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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2940/2024

ATA/1356/2024 du 19.11.2024 ( FORMA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2940/2024-FORMA ATA/1356/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 novembre 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______, mineur, représenté par ses parents, B______ et C______ recourant

contre

DÉPARTEMENT DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 2007, a commencé en août 2022 un apprentissage de graphiste, voie maturité professionnelle, au sein du Centre de formation professionnelle (ci-après : CFP) Arts après avoir réussi le concours d’admission.

b. En juin 2023, il n’était pas promu en 2e année en maturité professionnelle, ayant une moyenne générale de 3.2, cinq disciplines insuffisantes et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 5.5. Il a été exclu de la filière.

Il était toutefois promu en 2e année en filière de certificat fédéral de capacité (ci‑après : CFC), avec une moyenne générale de 4.4, aucune discipline insuffisante et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 0.5. Au cours de l’année, il avait 18 arrivées tardives, deux absences non excusées et un renvoi.

c. En juin 2024, il n’était pas promu en 3e année en CFC, ayant une moyenne générale de 3.8, une discipline insuffisante et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 8.8. Ses moyennes annuelles se montaient à 4.1 pour les cours théoriques, à 4.0 pour l’enseignement professionnel (cours généraux) et à 3.5 pour les ateliers. Il était exclu de la filière. Ses résultats seront détaillés dans la partie en droit en tant que de besoin.

Il cumulait, pour l’année scolaire 2023/2024, 44 absences excusées, 35 non excusées, 41 arrivées tardives, 5 « certificats médicaux » et 22 renvois, dont 20 au second semestre.

d. Par décision du 5 juillet 2024, le conseil de direction du CFP, après discussion avec le conseil de classe, a refusé d’accorder à A______ un redoublement de la 2e année. Il devait quitter le CFP Arts.

Malgré un accompagnement soutenu de la part de toute l’équipe pédagogique durant l’année, l’étudiant ne satisfaisait pas aux normes de promotion. Au-delà des résultats scolaires, il rencontrait des difficultés de compréhension et d’adaptabilité aux exigences du métier de graphiste. Bien qu’un traitement médical ait été mis en place en fin d’année, les résultats n’étaient pas concluants et les enseignants conseillaient une réorientation.

Selon la demande des parents, le dossier avait été transmis à l’école de culture générale (ci-après : ECG) pour la rentrée d’août 2024. Les parents étaient toutefois encouragés à prendre contact avec deux organisations dont les coordonnées étaient fournies, qui venaient en aide aux jeunes qui rencontraient des difficultés dans leur formation professionnelle ou des hésitations dans leur choix d’orientation. Il convenait de prendre le temps pour le jeune d’explorer des professions où l’ordinateur, la conceptualisation et l’abstraction n’étaient pas au cœur des exigences métier.

B. a. Le 5 juillet 2024, les parents de A______ ont interjeté recours auprès de la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) contre cette décision.

Leur fils n’avait jamais redoublé. C’était la première fois qu’il était confronté à un échec. La dernière année avait été compliquée. Un trouble de l’attention avec hyperactivité (ci-après : TDAH) avait été diagnostiqué en mai 2024. Le jeune avait alors entrepris une thérapie afin d’intégrer cette nouvelle réalité et réfléchir aux mesures à mettre en place. Il convenait de lui laisser du temps pour que celles-ci puissent démontrer leur effet bénéfique sur ses apprentissages.

Leur fils reconnaissait son manque d’investissement durant l’année scolaire 2023/2024. Il réalisait, avec infiniment de regrets, qu’il n’avait pas été à l’écoute des avertissements et des conseils de ses enseignants et de ses parents. Cet échec lui avait fait prendre conscience de son véritable attachement à la formation qu’il avait choisie. Sa motivation pour reprendre et poursuivre son cursus restait intacte.

Les parents joignaient un certificat médical du 1er juillet 2024 de la Docteure D______, spécialiste FMH en pédiatrie, selon lequel A______ souffrait d’un TDAH avec hyperactivité. Un traitement avait été commencé en mai 2024. L’augmentation d’un dosage efficace pour ses troubles de concentration et d’hyperactivité n’avait pas pu être faite jusqu’au bout avant le début des vacances scolaires. Elle se ferait à la rentrée scolaire. L’intéressé était par ailleurs suivi par une psychologue pour ses troubles de concentration et d’angoisse. Il était très motivé à suivre sa psychothérapie et à prendre le traitement au dosage correspondant à son poids afin d’améliorer sa performance scolaire. Elle soutenait la demande des parents et de son patient que ce dernier puisse redoubler son année scolaire.

Dans une attestation du 13 juin 2024 du cabinet E______, Centre de soins médicaux et psychologiques, F______ a confirmé que A______ se rendait au cabinet de façon hebdomadaire pour un suivi psychologique en raison d’un TDAH avec hyperactivité. Le trouble était à l’origine de difficultés sur le plan académique.

b. Par décision du 13 août 2024, la DGES II a rejeté le recours du 5 juillet 2024.

Si les problèmes de santé évoqués pouvaient expliquer en partie l’échec de A______, ils ne pouvaient, à eux seuls, justifier la faiblesse des résultats obtenus par le jeune. Un pronostic de réussite dans la filière ne pouvait pas être posé. Une réorientation lui permettrait d’entreprendre un parcours qui puisse être couronné de succès.

C. a. Par acte du 10 septembre 2024, les parents ont interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Ils ont conclu à l’annulation de la décision et à ce que leur fils soit autorisé à redoubler sa 2e année de CFC. Ils ont repris l’argumentation développée devant la DGES II. Ils étaient choqués que, quand bien même le redoublement n’était pas un droit, leur fils ne puisse pas bénéficier d’une seconde chance compte tenu des difficultés médicales apparues en fin d’année scolaire 2023/2024. Des problèmes personnels de ce dernier l’avaient conduit à deux chantages au suicide. Sur recommandation de sa psychologue, ils avaient consulté Malatavie, unité de crise des Hôpitaux universitaires de Genève, pour les adolescents avec idées suicidaires. Cette période compliquée avait eu des répercussions néfastes sur ses capacités à tenir compte des avertissements de son entourage et à étudier sérieusement. Ils craignaient une démobilisation et déscolarisation de leur fils.

b. La DGES II a conclu au rejet du recours.

c. Invités à répliquer, les parents ont transmis copie des principales pièces du dossier.

d. Lors de l’audience de comparution personnelle des parties du 7 novembre 2024, l’étudiant a expliqué qu’il se portait bien. Il ne s’était jamais présenté à l’ECG. Il n’avait que peu d’intérêt pour les cours classiques tels que le français ou les mathématiques. Il avait effectué un stage d’un mois dans la classe de 5e primaire où sa mère enseignait. Il allait en effectuer un autre chez un relieur et attendait des nouvelles pour un troisième chez un graphiste. Il était en train de réaliser, contre rémunération, la carte de Noël pour le cabinet de logopédie de son parrain qui s’occupait notamment d’enfants atteints de surdité. Il avait eu un rendez‑vous, avec ses parents, à la DGES II pour discuter de son avenir et des possibilités de formation.

À la demande du jeune et avec l’accord de ses parents, ces derniers ont quitté momentanément l’audience.

Le jeune homme a détaillé avoir rencontré des difficultés d’ordre personnel qui étaient la cause de son comportement de l’année précédente. Ses problèmes étaient réglés. Cela lui avait permis de prendre conscience de son attachement à la formation de CFC graphiste. Ses notes étaient liées au fait qu’il n’avait pas travaillé. Il souhaitait pouvoir réintégrer le CFP Arts, à partir de la rentrée d’août 2025, afin de faire ses stages auparavant. Son second choix serait de repasser le concours et recommencer. Son troisième choix consisterait à faire une formation duale en graphisme. Il avait les capacités de réussir le CFP Arts. Sur le plan médical, il estimait ne pas avoir besoin de médicaments, mais faisait les efforts nécessaires pour compenser, qu’il s’agisse de l’organisation ou de la concentration notamment. Ses parents étaient plutôt favorables à une médication. Il effectuait son suivi avec le cabinet E______, une fois par mois. C’était son choix d’avoir espacé les rencontres.

La représentante du DIP a indiqué que, sauf erreur de sa part, il n’était pas possible pour un candidat de se présenter une seconde fois au concours d’entrée pour le graphisme. Elle a produit un courrier du 4 novembre 2024 du CFP Arts, interpellé en vue de l’audience. Son contenu est détaillé ci-dessous.

De retour dans la salle d’audience, B______ a précisé que son fils n’avait jamais eu de problèmes de comportement auparavant, pas même lors de la 1re année au CFP Arts. Il avait les capacités. Les parents n’avaient jamais été interpellés par l’école par rapport à son TDAH. Le bilan médical avait été fait à l’initiative de A______. Il s’en était très bien sorti jusque-là. Ils avaient rapidement été convoqués par le CFP Arts qui avait évoqué de gros problèmes de concentration et des problèmes de comportement. Confronté à des problèmes personnels, il n’avait plus été disponible pour sa formation. Les problèmes de comportement en 2e année avaient duré jusqu’à la moitié du second semestre. Lors du dernier entretien, l’école leur avait confirmé qu’ils étaient résolus. Son fils devait pouvoir bénéficier d’une seconde chance, quitte à ce qu’il soit à l’essai. Elle était convaincue que A______ souhaitait ardemment faire cette formation et que cet échec lui avait servi d’électrochoc.

À la demande de ses parents et d’entente avec leur fils, A______ est sorti de la salle d’audience.

B______ a souhaité attirer l’attention de la chambre de céans sur le fait que la famille avait dû se rendre à Malatavie, avant même la fin de l’année scolaire. Les spécialistes avaient estimé que, dès lors qu’il y avait un suivi psychologique et que A______ s’était engagé à le suivre, la prise en charge semblait suffisante. Les parents avaient essayé d’envisager d’autres voies de formation. Le CFP Arts était toutefois celui qui tenait à cœur de A______. Il allait beaucoup mieux. Ils l’encourageaient à essayer la médication, si nécessaire, et à prendre un coach TDAH. De l’avis des psychologues, il fallait toutefois le temps d’accepter le diagnostic. En sa qualité d’enseignante, B______ avait pu constater que certains de ses élèves qui devaient passer au cycle d’orientation en R1 avaient reçu l’électrochoc suffisant pour s’en sortir et finir en R3. Il fallait que l’enfant soit motivé. Dans le cas de son fils et après y avoir beaucoup réfléchi et en avoir beaucoup discuté, elle était persuadée que les conditions de cet électrochoc étaient remplies et qu’il devait pouvoir bénéficier d’une chance. Si tel ne devait pas pouvoir être le cas, les parents craignaient que cela ne l’affecte profondément et péjore son état d’esprit et son avenir. Il avait commencé la maturité profesionnelle sur conseil de ses amis, sans être très motivé. Il s’y était peu investi. L’abandon de cette voie était logique. Il n’était pas exclu qu’il y revienne plus tard lorsqu’il serait motivé. Il avait une fois abordé le sujet en indiquant qu’il la ferait s’il devait entrer aux hautes écoles.

Après le retour de A______ dans la salle d’audience, d’entente entre les parties, un délai au 11 novembre 2024 leur a été imparti pour éventuelles observations, après quoi la cause serait gardée à juger, rapidement, conformément à la demande de A______. L’entier du procès-verbal a été remis tant à A______ qu’à ses parents, d’entente entre eux.

e. Selon la correspondance du directeur et de la maîtresse adjointe du CFP Arts du 4 novembre 2024, les éléments qui avaient mené les enseignants de 2e année à une rupture de formation pour le recourant consistaient en : 1) il s’agissait d’un élève mineur, de 17 ans, avec des problèmes de concentration et de comportement importants depuis le début de l’année. Il rencontrait des difficultés dans la compréhension des consignes et de ce qui était attendu comme compétences métiers. Malgré un suivi très serré de l’équipe pédagogique, il n’avait pas été en mesure d’améliorer ses aptitudes et était resté dans le déni jusqu’à la fin de l’année de sa non promotion (8.8 d’écart à la moyenne) ; 2) l’élève était présent à tous les cours, mais peinait à rester concentré. Il faisait toujours autre chose. Le début de sa thérapie avec le médicament « concerta » était peu concluant, l’élève s’endormant en classe. Sans médicament, il ne tenait pas en place. Il était peu productif ; 3) l’élève rencontrait beaucoup de difficultés sociales avec la classe, avait eu des conflits en début d’année et était isolé. Il y avait eu des tensions importantes. Il lui manquait des repères dans les codes sociaux. Il avait une attitude difficile envers les clients. Il y avait de grandes différences entre sa perception des situations et la réalité vécue par les autres ; 4) il manquait d’autonomie et était incapable de travailler seul. Il demandait un travail constant de recadrage de la part des enseignants. Un seul cours fonctionnait soit la sérigraphie (mouvement).

À l’issue des conseils, et en se basant sur les compétences métiers attendues, les enseignants avaient considéré que l’étudiant n’était pas en mesure de satisfaire aux exigences métiers fixées par l’ordonnance de formation, notamment en termes de conceptualisation, d’abstraction et de productivité. Son TDAH prononcé lui posait problème sur des longues journées derrière un ordinateur.

De surcroît, la nouvelle ordonnance de formation étant appliquée depuis la rentrée 2023, avec un changement de la grille horaire, plus axée vers le numérique, un redoublement de l’élève le ferait passer sous la nouvelle ordonnance, avec une augmentation notable des cours se déroulant derrière un ordinateur.

Le conseil de classe avait relevé qu’un métier impliquant du mouvement lui conviendrait mieux, par exemple, qu’il pourrait s’orienter vers le métier de technologue en impression.

Les enseignants déconseillaient également une inscription à l’ECG, car un parcours académique ne semblait pas adéquat. Ils suggéraient une réorientation vers Cap Formation, For-Pro ou PI orientation, éventuellement Lullier.

La direction confirmait ne pas avoir pris en compte l’information sur l’épisode Malatavie, les problématiques de A______ ayant été décelées bien en amont de cet épisode et au-delà également. Cet épisode s’était déroulé essentiellement dans le cadre privé et en lien avec une rupture amoureuse avec une élève de la classe parallèle. Cette information n’avait pas influencé la décision du conseil de classe qui se basait sur des exigences et compétences opérationnelles qui faisaient défaut à l’élève, soit des compétences professionnelles (les personnes en formation maîtrisent des situations professionnelles courantes de manière ciblée, adéquate et autonome et sont capables d’en évaluer le résultat), méthodologiques (elles planifient l’exécution des tâches et d’activités professionnelles et privilégient une manière de procéder ciblée, structurée et efficace), sociales (elles abordent de manière réfléchie et constructive leurs relations sociales et la communication que ces dernières impliquent dans le contexte professionnel) et personnelles (elles mettent leur personnalité et leur comportement au service de leur activité professionnelle).

f. Le 11 novembre 2024, les parents ont relevé comprendre que le CFP Arts se pose des questions quant aux capacités de leur fils au vu l’année catastrophique qu’il avait réalisée. A______ démontrait depuis lors une motivation proactive et un engagement fort en faveur de cette formation. Il serait contre-productif de poser un jugement aussi définitif et dur qui ne laissait aucune possibilité à un jeune d’avoir un passage à vide et de se reprendre. Les éléments décrits dans le courrier du 4 novembre 2024 du CFP Arts n’avaient jamais été évoqués lors de la 1re année. Au vu de sa motivation renouvelée, du soutien familial et de l’accompagnement thérapeutique, ils plaidaient pour un redoublement.

g. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, rapidement, selon le souhait de A______.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 40 règlement de l’enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 - REST - C 1 10.31).

2.             Le recourant sollicite une autorisation pour redoubler sa 2e année.

2.1 L’école publique a pour buts, dans le respect de la personnalité de chacun : a) de donner à chaque élève le moyen d’acquérir les meilleures connaissances et compétences dans la perspective de ses activités futures et de chercher à susciter chez lui le désir permanent d’apprendre et de se former ; b) d’aider chaque élève à développer de manière équilibrée sa personnalité, sa créativité ainsi que ses aptitudes intellectuelles, manuelles, physiques et artistiques ; c) de veiller à respecter, dans la mesure des conditions requises, les choix de formation des élèves ; d) de préparer chacun à participer à la vie sociale, culturelle, civique, politique et économique du pays, en affermissant le sens des responsabilités, la faculté de discernement et l’indépendance de jugement ; e) de rendre chaque élève progressivement conscient de son appartenance au monde qui l’entoure, en éveillant en lui le respect d’autrui, la tolérance à la différence, l’esprit de solidarité et de coopération et l’attachement aux objectifs du développement durable ; f) de tendre à corriger les inégalités de chance de réussite scolaire des élèves dès les premières années de l’école (art. 10 al. 1 de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 [LIP - C 1 10]).

2.2 Selon l’art. 29 REST, les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière (al. 1). L’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école et, dans cette optique, lors de l’analyse de l’octroi d’une promotion par dérogation ou d’un redoublement ou lors d’une réorientation, il doit être tenu compte des aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation (al. 2). Sont également prises en considération les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève (al. 3).

2.2.1 Est promu au terme de la 1re, de la 2e et de la 3e année l’élève de la voie plein temps dont : a) la moyenne générale est égale ou supérieure à 4.0 ; b) la moyenne des branches d’atelier est égale ou supérieure à 4.0 ; c) la moyenne des cours généraux est égale ou supérieure à 4.0 ; d) la moyenne des cours théoriques est égale ou supérieure à 4.0 ; e) la somme des écarts négatifs n’excède pas 2.0 (art. 25 al. 1 du Règlement du centre de formation professionnelle arts du 28 juin 2017 ‑ RCFPA ‑ C 1 10.57).

2.2.2 En l’espèce, en fin d’année scolaire 2023/2024, le recourant a obtenu une moyenne générale de 3.8, et des moyennes des branches d’atelier de 3.5, des cours généraux de 4.1 et des cours théoriques de 4.0. La somme des écarts inférieurs à la moyenne s’élève à 8.8. Les conditions des let. a, b et e de l’art. 25 al. 1 RCFPA pour une promotion en 3e année ne sont en conséquence pas remplies, ce que le recourant ne conteste au demeurant pas.

2.3 Se pose la question du redoublement de la 2e année.

2.3.1 À teneur de l’art. 31 REST, l’octroi d’un redoublement n’est pas un droit (al. 1). La direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut autoriser un élève non promu à redoubler l’année (al. 2). Dans les voies de formation générale, cette mesure ne peut être accordée qu’une seule fois par filière (al. 3). Un élève ayant bénéficié d’un redoublement ne peut prétendre ni à un triplement de l’année ni à un redoublement de l’année immédiatement supérieure (al. 4). La DGES II peut accorder un redoublement supplémentaire pour de justes motifs, tels que des problèmes de santé ou un accident (al. 7).

Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéficie d’un très large pouvoir d’appréciation, dont la chambre de céans ne censure que l’abus ou l’excès. Ainsi, alors même que l’autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/1697/2019 du 19 novembre 2019 consid. 4d et les références citées).

2.3.2 Aux conditions fixées dans les règlements ad hoc propres à chaque filière, un élève peut être soumis à une mesure d’essai lors de son admission dans une filière, lors d’une promotion par dérogation à l’année supérieure ou lors d’un redoublement (art. 32 REST).

2.3.3 Le REST est applicable à titre subsidiaire pour toute problématique non traitée par le RCFPA (art. 56 RCFPA).

2.3.4 Dans l’exercice de ses compétences, toute autorité administrative est tenue de respecter le principe de la proportionnalité découlant des art. 5 al. 2 et 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), qui commande que la mesure étatique en cause soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu’elle soit dans un rapport raisonnable avec l’atteinte aux droits des particuliers qu’elle entraîne (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2).

2.3.5 La chambre de céans a déjà jugé que dans un contexte où aucune mesure n’avait été mise en place en faveur d’une étudiante durant l’année scolaire en cause, en refusant de l’autoriser à redoubler, en ne tenant pas compte de l’identification d’un trouble supplémentaire et en ne se fondant que sur les mentions sommaires d’un formulaire pour minimiser le lien de causalité entre l’absence de mesures d’accompagnement unanimement préconisées et la situation d’échec général dans laquelle elle s’était trouvée, sans évaluer les chances de succès de l’intéressée dans un environnement scolaire favorable, la direction générale de l’enseignement post‑obligatoire n’avait pas procédé à une appréciation correcte du cas. Sa décision, de même que celle de la direction du collège avait été annulée (ATA/604/2014 du 29 juillet 2014 consid. 5b).

2.3.6 En l’espèce, à l’issue de l’année scolaire 2023/2024, le recourant n’était pas promu en raison de trois causes d’échec, soit une moyenne générale inférieure à 4.0, une moyenne des branches d’atelier de 3.5 et un écart négatif à la moyenne très important de 8.8 alors que seuls 2.0 sont tolérés. Sur les dix branches d’atelier, le recourant n’a obtenu la moyenne que dans deux, soit en dessin et en sérigraphie. Tant le graphisme, que l’expression artistique, la typographie, l’atelier « image en mouvement », l’infographie, la photographie, la « défense de projet » et « dessin de projet portfolio » sont insuffisants. De même, sa moyenne dans les cours généraux se situe à 4.0, plusieurs branches étant insuffisantes à l’instar de la typographie, la technologie et les nouveaux médias. Pour les cours théoriques, sous réserve de bons résultats en sport (5.3), l’étudiant a obtenu 3.7 en culture générale et 3.5 en connaissances artistiques. Sur l’ensembles des 20 résultats seules deux branches sont égales ou supérieures à 5, soit le sport et la perception (5.0).

À cela s’ajoutent, indépendamment des absences excusées, 22 renvois, 41 arrivées tardives et 35 absences non excusées.

L’appréciation de la situation globale telle qu’effectuée par les conseils de classe et de direction du CFP Arts se fonde principalement sur les résultats du recourant, fortement éloignés des normes de promotion.

Il n’est pas allégué que le conseil de direction qui a pris la décision n’aurait pas été en possession des éléments médicaux découverts en cours d’année et pris en charge dès mai 2024. À ce titre, les réflexions des professionnels sur le bien-fondé d’une réorientation de la formation professionnelle, notamment dans des professions où l’ordinateur, la conceptualisation et l’abstraction ne seraient pas au cœur des exigences métier apparaissent se centrer sur l’intérêt du jeune et tenir compte de ses difficultés tout en restant dans une optique constructive et de soutien de son avenir conformément aux art. 10 LIP et 29 al. 2 REST.

Toutefois, la direction de l’établissement a confirmé, dans sa lettre du 4 novembre 2024, que si elle avait bien connaissance des problèmes personnels de l’étudiant, y compris de l’intervention de Malatavie, elle n’en n’avait pas tenu compte, s’agissant de problèmes privés. Or, conformément à l’art. 29 al. 3 REST et à la jurisprudence précitée, la direction doit procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité. La direction aurait dès lors dû prendre en considération dans son analyse les problèmes personnels de l’étudiant, leur gravité et leur incidence sur son année scolaire. Il n’est en effet pas contesté que les difficultés rencontrées par l’intéressé ont fortement influencé tant son comportement que ses résultats et ont, en tous les cas pour partie, entraîné son échec.

De surcroît, la direction a retenu que les problèmes de santé invoqués pouvaient expliquer en partie l’échec du recourant, mais ne pouvaient à eux seuls justifier la faiblesse des résultats obtenus. L’autorité intimée n’a toutefois pas discuté de la possibilité que le cumul desdits problèmes médicaux et personnels puisse expliquer son échec.

Quand bien même la direction de l’école a fait une évaluation détaillée, nuancée et comme précédemment mentionné, orientée sur ce qu’elle considère être le plus adapté et favorable à l’étudiant pour son avenir, elle a abusé de son pouvoir d’appréciation en ne tenant pas compte de toutes les circonstances. Dès lors, la décision doit être annulée et le dossier renvoyé à la direction pour nouvelle décision. Il appartiendra à la direction de l’établissement d’analyser une nouvelle fois la situation, en tenant compte non seulement du TDAH, diagnostiqué en cours d’année, mais des problèmes personnels rencontrés par le jeune, de leur gravité et du cumul des deux problématiques. Toutes les circonstances devront être évaluées.

Il sera relevé que, dans la pesée des intérêts, intervenant dans le sous‑principe de la proportionnalité, l’important intérêt privé du jeune devra être mis en balance avec l’intérêt public que seuls des étudiants répondant aux normes de promotion puissent suivre les cours concernés. Le litige porte en effet sur une décision d’exclusion d’une formation pour laquelle l’intéressé a été sélectionné sur concours. Son intérêt privé à pouvoir tenter une nouvelle fois sa 2e année, sans ses problèmes personnels, avec une prise en charge de son TDAH, manifestement avec le soutien de ses parents, est ainsi très important. Cette formation lui serait en effet définitivement fermée s’il ne pouvait obtenir une occasion d’effectuer une seconde fois la 2e année et démontrer qu’il a pris conscience de l’importance qu’elle revêt pour son avenir.

Parmi toutes les circonstances, le fait que l’étudiant n’ait jamais redoublé, ait réussi sa première année de CFC et les modalités de cette réussite (ses résultats, son comportement, ses aptitudes notamment) doivent être pris en compte pour une évaluation plus globale et complète de sa situation.

Dans ce contexte, l’échec en maturité professionnelle à l’issue de la 1re année n’est pas pertinent. L’étudiant et sa famille ont expliqué en audience que celui-là s’y était inscrit motivé par des amis, mais qu’il n’appréciait pas les branches telles que le français ou les mathématiques. Cette analyse est confirmée par la direction du CFP Arts qui a relevé qu’un parcours académique ne semblait pas adéquat. L’abandon de cette filière est sans incidence dans l’analyse d’un éventuel redoublement de la 2e en CFC, sous réserve du temps qu’il y a éventuellement consacré en 2022/2023.

L’importance de l’écart à la moyenne et les problématiques comportementales devront être contextualisées au vu de leur ampleur.

Enfin, dans l’hypothèse où la direction du CFP Arts décide, après une analyse de tous les critères pertinents, de refuser le redoublement, il conviendra encore, le cas échéant, d’examiner si l’application de l’art. 32 REST permettrait un redoublement à l’essai. Aucun règlement du secondaire II n’évoque cette possibilité. Seul le règlement relatif à la formation gymnasiale au collège de Genève du 29 juin 2016 (RGymCG - C 1 10.71) l’exclut expressément (art. 10). Le RCFPA ne contient aucune disposition y relative. Il précise toutefois que le REST est applicable à titre subsidiaire pour toute problématique qu’il ne traite pas (art. 56 RCFPA).

Le recours sera en conséquence partiellement admis et le dossier renvoyé à la direction du CFP Arts pour nouvelle décision conformément aux considérants qui précèdent.

3.             Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée, les recourants ne faisant pas état de frais de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 septembre 2024 par A______, mineur, représenté par ses parents, B______ et C______, contre la décision du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 13 août 2024 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

renvoie la cause à la direction du CFP Arts pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à B______ et C______ ainsi qu’au département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :