de salaire dues à des réductions de temps de travail et à éviter le chômage complet, à savoir des licenciements et résiliations de contrats de travail. D’autre part, l’indemnité en cas de RHT vise au maintien de places de travail dans l’intérêt tant des travailleurs que des employeurs, en offrant la possibilité de conserver un appareil de production intact au-delà de la période de réduction de l’horaire de travail (ATF 121 V 371 consid. 3a).

Une perte de travail est prise en considération lorsqu’elle est due, entre autres conditions, à des facteurs économiques et qu’elle est inévitable (art. 32 al. 1 let. a LACI). Ces conditions sont cumulatives (ATF 121 V 371 consid. 2a).

5.        a. En raison de la propagation de la COVID-19, le Conseil fédéral a, le 28 février 2020, qualifié la situation prévalant en Suisse de « situation particulière » au sens de l’art. 6 al. 2 let. b de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme (loi sur les épidémies ; LEP - RS 818.101). Sur cette base, le Conseil fédéral a édicté l’Ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 28 février 2020 (RO 2020 573) puis l’Ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 13 mars 2020 (Ordonnance 2 COVID-19 ; RO 2020 773) qui limitait notamment l’accueil dans les restaurants, les bars, les discothèques et les boîtes de nuit à cinquante personnes (art. 6 al. 2). Après avoir qualifié la situation en Suisse de « situation extraordinaire » au sens de l’art. 7 LEP, le Conseil fédéral a procédé à des modifications de cette ordonnance, notamment en ordonnant la fermeture des restaurants (art. 6 al. 2 let. b). Cette modification est entrée en vigueur le 17 mars 2020 (RO 2020 783). Elle a été abrogée avec effet au 11 mai 2020 (RO 2020 1499). Dès cette date, les restaurants ont pu rouvrir à condition de disposer d’un plan de protection (art. 6 al. 3 let. bbis) et pour autant que les consommations soient prises assises, que le nombre de clients soit limité à quatre personnes à table et que les établissements restent fermés entre 00h00 et 06h00 (art. 6 al. 3bis). L’ordonnance 2 COVID-19 a été abrogée le 22 juin 2020 (RO 2020 773).

Le 19 juin 2020, à la suite d’une diminution du nombre de nouveaux cas, le Conseil fédéral a requalifié la situation extraordinaire en situation particulière et restructuré ses mesures notamment en édictant l’ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre l’épidémie de COVID-19 en situation particulière (Ordonnance COVID-19 situation particulière – RS 818.101.26). Il a en particulier levé l’obligation de rester assis dans les restaurants et la limitation des horaires d’ouverture de ceux-ci.

Le 18 octobre 2020, le Conseil fédéral a notamment imposé le port du masque facial dans les espaces clos accessibles au public des installations et des établissements, y compris les restaurants sauf si les clients sont assis à une table (art. 3b al. 1 et 2 let. c de l’ordonnance COVID-19 situation particulière) et imposé que les aliments et boissons soient consommés uniquement à des places assises (art. 5a de l’ordonnance COVID-19 situation particulière). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 19 octobre 2020 (RO 2020 4159).

Le 28 octobre 2020, le Conseil fédéral a étendu l’obligation du port du masque aux espaces publics extérieurs des installations et établissements (art. 3b al. 1 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière), limité le nombre de clients à quatre par table dans les restaurants et imposé leur fermeture entre 23h00 et 06h00 (art. 5a de l’ordonnance COVID-19 situation particulière). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 29 octobre 2020 (RO 2020 4503).

Le 12 décembre 2020 est entrée en vigueur une modification de l’ordonnance COVID-19 situation particulière prévoyant que les établissements de restauration devaient demeurer fermés entre 19h00 et 06h00 (art. 5a de l’ordonnance COVID-19 situation particulière). Tout canton pouvait toutefois prévoir d’étendre ces heures d’ouverture si les capacités hospitalières étaient garanties, que le taux de reproduction effectif du virus était inférieur à 1 durant au moins sept jours consécutifs et que le nombre de nouvelles infections par 100'000 personnes était inférieur à la moyenne suisse au cours des sept derniers jours également ; le cas échéant, il pouvait décider que les établissements de restauration restaient ouverts au plus tard jusqu’à 23h00 (art. 7 al. 2 et 3 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière).

Le 18 décembre 2020, le Conseil fédéral a procédé à une modification de l’ordonnance COVID-19 situation particulière, entrée en vigueur le 22 décembre 2020, et a notamment interdit l’exploitation des établissements de restauration (art. 5a al. 1 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière), sous réserve des allègements pouvant être ordonnés par les cantons au sens de l’art. 7 al. 2 et 3 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière (RO 2020 5813).

