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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/526/2024

ATA/547/2024 du 30.04.2024 ( PATIEN ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/526/2024-PATIEN ATA/547/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 avril 2024

2ème section

dans la cause

 

A______ recourante

contre

COMMISSION DU SECRET PROFESSIONNEL

et

Docteure B______ intimées

 



EN FAIT

A. a. À la suite de la demande du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci‑après : TPAE) souhaitant obtenir des renseignements médicaux de la Docteure B______, médecin cheffe de clinique auprès de l’Hôpital C______, au sujet de D______, née en 1939, la praticienne a saisi la commission du secret professionnel (ci-après : commission) rattachée au département de la santé et des mobilités. d’une demande de levée du secret professionnel afin de pouvoir transmettre des informations médicales concernant sa patiente.

b. D______ a refusé une telle levée. Lors de son audition par la commission, la médecin a confirmé que la précitée disposait de sa capacité de discernement.

c. Par décision du 1er février 2024, la commission a refusé de lever le secret professionnel de la Dre B______, rien ne justifiant de passer outre le refus de la patiente, qui possédait la capacité de discernement.

B. a. Par acte expédié le 14 février 2024 à la commission, A______, fille de D______, a contesté cette décision.

Ses frères et elle considéraient que la capacité de discernement de leur mère était altérée. Son frère E______, qui vivait avec leur mère avait constaté, le 22 janvier 2024, qu’elle n’était retournée à son domicile ce jour-là qu’à 20h00, en alléguant avoir entendu une annonce dans le bus selon laquelle la police la recherchait, ce qui ne paraissait pas plausible. Son frère avait, certes, fait appel à la police, car il s’inquiétait de l’absence de sa mère, mais la police n’avait pas lancé d’appels au moyen des transports publics.

Le 8 février 2024, leur mère s’était rendue aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), mais avait refusé d’être auscultée. F______, autre fils de l’intéressée, que les HUG avaient appelé, leur avait indiqué de la laisser partir.

Enfin, le 10 février 2024, elle avait déplacé la poubelle sur son balcon, expliquant que c’était parce que l’hôpital la surveillait.

A______ sollicitait la réévaluation psychiatrique de sa mère. Celle-ci refusait tout soin et toute aide.

b. La commission a transmis ce courrier à la chambre administrative de la Cour de justice, comme objet de sa compétence.

c. Invitée à se déterminer sur le recours, la commission a conclu à son rejet. D______ disposait selon la Dre B______ de sa capacité de discernement. La praticienne avait également déclaré qu’il existait un important conflit entre la patiente et ses enfants au sujet de son admission dans un établissement médico-social. En l’absence de tout intérêt privé ou public prépondérant, le refus de la patiente devait être respecté.

d. La Dre B______ n’a pas formulé d’observations.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Se pose la question de savoir si la recourante a la qualité pour recourir.

2.1 Selon l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir non seulement les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a), mais aussi toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b).

La jurisprudence a précisé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/1123/2020 du 10 novembre 2020 consid. 3b ; ATA/577/2014 du 29 juillet 2014 consid. 5a ; ATA/790/2012 du 20 novembre 2012).

Le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1). L'intérêt invoqué, qui n'est pas nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un intérêt de fait, doit se trouver, avec l'objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF 143 II 512 consid. 5.1). L'intérêt à obtenir un jugement favorable doit être personnel, direct, immédiat et actuel (MGC 1984 I 1604 ss ; 1985 III 4373 ss ; ATA/1059/2015 du 6 octobre 2015 consid. 3a).

2.2 En l’espèce, la recourante n’était pas partie à la procédure qui a donné lieu à la décision de la commission. Seule la patiente et son médecin, la Dre B______, ont participé à la procédure devant la commission. La décision n’a pas non plus été notifiée à la recourante. Elle ne remplit donc pas les conditions de l’art. 60 al. 1 let. a LPA.

Celle-ci ne peut pas non plus se prévaloir d’un intérêt digne de protection au sens de l’art. 60 al. 1 let. b LPA. En effet, la recourante ne dispose pas d’un intérêt juridiquement protégé à obtenir la levée du secret professionnel du médecin de sa mère. En outre, la préoccupation dont la recourante fait part au sujet de celle-ci ne saurait constituer un intérêt de fait digne de protection justifiant la levée du secret professionnel. Il n’existe, en effet, pas de rapport étroit et spécial dont la recourante pourrait se prévaloir en sa faveur entre sa préoccupation et ladite levée. En effet, la levée du secret professionnel de la praticienne resterait sans effet sur les droits de la recourante.

Au vu de ce qui précède, la qualité pour recourir de celle-ci doit lui être niée. Faute d’avoir cette qualité, son recours sera déclaré irrecevable.

3.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 14 février 2024 par A______ contre la décision de la commission du secret professionnel du 1er février 2024 ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge d’A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à la commission du secret professionnel ainsi qu'à la Docteure B______.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. RODRIGUEZ ELLWANGER

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :