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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3874/2024

ATA/1075/2025 du 30.09.2025 ( AIDSO ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3874/2024-AIDSO ATA/1075/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 septembre 2025

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Philippe SCHELLENBERG, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé

_________



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1979, de nationalité suisse, est le père d’B______, né le ______ 2014.

b. Il a bénéficié d'une aide financière de l'Hospice général (ci-après : l'hospice) du 1er mai au 30 septembre 2014.

B. a. En mars 2019, parvenu en fin de droit à l'assurance-chômage, A______ a sollicité une aide financière de l'hospice.

Il a signé le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » le 5 mars 2019, a rempli deux jours plus tard le formulaire de demande correspondant et a signé le 16 avril 2019 un contrat d'aide social individuel (ci-après : CASI).

b. Lors d'un entretien avec son assistant social le 13 juin 2019, A______ a indiqué s'être inscrit à la C______ (ci-après : C______) et être dans l'attente d'une réponse au sujet de son admission. L'assistant social lui a précisé que l'hospice ne versait pas de prestations financières aux personnes qui étaient en études.

c. A______ s'est inscrit à la C______ et y a commencé un cursus en septembre 2019.

d. Par la suite, il a régulièrement remis à son assistant social des recherches d'emploi et n'a pas évoqué ses études à la C______.

e. Le 19 mai 2021, A______ a signé une nouvelle fois le document « Mon engagement » et a rempli et signé une nouvelle demande de prestations d'aide financière, en indiquant que sa situation n'avait pas changé depuis sa dernière demande de prestations.

f. Il en a fait de même en mai 2022.

g. Au début du mois de juillet 2022, par l'intermédiaire d'un stagiaire de la C______ travaillant à l'hospice, l'assistante sociale en charge du dossier de A______ a appris incidemment que ce dernier était étudiant à la C______.

h. Lors d'un entretien qui s'est déroulé le 26 juillet 2022 en présence du responsable d'unité, l'assistante sociale a informé A______ qu'elle avait découvert qu'il était étudiant à la C______, ce qu'il n'avait jamais déclaré à l'hospice, et qu'il allait être mis fin aux prestations d'aide financière pour ce motif. Une demande de restitution lui serait adressée.

i. Par décision du 16 février 2023 annulant et remplaçant une décision du 2 février 2023, le centre d'action sociale (ci-après : CAS) des D______ a demandé à A______ la restitution de CHF 113'983.50 à titre de prestations indûment versées correspondant à la période allant du 1er septembre 2019 au 31 juillet 2022. Il avait caché son statut d'étudiant.

C. a. Par acte du 20 mars 2023, A______ a formé opposition à l'encontre de cette décision, concluant principalement à son annulation et subsidiairement à une remise dudit montant.

Son projet avait toujours été de se réinsérer au plus vite dans le monde professionnel, raison pour laquelle il avait constamment répondu à des offres d'emploi, même lorsqu'il était assisté par l'hospice. En juin 2019, il avait indiqué avoir décidé de suivre une formation en travail social à la C______ à son assistant social, lequel avait simplement pris note de sa décision. Par la suite, le sujet de sa formation n'avait plus jamais été abordé pendant les entretiens périodiques.

Son intention avait toujours été d'interrompre sa formation aussitôt qu'il trouverait un emploi durable. Il n'avait jamais perçu les prestations financières de l'hospice dans le but de suivre ladite formation.

Le remboursement réclamé le mettrait dans une situation inextricable au vu de sa situation tant financière que personnelle et familiale, et mettrait à néant ses chances d'atteindre l'objectif qui était le sien mais aussi celui de l'hospice, à savoir sa réinsertion durable dans le monde professionnel.

b. Le 11 octobre 2024, l'hospice a rejeté l'opposition et la demande de remise.

A______ avait gravement violé son devoir d'information en cachant son statut d'étudiant à la C______, alors même qu'il avait été informé par son assistant social qu'un tel statut l'exclurait de tout droit aux prestations. Il avait certes indiqué s'être inscrit à la C______ et être en attente d'une réponse, mais l'assistant social avait attiré son attention sur le fait que s'il était admis, il ne pourrait plus bénéficier de prestations d'aide financière. A______ en était conscient puisqu'il avait demandé au stagiaire de la C______ allant travailler à l'hospice de taire le fait qu'ils se connaissaient de la C______. Il était ainsi justifié de lui réclamer le montant des prestations indûment perçues.

Quant à la demande de remise, elle devait être rejetée dès lors que la condition de la bonne foi n'était pas donnée.

D. a. Par acte posté le 20 novembre 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant principalement à son annulation et à l'octroi d'une indemnité de procédure, subsidiairement à une remise de la somme réclamée.

Lorsqu'il avait été informé par son assistant social que s'il étudiait à la C______ il ne pourrait plus bénéficier de prestations financières, il avait été effrayé et se voyait déjà, de même que son fils autiste, dans le dénuement le plus total. L'assistant social aurait dû l'informer d'une part de l'existence de prestations extraordinaires pour les étudiants, et d'autre part de l'existence du système des bourses d'études versées par l'État. De plus, il n'avait posé aucune question sur le statut de son inscription à la C______ et n'avait pas non plus contacté celle-ci alors qu'il en avait le pouvoir.

La décision attaquée consacrait une violation de plusieurs principes constitutionnels et administratifs, à commencer par celui de la bonne foi en raison des manquements précités à la transparence et à la cohérence. Son silence n'était que la conséquence de l'information incomplète qu'il avait reçue de l'hospice. Il n'avait jamais cherché à s'enrichir indûment ; comme il avait droit à une aide exceptionnelle pour étudiants au barème de l'aide ordinaire, il n'avait pas perçu les prestations litigieuses de manière indue. La décision violait également le principe de la proportionnalité, dès lors que l'on ne pouvait lui imputer la totalité de la responsabilité, la faute étant initialement exclusivement celle de l'intimé.

La décision violait aussi les principes de l'égalité de traitement – dans une affaire jugée en 2013 par la chambre administrative, un étudiant avait cumulé bourse et prestations d'assistance publique et avait été frappé de la même sanction –, du droit à l'aide dans les situations de détresse en lien avec l'art. 27 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107), et de l'interdiction de l'arbitraire, car elle le plongerait dans une précarité durable, à l'inverse des buts de la législation en matière d'aide sociale. Son cas avait un caractère unique dont il fallait tenir compte.

Il pouvait bénéficier d'une remise, l'hospice ne pouvant lui reprocher de ne pas avoir été de bonne foi et le remboursement demandé le mettant dans une situation plus que difficile.

b. Le 9 janvier 2025, l'hospice a conclu au rejet du recours.

L'aide sociale était subsidiaire aux bourses et aux autres prestations dont pouvaient bénéficier les personnes en études. Le recourant avait gravement violé son devoir de renseigner dès lors qu'il n'avait pas annoncé son statut d'étudiant, ceci sciemment. L'assistant social n'avait pas violé son devoir d'information. Il n'était certes pas entré dans le détail de la législation concernant les étudiants, mais cela ne pouvait lui être reproché et encore moins justifier la violation du devoir d'information par le bénéficiaire. Le recourant avait renouvelé ses demandes de prestations en 2021 et 2022 sans jamais indiquer avoir une formation en cours.

L'arrêt de 2013 cité par le recourant ne pouvait être comparé au cas d'espèce, et quoi qu'il en fût une inégalité de traitement ne pouvait en principe être invoquée lorsque la loi avait été correctement appliquée dans le cas d'espèce.

La remise ne pouvait enfin être accordée au vu de la violation grave du devoir de renseigner, qui excluait, de jurisprudence constante, la bonne foi du bénéficiaire.

c. Le 21 février 2025, le recourant a répliqué et persisté dans les termes et conclusions de son recours.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10), sous réserve de ce qui suit.

2.             Se pose la question du droit matériel applicable à la présente cause.

2.1 Le 1er janvier 2025 sont entrés en vigueur la loi sur l'aide sociale et la lutte contre la précarité du 23 juin 2023 (LASLP - J 4 04) et son règlement d'application du 17 avril 2024 (RASLP - J 4 04.01), abrogeant la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) et son règlement d'exécution du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01).

2.2 La LASLP s'applique dès son entrée en vigueur à toutes les personnes bénéficiant des prestations prévues par la LIASI (art. 81 al. 1 LASLP). Les art. 48 à 54 LASLP s'appliquent aux prestations d'aide financière versées en application de l'ancienne loi, dans la mesure où elles auraient donné lieu à restitution selon cette loi et si l'action en restitution n'est pas prescrite au moment de l'abrogation de ladite loi (art. 81 al. 2 LASLP).

L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (art. 36 al. 5 LIASI et 48 al. 5 et 51 al. 5 LASLP).

2.3 En l'occurrence, le recourant a bénéficié de prestations d'aide financière remboursables en vertu de la LIASI entre le 1er septembre 2019 au 31 juillet 2022. Les prestations auraient donné lieu à restitution également sous l'empire la LIASI et l'action en restitution n'était pas prescrite au 1er janvier 2025, dès lors que l'hospice en a eu connaissance du fait ouvrant le droit au remboursement au plus tard le 26 juillet 2022, soit moins de cinq ans avant cette date.

Il s'ensuit que la LASLP est applicable in casu, étant précisé que les dispositions topiques ont un contenu similaire à celles de la LIASI – sous une réserve, en l'espèce favorable au recourant, conformément aux considérants qui suivent.

3.             Le litige porte sur la demande de restitution du montant de CHF 113'983.50, correspondant aux prestations financières versées pendant la période allant du 1er septembre 2019 au 31 juillet 2022, ainsi que sur le refus de remise y relatif.

3.1 La LASLP a pour but de renforcer la cohésion sociale, de prévenir l'exclusion et de lutter contre la précarité (art. 1 al. 1 LASLP). Elle vise à venir en aide aux personnes dans le besoin et à favoriser durablement l'autonomie, l'insertion sociale et l'insertion professionnelle (art. 1 al. 2 LASLP). Avec le RASLP, elle concrétise l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et l'art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00).

3.2 Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » concrétise l'obligation de collaborer et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 45 al. 1 LASLP ; ATA/1304/2021 du 30 novembre 2021 consid. 3a ; ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a). Il atteste notamment du fait que le bénéficiaire a été informé du caractère subsidiaire des prestations d'aide financière exceptionnelle et du fait que des prestations sociales ou d'assurances sociales ne peuvent se cumuler avec les prestations d'aide financière dont elles doivent être déduites (ATA/993/2025 du 9 septembre 2025 consid. 4.2).

3.3 La personne qui demande des prestations d’aide financière ou son représentant légal doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d’aide financière (art. 44 al. 1 LASLP).

La personne au bénéfice de prestations d’aide financière ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 45 al. 1 LASLP).

3.4 L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, lequel est rappelé par l’art. 12 Cst. La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/1148/2024 du 1er octobre 2024 consid. 6.1 ; ATA/1116/2024 du 24 septembre 2024 consid. 2.1 ; Guido WIZENT, Sozialhilferecht, 2e éd., 2023, n. 422 ss). L'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource, mais elle est aussi subsidiaire à tout revenu que le bénéficiaire pourrait acquérir par son insertion sociale ou professionnelle (ATF 146 I 1 consid. 8.2.1 ; ATA/649/2024 du 28 mai 2024 consid. 3.2 ; ATA/417/2024 du 26 mars 2024 consid. 3.8 ; MGC 2005-2006/I A p. 259 à propos de l'art. 9 LIASI, lequel a été largement repris par l'art. 22 LASLP, PL 13119 p. 82).

L'art. 22 al. 1 LASLP prévoit que les prestations d’aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu, aux prestations découlant du droit de la famille ou de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe du 18 juin 2004 (loi sur le partenariat, LPart - RS 211.231), ainsi qu’à toute autre prestation à laquelle la personne au bénéfice de prestations d’aide financière et les membres du groupe familial ont droit, en particulier aux prestations d’assurances sociales fédérales et cantonales, et aux prestations communales, à l’exception des prestations occasionnelles. Conformément à l'art. 22 al. 2 LASLP, la personne au bénéfice de prestations d’aide financière et les membres du groupe familial doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l’aide financière est subsidiaire et doivent mettre tout en œuvre pour améliorer leur situation sociale et financière.

3.5 L’art. 24 al. 1 LASLP décrit le cercle des bénéficiaires des prestations d’aide financière en prévoyant qu’y ont droit les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire genevois (let. a), ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) et répondent aux autres conditions de la loi
(let. c), lesquelles sont cumulatives.

L’aide financière ordinaire est calculée selon les modalités prévues par les art. 31 ss LASLP (art. 24 al. 2 LASLP). Le Conseil d’État fixe par règlement (en l'occurrence les art. 39 et 40 RASLP) les modalités d’une aide financière pouvant être inférieure à l’aide ordinaire prévue par l’art. 24 al. 2 LASLP et/ou limitée dans le temps en faveur des catégories de personnes définies à l’art. 25 LASLP (art. 24 al. 3 LASLP), soit en particulier les étudiants des hautes écoles au sens de la loi fédérale sur l’encouragement des hautes écoles et la coordination dans le domaine suisse des hautes écoles, du 30 septembre 2011, dont le groupe familial ne compte pas d’enfant mineur à charge (art. 25 al. 1 let. a LASLP). L’aide financière en question, dont les modalités sont définies à l'article 40 RASLP, doit permettre de surmonter des difficultés passagères ; elle est limitée à six mois et peut être reconduite à titre exceptionnel (art. 39 al. 3 RASLP).

De jurisprudence constante, l’exclusion des étudiants et des personnes en formation de l’aide financière ordinaire s’explique en particulier par le fait que ces derniers doivent en premier lieu faire appel aux prestations spécifiques qui leur sont destinées, telles que les allocations d'études, les bourses et autres encouragements à la formation. Les prestations d'aide sociale sont également subsidiaires par rapport au devoir d'entretien des père et mère, lequel dure au-delà de la majorité si l'enfant, au moment de sa majorité, n'a pas de formation appropriée (ATA/137/2021 du 9 février 2021 consid. 4c ; ATA/450/2018 du 8 mai 2018 consid. 3b ; MGC 2005‑2006/I A 228 p. 263).

3.6 L'art. 48 LASLP dispose qu'est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de sa négligence ou de sa faute (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut-être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3). L'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 5).

De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment (ATA/993/2025 précité consid. 4.4 ; ATA/1263/2024 du 29 octobre 2024 consid. 4.4 ; ATA/595/2024 du 14 mai 2024 consid. 3.5).

3.7 Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 145 I 73 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_449/2022 du 3 février 2023 consid. 2.2.1 ; 1C_695/2021 du 4 novembre 2022 consid. 3.1.2).

3.8 Conformément à l'art. 49 LASLP, la personne qui était de bonne foi n'est tenue au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où elle ne serait pas mise, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1). Dans ce cas, elle doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de 30 jours dès l'entrée en force de la décision exigeant le remboursement. Cette demande de remise est adressée à l'Hospice général (al. 2). L'exposé des motifs de la LASLP montre qu'un rapprochement avec le droit des assurances sociales a été voulu (PL 13119 p. 103).

De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/595/2024 précité consid. 4.1 et les références citées). La condition de la bonne foi doit être réalisée dans la période où le bénéficiaire concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4 ; ATA/595/2024 précité consid. 4.1 ; ATA/50/2024 du 16 janvier 2024 consid. 4.1).

3.9 L'entrée en force formelle d'une décision administrative, qui équivaut à son caractère définitif, correspond au moment à partir duquel elle ne peut plus être contestée par un moyen juridictionnel ordinaire, c'est-à-dire un recours, une opposition ou une réclamation (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2e éd., 2025, n. 1343 s. ; cf. également art. 53 al. 1 let. a LPA).

3.10 En l'espèce, le recourant n'a pas communiqué à l'hospice son admission à la C______ et son statut d'étudiant, en violation de son devoir de renseigner prévu par l'art. 45 al. 1 LASLP (et à l'époque par la LIASI). Il l'a fait sciemment dès lors qu'il admet que son assistant social lui avait dit, en juin 2019, que s'il était admis à la C______ il perdrait le droit aux prestations d'aide financières, tout en minimisant son comportement en faisant valoir qu'il était effrayé à l'idée d'être dépourvu de toute ressource pour lui et son fils.

Il reproche à l'hospice de ne pas l'avoir informé de l'aide extraordinaire réservée aux étudiants, ni sur l'existence des bourses et prêts d'études, et en déduit la violation de divers principes de rang constitutionnel. Il ne saurait toutefois être suivi sur ce point. Si l'on peut certes admettre qu'il aurait été expédient que l'assistant social, lors d'un entretien ultérieur, lui demandât s'il avait été admis à la C______ – ce qui eût permis de réduire le dommage –, il n'en devait pas moins, de lui‑même, avertir l'hospice de son admission et de son statut d'étudiant, et aurait du reste aussi pu poser lui-même des questions sur la possibilité pour les étudiants d'obtenir des aides autres que celle de l'hospice. À cet égard, il convient toutefois de relever que l'existence de la législation sur les bourses et prêts d'études est largement connue, et quoi qu'il en soit – sous réserve de quelques exceptions dont aucune n'est en jeu ici – nul n'est censé ignorer la loi. Quant à l'aide exceptionnelle pour les étudiants, il est normal que l'assistant social n'en ait pas fait état, les conditions n'en étant pas réalisées – elle suppose en effet que l'étudiant soit en fin de formation puisqu'elle doit permettre de surmonter des difficultés passagères et de terminer la formation en cours (ATA/1355/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3c), ce qui n'était pas le cas.

Dès lors que les prestations d'aide financière litigieuses ont été acquises en violation de l'obligation de renseigner, elles constituent, conformément à la jurisprudence constante, des prestations obtenues indûment, remboursables en vertu de l'art. 48 al. 2 LASLP. La tentative du recourant de démontrer qu'il aurait pu obtenir une aide d'un montant équivalent – allégation du reste contestée par l'intimé – est donc dépourvue de pertinence. Du point de vue de l'égalité de traitement, la situation du recourant n'est ainsi, en lien avec le critère essentiel posé par la loi (soit l'obtention indue de prestations, en l'occurrence en raison de la violation du devoir de renseigner), pas différente de la personne visée par l'ATA/380/2013 mis en avant par le recourant, si bien qu'aucune violation dudit principe ne peut être retenue.

3.11 S'agissant du refus de remise, le recourant prétend que les deux conditions en sont remplies, ce que l'intimé conteste. Tous deux perdent toutefois de vue que c'est la LASLP qui s'applique au présent litige, et que celle-ci prévoit expressément, à son art. 49 al. 2, que la demande de remise ne peut être formulée qu'après l'entrée en force de la décision exigeant le remboursement. Le contentieux y relatif est dès lors prématuré, la décision de remboursement n'entrant en force qu'à l'expiration du délai de recours contre le présent arrêt ou, en cas de recours au Tribunal fédéral, le jour où celui-ci prononcera son arrêt (art. 61 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). La décision sur opposition attaquée doit dès lors être annulée en tant qu'elle refuse la remise, le recours devant être admis sur ce point même s'il doit en aller ainsi sur la base d'autres motifs que ceux soulevés dans le recours.

Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission partielle du recours et à l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle porte sur la demande de remise.

4.             Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Malgré son issue, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure, dès lors que le seul motif retenu pour l'admission partielle du recours n'a pas été soulevé par le recourant (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 novembre 2024 par A______ contre la décision sur opposition de l'Hospice général du 11 octobre 2024 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision sur opposition de l'Hospice général du 11 octobre 2024 en tant qu'elle porte sur la demande de remise, conformément aux considérants ;

la confirme pour le surplus ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe SCHELLENBERG, avocat du recourant ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MARMY

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :