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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2356/2025

ATA/1020/2025 du 16.09.2025 ( FORMA ) , REJETE

Descripteurs : INSTRUCTION ET FORMATION PROFESSIONNELLE;ÉTUDIANT;FRAIS DE FORMATION;BOURSE D'ÉTUDES;REJET DE LA DEMANDE;DROIT CONSTITUTIONNEL À LA PROTECTION DE LA BONNE FOI;RENSEIGNEMENT ERRONÉ
Normes : LBPE.1; LBPE.4; LBPE.5; LBPE.11; LBPE.14
Résumé : Octroi d'un prêt (convertible) pour une formation de maîtrise universitaire d'une durée minimale de trois semestres selon le plan d'études. Prestations octroyées pendant quatre semestres, y compris deux correspondant à un séjour « mobilité » à l'étranger, mais refusées à compter du 5ème semestre. Détermination de la durée minimale de la formation selon l'art. 14 al. 1 LBPE, en l'espèce inférieure à deux ans. Interprétation de l'art. 14 al. 2 LBPE, conduisant à retenir que son application suppose, comme l'al. 1, que la durée minimale de la formation soit de deux ans au moins. Pas de protection de la bonne foi en raison d'un faux renseignement du SBPE car il n'a pas influé sur le comportement de la recourante. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2356/2025-FORMA ATA/1020/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 septembre 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES intimé



EN FAIT

A. a. Après avoir obtenu en 2019 un premier baccalauréat universitaire (ci-après : bachelor) en relations internationales auprès de l'Université de Genève (ci-après : l'université), A______ a suivi, également auprès de l'université, un cursus de bachelor en sciences informatiques de trois ans, de 2019 à 2022. Elle a bénéficié, pour cette deuxième formation, de prestations du service des bourses et prêts d'études (ci-après : SBPE).

b. En 2022, A______ a à nouveau sollicité une aide financière du SBPE afin de suivre pendant l'année académique 2022/2023, toujours auprès de l'université, la première année d'un programme de maîtrise universitaire pluridisciplinaire en études asiatiques (ci-après : master). Le SBPE a fait droit à cette demande par décision du 4 octobre 2022 en lui octroyant un prêt – stipulé convertible en bourse en cas de réussite des études menant au master – d'un montant maximum de CHF 16'000.-.

c. Le 31 juillet 2023, elle a déposé une nouvelle demande de prestations pour l'année académique 2023/2024. Le 18 août 2023, elle a communiqué au SBPE trois documents supplémentaires dont il ressortait en résumé que, tout en restant inscrite à l'université (mais en ne payant qu'une taxe fixe de CHF 65.- par semestre), elle bénéficierait lors de cette année académique d'un programme d'échange (3 campus East Asia) dans le cadre duquel elle étudierait du 15 septembre 2023 au 20 août 2024 dans trois universités asiatiques (à Tokyo, Séoul et Hong Kong).

d. Par décision du 13 octobre 2023, le SBPE lui a octroyé un nouveau prêt convertible d'un montant maximum de CHF 16'740.- pour l'année académique 2023/2024.

e. Le 8 septembre 2024, elle a déposé une nouvelle demande de prestations pour l'année académique 2024/2025, dans le cadre du cursus de master.

f. Par décision du 4 décembre 2024, le SBPE a refusé d'octroyer des prestations. La durée minimale de la formation suivie étant de trois semestres, l'étudiante avait épuisé son droit à un prêt convertible. Dans la mesure toutefois où elle pourrait faire valoir des circonstances particulières justifiant la durée de ses études, un prêt sans intérêts, remboursable sur huit ans dès la fin des études, pourrait lui être proposé.

g. Par lettre du 4 février 2025, A______ a formellement sollicité un prêt remboursable.

