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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2418/2020

ATAS/487/2021 du 20.05.2021 ( APG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2418/2020 ATAS/487/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 20 mai 2021

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à Vessy

recourante

contre

CAISSE DE COMPENSATION GASTROSOCIAL, sise Buchserstrasse 1, Aarau

intimée

 


 

 

EN FAIT

 

1.        Madame A______ (ci-après : l'assurée) a commencé à exercer son activité indépendante de gérante de bar (B______) le 1er janvier 2020.

2.        Le 30 janvier 2020, elle a demandé à être inscrite en tant qu'indépendante auprès de la caisse de compensation GASTROSOCIAL (ci-après : la caisse).

Selon le formulaire d'inscription, la masse salariale annuelle brute, salaire de l'intéressée compris, était estimée « jusqu'à CHF 100'000.- » (page 1). L'assurée indiquait employer une personne pour un salaire mensuel brut de 1'500.- CHF/mois (y compris la part du 13e salaire). Elle estimait son propre salaire « au minimum » (page 6) pour l'année 2020. Le capital investi était de CHF 100'000.-.

3.        Par courrier du 17 février 2020, la caisse a confirmé à l'assurée son inscription avec effet au 1er janvier 2020.

4.        Le même jour, la caisse a fixé le montant des cotisations AVS de l'assurée à CHF 496.- ([cotisation minimale, correspondant à celle due en 2020 par un assuré sans activité lucrative]), compte tenu d'un revenu de CHF 0.- pour l'année 2020.

5.        Le 9 mars 2020, la caisse a adressé à l'assurée un décompte de cotisations personnelles pour le premier trimestre 2020 d'un montant de CHF 127,40.

6.        Suite aux mesures officielles prises dans le cadre de la pandémie de coronavirus, B______ a été contraint de fermer ses portes dès le 17 mars 2020.

7.        Le 26 mars 2020, l'assurée a fait parvenir à la caisse une demande d'allocations pour perte de gain en lien avec le coronavirus (ci-après : APG-Covid).

8.        Par décision du 27 avril 2020, la caisse lui a nié le droit aux APG-Covid, au motif que son revenu déterminant était de CHF 0.-, conformément à la décision d'acomptes de cotisations la plus actuelle.

9.        Par pli du 1er mai 2020, l'assurée a contesté le revenu retenu par la caisse. Elle alléguait que sa demande d'affiliation du 30 janvier 2020 contenait des incohérences, imputables à son courtier.

Comme cela avait été indiqué, elle prévoyait d'occuper du personnel, ce qui avait été effectivement le cas depuis le 17 février 2020. Ses 100%, additionnés aux 50% de son employée équivalaient à la masse salariale prévue - dont il avait été estimé qu'elle pourrait aller « jusqu'à CHF 100'000.- ». Le salaire annuel de son employée, de CHF 22'750.- (13 x CHF 1'750.-), avait été annoncé à la caisse et cette dernière pouvait donc en déduire que la différence entre la masse salariale totale et le salaire de l'employée correspondait à son propre salaire.

En tout état de cause, un salaire minimum de CHF 66'690.- était assuré en matière d'assurances-accidents et d'assurance-maladie perte de gain.

Partant, elle sollicitait de la caisse qu'elle reconsidère sa décision.

10.    Le 23 juin 2020, la caisse a confirmé sa décision du 27 avril 2020, l'assurée n'ayant pas contesté l'absence de revenu en temps utile.

11.    Par courriel du 28 juin 2020, l'assurée a informé la caisse que le revenu net présumé pour 2020 s'élevait à CHF 38'000.- et que le capital propre engagé était de CHF 150'000.- et non de CHF 100'000.-.

12.    Le 1er juillet 2020, la caisse a modifié les acomptes de cotisations pour l'année 2020, retenant désormais un revenu de CHF 40'800.-.

13.    Le 17 août 2020, l'assurée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant à l'octroi d'APG-Covid pour la période du 17 mars au 11 mai 2020.

La recourante rappelle qu'elle a repris « B______ » en janvier 2020.

Ne pouvant s'affilier directement à la caisse, elle s'est adressée à un courtier qui, le 30 janvier 2020, lui a fait signer un formulaire de demande d'affiliation qu'il avait prérempli.