Le 9 janvier 2021, le Conseil fédéral a abrogé l’art. 7 al. 2 et 3 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière sur les exceptions cantonales concernant notamment l’ouverture des établissements de restauration (RO 2021 2).

b. Sur le plan cantonal, le Conseil d’État a adopté, le 1er novembre 2020, l’arrêté d’application de l’ordonnance COVID-19 situation particulière et sur les mesures de protection de la population (ci-après : l’arrêté COVID-19), publié dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 2 novembre 2020, qui, à son art. 11 al. 1 let. d a ordonné la fermeture des installations et établissements offrant des consommations, notamment bars, cafés-restaurants, cafeterias, buvettes et établissements assimilés ouverts au public. Selon l’al. 2 de cette disposition, font exception à l’obligation de fermeture résultant de l’al. 1 les magasins d’alimentation et autres points de vente et étals de marchés qui vendent des denrées alimentaires ou des biens de consommation courante. Cet arrêté est entré en vigueur le 2 novembre 2020.

Le 7 décembre 2020, publié dans la FAO du même jour, le Conseil d’État a abrogé l’art. 11 al. 1 let. d de l’arrêté COVID-19 avec effet au 10 décembre 2020 à 00h01 (art. 2 al. 2 de l’arrêté du Conseil d’État du 7 décembre 2020).

Par arrêté du 21 décembre 2020, publié dans la FAO du même jour et entré en vigueur le 23 décembre 2020, le Conseil d’État a modifié l’arrêté COVID-19 en adoptant notamment l’art. 11 al. 1 let. d ordonnant la fermeture des installations et établissements offrant des consommations, notamment bars, cafés-restaurants, cafeterias, buvettes et établissements assimilés ouverts au public.

6.        S’agissant du domaine particulier de l’indemnité en cas de RHT, le Conseil fédéral a adopté, le 20 mars 2020, l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de l’assurance-chômage en lien avec le Coronavirus (Ordonnance COVID-19 assurance-chômage ; RS 837.033), avec une entrée en vigueur rétroactive au 1er mars 2020 (art. 9 al. 1), qui prévoyait, à son art. 8b al. 1 que l’employeur n’était pas tenu de respecter un délai de préavis, lorsqu’il avait l’intention de requérir l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail en faveur de ses travailleurs. Cette disposition a été abrogée avec effet au 1er juin 2020 (RO 2020 3569). Quant à l’art. 8c de l’ordonnance COVID-19 assurance-chômage, il prévoyait qu’en dérogation à l’art. 36 al. 1 LACI, le préavis devait être renouvelé lorsque la réduction de l’horaire de travail durait plus de six mois. Cette disposition a été abrogée par modification du 12 août 2020, avec effet au 1er septembre 2020 (RO 3569).

Le 19 mars 2021, l’Assemblée fédérale a adopté l’art. 17b de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de COVID-19 (loi COVID-19 – RS 818.102). D’après son al. 1er, en dérogation à l’art. 36 al. 1 LACI, aucun délai de préavis ne doit être observé pour la réduction de l’horaire de travail. Le préavis doit être renouvelé lorsque la réduction de l’horaire de travail dure plus de six mois. À partir du 1er juillet 2021, une réduction de l’horaire de travail pour une durée de plus de trois mois ne peut être autorisée que jusqu’au 31 décembre 2021 au plus tard. Toute modification rétroactive d’un préavis existant doit faire l’objet d’une demande auprès de l’autorité cantonale jusqu’au 30 avril 2021 au plus tard.

D’après le ch. III al. 7 de la modification du 19 mars 2021 à la loi COVID-19 (RO 2021 153), l’art. 17b al. 1 entre en vigueur rétroactivement le 1er septembre 2020 et a effet jusqu’au 31 décembre 2021.

Il ressort du message du Conseil fédéral relatif à une modification de la loi COVID-19 du 17 février 2021 que l’art. 17b crée une disposition directement applicable qui, après son entrée en vigueur, n’a pas besoin d’être mise en œuvre dans l’ordonnance COVID-19 assurance-chômage. L’al. 1, 1ère phrase, supprime totalement le délai de préavis pour toutes les entreprises. Le début de la réduction de l’horaire de travail pourra être autorisé à partir de la date du préavis pour autant que toutes les autres conditions dont dépend le droit à l’indemnité soient remplies. Par ailleurs, selon l’art. 36 al. 1 LACI, le préavis doit être renouvelé et la réduction de l’horaire de travail autorisée de nouveau si celle-ci dure plus de trois mois. L’al. 1, 2ème phrase de l’art. 17b de la loi COVID-19 prévoit que l’autorisation de réduction de l’horaire de travail émise par l’autorité cantonale sera désormais valable pendant six mois. Autrement dit, l’entreprise ne devra renouveler le préavis que si la réduction de l’horaire de travail dure plus de six mois. Cette réglementation allègera la charge administrative des entreprises et des organes d’exécution (FF 2021 285, p. 29s.).

7.        En l’espèce, la recourante exploite un restaurant qui a été contraint de fermer le 2 novembre 2020 en raison des mesures prises par le Conseil d’État par arrêté du 1er novembre 2020. Par courriel du 21 décembre 2020, l’intéressée a transmis son formulaire de préavis, sollicitant des indemnités en cas de RHT à compter du 2 novembre 2020. Dans la décision entreprise, l’intimé a octroyé l’indemnité dès le 23 décembre 2020, date correspondant à l’entrée en vigueur de l’arrêté du Conseil d’État ordonnant la fermeture des restaurants.

Devant la chambre de céans, la recourante fait valoir qu’elle a formé une demande d’indemnités auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage le 6 novembre 2020, puis à nouveau le 2 décembre 2020.

a. Selon l’art. 29 al. 3 LPGA, si une demande ne respecte pas les exigences de forme ou si elle est remise à un organe incompétent, la date à laquelle elle a été remise à la Poste ou déposée auprès de cet organe est déterminante quant à l’observation des délais et aux effets juridiques de la demande. L’art. 30 LPGA précise que tous les organes de mise en œuvre des assurances sociales ont l’obligation d’accepter les demandes, requêtes ou autres documents qui leur parviennent par erreur. Ils en enregistrent la date de réception et les transmettent à l’organe compétent. Par ailleurs, en vertu de l’art. 39 al. 2 LPGA, lorsqu’une partie s’adresse en temps utile à un assureur incompétent, le délai est réputé observé. Cette disposition rappelle une règle générale en matière de procédure administrative, voulant que le délai soit également considéré comme respecté lorsque l’assuré s’adresse à temps à une autorité incompétente. Il la limite toutefois, dans ce sens que seul le fait de s’adresser à un assureur social incompétent permet de considérer le délai comme respecté, et non pas le fait de s’adresser à n’importe quelle autorité. Il faut cependant interpréter la notion d’« assureur social » dans un sens large et entendre par ces termes toutes les entités organisationnelles qui participent à l’administration d’une ou de plusieurs branches d’assurances sociales. Il peut ainsi s’agir, par exemple, d’une caisse de compensation, d’un office d’assurance-invalidité, d’une caisse de chômage ou d’un assureur-maladie (DUPONT / MOSER-SZELESS, Commentaire romand de la Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, p. 511, n° 12).

La date de réception de l’annonce joue un rôle en relation avec le respect de l’observation du délai. C’est pourquoi l’assureur et tout autre organe de mise en œuvre de l’assurance sociale - même si l’assuré s’est adressé à lui par erreur - doit enregistrer la date de réception de la demande de prestations et, cas échéant, transmettre celle-ci à l’assureur compétent (art. 29 al. 3 LPGA ; art. 30 LPGA). De manière générale, selon la jurisprudence relative à l’art. 29 al. 3 LPGA, la date déterminante quant à l’observation des délais et aux effets juridiques d’une demande est celle à laquelle la requête a été remise à la Poste ou déposée auprès de l’organe (compétent ou incompétent). Si une demande ne respecte pas les exigences de forme, l’assureur compétent pourra demander, dans un certain délai, de compléter l’annonce (ATAS/346/2021 du 20 avril 2021 consid. 7b ; Guy LONGCHAMP, in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 40 ad art. 29 LPGA).

b. Dans le cas particulier, il n’est pas contesté que la recourante a déposé une demande d’indemnités pour le mois de novembre 2020 auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage. Or, il s’agit bien d’un autre assureur au sens de l’art. 39 al. 2 LPGA. On peut certes reprocher à la recourante d’avoir déposé une « demande et décompte d’indemnité en cas de RHT » à la caisse de chômage en lieu et place d’un « préavis de RHT » à l’OCE, alors même que la société avait formé sa demande de préavis de RHT du 18 mars 2020 auprès de l’OCE, soit l’autorité compétente. Par cette démarche, la recourante a néanmoins sollicité des prestations. Dans ces conditions, et compte tenu de la situation liée au partage des compétences entre l’OCE et la caisse de chômage en matière de vérification des conditions d’octroi de l’indemnité en cas de RHT, il convient d’admettre que, malgré son erreur, la recourante entendait obtenir des indemnités en cas de RHT prévue selon les ordonnances COVID (ATAS/1050/2020 du 29 octobre 2020, consid. 9 ; ATAS/1216/2020 du 15 décembre 2020 consid. 6). La demande formée auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage sera en conséquence assimilée à un préavis de RHT comportant une demande d’indemnités pour ses employés.

8.        Reste à déterminer la date de réception de la demande auprès de la caisse.

a. Dans le domaine des assurances sociales, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d’office par l’autorité (art. 43 LPGA). Cette règle n’est toutefois pas absolue. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire. Cela comporte en partie l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi la partie concernée s’expose à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (ATF 145 V 90 consid. 3.2). En droit de l’assurance-chômage et à titre d’exemple, en matière de remise de la liste des recherches d’emploi, le Tribunal fédéral a presque toujours retenu que malgré les pertes de documents pouvant se produire dans toute administration, les assurés supportaient les conséquences de l’absence de preuve en ce qui concerne la remise de ladite liste (cf. ATF 145 V 90 consid. 3.2).  

La date de réception de l’annonce joue un rôle en relation avec le respect de l’observation du délai. C’est pourquoi l’assureur et tout autre organe de mise en œuvre de l’assurance sociale - même si l’assuré s’est adressé à lui par erreur - doit enregistrer la date de réception de la demande de prestations et, cas échéant, transmettre celle-ci à l’assureur compétent (art. 29 al. 3 LPGA ; art. 30 LPGA). De manière générale, selon la jurisprudence relative à l’art. 29 al. 3 LPGA, la date déterminante quant à l’observation des délais et aux effets juridiques d’une demande est celle à laquelle la requête a été remise à la Poste ou déposée auprès de l’organe (compétent ou incompétent). Si une demande ne respecte pas les exigences de forme, l’assureur compétent pourra demander, dans un certain délai, de compléter l’annonce (DUPONT / MOSER-SZELESS, Loi sur la partie générale des assurances sociales – Commentaire romand, 2018, n. 40 ad art. 29 LPGA).

b. En l’occurrence, la recourante allègue que sa demande et décompte d’indemnités en cas de RHT pour le mois de novembre 2020 a été adressée à la caisse le 5 novembre 2020. Invitée par la chambre de céans, la caisse a produit ce document, signé le 4 novembre 2020 et portant le tampon de réception par la caisse du 6 novembre 2020. Il convient de retenir que la demande a été formée le 6 novembre 2020, soit à la date de réception par la caisse, étant précisé que, conformément à la jurisprudence précitée, la date de dépôt de la demande de RHT correspond à la date de réception de la demande et non à la date de signature du formulaire de préavis (cf. art. 29 al. 3 LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).

Enfin, conformément à l’art. 17b al. 1 de la loi COVID-19, entré en vigueur avec effet rétroactif au 1er septembre 2020, aucun délai de préavis ne doit être observé pour la RHT. Ainsi, dans la mesure où la demande de RHT a été formée le 6 novembre 2020, pour des indemnités en cas de RHT à compter du 2 novembre 2020, l’indemnité en cas de RHT doit être accordée dès la date de dépôt de la demande de RHT, soit le 6 novembre 2020.

Au vu de ce qui précède, la recourante a droit à l’indemnité en cas de RHT dès le 6 novembre 2020, sous réserve de l’examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l’art. 39 LACI.

c. En vertu de l’art. 17b al. 1 de la loi COVID-19, le préavis, en dérogation à l’art. 36 al. 1 LACI, doit être renouvelé lorsque la réduction de l’horaire de travail dure plus de six mois. L’autorisation de réduction de l’horaire de travail émise par l’autorité cantonale est ainsi valable pendant six mois. Dans la mesure où, comme on l’a vu (cf. supra consid. 6), cette disposition est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 1er septembre 2020, la période couverte par le préavis dure jusqu’au 5 mai 2021.

9.        Le recours sera donc partiellement admis et la décision litigieuse modifiée en ce sens que la recourante a droit à l’indemnité en cas de RHT, pour une durée de six mois, à partir du 6 novembre 2020, sous réserve de l’examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l’art. 39 LACI.

Bien qu’obtenant partiellement gain de cause, la recourante, qui n’est pas représentée en justice et qui n’a pas allégué avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n’a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision sur opposition du 12 février 2021, en ce sens que la recourante a droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail, pour une durée de six mois, à partir du 6 novembre 2020, sous réserve de l’examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l’art. 39 LACI.

4.        Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d’État à l’économie par le greffe le