Le cursus de master était structuré en quatre semestres, avec une première partie consacrée aux enseignements et une seconde dédiée à la recherche. Cette seconde partie comprenait obligatoirement un stage ou une mobilité à l'étranger, valant 6 crédits ECTS, et la rédaction d'un mémoire pour 24 crédits ECTS. Les deux semestres de mobilité qu'elle avait effectués en Asie ne comptaient pas dans les semestres comptabilisés pour le master. Elle avait ainsi l'intention de consacrer les deux semestres de l'année académique 2024/2025, correspondant à ses troisième et quatrième semestres du programme de master, à la rédaction de son mémoire, qu'elle prévoyait de soutenir d'ici la fin de l'année académique. L'aide financière requise lui était absolument nécessaire pour terminer son master dans des conditions sereines, payer ses factures et assurer sa stabilité financière.

h. Par courrier du 13 mars 2025, le SBPE a confirmé sa décision de refus de prestations du 4 décembre 2024. Au vu de la durée minimum d'études prévue pour le master, soit trois semestres, l'octroi d'une nouvelle aide financière n'était pas possible.

i. Le 14 avril 2025, l'étudiante a formé une réclamation contre ce nouveau refus.

Comme cela lui avait été demandé dans la décision du 4 décembre 2024, elle avait expliqué quelles étaient les circonstances particulières justifiant en l'espèce l'octroi d'un prêt remboursable. À défaut d'un tel prêt, elle ne pourrait faire face à toutes ses dépenses ni rembourser à ses proches l'aide qu'ils lui avaient apportée.

j. Après avoir sollicité diverses informations de l'université, le SBPE, par décision du 25 juin 2025, a rejeté la réclamation formée par l'étudiante.

La durée minimale du master étant, selon son règlement, de trois semestres, le SBPE n'aurait dû intervenir que pour cette durée. C'était donc par erreur qu'il avait accordé un prêt convertible pour quatre semestres. Des circonstances particulières permettant une aide supplémentaire ne pouvaient être prises en considération que pour les formations dont la durée minimale était de deux ans ou plus. Le séjour de mobilité ou le stage pouvant être effectués pendant le cursus de master étaient considérés comme un congé et ne modifiaient donc pas la durée minimale de la formation.

B. a. Par acte adressé le 3 juillet 2025 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), A______ a recouru contre cette décision, concluant à son annulation et à ce qu'un prêt remboursable lui soit octroyé.

En présence de circonstances particulières, des prestations pouvaient être octroyées au-delà de la durée normale des études. Dans le cas d'espèce, elle avait terminé son cursus de master dans une durée normale compte tenu du séjour de mobilité de deux semestres effectué en Asie et validé par l'université.

b. Dans ses observations du 4 août 2025, le SBPE a conclu au rejet du recours.

Il résultait du règlement du master, du plan d'études et des renseignements supplémentaires obtenus de l'université dans le cadre d'échanges de courriels, d'une part que la durée minimale du cursus était de trois semestres et, d'autre part, que le stage professionnalisant ou le séjour de recherche étaient facultatifs. Ainsi, la durée minimale de la formation n'atteignant pas deux ans, il ne pouvait être entré en matière sur une aide couvrant des semestres supplémentaires.

La recourante ne pouvait pour le surplus être considérée comme une personne en formation, ayant bénéficié d'un congé pendant l'année académique 2023/2024. Elle n'avait par ailleurs obtenu que 30 crédits ECTS pendant les années académiques 2023/2024 et 2024/2025, ce qui représentait une moyenne de 7.5 crédits ECTS par semestre et correspondait, selon les directives pour le renouvellement coordonné de l'enseignement des hautes écoles suisses dans le cadre du processus de Bologne (ci‑après : les Directives de Bologne), à moins de 20 heures de travail par semaine.

Enfin, la recourante avait omis d'annoncer que, selon décision du 30 janvier 2025, ses parents, avec lesquels elle habitait, percevaient des prestations complémentaires avec effet rétroactif au 1er mars 2024, violant ainsi ses obligations. Un nouveau calcul rétroactif de son droit aux prestations était dès lors réservé.

c. La recourante a persisté dans ses conclusions par réplique du 2 septembre 2025.

Les réponses données par l'université aux questions du SBPE, notamment celle de B______ du 11 juillet 2025, démontraient qu'un séjour mobilité était requis par le plan d'études alors que, sans pour autant constituer un congé, il n'était pas compris dans la durée normale du cursus de master. Dans la mesure où elle avait passé deux semestres en séjour mobilité en Asie et avait terminé son master en août 2025, soit en quatre ou six semestres selon que l'on compte ce séjour ou non, elle avait droit à un prêt remboursable pour l'année académique 2024/2025.

Était annexé à la réplique un relevé final des notes de master de la recourante, dont il ressort qu'elle a obtenu les 90 crédits ECTS nécessaires, dont 6 pour l'échange mobilité et 24 pour son mémoire, présenté en août 2025 et récompensé de la note maximale de 6.

La recourante a pour le surplus contesté avoir violé son obligation d'annoncer les éléments pertinents pour le calcul des aides financières et précisé que les rentes rétroactives revenant à ses parents n'étaient que de CHF 2'000.- environ.

d. La cause a été gardée à juger le 3 septembre 2025.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             L’objet du litige consiste principalement à déterminer si c’est à bon droit que le SBPE a refusé à la recourante un prêt remboursable au motif qu’elle aurait dépassé le nombre maximal de semestres d’études y donnant droit.

2.1 La loi sur les bourses et prêts d'études du 17 décembre 2009 (LBPE - C 1 20) règle l’octroi des aides financières aux personnes en formation. Le financement de la formation incombe en premier lieu aux parents et aux tiers qui y sont légalement tenus ainsi qu'aux personnes en formation elles-mêmes. Les aides financières sont accordées à titre subsidiaire (art. 1 LBPE).

2.2 Ces aides sont accordées sous forme de bourses, de prêts ou de remboursement de taxes (art. 5 LBPE). Les premières sont des prestations uniques ou périodiques non remboursables, qui permettent aux bénéficiaires d'entreprendre, de poursuivre ou de terminer une formation (art. 4 al. 1 LBPE). Les secondes sont définies comme des prestations uniques ou périodiques, qui doivent en principe être remboursées à la fin de la formation ou en cas d'interruption ou d'échec de la formation (art. 4 al. 2 LBPE). L'art. 26 al. 1 let. a LBPE prévoit toutefois que les prêts sont convertis en bourses d'études non remboursables en cas, notamment, de réussite des études menant à la maîtrise.

2.3 L’art. 11 al. 1 LBPE liste les formations pouvant donner droit à des bourses. En fait notamment partie la formation professionnelle supérieure universitaire, soit les formations dispensées par les universités aboutissant à un bachelor (art. 11 al. 1 let. d ch. 1 LBPE). L’al. 2 de cette même disposition détermine les formations pouvant donner droit à des prêts. En font notamment partie les études menant au premier master (art. 11 al. 2 let. c LBPE).

2.4 L'art. 14 LBPE fixe la durée de l’aide : les bourses sont octroyées pour la durée minimale de la formation ; lorsque cette durée est de deux ans ou plus et que la formation n’est pas encore achevée, les bourses peuvent être versées pendant deux semestres supplémentaires (al. 1). Lorsque la durée des études dépasse de plus de deux semestres la durée minimale de formation, des prêts peuvent être octroyés si des circonstances particulières le justifient (al. 2).

L’exposé des motifs figurant dans le rapport du Conseil d’État à l’appui du projet de loi (Mémorial des séances du Grand Conseil [en ligne], séance 60 du 17 septembre 2009 à 17h00, disponible en ligne sur le lien http://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL10524.pdf) précise à propos de l’art. 14 al. 1 LBPE : « Si la durée de la formation est égale ou supérieure à deux ans, les aides à la formation (bourses ou prêts) sont accordées pour toute la durée de la formation avec une marge supplémentaire de deux semestres ».

En relation avec l'art. 14 al. 2 LBPE, l'exposé des motifs précise : « si la personne en formation peut invoquer des circonstances particulières (maladie, charges de famille, activités rémunérées, etc.) pour justifier la durée supplémentaire des études, elle peut obtenir un prêt remboursable ».

L'art. 6 du règlement d'application de la LBPE du 2 mai 2012 (RBPE - C 1 20.01) apporte des précisions sur la durée de l’aide. La durée minimale des études est déterminée par la loi ou le règlement régissant la formation en question ou par le plan d'études de l'établissement de formation (al. 1).

2.5 Selon l'art. 5.1 du règlement d'études de la maîtrise universitaire pluridisciplinaire en études asiatiques (ci-après : le règlement d'études), la durée des études pour l'obtention du master est de trois semestres au minimum et de quatre semestres au maximum, soutenance de mémoire comprise. En cas de premier échec au mémoire, la durée maximum d'études peut être de cinq semestres.

L'art. 6.1 du règlement d'études prévoit que le plan d'études est organisé en quatre modules, dont un de langue, ainsi qu'un module de recherche comprenant la rédaction d'un mémoire avec éventuellement un stage ou un séjour de recherche. Selon l'art. 6.2, le programme de master correspond à 90 crédits ECTS répartis entre les trois modules d'enseignement général (48 crédits), le module de langue orientale (12 crédits) et un module de recherche avec mémoire (comprenant éventuellement un séjour de recherche ou un stage professionnalisant). Les modalités d'obtention et la répartition des crédits ECTS sont décrits dans le plan d'études (art. 6.3). Sauf dérogation, l'étudiant doit avoir suivi tous les enseignements avant le début du troisième semestre du programme et avoir impérativement obtenu un minimum de 48 crédits ECTS au cours des deux premiers semestres (art. 7.4).

L'art. 8.1 du règlement d'études prévoit que, dans le cadre du module de recherche, l'étudiant a la possibilité d'effectuer un séjour de recherche ou un stage professionnalisant. Le séjour de recherche ou le stage s'effectuent dans un pays asiatique, en liaison soit avec des institutions universitaires et de recherche, soit avec des organisations gouvernementales ou non gouvernementales, locales ou internationales (art. 8.2). à la fin du stage, l'étudiant doit rédiger un rapport de stage (art. 8.5). Sur préavis du comité directeur, le doyen ou la doyenne de la faculté des lettres peut accorder un semestre (au maximum deux) de congé pour stage ou séjour de recherche à l'étudiant qui en fait la demande. Les semestres de congé ne sont pas comptés dans la durée des études prescrite (art. 5.3).

Le plan d'étude (consulté le 8 septembre 2025 à l'adresse https://www.unige.ch/maspea/application/files/4617/2958/5723/Plan_detudes.pdf)règle les modalités d'obtention et de répartition des crédits ECTS. En relation avec le « bloc recherche », il expose qu'il s'agit d'une spécialisation ayant lieu au troisième semestre du programme et permettant à l'étudiant d'orienter sa formation en fonction de ses objectifs de départ ou des centres d'intérêts identifiés durant les deux premiers semestres. Outre la rédaction d'un mémoire, représentant 24 crédits ECTS, l'étudiant a la possibilité d'effectuer dans un environnement directement en rapport avec le monde asiatique un stage professionnalisant aboutissant à un rapport de stage, lequel peut mener à l'obtention de 6 crédits ECTS. En accord avec le comité directeur, les étudiants qui ne font pas de stage produisent deux travaux (papers) de dix pages environ, annexes non comprises, dans le cadre de deux enseignements différents, chacun ayant une valeur de 3 crédits ECTS.

2.6 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme au regard notamment de la volonté du législateur, telle qu'elle ressort des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, en particulier de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique ; ATF 140 II 202 consid. 5.1).

2.7 Il ressort en l'espèce de l'exposé des motifs relatif à l'art. 14 al. 1 LBPE, dont il n'y a pas lieu de s'écarter, que contrairement à ce qu'une interprétation littérale pourrait donner à croire, cette disposition s'applique à l'ensemble des aides financières prévues par la loi, soit non seulement aux bourses mais également aux prêts. Ceux-ci ne sont donc en principe octroyés (pour les formations énumérées à l'art. 11 al. 2 LBPE) que pour la durée minimale de la formation et, uniquement lorsque cette durée est de deux ans ou plus et que la formation n'est pas achevée, peuvent être octroyés pour deux semestres supplémentaires. Il s'agissait là, pour le législateur, d'accorder une certaine marge à l'autorité pour tenir compte des cas dans lesquels l'étudiant n'est pas parvenu à terminer dans le délai minimum possible une formation d'une certaine durée.

L'art. 14 al. 2 LBPE doit être lu en relation avec l'al. 1. Il vise ainsi les cas où l'étudiant bénéficiant d'une aide financière ne sera pas parvenu à achever sa formation dans la durée minimale prévue, augmentée conformément à la deuxième phrase de l'al. 1 de deux semestres supplémentaires. Dans cette hypothèse, seul l'octroi d'un prêt est envisageable, et il est soumis à l'existence de circonstances particulières, telles une maladie, des charges de famille ou des activités rémunérées selon l'exposé des motifs, pouvant justifier la durée supplémentaire des études. Ainsi, dans la mesure où l'hypothèse envisagée par l'art. 14 al. 2 LBPE s'inscrit, selon la volonté du législateur et la systématique de la loi, dans la continuité de celle envisagée à l'art. 14 al. 1 deuxième phrase LBPE, l'octroi d'une aide financière demeure soumise à la condition que la durée minimale de la formation soit de deux ans au moins.

Or, cette condition n'est pas réalisée dans le cas d'espèce. Le règlement d'études, auquel renvoie l'art. 6 al. 1 RBPE, prévoit en effet expressément que la durée des études pour l'obtention du titre est de trois semestres au minimum. Le plan d'études ne dit pas le contraire puisqu'il prévoit que le bloc d'enseignement, y compris son module langue orientale, occupe les deux premiers semestres alors que le bloc recherche, comprenant le cas échéant un séjour de recherche ou un stage, a lieu au troisième semestre. Certes, comme le relève la recourante et ainsi que cela ressort des informations fournies par l'université, les étudiants sont encouragés à effectuer des stages ou des séjours mobilité en Asie, ce qui peut paraître difficile à concilier avec un achèvement des études de master en trois semestres. Ils ont du reste la possibilité, selon l'art. 5.3 du règlement d'études, d'obtenir que la durée de leur stage ou de leur séjour de mobilité ne soit pas décomptée dans la durée maximale de quatre semestres dont ils disposent en principe pour achever la formation. Il n'en reste pas moins que de tels stage ou séjour de mobilité ne sont pas obligatoires (contrairement à ce qu'indique B______ dans son courriel du 11 juillet 2025 adressé au SBPE), des travaux de remplacement étant possibles selon le plan d'études, et qu'en toute hypothèse leur accomplissement n'est pas en lui-même incompatible avec l'achèvement de la formation en trois semestres. C'est donc à juste titre que le SBPE a retenu que la durée minimale de la formation n'était que de trois semestres. Il en résulte que la recourante ne peut tirer aucun droit en sa faveur de l'art. 14 al. 1 ou 2 LBPE, faute de durée suffisante de la formation.

3.             Reste à examiner si la recourante peut se prévaloir de la protection de sa bonne foi au vu des informations reçues du SBPE.

3.1 Découlant directement de l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1 ; ATA/386/2023 du 18 avril 2023 consid. 6a ; Luc GONIN, Droit constitutionnel suisse, 2021, p. 624 n. 2023). Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (2) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1 ; ATA/386/2023 du 18 avril 2023 consid. 6a ; Jacques DUBEY, in Vincent MARTENET/Jacques DUBEY [éd.], Commentaire romand de la Constitution fédérale. Préambule - art. 80 Cst, 2021, p. 381 ss n. 81 ss ad art. 9 Cst. ; Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER/Maya HERTIG RANDALL/Alexandre FLÜCKIGER, Droit constitutionnel suisse, vol. 2, 4e éd., 2021, p. 645 n. 1297 ss ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 8e éd., 2020, p. 143 ss et p. 158 n. 699 ; Jacques DUBEY, Droits fondamentaux, vol. 2, 2018, p. 654 n. 3510 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 206 ss n. 578 ss. ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2e éd., 2024, p. 423 ss n 997 ss ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3e éd., 2012, p. 922 ss n. 6.4.1.2 et 6.4.2.1).

3.2 En l'occurrence, l'autorité intimée a indiqué à la recourante, dans sa décision du 4 décembre 2024, après avoir relevé qu'elle avait épuisé son droit à un prêt convertible, que « dans la mesure où [elle] pouv[ait] faire valoir des circonstances particulières justifiant la durée de [ses] études, le service peut vous proposer un prêt d'études remboursable sans intérêts sur une période de 8 ans dès la fin des études ». Dans un courriel adressé le 4 février 2025 au père de la recourante, l'autorité intimée s'est expressément référée à ce passage de sa décision du 4 décembre 2024 ainsi qu'à l'art. 14 al. 2 LBPE pour inviter celle-ci à lui envoyer un courrier exposant les circonstances particulières invoquées, ce qu'elle a fait le jour même. Or, comme vu ci-dessus, cette information était erronée, la recourante ne pouvant pas non plus prétendre à une aide financière en application de l'art. 14 al. 2 LBPE.

Cette information erronée a été donnée dans une situation concrète par une autorité agissant apparemment dans les limites de ses compétences. La recourante ne pouvait guère se rendre compte sur le moment de son inexactitude et la règlementation n'a pas changé depuis lors. Reste à examiner si, sur la foi de cette assurance erronée, la recourante a pris des dispositions auxquelles elle ne pouvait ensuite renoncer sans subir de préjudice.

Au moment où l'information erronée relative à la possibilité d'obtenir un prêt remboursable en cas de circonstances particulières dûment justifiées a été donnée par le SBPE, soit le 4 décembre 2024, la recourante avait déjà effectué la totalité de son séjour mobilité de deux semestres en Asie. En faisant abstraction de ces deux semestres, elle se trouvait alors dans le troisième semestre du programme de master, consacré au bloc recherche et à la rédaction du mémoire final. Selon le courrier qu'elle a adressé le 4 février 2025 au SBPE pour justifier de l'existence de circonstances particulières, elle avait décidé de dédier exclusivement les troisième et quatrième semestres du programme de master à la rédaction de son mémoire final, sur lequel elle travaillait alors activement et qu'elle prévoyait de soutenir d'ici la fin de l'année académique, soit septembre 2025. Par lettre du 13 mars 2025, elle a été informée que, contrairement à ce qui lui avait dans un premier temps été indiqué, elle ne pourrait bénéficier d'une aide financière supplémentaire. Elle a effectivement soutenu son mémoire final en août 2025.

Au vu de ces éléments temporels, il ne peut être retenu que, si elle n'avait pas reçu le 4 décembre 2024 l'information erronée selon laquelle l'octroi d'un prêt remboursable pourrait être envisageable, la recourante aurait adopté un comportement différent. Elle avait en effet d'ores et déjà résolu de consacrer les deux semestres de l'année académique 2024/2025 à la rédaction de son mémoire final, sur lequel elle travaillait activement en février 2025 encore, et il paraît peu probable – elle ne le soutient du reste pas – qu'elle ait eu la possibilité d'en avancer la présentation si elle avait su plus tôt qu'elle n'obtiendrait aucune aide financière supplémentaire, ce qu'elle ne pouvait en toute hypothèse plus ignorer dès réception de la lettre du SBPE du 13 mars 2025. Elle devait en outre envisager d'emblée la possibilité que les circonstances particulières qu'elle invoquait ne soient pas considérées comme suffisantes pour justifier l'octroi d'un prêt remboursable.

Il n'est ainsi pas établi que la recourante aurait, à la suite et en raison des informations erronées données le 4 décembre 2024 par le SBPE, pris des dispositions auxquelles elle n'aurait plus ensuite pu renoncer sans subir un préjudice. Elle ne peut donc tirer aucun droit en sa faveur de l'application du principe de la bonne foi.

Mal fondé, le recours devra être rejeté.

Compte tenu de cette issue, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les conséquences d'une éventuelle violation de l'obligation de collaboration incombant à la recourante en relation avec les décisions allouant des prestations complémentaires à ses parents, avec effet rétroactif.

4.             Vu la matière concernée, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, la recourante succombant et plaidant au demeurant en personne (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 juillet 2025 par A______ contre la décision du service des bourses et prêts d'études du 25 juin 2025 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :