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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/715/2023

ATA/615/2024 du 21.05.2024 sur JTAPI/1145/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/715/2023-PE ATA/615/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mai 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Gazmend ELMAZI, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 octobre 2023 (JTAPI/1145/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______1978, est ressortissant du Kosovo.

b. Il déclare être arrivé en Suisse en 2001.

c. Les 15 février 2021, 4 janvier 2022 et 13 janvier 2023, il a sollicité des visas de retour pour « raisons familiales ».

B. a. Le 5 mars 2020, l'intéressé a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur. À l'appui de cette demande, il a déposé divers documents dont :

-          Un certificat médical des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 26 décembre 2014 attestant d'une consultation du même jour ;

-          Une attestation des transports publics genevois (ci-après : TPG) du 10 février 2020 prouvant l'achat d'abonnements mensuels pour les périodes de novembre 2011, 8 juin au 9 août 2012, 13 octobre au 13 décembre 2012, janvier 2013, mars 2013, mai 2013 à avril 2014, mai 2014 à octobre 2014, février 2015, 18 juillet 2019 au 18 septembre 2019, novembre 2019 à fin février 2020 ;

-          Un décompte d'affiliation du syndicat B______ pour l'année 2013 ;

-          Une confirmation d'ouverture de compte du 26 juin 2012 dans les livres de Postfinance ;

-          Des formulaires d'inscription pour l'obtention de cartes Prepaid auprès de Sunrise et Yallo, respectivement les 19 avril 2014 et 8 juin 2019 ;

-          Une attestation des HUG du 10 février 2020 indiquant qu'il y était suivi depuis 2010 ;

-          Une attestation de l'IFAGE du 10 février 2020 attestant d'un niveau oral A2 en français.

b. Par courrier du 5 janvier 2022, l'OCPM a sollicité du requérant divers documents dont des justificatifs de son séjour pour les années 2016, 2017 et 2018.

c. Dans sa réponse du 4 mars 2022, il a expliqué être venu en Suisse en 2000 ou 2001. Il était retourné au Kosovo trois ans après, durant cinq mois. Il ne disposait d'aucune preuve de son séjour pour les années 2016 à 2018 car il s'était occupé de son ancien employeur, gravement malade et aujourd'hui décédé. Il avait des contacts réguliers avec ses quatre oncles, domiciliés à C______ et Genève.

Il a notamment produit six photographies de lui dans des lieux publics à Genève, avec la mention de dates entre 2016 et 2018, des fiches de salaires pour un emploi au restaurant de D______ de juin à décembre 2021, ainsi qu’un extrait de son compte individuel AVS attestant de cotisations versées en janvier 2020 et de juin à décembre 2020.

d. Par courriers des 5 et 26 avril 2022, l'OCPM a fait part au requérant de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande d'autorisation, lui impartissant un délai de trente jours pour faire valoir, par écrit, son droit d'être entendu.

À teneur des pièces produites, il pouvait justifier d'un séjour en Suisse à partir de 2011, à l'exception des années 2016 à 2018, les photographies fournies ne pouvant établir sa présence à Genève durant cette période. Il n'avait pas démontré une intégration socioculturelle remarquable et ne pouvait pas justifier d'un revenu, étant sans emploi. Enfin, il n'avait pas démontré qu'une intégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle.

e. Le 17 juin 2022, le requérant a exercé son droit d'être entendu, se référant au contenu de son courrier du 4 mars 2022.

f. Par décision du 27 janvier 2023, l’OCPM a refusé, pour les motifs qui ressortaient de ses lettres d’intention des 5 et 26 avril 2022, de préaviser favorablement son dossier auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour, et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 27 mars 2023 pour quitter la Suisse.

C. a. Par acte du 27 février 2023, le requérant a recouru devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision précitée.

Il séjournait en Suisse depuis bien plus de dix ans où il avait toujours travaillé dans la restauration. Il devait très prochainement commencer, à nouveau, un emploi dans la restauration. Il s'était parfaitement intégré en Suisse en ayant noué d'excellentes relations de travail, d'amitié et de voisinage. Il avait de nombreux membres de sa famille proche en Suisse. Il maîtrisait le français, ne faisait l'objet d'aucune poursuite et n'avait jamais sollicité l'aide sociale. En cas de retour dans son pays, il se retrouverait dans une situation précaire et sans emploi.

b. Par jugement du 19 octobre 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Le requérant ne satisfaisait pas aux conditions strictes pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La durée de son séjour en Suisse n'était pas suffisante. Il n’avait pas prouvé sa présence pour les années 2016 à 2018, les photographies produites et les certificats médicaux ne permettant pas d'établir qu'il vivait de manière continue en Suisse durant cette période. Il avait travaillé dans la restauration mais n'avait pas démontré d'activité lucrative en 2023. Il n'avait pas noué de liens forts traduisant un profond enracinement dans la vie de la cité. Le fait qu'il parlait le français, qu'il n’émargeait pas à l’aide sociale et n'avait pas de dettes ne correspondait pas aux critères d’une intégration exceptionnelle. Il avait passé son enfance et adolescence, périodes cruciales pour la formation de la personnalité, et le début de sa vie d’adulte, dans son pays natal. Il en maîtrisait ainsi la langue et la culture et y avait conservé des attaches puisqu'il y était retourné plusieurs fois pour des raisons familiales.

Dans ces circonstances, il n'apparaissait pas que sa réintégration au Kosovo soit fortement compromise ni qu’un départ de Suisse constituerait un déracinement.

D. a. Par acte du 22 novembre 2023, le requérant a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et au renvoi du dossier à l’OCPM en vue de la délivrance d’une autorisation de séjour.

Il séjournait en Suisse depuis 2001. Pour les années 2016 à 2018, il était parvenu à produire des photographies. Il avait toujours travaillé, ce qui démontrait une intégration professionnelle remarquable, et était indépendant financièrement. Il n’avait aucune dette et n’avait jamais bénéficié de l’aide sociale. Il avait pris racine en Suisse et y avait toutes ses attaches. Il maîtrisait la langue française, comme en témoignait son attestation de connaissance du français. Sa réintégration sociale au Kosovo était fortement compromise au vu de sa situation professionnelle et personnelle.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la décision de refus d’octroi de l’autorisation de séjour en faveur du recourant et prononçant son renvoi de Suisse.

2.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

2.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/163/2020 du 11 février 2020 consid. 7b).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée (Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral
[ci-après : TAF] C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Après un séjour régulier et légal de dix ans, il faut en principe présumer que les relations sociales entretenues en Suisse par la personne concernée sont devenues si étroites que des raisons particulières sont nécessaires pour mettre fin à son séjour dans ce pays (ATF 144 I 266 consid. 3.8). La durée d'un séjour illégal, ainsi qu'un séjour précaire, ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte (ATF 130 II 39 consid. 3 ; ATAF 2007/45 consid. 4.4 et 6.3 ; 2007/44 consid. 5.2).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

S'agissant de l'intégration, le Tribunal fédéral administratif a considéré que, d'une manière générale, lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du TAF F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

2.3 À teneur de l'art. 77e OASA, une personne participe à la vie économique lorsque son revenu, sa fortune ou des prestations de tiers auxquelles elle a droit lui permettent de couvrir le coût de la vie et de s'acquitter de son obligation d'entretien. Selon la jurisprudence, une intégration réussie n'implique pas nécessairement la réalisation d'une trajectoire professionnelle particulièrement brillante au travers d'une activité exercée sans discontinuité. L'essentiel en la matière est que l'étranger subvienne à ses besoins, n'émarge pas à l'aide sociale et ne s'endette pas de manière disproportionnée (arrêts du Tribunal fédéral 2D_25/2023 du 12 janvier 2024 consid. 5.4 ; 2C_353/2023 du 22 novembre 2023 consid. 4.3.1 ; 2C_797/2022 du 22 mars 2023 consid. 3.3.3 ; 2C_145/2022 du 6 avril 2022 consid. 6.3 ; 2C_935/2021 du 28 février 2022 consid. 5.1.2 ; 2C_822/2019 du 9 juin 2020 consid. 3.3 et les arrêts cités). L'impact de l'endettement dans l'appréciation de l'intégration d'une personne dépend du montant des dettes, de leurs causes et du point de savoir si la personne les a remboursées ou s'y emploie de manière constante et efficace (arrêts du Tribunal fédéral 2C_145/2022 précité consid. 6.3 ; 2C_935/2021 précité consid. 5.1.2 ; 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 7.2 et les arrêts cités).  

Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation. De même, la personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015  du 11 février 2016 consid. 4.2 ; arrêt du TAF F-6860/2016 du 6 juillet 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 5f).

2.4 Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

2.5 Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

2.6 En l’occurrence, le recourant fait valoir qu’il réside à Genève depuis 2001. Les pièces au dossier, en particulier l’attestation d’achats d’abonnements des TPG du 10 février 2020, permettent de retenir une présence en Suisse, tout au plus, depuis fin 2011 jusqu’à 2015, puis à partir de 2019. De mars 2015 à juillet 2019, le recourant n’a pas fait l’acquisition d’abonnements mensuels et aucune pièce au dossier ne permet de justifier une présence en Suisse durant cette période, les seules photographies produites par l’intéressé ne suffisant pas à démontrer un séjour effectif. Contrairement à ce que soutient le recourant, il n’est pas non plus possible de retenir une présence continue en Suisse depuis 2001. Le certificat de travail du 31 octobre 2003 atteste certes d’un emploi au E______ du 1er septembre 2000 au 31 octobre 2003. Or, depuis cette date, les pièces au dossier – en particulier le courrier du SIT du 23 novembre 2006 et l’attestation des HUG relative à un suivi depuis 2010 – ne suffisent pas à justifier d’une présence en Suisse jusqu’à 2011.

Ainsi, tenant compte de l’ensemble de ces éléments, il convient de retenir que le recourant a séjourné deux ans en Suisse de 2001 à 2003, puis de 2011 à 2015, puis à nouveau dès 2019. Un tel séjour, interrompu à deux reprises, peut certes être considéré comme étant de longue durée. L’intégralité de ce séjour s’est toutefois déroulée dans l’illégalité, voire, depuis sa demande de régularisation du 5 mars 2020, au bénéfice d’une simple tolérance. Or, conformément à la jurisprudence précitée, la durée d'un séjour illégal, ainsi qu'un séjour précaire, ne doivent normalement pas être pris en considération, ou seulement dans une mesure très restreinte. Il y a donc lieu d'examiner si des critères d'évaluation autres que la seule durée du séjour en Suisse seraient de nature à faire admettre qu'un départ de ce pays placerait l'intéressé dans une situation excessivement rigoureuse.

Tel n’est toutefois pas le cas en l’occurrence. Le recourant, qui a travaillé dans le domaine de la restauration, n’établit pas qu’il aurait réalisé une intégration professionnelle exceptionnelle. Il a certes travaillé, n’a pas recouru à l’aide sociale, n’a pas fait l’objet de dettes et parle le français. Il ne soutient toutefois pas avoir acquis en Suisse des connaissances si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre ailleurs. Au contraire, en cas de retour dans son pays, il pourra mettre à profit l’expérience professionnelle et les connaissances de la langue française acquises durant son séjour en Suisse. Enfin, il n’établit pas s’être investi dans la vie associative, culturelle ou sportive de la Suisse, ni avoir créé des attaches particulièrement étroites avec ce pays.

Pour le reste, né au Kosovo, il y a passé son enfance, son adolescence, soit la période essentielle pour la formation de sa personnalité, ainsi que les premières années de sa vie d’adulte. Il maîtrise la langue et les codes culturels du pays. S’il se heurtera sans doute à des difficultés, il ne soutient pas que sa réintégration sera impossible, étant précisé qu’il admet être retourné y vivre après un premier séjour en Suisse et a sollicité trois visas de retour pour le Kosovo depuis 2021.

C’est partant à juste titre que tant l’autorité intimée, qui n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation, que le TAPI, ont retenu que les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour n’étaient pas remplies.

3.             La décision querellée prononce le renvoi du recourant.

3.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation.

3.2 Le recourant ne fait pas valoir que son renvoi serait impossible, illicite ou ne pourrait être exigé. Il ne ressort par ailleurs pas de la procédure que tel serait le cas, de sorte que le prononcé du renvoi apparaît conforme au droit.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

 

 

* * * * *

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 novembre 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 octobre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gazmend ELMAZI, avocat du recourant, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.