Elle allègue n'avoir obtenu une copie de ce formulaire qu'en date du 13 mai 2020 et avoir alors constaté l'existence de plusieurs incohérences. Par exemple, le montant de la masse salariale annuelle brute était estimé « jusqu'à CHF 100'000.- » en page 1 du formulaire et au « minimum » en page 6. Selon la recourante, le terme « minimum », ne signifie pas CHF 0.- mais correspond au montant indiqué en première page.

Le montant mentionné dans le formulaire était celui qui prévalait lors de la signature du document et ne constituait en aucun cas une projection pour 2020. Après quatre semaines d'activité seulement, elle ne pouvait encore établir de bilan intermédiaire et estimer précisément son revenu. Elle partait de l'idée que les acomptes de cotisations s'ajusteraient et qu'un décompte final se ferait au plus tard au début de l'année suivante, conformément au bilan.

La recourante ajoute que son salaire et celui réalisé par son employée sont équivalents à la masse salariale annuelle brute, estimée jusqu'à CHF 100'000.- et qu'un salaire minimum de CHF 66'690.- a été annoncé à l'assurance-accidents.

Elle relève par ailleurs que le 1er juillet 2020, l'intimé a réajusté les cotisations, lesquelles se basent désormais sur un revenu de CHF 40'800.- rétroactivement au 1er janvier 2020.

Enfin, compte tenu de la pandémie liée au coronavirus et des charges incompressibles, la recourante demande à ce que le principe de l'égalité de traitement s'applique entre les indépendants qui ont débuté leur activité en 2020 et les autres.

14.    Invitée à se déterminer, l'intimée, dans sa réponse du 25 septembre 2020, a conclu au rejet du recours.

Se référant aux passages pertinents de la circulaire applicable, la caisse relève que la recourante n'a pas contesté la facture d'acompte du 17 février 2020, laquelle mentionnait un revenu de CHF 0.-. Aucun ajustement de la facture d'acompte en question n'a été annoncé avant le 17 mars 2020, malgré l'obligation de communiquer un changement significatif de revenus mentionnée sur la facture d'acompte.

Pour le surplus, la décision litigieuse est conforme aux indications fournies dans le formulaire d'adhésion.

15.    Par courrier du 23 octobre 2020, la recourante a rappelé la situation exceptionnelle qui prévalait au printemps 2020.

Selon elle, vu les circonstances, il était parfaitement illusoire pour elle d'agir et d'ajuster le revenu soumis à cotisation entre le 17 février 2020 (envoi du premier acompte de cotisations sociales) et le 17 mars 2020 (obligation de fermeture).

En toute bonne foi, elle pensait que le réajustement des cotisations sociales devait se faire au fur et à mesure des trimestres.

N'étant pas allée au bout du premier trimestre, elle n'aurait de toute manière pu communiquer un changement de revenu significatif à l'intimée.

16.    Le 5 novembre 2020, l'intimée a persisté dans ses conclusions.

 

EN DROIT

 

1.        Les dispositions de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA - RS 830.1) s'appliquent aux allocations pertes de gain en lien avec le coronavirus, sous réserve de dérogations expresses (art. 1 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19). Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours auprès du tribunal des assurances compétent (art. 56 LPGA).

La Chambre de céans est ainsi compétente pour connaître du recours (ATAS/1208/2020 du 10 décembre 2020).

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), le recours est recevable.

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l'intimée de nier à la recourante le droit à des APG-Covid, singulièrement sur le calcul de l'allocation et le revenu à prendre en considération.

4.        a. Pour lutter contre l'épidémie de coronavirus (ci-après : COVID-19) qui a atteint la Suisse début 2020, le Conseil fédéral a pris une série de mesures urgentes, lesquelles ont notamment conduit, le 17 mars 2020, à la fermeture des restaurants (art. 6 al. 2 let. c de l'ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus [COVID-19 ; ordonnance 2 COVID-19 - RS 818.101.24]). Cette mesure, initialement prévue jusqu'au 19 avril 2020 a été prolongée jusqu'au 10 mai 2020, les établissements publics tels que les restaurants ayant pu rouvrir leurs portes dès le 11 mai 2020.

b/aa. Parallèlement aux restrictions imposées par l'ordonnance 2 COVID-19, le Conseil fédéral a adopté, le 20 mars 2020, l'ordonnance sur les mesures en cas de perte de gain en lien avec le coronavirus (COVID-19 ; ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 ; RS 830.31), laquelle est entrée en vigueur rétroactivement au 17 mars 2020.

