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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2005/2020

ATAS/611/2021 du 15.06.2021 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2005/2020 ATAS/611/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 juin 2021

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, p.a. B______, ______, à GENÈVE

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A.      a. Le 5 mai 2020, l’entreprise individuelle B______, (ci-après : l’entreprise), soit pour elle son titulaire Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), a transmis à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) un formulaire de préavis de réduction de l’horaire de travail (ci-après : RHT) annonçant une perte de travail de 100 % pour toute l’entreprise, soit un employé.

b. L’entreprise, avec siège à Genève, avait pour but la création et la vente de produits touristiques au Brésil. Elle a été radiée du registre du commerce le 4 janvier 2021 par suite de cessation de l’exploitation (cf. extrait du registre du commerce).

c. L’assuré était également gérant de la société C______GmbH, avec siège à Zurich, de juin 2017 à décembre 2017. Depuis octobre 2018, la raison sociale de la société est D______GmbH (cf. registre du commerce de Zurich).

B.       a. Par décision du 7 mai 2020, l’OCE a fait partiellement opposition au paiement de l’indemnité en cas de RHT. Pour autant que toutes les autres conditions du droit étaient remplies, la caisse pouvait octroyer l’indemnité pour la période du 5 mai 2020 au 4 novembre 2020 pour toute l’entreprise.

b. Le 22 mai 2020, l’assuré a fait opposition à la décision précitée, en faisant valoir que les vols commerciaux avaient cessé le 16 mars 2020, de sorte que l’indemnité était requise dès cette date. Il a indiqué avoir formé une demande d’allocations pour perte de gain (ci-après : APG) le 29 mars 2020 auprès de la caisse genevoise de compensation (ci-après : la caisse). Ce n’était que le 5 mai 2020 que la caisse l’avait informé qu’il fallait demander des indemnités en cas de RHT.

Sa demande d’APG du 29 mars 2020 ainsi que la réponse de l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) du 5 mai 2020 étaient jointes à son opposition.

c. Par décision du 8 juin 2020, annulant et remplaçant sa décision du 7 mai 2020, l’OCE a formé opposition au préavis du 5 mai 2020. Il ressortait des explications fournies par l’entreprise à l’appui de son opposition que la demande déposée le 5 mai 2020 concernait un salarié d’un employeur non tenu de cotiser. Or, les salariés travaillant pour des employeurs non tenus de payer des cotisations n’avaient pas droit aux indemnités en cas de RHT.

d. Par décision sur opposition du 11 juin 2020, l’OCE a déclaré l’opposition du 22 mai 2020 sans objet, compte tenu de l’annulation de la décision du 7 mai 2020.

e. Le 25 juin 2020, l’assuré a fait opposition à la décision du 8 juin 2020, en faisant valoir que les cotisations avaient été régulièrement payées depuis la création de l’entreprise en juillet 2015. Il avait donc droit aux prestations. Il a expliqué que l’entreprise ne se composait que d’une seule personne, dont la fonction consistait à être l’intermédiaire dans des opérations commerciales. La direction générale était située au Brésil et le lien de subordination envers cette société avait été attesté. La catégorie d’indépendant ne correspondait pas à la réalité.

À l’appui de son opposition, il a produit une attestation de la caisse du 12 mars 2020, selon laquelle l’assuré était dûment affilié auprès de la caisse en tant qu’assuré salarié d’un employeur non tenu de cotiser, ainsi que les factures d’acomptes de cotisations personnelles pour 2020 et la décision de cotisations personnelles pour salarié d’un employeur non soumis à cotisations pour 2019.

f. Par décision sur opposition du 2 juillet 2020, l’OCE a rejeté l’opposition et confirmé la décision du 8 juin 2020. Il n’était pas contesté que l’assuré avait le statut de salarié d’une entreprise non soumise à cotisations, de sorte qu’il faisait partie des personnes exclues du droit à l’indemnité en cas de RHT.

C.       a. Le 4 juillet 2020, l’assuré a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d’un recours à l’encontre de la décision précitée, concluant à son annulation et à l’octroi de l’indemnité en cas de RHT dès le 16 mars 2020. Dans la mesure où les cotisations avaient été payées régulièrement, il devait être assuré. Par ailleurs, la condition d’un siège en Suisse était remplie, le siège de l’entreprise ayant été situé à Genève. En outre, le mandat d’exclusivité attestant des activités provenait de l’entreprise C______GmbH, avec siège à Zurich.

b. Le 28 juillet 2020, l’OCE a conclu au rejet du recours.

c. Les parties ont persisté dans leurs conclusions par écritures des 7 août 2020 et 31 août 2020.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.        a. Afin de surmonter des difficultés économiques passagères, un employeur peut introduire, avec l’accord de ses employés, une RHT, voire une suspension temporaire de l’activité de son entreprise (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, ch. 1 relatif aux remarques préliminaires concernant les art. 31ss). L’indemnité s’élève à 80 % de la perte de gain prise en considération (art. 34 al. 1 LACI). L’indemnité en cas de RHT doit être avancée par l’employeur (art. 37 let. a LACI) et sera, par la suite, remboursée par la caisse de chômage à l’issue d’une procédure spécifique (art. 36 et 39 LACI), étant précisé qu’un délai d’attente de deux à trois jours doit être supporté par l’employeur (art. 32 al. 2 LACI et 50 al. 2 de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 [ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02], étant précisé que l’art. 50 al. 2 OACI a été modifié temporairement en raison de la pandémie de coronavirus).

b. Le but de l’indemnité en cas de RHT consiste, d’une part, à garantir aux personnes assurées une compensation appropriée pour les pertes de salaires dues à des réductions de temps de travail et à éviter le chômage complet, à savoir des licenciements et résiliations de contrats de travail. D’autre part, l’indemnité en cas de RHT vise au maintien de places de travail dans l’intérêt tant des travailleurs que des employeurs, en offrant la possibilité de conserver un appareil de production intact au-delà de la période de réduction de l’horaire de travail (ATF 121 V 371 consid. 3a).

c. Selon le Bulletin LACI RHT, publié par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO), état au mois de janvier 2021, la RHT est une diminution temporaire de l'horaire de travail contractuel décidée par l'employeur en accord avec les travailleurs concernés, alors que les contrats de travail sont maintenus. L'indemnité en cas de RHT indemnise de manière appropriée les pertes de travail prises en considération (chiffre A1). La RHT vise à prévenir le chômage et à maintenir les emplois. Son but sert autant les intérêts des travailleurs que ceux des employeurs, puisqu'elle offre aux entreprises la possibilité de surmonter des fléchissements économiques en conservant leur entière capacité de production (chiffre A2). En principe, tous les travailleurs touchés par la RHT ont droit à l'indemnité, à condition qu'ils soient soumis à l'obligation de cotiser à l'assurance-chômage ou s'ils n'ont pas encore atteint l'âge minimum requis pour cotiser à l'AVS. Est donc déterminante la notion de travailleur au sens de la législation sur l'AVS. Une période minimale de cotisations n’est par contre pas exigée ; il suffit que le travailleur soit sous contrat de travail et exerce une telle activité au moment où une RHT est introduite et pendant la durée de cette réduction. Les travailleurs étrangers ont dès lors également droit à l'indemnité indépendamment de leur lieu de domicile et de leur statut de séjour. Ainsi, les frontaliers étrangers, par exemple, ont droit à l'indemnité en cas de RHT dès le premier jour où ils exercent une activité soumise aux cotisations de l'assurance-chômage et s'ils remplissent les autres conditions du droit à l'indemnité (chiffre B24).

d. S’agissant plus particulièrement de la procédure, l’art. 36 al. 1 LACI prévoit que lorsqu’un employeur a l’intention de requérir une indemnité en faveur de ses travailleurs, il est tenu d’en aviser l’autorité cantonale par écrit dix jours au moins avant le début de la RHT. Le Conseil fédéral peut prévoir des délais plus courts dans des cas exceptionnels. Le préavis est renouvelé lorsque la RHT dure plus de trois mois.

4.        Pour lutter contre le COVID-19, le Conseil fédéral a pris une série de mesures urgentes en édictant l’ordonnance 2 COVID-19 le 13 mars 2020 qui interdisait les manifestations publiques ou privées accueillant simultanément cent personnes (art. 6 al. 1) et qui limitait l’accueil dans les restaurants, les bars, les discothèques et les boîtes de nuit à cinquante personnes (art. 6 al. 2).

Le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a modifié cette ordonnance en interdisant toutes les manifestations publiques ou privées et en ordonnant la fermeture des magasins, des marchés, des restaurants, des bars, des discothèques, des boîtes de nuit et des salons érotiques (art. 6 al. 1 et 2). Cette modification est entrée en vigueur le 17 mars 2020 (RO 2020 783).

Le 20 mars 2020, le Conseil fédéral a adopté l’ordonnance COVID-19 assurance-chômage, avec une entrée en vigueur rétroactive au 17 mars 2020, qui prévoyait notamment que dès cette date plus aucun délai d’attente ne devait être déduit de la perte de travail à prendre en considération (art. 3) et que l’employeur pouvait demander le versement de l’indemnité en cas de RHT sans devoir l’avancer (art. 6).

L’ordonnance COVID-19 assurance-chômage a ensuite été modifiée le 26 mars 2020, avec effet rétroactif au 17 mars 2020 également (art. 9), avec notamment l’introduction d’un nouvel art. 8b qui prévoit que l’employeur n’est pas tenu de respecter un délai de préavis, lorsqu’il a l’intention de requérir l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail en faveur de ses travailleurs (al. 1). Le préavis de réduction de l’horaire de travail peut également être communiqué par téléphone et l’employeur est tenu de confirmer immédiatement par écrit la communication téléphonique (al. 2).

Le Conseil fédéral a modifié l'entrée en vigueur de l'ordonnance précitée et de ses modifications le 9 avril 2020 (RO 2020 1201) prévoyant qu’elles entraient en vigueur avec effet rétroactif au 1er mars 2020 (art. 9 al. 1), avec effet jusqu’au 31 août 2020 (art. 9 al. 2).

L’art. 8b de l’ordonnance a été abrogé avec effet au 1er juin 2020 (RO 2020 1777).

Les art. 3 et 6 de l’ordonnance ont été abrogés avec effet au 1er septembre 2020 (RO 2020 3569).

5.        Dans la décision entreprise, l’intimé a nié le droit aux indemnités en cas de RHT au motif que le recourant avait le statut de salarié d’une entreprise non soumise à cotisations. Quand bien même il était tenu de cotiser en Suisse, il n’avait pas droit aux indemnités en cas de RHT dès lors que l’entreprise de son employeur n’avait pas de siège en Suisse.

En l’occurrence, il n’est pas contesté que le recourant est affilié auprès de la caisse genevoise de compensation en qualité d’assuré salarié d’un employeur non tenu de cotiser depuis le 1er juillet 2015. Cela résulte de l’attestation de la caisse genevoise de compensation du 12 mars 2020, sur laquelle se fonde le recourant pour prétendre à l’octroi d’indemnités en cas de RHT. L’identité de l’employeur du recourant ne ressort toutefois pas clairement du dossier. Dans son opposition du 25 juin 2020, le recourant a expliqué qu’un lien de subordination entre la « Direction générale », avec siège au Brésil, et lui-même avait été attesté. Or, dans ce cas de figure, le recourant n’aurait pas droit à l’indemnité en cas de RHT dès lors que ce droit doit être exercé par l’employeur selon l’art. 36 al. 1 LACI (cf. ATAS/295/2021 du 25 mars 2021 consid. 7). En l’occurrence, la demande de préavis a été formée par le recourant. On pourrait du reste même se demander si, en pareille hypothèse, l’intimé serait compétent pour faire droit à la demande de RHT. Dans un arrêt rendu en matière d’indemnités en cas de RHT, le Tribunal fédéral a en effet relevé que si l’État d’emploi n’était pas la Suisse, les employés ne pouvaient pas prétendre aux indemnités de chômage partiel selon le droit suisse, quel que soit leur lieu de domicile (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_780/2020 du 15 avril 2021 consid. 5.1). Or, dans l’hypothèse considérée où l’employeur du recourant est la « Direction générale » avec siège au Brésil, la Suisse ne saurait être reconnue comme le pays d’emploi. En effet, dans l’arrêt précité, le Tribunal fédéral a relevé que le fait pour un employé de travailler en Suisse et d’être affilié au système d’assurances sociales suisse ne suffisait pas à lui ouvrir le droit aux prestations de chômage partiel. L’entreprise devait notamment démontrer une perte minimale d’heures de travail sur l’ensemble de l’entreprise ou dans l’un de ses départements pour que la Suisse soit considérée comme le pays d’emploi. Or, un employé en Suisse ne représentait pas à lui seul une structure opérationnelle permanente de l’entreprise en Suisse, si bien que la Suisse ne pouvait être considérée comme le pays d’emploi (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_780/2020 du 15 avril 2021 consid. 5.2). Il s’ensuit que même si la demande avait été formée par la « Direction générale » avec siège au Brésil, l’intimé n’aurait en tout état pas été compétent pour admettre le droit aux indemnités en cas de RHT.

Devant la chambre de céans, le recourant fait valoir que, contrairement à ce qu’a retenu l’intimé, l’entreprise de l’employeur avait son siège en Suisse. Il se réfère en cela à l’extrait du registre du commerce de l’entreprise B______, L’intéressé perd cependant de vue qu’il s’agit d’une entreprise individuelle dépourvue de personnalité juridique, si bien qu’elle se confond avec la personne physique qui en est la titulaire, à savoir le recourant. À suivre son raisonnement, le recourant devrait en réalité se voir reconnaître le statut d’indépendant. Or, le droit aux RHT n’est pas non plus ouvert dans ce cas de figure (ATAS/295/2021 précité, consid. 7).

Enfin, dans son recours du 4 juillet 2020, l’assuré mentionne la société à responsabilité limitée C______GmbH, avec siège à Zurich. Or, à supposer que le recourant ait été lié à un rapport de travail avec ladite société, ce que le recourant n’allègue ni ne démontre, il n’aurait pas non plus droit à l’indemnité en cas de RHT, dès lors que, comme on l’a vu, ce droit doit être exercé par l’employeur, selon l’art. 36 al. 1 LACI (ATAS/295/2021 précité, consid. 7). Or, la demande de préavis a été formée par l’assuré, qui n’était plus gérant de la société C______GmbH depuis décembre 2017.

Il en résulte que c’est à juste titre que l’intimé a nié le droit du recourant à l’indemnité en cas de RHT.

6.        Le recours doit en conséquence être rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA, dans sa version applicable jusqu’au 31 décembre 2020).

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le