Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/588/2025 du 27.05.2025 sur JTAPI/693/2024 ( PE ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/1113/2024-PE ATA/588/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 27 mai 2025 2ème section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Jean ORSO, mandataire
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 juillet 2024 (JTAPI/693/2024)
A. a. A______, né le ______ 1981, est ressortissant du Kosovo.
b. Il a déposé le 28 août 2019 auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour, en y joignant diverses pièces.
c. Le 11 octobre 2021, A______ a été interpellé et prévenu d’infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.2), de comportement frauduleux à l’égard des autorités ainsi que de faux dans les titres. Lors de son audition, il a, notamment, déclaré être arrivé à Genève entre 2009 et 2010. Il avait effectué l’école obligatoire au Kosovo, y avait suivi une formation de carrossier et travaillé quelques années dans ce domaine avant de venir en Suisse. Son épouse et ses deux enfants, de même que ses trois frères, ses deux sœurs et ses parents vivaient au Kosovo. Il reconnaissait avoir séjourné et travaillé en Suisse sans les autorisations nécessaires, ne pas avoir souscrit à une assurance maladie obligatoire et que les documents présentés à l’appui de sa demande étaient faux. Néanmoins, au moment où il les avait envoyés à l’OCPM, il ne le savait pas.
d. Par ordonnance pénale du 12 octobre 2021, le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de cent cinquante jours-amende à CHF 40.- le jour, avec sursis et délai d’épreuve de trois ans, pour faux dans les titres, infractions à l’art. 115 LEI (entrée illégale, séjour illégal et exercice d’une activité lucrative sans autorisation) et à l’art. 118 LEI (comportement frauduleux à l’égard des autorités), ainsi que pour infraction à la loi fédérale sur l’assurance‑maladie.
e. Le 24 janvier 2022, l'OCPM a rejeté la demande d'A______ et prononcé son renvoi au motif qu’il avait produit des documents falsifiés, notamment des fiches de salaires, dans le but d’induire en erreur l’autorité afin d’obtenir frauduleusement une autorisation de séjour. Il ne disposait pas de connaissances de la langue française de niveau minimum A1 et n'avait pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable au vu de son comportement. Il n’avait pas établi une très longue durée de séjour en Suisse, ni démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle. Il y avait maintenu des liens étroits puisqu’il avait obtenu plusieurs visas de retour depuis le dépôt de sa demande pour se rendre au Kosovo. Le dossier ne faisait pas apparaitre que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.
f. Par jugement du 29 novembre 2022, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours formé par A______ contre cette décision.
Le séjour continu du précité n’était établi qu’à compter de 2019. Même si une durée plus longue était retenue, elle devrait être fortement relativisée dès lors que le séjour avait été effectué de manière illégale. Son intégration socio-professionnelle en Suisse ne pouvait être qualifiée de remarquable. Travaillant comme carrossier, il ne pouvait se prévaloir d’avoir acquis en Suisse des connaissances si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans sa patrie. Sa condamnation pénale démontrait son manque d'intégration. Il n’établissait pas avoir noué des liens particuliers avec la Suisse ou qu’il s’y serait investi dans la vie associative ou culturelle. Aucune preuve n’avait été fournie concernant ses connaissances linguistiques, étant relevé que l’attestation de langue produite était un faux. Enfin, sa réintégration dans son pays ne paraissait pas gravement compromise et rien ne s’opposait à son renvoi.
g. Par arrêt du 28 mars 2023 (ATA/325/2023), la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté par A______ à l'encontre du jugement précité.
La question de savoir si son séjour continu depuis 2009 était établi pouvait demeurer indécise. En effet, quand bien même tel serait le cas, la durée de son séjour devrait être fortement relativisée, dès lors qu’il avait été effectué dans l’illégalité.
Par ailleurs, l’intéressé ne pouvait se targuer d’une intégration socioprofessionnelle particulièrement réussie. Certes, il n’avait jamais émargé à l’aide sociale, n’avait pas de dettes, était financièrement indépendant et alléguait – sans toutefois le démontrer – avoir une certaine maîtrise de la langue française. Il ne rendait pas vraisemblable qu’il avait tissé à Genève des liens amicaux ou affectifs d’une intensité particulière. Dans la mesure où son épouse et ses deux enfants vivaient au Kosovo où il s’était régulièrement rendu, il ne pouvait soutenir que le centre de ses intérêts familiaux se trouvait en Suisse.
L’intégration professionnelle d'A______, qui avait œuvré comme carrossier, ne relevait pas d’une ascension particulièrement remarquable. Les connaissances professionnelles acquises dans ce domaine n'étaient pas spécifiques à la Suisse. Âgé de 42 ans, il était arrivé en Suisse, selon ses dires, à l’âge de 28 ans. Il avait ainsi passé son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Il en connaissait donc les us et coutumes, y compris dans le monde professionnel puisqu’il y avait travaillé, et en maîtrisait la langue. Par ailleurs, il y avait conservé des liens familiaux, notamment son épouse et ses deux enfants, à qui il avait régulièrement rendu visite. Compte tenu de cet élément, de son âge, de son bon état de santé ainsi que des connaissances linguistiques et de l’expérience professionnelle acquises en Suisse, sa réintégration dans son pays d’origine ne paraissait pas gravement compromise. Aucun motif ne permettait de retenir que son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé.
h. Cet arrêt est entré en force faute d'avoir été contesté.
B. a. Par courrier du 9 février 2024 adressé à l'OCPM, A______ a sollicité la reconsidération de la décision du 24 janvier 2022. À cette occasion, il a exposé son parcours migratoire, familial et professionnel ainsi que sa bonne intégration. Concernant l'ordonnance pénale du 12 octobre 2021, aux termes de laquelle il avait été condamné pour faux dans les titres, il expliquait qu'il n'avait jamais falsifié de documents et que les éléments retenus par l'autorité pénale relevaient en réalité d'imprécisions, de contradictions ou de lacunes commises par ses employeurs, comme en témoignait la lettre de B______du 15 janvier 2024.
Étaient notamment joints divers justificatifs de son séjour en Suisse couvrant les périodes 2008 à 2017 et 2020 à 2022.
b. Par décision du 4 mars 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération précitée.
Ses explications relatives au fait qu'il n'avait jamais falsifié de documents, comme en témoignerait la lettre de B______n'étaient pas de nature à modifier la position de l'autorité intimée, laquelle n'était pas compétente pour réviser une décision pénale.
De plus, la décision du 10 mai 2022 (recte : 24 janvier 2022) avait été rendue en application des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) et non dans le cadre de l'« opération Papyrus » comme il l'indiquait à tort. Ses arguments ne pouvaient pas être pris en considération, car les circonstances ne s'étaient pas modifiées de manière notable depuis la décision de refus, de sorte que les conditions de l'art. 48 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) n'étaient pas réunies. En effet, les éléments contenus dans la nouvelle requête n'étaient pas des faits nouveaux et importants susceptibles de modifier sa position.
Il était rappelé par ailleurs qu'A______ faisait l'objet d'une décision de refus et de renvoi de Suisse et de l'espace Schengen entrée en force, rendue le 24 janvier 2022, à laquelle il était tenu de se conformer sans délai.
C. a. Par acte du 30 mars 2024, A______ a interjeté recours auprès du TAPI à l'encontre de la décision précitée, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours et, sur mesures provisionnelles, à ce qu'il soit autorisé à séjourner en Suisse jusqu'à droit jugé sur le recours ; et, principalement, à l'annulation de la décision attaquée et à ce qu'il soit enjoint à l'OCPM d'entrer en matière sur la demande de reconsidération.
Les éléments qu'il mettait en avant étaient nouveaux et importants et justifiaient une reconsidération de la position de l'autorité intimée. Il disposait d'un intérêt privé prépondérant à rester en Suisse, à tout le moins jusqu'à droit jugé sur son recours. Après avoir expliqué et fait attester qu'il n'avait jamais commis de faux dans les titres et que sa condamnation pénale résultait de négligences commises par son employeur, il ne représentait aucun danger pour la sécurité et l'ordre public Suisse. L'autoriser à rester en Suisse ne conduirait pas à anticiper le jugement définitif puisque cela contraindrait uniquement l'OCPM à tolérer son séjour, ce qu'il faisait tous les jours avec une multitude de sans-papiers dans l'attente d'une réponse.
Depuis le 1er novembre 2023, il avait réalisé une progression professionnelle en obtenant l'augmentation de son taux d'activité auprès de C______Sàrl à 100%, pour un salaire mensuel brut de CHF 4'635.-. Il totalisait près de quinze ans de séjour ininterrompu en Suisse, de sorte qu'il avait formé toute sa personnalité d'adulte dans ce pays vu son âge lors de son arrivée, soit 27 ans. Vu ses nombreuses années de séjour en Suisse, il n'avait quasiment plus aucun contact avec ses frères et sœurs et ses parents restés au Kosovo. Un retour dans son pays d'origine n'était pas raisonnablement exigible.
Il ne demandait pas la révision de la position du Ministère public, mais que l'OCPM tienne compte de la réalité des faits tels que rectifiés par son employeur, B______, seul responsable des documents inexacts ou incomplets produits auparavant. Le garage du précité avait connu trois changements de société, ce qui rendait les erreurs administratives commises non seulement compréhensibles mais excusables et faisaient en sorte qu'elles ne pouvaient être qualifiées de « faux ».
b. Le 11 avril 2024, l'OCPM a conclu au rejet tant de la demande de mesures provisionnelles que du recours.
A______ ne bénéficiait d'aucun statut légal en Suisse, faisant par ailleurs l'objet d'une décision de refus d'autorisation de séjour et de renvoi de Suisse entrée en force. Il n'avait, en outre, pas démontré d'intérêt privé prépondérant justifiant l'octroi de mesures provisionnelles. En outre, la durée de son séjour et son évolution professionnelle résultaient notamment du fait qu'il ne s'était pas conformé à son obligation de quitter la Suisse. Il y avait lieu de considérer que l'intérêt public à l'établissement d'une situation conforme au droit l'emportait sur l'intérêt privé du recourant à demeurer en Suisse jusqu'à l'issue de la procédure.
A______ relatait une nouvelle fois son parcours en Suisse, relevant la durée de son séjour à Genève, puis revenait sur sa condamnation pour faux dans les titres, précisant à ce sujet que les faits retenus dans cette procédure pénale étaient erronés. Aucun fait nouveau n'était invoqué au sens de l'art. 48 LPA. Il était en outre rappelé qu'une personne qui se prévalait, grâce à l'écoulement du temps depuis la décision initiale, d'une durée de séjour accru, d'un emploi stable, d'une indépendance financière et de la prise d'un logement ne pouvait se prévaloir d'une modification notable des circonstances.
c. Par décision du 8 mai 2024, le TAPI a rejeté la demande de restitution de l'effet suspensif et de mesures provisionnelles.
d. Dans sa réplique du 17 mai 2024, A______ a ajouté que lors du prononcé de l'ordonnance pénale du 12 octobre 2021, le Ministère public avait commis une erreur d'appréciation des faits. N'étant pas assisté d'un avocat au moment de son audition par le procureur et ne maîtrisant pas le français, il n'avait pas fait opposition à l'ordonnance pénale, de sorte qu'elle était entrée en force. Partant, l'attestation de son employeur aurait dû être prise en considération par l'OCPM comme constitutive d'un moyen de preuve nouveau.
e. Par jugement du 11 juillet 2024, le TAPI a rejeté le recours.
Il résultait de la décision dont il sollicitait la reconsidération que l'OCPM s'était notamment fondé sur l'ordonnance pénale du 12 octobre 2021 qui avait reconnu A______ coupable notamment de faux dans les titres et de comportement frauduleux à l'égard des autorités, faits qu'il avait reconnus lors de son audition par la police et qu'il n'avait pas contestés par la voie de l'opposition qui était ouverte, de sorte que cette ordonnance pénale était en force. Il aurait ainsi pu, en formant opposition contre son ordonnance pénale, solliciter l'audition de son employeur ou produire une attestation de ce dernier. En outre, un traducteur de langue albanaise était présent lors de son audition devant la police en octobre 2021 et l'ordonnance pénale du 12 octobre 2021 lui avait été dûment traduite en albanais, de sorte qu'il ne pouvait invoquer de manière convaincante qu'il n'en n'aurait pas saisi toute la portée. A______ était représenté par un avocat dans le cadre de la procédure de recours devant le TAPI puis devant la chambre administrative contre la décision du 24 janvier 2022 mais n'avait pas remis en question les faits ayant motivé sa condamnation, expliquant au contraire que sa condamnation était liée à des infractions à la LEI et à son désir de pouvoir vivre en Suisse avec sa famille. Par conséquent, la lettre de son employeur, qui aurait aussi bien pu être produite devant le MP ou devant le Tribunal de police, ne constituait pas un nouveau moyen de preuve obligeant l'OCPM d'entrer en matière sur la demande de reconsidération.
Quant au changement des circonstances depuis la décision du 24 janvier 2022, il n'était dû qu'à l'obstination d'A______ à demeurer en Suisse malgré la décision de renvoi définitive et exécutoire. C'était donc à raison que l'OCPM avait refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération du 9 février 2024.
D. a. Par acte posté le 16 septembre 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant préalablement à l'octroi de mesures provisionnelles (soit être autorisé à demeurer en Suisse jusqu'à droit jugé sur le recours), à son audition ainsi qu'à celle de B______en qualité de témoin, et principalement à l'annulation du jugement attaqué et à ce qu'il soit enjoint à l'OCPM d'entrer en matière sur la demande de reconsidération.
Il revenait sur les circonstances de sa condamnation pénale. Il avait été assisté d'un interprète mais non d'un avocat. Il avait été prévenu de faux dans les titres et, par peur d'être emprisonné, avait fini par reconnaître devant la police les infractions qui lui étaient à tort reprochées.
Il invoquait à l'appui de sa demande de reconsidération une rare stabilité et progression professionnelles, après quinze ans de travail de qualité pour le même employeur, ainsi que les faits nouveaux en lien avec sa condamnation pénale. Il réalisait manifestement les conditions pour que sa situation soit reconnue comme un cas d'extrême gravité.
b. Le 2 octobre 2024, le juge délégué a indiqué au recourant qu'il n'entendait en l'état pas ouvrir de procédure sur mesures provisionnelles, le dossier ne contenant aucun indice selon lequel son expulsion serait prochainement mise en œuvre.
c. Le 7 novembre 2024, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Les arguments soulevés dans celui-ci, en substance semblables à ceux présentés devant le TAPI, n'étaient pas de nature à modifier sa position.
d. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 20 décembre 2024 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.
e. Dans ce délai, l'OCPM indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires à formuler.
f. Le recourant ne s'est quant à lui pas manifesté.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le recourant demande son audition et celle d'un témoin, à savoir son employeur, B______.
2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).
2.2 En l'espèce, le recourant a eu l’occasion de faire valoir son point de vue tout au long de la procédure devant l’OCPM, le TAPI, puis la chambre de céans. Il a, en outre, pu produire toutes les pièces qu’il estimait utiles. Il ne motive aucunement sa demande d’audition et n’explique pas en quoi celle-ci serait nécessaire à la solution du litige.
S'agissant de l'audition de témoin demandée, elle ne serait d'aucune utilité pour résoudre le présent litige. En effet, non seulement le recourant a déjà produit une attestation de la personne concernée, mais aussi et surtout ses dires, même confirmés, ne permettraient pas, comme cela sera expliqué ci-après, de revenir sur la non-entrée en matière prononcée par l'intimé.
Les actes d'instruction demandés seront par conséquent refusés.
3. Est litigieuse la non-entrée en matière de l’OCPM sur la demande de reconsidération du recourant.
3.1 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/512/2024 du 23 avril 2024 consid. 3.1 ; ATA/651/2023 du 20 juin 2023 consid. 4.1). Sont « nouveaux », au sens de cette disposition, les faits qui, survenus à un moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure principale, n'étaient (objectivement) pas connus du requérant malgré toute sa diligence (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; ATA/111/2025 du 28 janvier 2025 consid. 3 ; ATA/1276/2024 du 30 octobre 2024 consid. 3.1).
Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux », c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/512/2024 précité consid 3.1 ; ATA/757/2023 du 11 juillet 2023 consid. 3.1). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/512/2024 du 23 avril 2024 consid 3.2 ; ATA/651/2023 précité consid. 4.1 in fine).
3.2 Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 1417).
En droit des étrangers, le résultat est identique que l'on parle de demande de réexamen ou de nouvelle demande d'autorisation : l'autorité administrative, laquelle se base sur l'état de fait actuel et traiterait une requête comme une nouvelle demande, n'octroiera pas une autorisation de séjour dans un cas où elle l'a refusée auparavant si la situation n'a pas changé ; si la situation a changé, les conditions posées au réexamen seront en principe remplies (arrêt du Tribunal fédéral 2C_715/2011 du 2 mai 2012 consid. 4.2 ; ATA/463/2025 du 29 avril 2025 consid. 3.2).
3.3 Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a). Si lesdites conditions sont réalisées, ou si l'autorité entre en matière volontairement sans y être tenue, et rend une nouvelle décision identique à la première sans avoir réexaminé le fond de l'affaire, le recours ne pourra en principe pas porter sur ce dernier aspect. Si la décision rejette la demande de reconsidération après instruction, il s'agira alors d'une nouvelle décision sur le fond, susceptible de recours. Dans cette hypothèse, le litige a pour objet la décision sur réexamen et non la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3 ; 2C_406/2013 du 23 septembre 2013 consid. 4.1).
3.4 Bien que l'écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socioprofessionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/115/2025 du 28 janvier 2025 consid. 2.4 ; ATA/585/2024 du 14 mai 2024 consid. 3.1).
3.5 En l'espèce, il convient – comme déjà précisé – uniquement d’examiner si les conditions d’une reconsidération sont réunies, l’OCPM ayant refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération.
Le recourant fait valoir deux arguments qui justifieraient selon lui la reconsidération de la décision du 24 janvier 2022. Le premier a trait à une « rare stabilité et progression professionnelles, après quinze ans de travail de qualité pour le même employeur » ainsi qu'au surcroît d'intégration qui y serait associé. Or, comme cela vient d'être rappelé, l'écoulement du temps – seul élément à mettre en lien avec la stabilité et la progression professionnelles mise en avant – et la poursuite de l'intégration ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA, dès lors qu'ils résultent uniquement du fait que le recourant ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force.
Par ailleurs, le recourant, en soutenant qu'il aurait dû être acquitté de l'infraction de faux dans les titres telle que retenue par le Ministère public dans son ordonnance pénale du 12 octobre 2021, demande en fin de compte aux juridictions administratives de revenir, à titre préjudiciel, sur cette condamnation pénale entrée en force.
Or, même indépendamment de savoir si l'on ne peut imputer à la charge du recourant de ne pas avoir formé opposition à l'ordonnance pénale, ce qui est douteux, force est de constater que dans la précédente procédure de recours devant le TAPI puis la chambre administrative contre la décision du 24 janvier 2022, il n'a – comme relevé à juste titre par le TAPI dans le jugement attaqué – pas remis en question les faits ayant motivé sa condamnation, expliquant au contraire que sa condamnation était liée à des infractions à la LEI et à son désir de pouvoir vivre en Suisse avec sa famille, alors même qu'il aurait pu fournir à cette occasion l'attestation de son employeur ou tout autre pièce utile à remettre en cause sa condamnation pénale. Il s'ensuit que les explications et pièces fournies par le recourant dans la présente procédure ne lui sont d'aucun secours, puisqu'il ne s'agit ni de faits nouveaux « anciens » qu'il ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente au sens de l'art. 80 let. b LPA, ni de faits véritablement nouveaux au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA. Il convient en outre de relever que la condamnation pénale du recourant n'était nullement le seul argument mis en avant par la chambre de céans pour refuser la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité.
C’est ainsi de manière conforme au droit que l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération. Mal fondé, le recours sera rejeté. Le prononcé du présent arrêt rend en outre sans objet la demande de mesures provisionnelles.
4. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 16 septembre 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 juillet 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met à la charge d'A______ un émolument de CHF 400.- ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Jean ORSO, mandataire du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Valérie MONTANI, Jean-Marc VERNIORY, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| le président siégeant :
C. MASCOTTO |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
|
| la greffière :
|
Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html
Recours en matière de droit public | Recours constitutionnel subsidiaire |
Art. 82 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours : a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ; … Art. 83 Exceptions Le recours est irrecevable contre : … c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent : 1. l’entrée en Suisse, 2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit, 3. l’admission provisoire, 4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi, 5. les dérogations aux conditions d’admission, 6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ; d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues : 1. par le Tribunal administratif fédéral, 2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ; … Art. 89 Qualité pour recourir 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ; b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. … Art. 95 Droit suisse Le recours peut être formé pour violation : a. du droit fédéral ; b. du droit international ; c. de droits constitutionnels cantonaux ; d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ; e. du droit intercantonal. Art. 100 Recours contre une décision1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ______________________________________________ | Art. 113 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89. Art. 115 Qualité pour recourir A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Art. 116 Motifs de recours Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels. Art. 100 Recours contre une décision 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ___________________________________________
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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)
1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.
3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.