Selon l'art. 2 al. 3 en relation avec l'art. 2 al. 1bis let. c de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, dans sa teneur jusqu'au 16 septembre 2020, les personnes qui exercent une activité lucrative indépendante au sens de l'art. 12 de la loi du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA; RS 830.1) ont droit à l'allocation perte de gain si elles sont assurées obligatoirement au sens de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS; RS 831.10) et si elles subissent une perte de gain en raison d'une mesure prévue à l'art. 6 al. 1 et 2 de l'ordonnance 2 COVID-19 susmentionnée.

En vertu de l'art. 5 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, dans sa teneur jusqu'au 16 septembre 2020, l'indemnité journalière est égale à 80% du revenu moyen de l'allocation (al. 1). Pour déterminer le montant du revenu, l'art. 11 al. 1 de la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité du 25 septembre 1952 (LAPG - RS 834.1) s'applique par analogie. Après la fixation du montant de l'allocation, cette dernière ne peut faire l'objet d'un nouveau calcul que si une taxation fiscale plus récente est envoyée à l'ayant droit d'ici au 16 septembre 2020 et que celui-ci dépose une demande de nouveau calcul d'ici à cette date (al. 2).

b/bb. A teneur de l'art. 11 al. 1 1ère phrase LAPG, le revenu moyen acquis avant l'entrée en service est le revenu déterminant pour le calcul des cotisations dues conformément à la LAVS. Le Conseil fédéral édicte des dispositions relatives au calcul de l'allocation et fait établir par l'Office fédéral des assurances sociales des tables dont l'usage est obligatoire et dont les montants sont arrondis à l'avantage de l'ayant droit.

Vu la délégation précitée, le Conseil fédéral a édicté le règlement du 24 novembre 2004 sur les allocations pour perte de gain (RAPG - RS 834.11). Selon l'art. 7 al. 1 RAPG, pour les personnes exerçant une activité indépendante, l'allocation est calculée d'après le revenu, converti en revenu moyen, qui a servi de base à la dernière décision de cotisations à l'AVS rendue avant l'entrée en service. L'allocation est ajustée sur demande si, par la suite, une nouvelle décision de cotisation est prise pour l'année pendant laquelle le service a été accompli (al. 1). Pour les personnes qui rendent vraisemblable qu'elles auraient entrepris une activité indépendante de longue durée pendant la période du service, l'allocation est calculée d'après le revenu qu'elles auraient pu obtenir (al. 2). Si une personne exerçant une activité indépendante n'est pas astreinte à payer des cotisations en vertu de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS), son allocation est calculée d'après le revenu acquis au cours de l'année précédant celle de l'entrée en service (al. 3).

La perception des acomptes de cotisations est, quant à elle, régie par l'art. 24 du règlement du 31 octobre 1947 sur l'assurance-vieillesse et survivants (RAVS ; RS 831.101). Pendant l'année de cotisation, les personnes tenues de payer des cotisations doivent verser périodiquement des acomptes de cotisations (al. 1). Les caisses de compensation fixent lesdits sur la base du revenu probable de l'année de cotisation. Elles peuvent se baser sur le revenu déterminant pour la dernière décision de cotisation, à moins que la personne tenue de payer des cotisations ne rende vraisemblable qu'il ne correspond manifestement pas au revenu probable (al. 2). S'il s'avère, pendant ou après l'année de cotisation, que le revenu diffère sensiblement du revenu probable, les caisses de compensation adaptent les acomptes de cotisations (al. 3). Les personnes tenues de payer des cotisations doivent fournir aux caisses de compensation les renseignements nécessaires à la fixation des cotisations, leur transmettre, sur demande, des pièces justificatives et leur signaler lorsque le revenu diffère sensiblement du revenu probable (al. 4).

Constitue une modification sensible au sens de l'alinéa 4 précité une différence d'au moins 25% du revenu réalisé par rapport au revenu annuel probable initial (ch. 1155 des Directives sur les cotisations des travailleurs indépendants et des personnes sans activité lucrative dans l'AVS, AI et APG (DIN), état au 1er janvier 2020).

b/cc. En réponse à une motion n°20.3319, le Conseil fédéral a expliqué que le régime des APG-Covid se fonde sur le principe d'assurance. 80% du salaire soumis à l'AVS est indemnisé. En d'autres termes le montant de l'allocation est défini en fonction du revenu sur la base duquel les cotisations ont été versées à l'assurance. Si une personne a payé des cotisations AVS peu élevées, l'indemnité reçue l'est également (https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?
AffairId=20203319).

5.        a. L'OFAS a émis des lignes directrices relatives à l'application de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 dans la circulaire sur l'allocation pour perte de gain en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus (ci-après : CCPG).

D'après le ch. 1065 CCPG, dans sa version en vigueur depuis le 13 mai 2020, rétroagissant au 17 mars 2020, la base de calcul de l'indemnité pour les indépendants correspond en principe au revenu réalisé en 2019. Pour ce faire, c'est le revenu retenu pour le décompte des cotisations 2019 (acomptes de cotisation) qui est déterminant. En revanche, si, au moment où l'indemnité est déterminée, la taxation fiscale définitive pour 2019 est déjà disponible, celle-ci doit être prise comme base de calcul.

Le ch. 1065.1 CCPG précise toutefois, lorsque l'indemnité a été fixée sur la base des revenus utilisés pour les acomptes de cotisation 2019 et que ceux-ci n'ont pas été adaptés depuis la dernière décision définitive de cotisation, que les revenus de la dernière décision définitive de cotisation doivent être pris en compte sur demande du bénéficiaire. Si, au moment de la demande, la taxation fiscale pour 2019 est déjà disponible, c'est celle-ci qui doit être prise en compte. La demande de nouveau calcul, respectivement de révision ou de reconsidération, doit être adressée à la caisse de compensation au plus tard le 16 septembre 2020.

Enfin, le ch. 1068 de la CCPG dispose qu'une adaptation ultérieure du revenu de l'activité lucrative après la communication fiscale définitive n'a pas d'influence sur le montant de l'allocation. Il en va de même pour les changements du montant des acomptes de cotisation pour 2019 intervenus après le 17 mars 2020 (sous réserve du ch. 1065.1).

b. De telles directives de l'OFAS ne créent pas de nouvelles règles de droit mais sont destinées à assurer l'application uniforme des prescriptions légales, en visant à unifier, voire à codifier la pratique des organes d'exécution. Elles ont notamment pour but d'établir des critères généraux d'après lesquels sera tranché chaque cas d'espèce et cela aussi bien dans l'intérêt de la praticabilité que pour assurer une égalité de traitement des ayants droit. Selon la jurisprudence, ces directives n'ont d'effet qu'à l'égard de l'administration dont elles donnent le point de vue sur l'application d'une règle de droit et non pas une interprétation contraignante de celle-ci. Cela ne signifie toutefois pas que le juge n'en tienne pas compte. Au contraire, il doit les prendre en considération lors de sa décision lorsqu'elles offrent une interprétation satisfaisante des dispositions légales applicables et adaptée au cas d'espèce. Il ne s'en écarte que dans la mesure où les directives établissent des normes qui ne sont pas conformes aux dispositions légales applicables (voir ATF 145 V 84 consid. 6.1.1 et les références).

c. Dans un arrêt rendu le 18 septembre 2020 (CASSO APG 2/20 - 13/2020 du 18 septembre 2020), auquel la Cour de céans s'est ralliée (ATAS/117/2021 du 16 février 2021 et ATAS/296/2021 du 25 mars 2021), la Cour des assurances sociales vaudoise a constaté que les ch. 1065 et 1065.1 de la CCPG étaient conformes aux art. 11 al. 1 LAPG et 7 al. 1 RAPG ainsi qu'à la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue en matière d'allocation pour perte de gain (ATF 133 V 431 consid. 6.2.2 ; voir également l'arrêt du Tribunal fédéral 9C_253/2014 du 28 juillet 2014 consid. 4.3), laquelle admet qu'une caisse de compensation peut, lorsque les cotisations dues pour l'année déterminante n'ont pas encore fait l'objet d'une décision passée en force, calculer provisoirement le montant de l'allocation de maternité sur la base du revenu pris en considération par la caisse de compensation pour fixer les acomptes de cotisations pour l'année en cause.

6.        a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b; 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

b. Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment de la clôture de la procédure administrative. Les faits survenus postérieurement et ayant modifié cette situation doivent faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 131 V 242 consid. 2.1; 121 V 362 consid. 1b).

7.        a. En l'espèce, la recourante demande l'octroi d'APG-Covid, sur la base de l'art. 2 al. 3 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, en raison de la fermeture, dès le 17 mars 2020, du bar qu'elle gérait.

L'intimée a retenu un revenu de CHF 0.-, conformément au décompte provisoire de cotisations du 17 février 2020 et, partant, nié le droit de la recourante à des APG-Covid.

La recourante conteste le revenu retenu, alléguant que les montants indiqués dans la demande d'affiliation en tant qu'indépendante permettaient de fixer son revenu à plus de CHF 0.-.

b. Selon les art. 5 al. 2 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, 11 al. 1 LAPG et 7 al. 1 RAPG, l'APG-Covid est calculée d'après le revenu moyen ayant servi de base à la dernière décision de cotisations à l'AVS. Selon le ch. 1065 CCPG, il s'agit en principe du revenu réalisé en 2019.

Dans le cas d'espèce, la recourante n'a perçu aucun revenu d'indépendant en 2019, dès lors qu'elle n'a commencé son activité que le 1er janvier 2020. Aucune décision de cotisation pour l'année 2019, provisoire ou définitive, n'a donc été rendue, raison pour laquelle l'intimée s'est fondée sur le décompte provisoire de cotisations 2020, daté du 17 février 2020.

Cette manière de procéder est conforme à la jurisprudence fédérale en matière d'APG « traditionnelles » (ATF 133 V 431), applicable par analogie, laquelle autorise la caisse de compensation à calculer provisoirement le montant de l'allocation sur la base du revenu pris en considération pour fixer les acomptes de cotisations pour l'année en cause.

Or, selon le décompte de cotisations provisoire 2020, daté du 17 février 2020, le revenu soumis à cotisations était de CHF 0.-. La recourante a d'ailleurs payé, à tout le moins pour le premier trimestre 2020, un acompte pour des cotisations correspondant à celles réclamées aux personnes sans activité lucrative.

Bien plus, elle n'a pas demandé la rectification de ce décompte de cotisations du 17 février 2020, ni lors de la fermeture du bar, le 17 mars 2020, ni lors du dépôt de la demande, le 26 mars 2020, ni lors du prononcé de la décision initiale, le 27 avril 2020, ni encore lors de la décision sur opposition, le 23 juin 2020. Pourtant, la recourante pouvait déjà supposer, en février 2020, que son revenu serait supérieur à CHF 0.-, au vu du bénéfice réalisé par son établissement entre janvier et mars.

Partant, au jour de la décision litigieuse, l'intimée ne pouvait se fonder sur aucun autre document fixant les cotisations dues en raison d'une activité indépendante. C'est donc à juste titre qu'elle s'est basée sur un revenu de CHF 0.- et qu'elle a nié le droit de la recourante à des APG-Covid, étant rappelé que la Cour de céans doit examiner la légalité de la décision sur opposition querellée en fonction des faits tels qu'ils se présentaient à cette date.

c. Reste à examiner si la recourante peut obtenir une modification de la décision querellée compte tenu de la rectification des acomptes de cotisations le 1er juillet 2020.

Si, en matière d'APG « traditionnelles », l'allocation peut être ajustée sur demande lorsque, par la suite, une nouvelle décision de cotisation est prise pour l'année en question (cf. art. 7 al. 1 2e phr. RAPG), tel n'est pas le cas en matière d'APG-Covid.

En effet, l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 prévoit expressément qu'après la fixation du montant de l'allocation, cette dernière ne peut faire l'objet d'un nouveau calcul que si une taxation fiscale plus récente est envoyée à l'ayant droit d'ici au 16 septembre 2020 et que celui-ci dépose une demande de nouveau calcul d'ici à cette date (art. 5 al. 2 2e phr. de l'ordonnance précitée).

Or, force est de constater que la recourante n'est pas en mesure de produire une taxation fiscale définitive, de sorte qu'elle ne peut exiger une modification du montant des APG (voir dans le même sens l'ATAS/117/2021 du 16 février 2021 et ch. 1068 CCPG).

C'est le lieu de rappeler, dans ce contexte, que le Conseil fédéral a expliqué, dans sa réponse à la motion n°20.3319, que le montant de l'APG-Covid était défini en fonction du revenu sur la base duquel les cotisations avaient été versées à l'assurance. Si une personne a payé des cotisations AVS peu élevées, l'indemnité reçue l'est également (https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20203319).

En l'occurrence, entre le 17 mars, date de la fermeture du bar, et le 11 mai 2020, date de sa réouverture, la recourante s'est acquittée des cotisations minimales, calculées sur la base d'un revenu de CHF 0.-. C'est le lieu de rappeler que ces cotisations minimales correspondent à celles que doivent payer les personnes sans activité lucrative. Ce n'est finalement que suite à une demande de rectification circonstanciée du 28 juin 2020 que le décompte de cotisations provisoires 2020 a été modifié le 1er juillet 2020, soit postérieurement à la période d'indemnisation. Il s'ensuit que la recourante ne peut obtenir une modification de la décision entreprise sur la base de la modification des acomptes le 1er juillet 2020.

8.        La recourante invoque enfin le principe de l'égalité de traitement, les personnes ayant entrepris une activité indépendante en 2020 et celles pour lesquelles cette activité a été commencée antérieurement à 2020 devant être traitées de manière identique.

a. Le principe de l'égalité de traitement, consacré à l'art. 8 al. 1 Cst., commande que le juge traite de la même manière des situations semblables et de manière différente des situations dissemblables (ATF 131 V 107 consid. 3.4.2 p. 114 et les arrêts cités).

b. En l'espèce, force est de constater que les mêmes principes sont appliqués à toutes les personnes indépendantes. Quelle que soit l'année au cours de laquelle l'activité indépendante a débuté, le droit aux APG-Covid se calcule sur la base du dernier décompte de cotisations.

Si le requérant a commencé son activité en 2020, le droit à l'APG-Covid se calcule sur la base des cotisations provisoires 2020 (voir dans ce sens l'ATAS/117/2021 du 16 février 2021 notamment).

Si le requérant était déjà indépendant en 2019, c'est sur la base du dernier décompte de cotisations que le droit aux APG-Covid a été déterminé. Ainsi, la Cour de céans a nié le droit d'un indépendant à des APG-Covid en se fondant sur la décision de cotisations 2018 faute de décision de cotisation - provisoire ou définitive - pour 2019 (voir dans ce sens l'ATAS/296/2021 du 25 mars 2021).

Quant à la Cour des assurances sociales du canton de Vaud, elle a nié le droit d'un indépendant à des APG-Covid sur la base de la décision provisoire de cotisations 2019, faute de taxation fiscale exécutoire et, partant, de décision définitive de cotisations et ce, quand bien même le requérant avait en réalité réalisé un revenu net de CHF 16'905,45 selon les comptes d'exploitation. En effet, la Cour des assurances sociales a considéré qu'il appartenait à l'indépendant de signaler à la caisse une augmentation de son revenu. Dès lors qu'il ne l'avait pas fait, c'était à juste titre que la caisse s'était fondée sur le revenu ressortant de la décision provisoire de cotisations 2019 (cf. arrêt/2020/995 - APG 20/20 - 24/2020 du 3 mars 2021).

Eu égard à ce qui précède, c'est à juste titre que l'intimée a nié le droit de la recourante à des APG-Covid compte tenu des indications ressortant de la décision de cotisations provisoires pour l'année 2020, laquelle indiquait un revenu de CHF 0.-, qui n'a été modifié que postérieurement à la décision querellée et à la période d'indemnisation.

Le recours est rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA en relation avec l'art. 1 de l'ordonnance sur les pertes de gain COVID-19).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales