Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1268/2024 du 29.10.2024 sur JTAPI/748/2024 ( ICC ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/1907/2024-ICC ATA/1268/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 29 octobre 2024 4ème section |
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dans la cause
A______ recourant
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE intimée
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 août 2024 (JTAPI/748/2024)
A. a. Le 30 avril 2024, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a rejeté la réclamation de A______ relative à son impôt cantonal et communal (ci‑après : ICC) pour les années 2009 à 2018.
b. Par acte du 3 juin 2024, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision sur réclamation.
c. Le 6 juin 2024, par pli recommandé, le TAPI lui a imparti un délai échéant le 8 juillet 2024 pour procéder au paiement d’une avance de frais de CHF 700.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours.
d. Selon le système du suivi des envois (« Track & Trace ») mis en place par la Poste, cette lettre recommandée a été distribuée à A______ le 14 juin 2024.
e. Le 17 juillet 2024, le TAPI a informé A______ que le compte bancaire de l'Etat de Genève-Pouvoir judiciaire avait été crédité le 11 juillet 2024. Il lui a demandé de lui transmettre un justificatif démontrant la date à laquelle le paiement de l'avance de frais d'un montant de CHF 700.- avait été effectué.
f. Par courrier du 26 juillet 2024, A______ a indiqué avoir « tenté à maintes reprises » de joindre le TAPI le 8 juillet 2024 (« date limite pour s'acquitter du paiement de l'avance de frais »), car il souhaitait s'y rendre physiquement afin d'effectuer ledit paiement sur place. Sans réponse du TAPI, il avait alors donné l'ordre à sa banque de procéder au virement lui permettant de s'acquitter de l'avance de frais.
g. Par jugement du 5 août 2024, le TAPI a déclaré le recours irrecevable.
La demande de paiement de l'avance de frais avait été correctement acheminée, par courrier recommandé du 6 juin 2024, à l'adresse de A______, qui correspondait par ailleurs à celle indiquée dans l'acte de recours. Un délai au 8 juillet 2024 lui avait été fixé pour effectuer ce paiement. A______ y avait procédé à une date inconnue, mais pas avant le 8 juillet 2024 selon ses explications, sans fournir de justificatif de paiement malgré l'invitation dans ce sens par le TAPI. Ce dernier ne pouvait dès lors que constater que l’avance de frais n'avait pas été effectuée dans le délai imparti. Par ailleurs, rien ne permettait de retenir que A______ avait été victime d’un empêchement non fautif de s’acquitter en temps utile du montant réclamé.
B. a. Par acte du 16 août 2024 adressé au TAPI, A______ a conclu implicitement à l'annulation de ce jugement, faisant valoir son manque de considération. L'avance de frais requise par le TAPI avait été versée le 11 juillet 2024, comme cela ressortait du justificatif bancaire annexé. Le recourant a également fait valoir des arguments au fond et indiqué souhaiter assainir sa situation fiscale.
b. Par jugement du 26 août 2024, le TAPI a déclaré irrecevable ce recours et l’a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.
c. L'AFC-GE a indiqué ne pas avoir d'observations à formuler sur ce recours.
d. Dans une écriture spontanée du 19 septembre 2024, le recourant a repris les arguments au fond développés dans le cadre de son recours.
e. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
1. Interjeté en temps utile et transmis pour raison de compétence à la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 11 al. 3 et 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le litige porte sur le bien-fondé du jugement d’irrecevabilité prononcé par le TAPI pour non-paiement de l’avance de frais.
2.1 L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non‑paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1).
2.2 En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).
À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l'al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d'appréciation à l'autorité judiciaire saisie (ATA/702/2024 du 10 juin 2024 consid. 3.2 ; ATA/184/2024 du 6 février 2024 consid. 2.1).
2.3 Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/184/2024 précité consid. 2.2 et les arrêts cités). Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible. Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et les références citées), partant à
2.4 La jurisprudence a tiré de l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) et de l’obligation d’agir de bonne foi à l’égard des justiciables (art. 5 et 9 Cst.) le principe de l’interdiction du déni de justice formel, qui comprend la prohibition de tout formalisme excessif. Un tel formalisme existe lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique sans raison objective la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l’accès aux tribunaux (ATF 142 V 152 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_254/2016 du 9 mai 2016 consid. 5.2).
De manière générale, la sanction du non-respect d'un délai de procédure n'est pas constitutive de formalisme excessif, une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (ATF 142 V 152 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_6/2016 du 1er juin 2017 consid. 3.2). De jurisprudence constante, la sanction de l’irrecevabilité du recours pour défaut de paiement à temps de l’avance de frais ne procède pas d’un excès de formalisme ou d’un déni de justice, pour autant que les parties aient été averties de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le versement et des conséquences de l’inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1).
2.5 En l'espèce, le recourant ne conteste pas avoir été informé du délai imparti pour verser l'avance de frais, ainsi que des conséquences d'une absence de versement en temps voulu. Le délai de paiement au 8 juillet 2024 imparti au recourant doit être considéré par ailleurs comme raisonnable au sens de l'art. 86 LPA, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs pas non plus. Il reconnaît par ailleurs que le paiement a été exécuté le 11 juillet 2024, comme cela ressort du justificatif bancaire qu'il a produit.
Dans ces circonstances, la chambre de céans ne peut que constater que, l'avance de frais n'ayant pas été acquittée dans le délai imparti, le TAPI était fondé à déclarer le recours irrecevable, conformément à l'art. 86 al. 2 LPA.
Mal fondé, le recours sera rejeté.
3. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 3 juin 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 août 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met à la charge solidaire de A______ un émolument de CHF 400.- ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la demanderesse, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______, à l'administration fiscale cantonale ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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