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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3864/2022

ATA/593/2024 du 14.05.2024 sur JTAPI/576/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3864/2022-PE ATA/593/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mai 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Mourad SEKKIOU, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 mai 2023 (JTAPI/576/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1991, est ressortissant du Kosovo.

b. Il est arrivé en Suisse en septembre 2011.

c. Le Ministère public du canton de Genève a condamné A______, par ordonnance pénale du 4 novembre 2020, pour faux dans les certificats et pour avoir tenté d'induire en erreur les autorités chargées de l'application de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration en leur donnant de fausses indications afin d'obtenir frauduleusement une autorisation.

B. a. Par courrier du 15 août 2018, A______ a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour. Il y exposait séjourner en Suisse, plus précisément à Genève, depuis le début de l'année 2010. Il était déclaré auprès des assurances sociales et les primes d'assurance pour employeurs et salariés étaient acquittées.

Il a joint notamment les documents suivants :

-     un reçu concernant le paiement de la taxe personnelle 2017 auprès de l'administration fiscale cantonale, acquittée le 17 février 2018 ;

-     une quittance à son nom délivrée le 3 février 2012 pour un an d'abonnement auprès de la société B______ et une autre délivrée le 25 juillet 2014 portant uniquement la mention « 1 an abo » ;

-     un récépissé de paiement auprès du service des contraventions en date du 16 mai 2018 ;

-     un récépissé de paiement auprès de l'association de la C______Suisse en date du 3 octobre 2017 ;

-     un extrait de son compte individuel AVS faisant état de cotisations versées d'octobre à décembre 2015, de mars à décembre 2016 et en novembre 2017 ;

-     des décomptes de salaire pour octobre et novembre 2014 auprès de la société D______SA ;

-     un extrait du casier judiciaire suisse indiquant l'absence de mention au 27 juin 2018 ;

-     un contrat de bail à loyer mentionnant en tant que locataires E______ et F______ et une attestation de celui-ci indiquant que A______ logeait à son domicile ;

-     une attestation délivrée par l'office des poursuites du canton de Genève le 21 juin 2018, indiquant qu'il ne faisait l'objet d'aucune poursuite ou acte de défaut de bien auprès de cet office ;

-     une attestation d'achats d'abonnement délivrée le 19 juin 2018 par les Transports publics genevois (TPG), dont il découle l'achat d'abonnements mensuels du 14 septembre 2011 au 23 juin 2018, sous réserve des interruptions suivantes : du 15 mai au 11 juin 2012 ; du 21 juin au 10 septembre 2013 ; du 9 octobre au 19 décembre 2013 ; du 21 février au 2 juin 2014 ; du 17 août au 9 septembre 2014 ; du 8 octobre au 22 décembre 2014 ; du 23 mai au 25 septembre 2015 ; du 29 décembre 2015 au 9 mars 2016 ; du 18 décembre 2016 au 17 janvier 2017 ; du 16 février au 19 juin 2017 ;

-     une attestation délivrée le 18 juin 2018 par l'Hospice général (ci‑après : l'hospice), indiquant qu'il n'avait reçu aucune aide durant les cinq dernières années ;

-     une attestation délivrée le 8 mai 2018 par le liquidateur de la société G______Sàrl, indiquant qu'il avait fait partie de l'entreprise du 1er juillet 2010 au 30 juin 2012 en tant que peintre à 50 % ;

-     six contrats de travail avec la société D______SA pour un travail d'aide-peintre à 50 % ou de plâtrier, signés respectivement les 1er novembre 2013, 19 septembre, 27 octobre et 27 novembre 2014, ainsi que les 14 et 19 mai 2017 ;

-     une attestation de connaissance de la langue française, niveau A2, délivrée le 3 octobre 2017 par H______;

-     un contrat d'abonnement valable du 1er novembre 2016 au 1er novembre 2017 auprès I______et la facture s'y rapportant ;

-     un contrat d'abonnement valable du 3 janvier 2012 au 3 janvier 2013 auprès de B______ ;

-     deux factures relatives à des abonnements valables du 26 juin au 26 septembre 2015, puis du 26 septembre au 26 décembre 2015 auprès I______, ainsi que le contrat se rapportant à la première de ces deux périodes ;

-     une facture relative à un abonnement valable du 1er novembre 2016 au 1er novembre 2017 auprès I______;

-     une facture des J______(J______) pour des soins reçus le 18 avril 2018, ainsi qu'une ordonnance établie à cette même date ;

–      un certificat d'assurance établi au 31 décembre 2017 par la Caisse de prévoyance de la construction, indiquant une date d'affiliation au 5 décembre 2017.

b. Par la suite, A______ a fait parvenir à l'OCPM une attestation signée par K______, indiquant qu'il l'avait logé chez lui de 2010 à 2013, un contrat de travail signé le 2 juillet 2018 avec l'entreprise L______SA, des extraits actualisés d'absence d'aide de l'Hospice général et de non-poursuite, un contrat de travail signé le 17 septembre 2019 avec l'entreprise M______, une déclaration attestant qu'il n'avait pas déposé de demande d'autorisation de séjour dans un pays de l'UE-AELE, un formulaire « Papyrus » dans lequel il annonçait une date d'arrivée en Suisse en 2009 et considérait avoir apporté des preuves pour chaque année de séjour, sauf pour 2009.

c. Le 16 décembre 2019, l'OCPM a dénoncé A______ auprès du Ministère public du canton de Genève, soupçonnant soit qu'il avait produit de faux documents concernant son emploi auprès de la société G______Sàrl du 1er juillet 2010 au 30 juin 2012, concernant ses engagements auprès de la société D______ pour les années 2013, 2014 et 2017 et son contrat de travail auprès de la société L______Sàrl à partir de juillet 2018, soit que ses employeurs avaient indûment soustrait des cotisations sociales aux organismes concernés.

d. Suite à cette dénonciation, A______ a été entendu par la police le 3 novembre 2020. Concernant son parcours, après avoir terminé son école obligatoire, âgé de 18 ans, il avait quitté le Kosovo au début du mois de mai 2010 pour se rendre à Genève. Il avait alors vécu chez son oncle, K______.

Après avoir commencé par déclarer qu'il avait commencé à travailler en tant que stagiaire pour la société G______Sàrl en juillet 2010, il a admis qu'il avait menti. Il n'avait en réalité jamais travaillé pour cette société, mais seulement illégalement « à droite à gauche ». Le patron de cette société, qu'il avait connu par l'intermédiaire de son frère, lui avait parlé de N______en lui expliquant qu'il établissait de faux documents pour des dossiers « Papyrus ». Il avait alors rencontré cette personne, qui lui avait demandé pour quelle année il souhaitait qu'il établisse un faux document afin de prouver sa présence en Suisse. Il a répondu que cela concernait les années 2010 à 2012. En retour, il lui avait versé une somme de CHF 200.-. Sur question de la police de savoir si son dossier « Papyrus » comportait d'autres faux documents, il a admis qu'il avait effectivement travaillé pour la société D______, mais pas comme cela était indiqué dans les fiches de salaire qu'il avait produites et dont certaines étaient fausses. S'agissant du document établi et signé par K______, indiquant qu'il avait logé de mai 2010 à 2013, il a admis qu'il s'agissait d'un document qu'il avait lui-même établi et dont le contenu était faux. Cependant, il avait demandé à l'intéressé de signer lui-même et celui-ci avait été d'accord de le faire.

Son arrivée en Suisse datait en réalité du 5 septembre 2011. Il avait travaillé ici et là jusqu'au mois de mars 2013, puis à partir de cette année-là pour l'entreprise D______ en tant que peintre à 100 % et il recevait pour chaque jour de travail un salaire de CHF 150.- qui lui était remis en espèces par le patron. Il avait travaillé pour cette société jusqu'en 2015. C'était bien ainsi que cela s'était passé et ses fiches de salaire étaient à cet égard fausses. S'agissant de sa situation personnelle, il a notamment déclaré qu'il voyait son frère et son oncle pratiquement tous les week‑ends.

e. Par décision du 20 octobre 2022, l'OCPM a refusé d'accéder à sa requête du 15 août 2018 et de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) et a en outre prononcé son renvoi de Suisse.

Il apparaissait que dans le cadre de sa demande, il avait produit des documents falsifiés afin de tenter d'obtenir frauduleusement une autorisation de séjour, ce pour quoi il avait été condamné le 4 novembre 2020. Il ne répondait donc pas aux critères de l'« opération Papyrus », compte tenu de ce comportement. Par ailleurs, il ne remplissait pas non plus les critères relatifs à un cas individuel d'extrême gravité. Il n'avait en effet pas démontré une très longue durée de son séjour en Suisse, ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence. Une partie des pièces qu'il avait produites pour justifier sa présence en Suisse étaient falsifiées, de sorte qu'il n'avait pas prouvé à satisfaction de droit une présence de dix ans dans ce pays. Par ailleurs, sa condamnation pénale du 4 novembre 2020 démontrait un comportement frauduleux et contraire à celui qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant la régularisation de ses conditions de séjour. Finalement, il n'avait pas démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle, indépendamment des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place.

C. a. Par acte du 21 novembre 2022, A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Il ressortait du dossier qu'il résidait dans le canton de Genève depuis au moins l'année 2010 (sic). Indépendant financièrement, il n'avait jamais bénéficié de l'aide de l'hospice et n'avait aucune dette. Il n'avait plus de contact avec son pays d'origine en dehors de sa proche famille. Parlant couramment le français, il était parfaitement intégré en Suisse, où se situait le centre de sa vie sociale.

Il s'était certes montré maladroit en usant de moyens condamnables dans le cadre de sa demande de permis de séjour, mais c'était précisément dans le but de pouvoir séjourner en Suisse. Il fallait au demeurant prendre en considération le fait qu'il se trouvait en toute hypothèse dans un cas individuel d'extrême gravité. Il avait en effet séjourné en Suisse durant une période assez longue au sens de la jurisprudence, soit durant plus de onze années au moins à ce jour. Il n'avait plus aucun rapport avec son pays, si ce n'était avec sa famille qu'il visitait durant ses vacances de temps en temps. Il n'avait donc plus aucun lien social avec son pays, où il lui serait impossible de se réinsérer socialement et professionnellement.

b. Le 18 janvier 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours, renvoyant pour l'essentiel à sa décision.

c. Par jugement du 22 mai 2023, le TAPI a rejeté le recours.

A______ avait été condamné pour faux dans les certificats et pour avoir tenté de tromper les autorités au sens de l'art. 118 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Il ne répondait ainsi pas à l'une des conditions cumulatives à laquelle était soumise l'octroi d'une autorisation de séjour dans le cadre de l'« opération Papyrus », à savoir l'absence de condamnation pénale autre que pour séjour illégal. En outre, arrivé en Suisse le 5 septembre 2011, il totalisait, au jour du dépôt de sa demande de régularisation, un séjour de sept ans (en admettant qu'il s'agît d'un séjour continu et ininterrompu), donc inférieur aux 10 ans requis dans le cadre de l'« opération Papyrus ».

Même en prenant par hypothèse en considération un séjour continu et ininterrompu de onze ans au moment où l'autorité intimée avait statué, il s'agirait certes d'un long séjour, sans qu'il suffise à lui seul pour admettre un cas individuel d'extrême gravité. Sur le plan professionnel, A______ avait occupé des emplois qu'il pourrait également occuper dans son pays d'origine, n'ayant pas acquis de compétences professionnelles particulièrement pointues. Sur le plan social, il ne faisait état d'aucun engagement particulier au sein de la communauté.

Il avait en outre gardé des contacts réguliers avec son pays d'origine, où vivait encore une partie de sa famille. Il était en outre resté en lien avec la culture de son pays, dont il parlait manifestement toujours la langue. Concernant les conséquences de son retour dans son pays d'origine, il se contentait d'indiquer de manière générale qu'il aurait de grandes difficultés de réinsertion, mais n'expliquait pas en quoi il serait spécifiquement visé par de telles difficultés, indépendamment de celles qui touchaient la majeure partie de la population restée sur place.

D. a. Par acte posté le 22 juin 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation et à l'octroi d'une autorisation de séjour ainsi que d'une indemnité de procédure.

Il était arrivé en Suisse en 2011. Comme il l'avait reconnu dans son premier recours, il avait été maladroit en usant de moyens condamnables dans le cadre de sa demande de permis de séjour. Il se trouvait néanmoins dans l'hypothèse d'un cas d'extrême gravité, ayant séjourné en Suisse pendant une période assez longue et n'ayant plus aucune attache avec son pays, si ce n'était avec sa famille à qui il rendait occasionnellement visite.

b. Le 22 août 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Les arguments soulevés dans celui-ci, semblables à ceux présentés devant le TAPI, n'étaient pas de nature à modifier sa position.

c. Le 25 août 2023, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 29 septembre 2023 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 28 septembre 2023, l'OCPM a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires à faire valoir.

e. Le recourant ne s'est quant à lui pas manifesté.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le litige porte sur le refus de l’OCPM de préaviser favorablement auprès du SEM la demande d'autorisation de séjour du recourant.

2.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit.

2.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er septembre 2018, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393
consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ;124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

2.3 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

2.4 Aux termes de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

2.5 L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes de l’UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch /regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'« opération Papyrus » n'emportait aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/334 du 5 mars 2024 consid. 3.6).

Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (ATA/1056/2023 du 26 septembre 2023 consid. 2.4 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b).

2.6 En l'espèce, le recourant a déclaré à la police – déclarations qu'il confirme dans son recours à la chambre de céans –, après avoir déposé sa demande de régularisation, être arrivé en Suisse en 2011. C'est donc à juste titre que le TAPI a retenu un séjour à Genève de sept ans seulement avant le dépôt de la demande de régularisation, ce qui conduit à retenir que les conditions de l'« opération Papyrus » n'étaient, indépendamment de la condamnation pénale pour faux dans les certificats, pas remplies.

Le recourant ne peut se prévaloir d'une intégration socioprofessionnelle remarquable. S’il est vrai qu’il a longtemps travaillé et subvenu à ses besoins et qu’il maîtrise la langue française au niveau requis, son activité dans la construction ne répond pas à la définition d’une intégration extraordinaire, conformément à la jurisprudence mentionnée plus haut. Le recourant n’a de plus fait état d’aucun engagement dans la vie sociale, culturelle ou sportive à Genève.

S'agissant de ses possibilités de réintégration dans son pays d'origine, le recourant est né au Kosovo, dont il parle la langue. Il y a vécu son enfance, son adolescence et les premières années de sa vie d'adulte, puisqu'il s'est installé en Suisse à l'âge de 20 ans. Il a du reste maintenu des liens avec son pays d'origine, dès lors qu'il admet y avoir de la famille et aller lui rendre visite périodiquement. En toute hypothèse, les années que le recourant a passées en Suisse ne l'ont pas rendu étranger à sa culture d’origine ni à sa langue maternelle. Le recourant est jeune et en bonne santé et, de retour dans son pays d'origine, il pourra faire valoir les connaissances linguistiques et professionnelles acquises en Suisse.

Dans ces circonstances, il n'apparaît pas que les difficultés auxquelles le recourant devra faire face en cas de retour au Kosovo seraient pour lui plus graves que pour la moyenne des étrangers, en particulier des ressortissants kosovars retournant dans leur pays. Le recourant ne présente donc pas une situation de détresse personnelle au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Il ne se justifie en conséquence pas de déroger aux conditions d'admission en Suisse en sa faveur, au vu de la jurisprudence très stricte en la matière. Enfin, il sera rappelé que l’autorité intimée bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation que la chambre de céans ne revoit qu’en cas d’abus ou d’excès, ce qui n’est toutefois pas le cas en l’espèce.

L'autorité intimée était en conséquence fondée à refuser de donner une suite positive à la demande d'autorisation de séjour déposée par le recourant, et l'instance précédente à confirmer ledit refus.

3.             Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée
(art. 83 al. 1 LEI).

En l'espèce, il n'existe pas, hormis les difficultés inhérentes à tout retour dans le pays d'origine après plusieurs années d'absence, de circonstances empêchant l'exécution du renvoi du recourant au Kosovo.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

4.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge solidaire du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 juin 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 mai 2023 ;

 

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mourad SEKKIOU, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.