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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2048/2023

ATA/503/2024 du 23.04.2024 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 07.06.2024, 1C_349/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2048/2023-FPUBL ATA/503/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 avril 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Romain JORDAN, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA CULTURE ET DU SPORT

et

B______ intimés

 



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1993, a été engagé pour effectuer des remplacements ponctuels au sein de B______ (ci-après : B______) dépendant du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) depuis le 27 septembre 2021.

b. Le 19 juillet 2022, B______ l’a engagé comme maître généraliste pour un remplacement de longue durée à l’école C______ (ci-après : C______) du 15 août 2022 au 30 juin 2023, à un taux de 85%.

c. À compter du 24 avril 2023, il s’est trouvé en incapacité de travail pour cause de maladie à 100%, attestée par deux certificats médicaux du 1er et 8 mai 2023, incapacité courant jusqu’au 22 mai 2023.

d. Par courriel du 18 avril 2023, A______ a postulé au service D______ (ci-après : D______) pour un remplacement de longue durée dans l’enseignement obligatoire à l’école E______, précisant être « sur un poste de remplacement de longue durée lors de cette année scolaire » à l’C______, lequel avait pris fin avant les vacances scolaires de Pâques.

e. Engagé par la direction générale de l’enseignement obligatoire (ci-après : DGEO) du DIP, il a pris ses fonctions le 24 avril 2023 au sein de cette école, alors qu’il était encore employé à l’C______.

B. a. Le 16 mai 2023, A______ a été convoqué à un entretien par F______, directeur d’établissements spécialisés, et G______, responsable des ressources humaines (ci-après : RH) du DIP au sein de l’école E______.

b. Il ressort du document tenu lors de cette séance et signé par le remplaçant, que ce dernier a déclaré qu’il était « conscient d’avoir validé deux contrats, DGEO et B______ ». Il ne savait pas comment se départir du contrat avec B______. Il voulait quitter C______ et avait « sauté sur l’occasion » de la DGEO. Il avait voulu appeler les RH de B______ mais ne l’avait pas fait, il comptait « le faire après un moment », peut-être vers la fin du mois de mai. Il avait voulu « essayer autre chose et mis en stand-by » C______ à cette fin. Il savait être en arrêt de travail et ne pas avoir le droit de travailler mais il y était « allé quand même ». Il avait informé B______ de son mal-être au travail mais pas de son « envie de partir ». Il avait « prémédité son contrat à la DGEO », s’étant dit « j’ai cette occasion d’y aller, j’y vais ». Il y était allé « sur le coup de l’impulsivité », et était conscient d’avoir agi de manière égoïste. Il savait être « hors la loi » en travaillant alors qu’il était sous certificat médical. Il était conscient d’avoir abandonné son poste à B______.

C. a. Par décision du 16 mai 2023 remise en mains propres, la DGEO a résilié le contrat de travail en qualité de remplaçant de A______ avec effet immédiat.

Alertée par le service des paies de l’existence d’un double contrat, elle constatait qu’il avait été engagé en qualité de remplaçant de longue durée de maître généraliste de l’enseignement spécialisé à un taux d’activité de 85% à compter du 15 août 2022 dans le cadre d’un contrat de droit privé de durée déterminée arrivant à échéance le 30 juin 2023. Il avait été affecté à C______, une structure rattachée à B______. Il se trouvait en incapacité totale de travail depuis le 24 avril 2023, conformément aux deux certificats médicaux datés des 1er et 8 mai 2023. Nonobstant l’engagement et l’incapacité de travail à temps complet précités, il avait cependant conclu un nouveau contrat relatif à un remplacement pour le compte de la DGEO à un taux de 89%, à compter du 24 avril 2023 jusqu’au 30 juin 2023. Il n’avait pas informé cette dernière de son engagement préalable au sein de B______ ni de son incapacité de travail, dont le début coïncidait avec son second contrat de remplacement. Au contraire, par courriel du 18 avril 2023, il avait indiqué au D______ être disponible pour effectuer cette mission.

Il n’avait pas non plus averti B______ de ce nouvel engagement, ni démissionné de ses fonctions au sein de C______. Il avait continué à communiquer à B______ des certificats médicaux attestant de son incapacité de travail tout en percevant une double rémunération, soit celle liée au contrat conclu avec B______ en parallèle de celle liée à son contrat avec la DGEO. Il avait commis une grave faute professionnelle, raison pour laquelle son contrat de remplacement du 24 avril 2023 était résilié avec effet immédiat, compte tenu de la gravité de la situation. En outre, il ne serait plus « convoqué pour effectuer des remplacements ».

b. Par décision remise en mains propres du 16 mai 2023, B______ a résilié le contrat de travail en qualité de remplaçant de l’intéressé avec effet immédiat. Nonobstant son engagement et son incapacité de travail à temps complet, il avait conclu un nouveau contrat de travail pour le compte de la DGEO à un taux d’activité de 89% dès le 24 avril 2023 jusqu’au 30 juin 2023. Il n’avait pas informé la DGEO de son engagement préalable au sein de B______ ni de son incapacité de travail. Au contraire, il avait indiqué au D______ par courriel du 18 avril 2023 être disponible pour effectuer cette mission.

Il ne l’avait pas informé de ce nouvel engagement contractuel, pas plus qu’il n’avait démissionné. Il avait continué à communiquer ses certificats médicaux et perçu sa rémunération liée au contrat conclu avec B______, en parallèle de sa rémunération auprès de la DGEO. Ce faisant, il avait commis une grave faute professionnelle. En conséquence, son contrat de remplacement était résilié avec effet immédiat. De plus ce courrier précisait qu’il ne serait « plus convoqué pour effectuer des remplacements ».

c. Par courriel du 31 mai 2023, A______ a demandé au DIP un certificat de travail ou une attestation de travail pour la période au sein de l’école primaire E______, laquelle lui a été fournie le 1er juin 2023.

d. Par courrier du 14 juin 2023 adressé au directeur général ad interim de B______, au directeur général de la DGEO et au chef du service D______ ainsi qu’au DIP, A______, sous la plume de son conseil, a sollicité des explications sur la mise en œuvre concrète de la décision du 16 mai 2023, qui l’excluait de toutes possibilités de remplacement. En tant que de besoin, il formait opposition à ladite décision, et souhaitait connaitre les démarches concrètes entreprises depuis lors ou que B______, le DIP ou la DGEO envisageaient d’entreprendre en vue d’appliquer cette décision.

e. Par courriel du 15 juin 2023, le DIP, au nom de toutes les entités concernées, a répondu qu’il n’y avait aucune démarche à effectuer, dans la mesure où il l’avait simplement informé ne plus souhaiter faire appel à ses services en vertu de « la liberté contractuelle qui était la sienne ». Il lui a également transmis son dossier administratif, conformément à sa demande.

f. Divers échanges de courriels ont ensuite eu lieu entre le DIP et A______ entre le 4 et le 13 juillet 2023, concernant ses certificats de travail et les demandes déjà formulées le 14 juin 2023.

Cause A/2048/2023

D. a. Le 15 juin 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) à l’encontre du courrier de résiliation avec effet immédiat du 16 mai 2023 rendu par la DGEO concluant principalement à son annulation en tant qu’il disposait qu’il ne serait plus convoqué pour des remplacements et au constat de son caractère illicite, ainsi qu’à ce qu’il soit ordonné à l’autorité intimée de considérer sa candidature pour d’éventuels remplacements tant dans l’enseignement spécialisé que dans l’enseignement obligatoire. Préalablement, il convenait d’ordonner à l’autorité intimée de produire son dossier, y compris les évaluations et notes internes et tenir une audience de comparution personnelle.

Son droit d’être entendu n’avait pas été respecté. La mesure consistant à l’exclure des remplacements en primaire et en école spécialisée lui avait été imposée comme une conséquence directe de la résiliation avec effet immédiat de son contrat de travail, sans qu’il sache que celle-ci emportait sa « radiation définitive de tous les établissements obligatoires ou spécialisés à titre de remplaçant ». En ne faisant pas état de ces éléments, la décision violait manifestement les exigences du droit d’être entendu et était constitutive d’un déni de justice formel.

La loi ne prévoyait pas la prise de mesures telle qu’une interdiction d’accès définitive aux remplacements dans l’enseignement obligatoire ou spécialisé. L’absence de règlementation à ce sujet était déjà en soi contraire au principe de la légalité. Il était « fiché » auprès du service des ressources humaines, ce qui violait son droit à l’oubli. Une telle inscription intemporelle entachait son avenir d’enseignant.

La liberté contractuelle à laquelle le DIP se référait ne le soustrayait pas au respect des garanties constitutionnelles. La tenue d’une liste fichant les candidats radiés nécessitait une règlementation minimale à défaut d’offrir d’autres garanties procédurales aux candidats exclus des remplacements.

Enfin, la décision violait le principe de la proportionnalité. Il avait reconnu ses torts. Le caractère exceptionnel de sa situation, son état de santé fragile lors des faits et l’absence de toute volonté de manœuvrer intentionnellement auraient dû être pris en compte avant la reddition d’une décision le radiant définitivement du cercle des remplaçants.

Compte tenu de ses explications fournies aux directeurs, force était de constater que cet épisode était isolé. Rien ne permettait de déduire qu’il allait réitérer un tel comportement à l’avenir. Son « exclusion intemporelle » du cercle des remplaçants était disproportionnée au regard des motifs ayant mené à la résiliation de ses deux contrats de travail.

b. Dans ses observations du 15 août 2023, la DGEO a conclu au rejet du recours. Il convenait « principalement de lui octroyer un délai pour répondre en fait et en droit sur le fond, d’ordonner l’audition de G______ et F______ », et préalablement d’ordonner la jonction de la présente cause à la cause A/2049/2023, et de déclarer le recours irrecevable.

Le recours devait être déclaré irrecevable, la chambre administrative n’étant pas compétente pour trancher ce litige. Le Tribunal fédéral avait jugé dans un cas similaire que l’annonce de ne plus faire appel à un remplaçant était une manifestation de volonté qui n’atteignait pas la personne dans sa situation juridique et n’était pas une décision. Il ne s’agissait pas non plus d’un acte attaquable sujet à recours, les droits et obligations du remplaçant dans cette situation n’ayant pas été modifiés par cette manifestation de volonté. Il était justifié de retenir l’absence de droit à ce que l’autorité statue par décision.

La liste évoquée par le recourant n’existait pas. Le seul document concernant les remplaçants était interne à l’administration et son seul but était de lui permettre d’organiser des missions de remplacement en faisant appel à des personnes qui en remplissaient les conditions. Il s’agissait d’un carnet d’adresses. L’argumentation basée sur la prétendue existence d’une « liste noire » tombait à faux. Le dossier administratif et sa conservation étaient régis par l’art. 35 de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD ‑ A 2 08). L’art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) n’était pas applicable.

Le contrat de remplacement était un contrat de droit privé, et comme le rappelait le Tribunal fédéral, les personnes intéressées à effectuer des remplacements n’étaient pas titulaires de droits et d’obligations envers l’État, et ne disposaient d’aucun droit à être engagés.

c. Dans sa réplique du 18 septembre 2023, le recourant a persisté dans ses précédentes conclusions et explications.

Aucun motif ne justifiait de scinder le traitement du recours, et la demande liminaire du DIP devait être rejetée. Il ne contestait pas son licenciement immédiat, mais bien le contrôle de la décision du DIP de ne plus l’appeler en qualité de remplaçant. Cette décision avait une influence sur sa situation juridique et sous l’angle de ses droits et obligations envers l’État, notamment en lien avec sa personnalité et les principes de la proportionnalité, de la légalité et de l’accès au juge.

d. Les 20 octobre et 30 novembre 2023, les parties ont présenté des observations, persistant dans leurs précédentes argumentations et conclusions.

e. Le 24 janvier 2024, la DGEO a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

f. Sur ce, les parties ont été informées le 26 janvier 2024 que la cause était gardée à juger.

Cause A/2049/2023

E. a. Par acte du 15 juin 2023, A______ a également interjeté recours à l’encontre de « la décision de résiliation avec effet immédiat du 16 mai 2023 » rendue par B______ en tant qu’elle stipul[ait] [qu’il] ne serait plus convoqué pour effectuer des remplacements » auprès de la chambre administrative, concluant principalement à son annulation en tant qu’elle prévoyait qu’il ne serait plus convoqué pour des remplacements et au constat du caractère illicite de cette partie de la décision. Il convenait préalablement d’ordonner à l’autorité intimée de produire l’intégralité de son dossier et de convoquer une audience de comparution personnelle.

Il n’existait aucune réglementation autorisant B______ à tenir un fichier comportant le nom du recourant tendant à l’interdire spécifiquement du cercle des candidats pouvant être engagés comme remplaçants. La tenue d’une telle liste n’était pas réglementée et a fortiori, l’exclusion pour une durée illimitée d’un candidat potentiel de celle-ci non plus. La sélection des candidats remplaçants n’était pas réglementée, pas plus que leur exclusion complète et illimitée du processus de sélection. Même si l’information n’était pas inscrite dans un fichier, elle avait été transmise à toutes les entités du DIP. Aucune base légale ne prévoyait que la résiliation du contrat de travail emportait comme conséquence l’impossibilité illimitée dans le temps de se porter candidat pour le futur à un poste de remplaçant.

Acter qu’il ne serait plus convoqué pour des remplacements était un traitement de ses données personnelles. L’absence de toute limitation temporelle d’une telle décision violait « son droit à l’oubli ».

Son droit d’être entendu avait été violé, puisqu’il n’avait pas été entendu avant la mesure d’exclusion de toute possibilité de remplacement en primaire et en école spécialisée. Or, tenir une liste fichant certains candidats radiés nécessitait une règlementation minimale à défaut d’offrir d’autres garanties procédurale aux candidats exclus des remplacements. La résiliation du contrat de travail, soumise au droit privé, ne pouvait emporter des conséquences relevant du droit administratif et échappant à toute contestation, notamment sous l’angle du principe de la proportionnalité. La décision ne respectait pas le principe de la légalité, en lien avec la sphère privée.

Enfin, la décision était disproportionnée, le caractère exceptionnel de la situation et de son état de santé auraient dû être pris en compte avant de le radier définitivement du cercle des remplaçants.

b. Dans ses observations du 15 août 2023, B______ a conclu à l’irrecevabilité du recours. L’acte querellé n’était pas une décision. La procédure devait être jointe au recours interjeté par le recourant contre la DGEO, enregistré sous référence A/2048/2023.

La volonté manifestée par le DIP de ne plus faire appel à ses services dans le cadre d’un contrat de droit privé ne ressortissait pas à la compétence de la chambre administrative. Le recourant entendait la soumettre au contrôle judiciaire sous l’angle du droit à la protection des données, invoquant l’art. 13 al. 2 Cst. et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Cette situation avait déjà été examinée par le Tribunal fédéral, qui avait retenu que le seul fait de figurer dans le carnet d’adresse des remplaçants du D______ n’octroyait aucun droit ni intérêt de fait et n’impliquait aucune relation entre la personne proposant ses services de remplaçant et l’État. La mention dans un courrier de ne plus faire appel à cette personne était une manifestation de volonté qui n’atteignait pas cette dernière dans sa situation juridique. Cette annonce n’était ainsi pas une décision. Sous l’angle de l’art. 4a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), la situation était identique, dès lors que les droits et obligations du remplaçant n’étaient pas modifiés par cette manifestation de volonté.

Enfin, contrairement à ce qu’alléguait le recourant, il n’existait pas de liste des personnes exclues à vie et de manière générale de remplacement au sein du DIP. Le seul document concernant les remplaçants était interne à l’administration et son but était seulement d’organiser adéquatement les missions de remplacement. Il s’agissait d’une sorte de carnet d’adresses. Ce n’était pas le fait de ne plus figurer dans le carnet d’adresses des remplaçants qui impliquait de ne plus être engagé en cette qualité mais bien la volonté manifestée par B______ de ne plus avoir recours à ses services. Cette volonté n’était pas contestable.

c. Dans ses observations du 18 septembre 2023, le recourant a rappelé ne pas contester le licenciement lui-même, seulement la volonté exprimée par B______ de ne plus le convoquer pour des remplacements. Il a repris les explications figurant dans sa réplique du 18 septembre 2023 dans la cause A/2048/2023.

d. Dans sa duplique du 20 octobre 2023, B______ est revenue sur la collaboration avec le recourant, et sur divers éléments négatifs concernant son attitude et son comportement professionnels. La présentation des faits du recourant dans ses écritures n’était pas conforme à la réalité.

Le recourant ne démontrait pas en quoi l’arrêt du Tribunal fédéral 8C_128/2021 précité n’était pas applicable à son cas. La théorie des deux niveaux non plus, la jurisprudence fédérale démontrant que B______ n’avait pas agi arbitrairement mais bien dans le cadre de son large pouvoir d’appréciation.

e. Dans ses observations du 30 novembre 2023, le recourant a repris la présentation des faits de B______, critiquant celle-ci et contestant tout comportement négatif de sa part au cours des relations de travail. Les reproches qui lui étaient faits étaient insuffisants pour lui interdire d’effectuer des remplacements. En outre, il n’était pas à l’origine de la mesure prise par l’autorité intimée, à teneur de la décision litigieuse.

f. Le 26 janvier 2024, B______ s’est déterminé sur les allégués de fait du recourant, ceux-ci n’étant toujours pas conformes à la réalité.

g. Sur ce, les parties ont été informées le 26 janvier 2024 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA)

2.             Le DIP et B______ concluent préalablement à la jonction des causes A/2048/2023 et A/2049/2023. Le recourant ne s’y oppose pas.

2.1 Selon l'art. 70 al. 1 LPA, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune. La jonction n’est toutefois pas ordonnée si la première procédure est en état d’être jugée alors que la ou les autres viennent d’être introduites (art. 70 al. 2 LPA).

2.2 En l'espèce, les procédures A/2048/2023 et A/2049/2023 concernent deux recours émanant du même administré, contre deux décisions d’autorités différentes, mais appartenant au même département (soit le DIP), concernant une problématique similaire liée à son inscription dans le registre des remplaçants. De plus, les questions juridiques posées sont identiques. Les causes se trouvent toutes deux au même stade procédural, ayant été gardées à juger depuis la même date.

Il se justifie ainsi de joindre les causes précitées sous le numéro de cause A/2048/2023.

3.             La première question à trancher porte sur la recevabilité des recours devant la chambre de céans. Le recourant soutient que le courrier en cause serait une décision, ce que les autorités intimées contestent. Il convient donc en premier lieu de vérifier s'il existe, en l'espèce, un acte attaquable devant la chambre administrative, plus particulièrement si la volonté querellée figurant dans les courriers du 16 mai 2023 peut être qualifiée de décision au sens de l'art. 4 LPA, ou si, dans le cas contraire, le recourant disposait d’un droit à obtenir un acte attaquable et à se prévaloir d’un droit d’accès au juge.

3.1 La chambre administrative examine d’office sa compétence (art. 11 al. 2 cum art. 1 al. 2 et art. 6 al. 1 let. c LPA ; ATA/660/2022 du 23 juin 2022 consid. 1 et les références citées).

Ladite compétence est définie à l'art. 132 de la LOJ. Elle est, sous réserve des compétences de la chambre constitutionnelle et de la chambre des assurances sociales, l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 LOJ). Selon l'art. 132 al. 2 LOJ, le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e, et 57 LPA. Sont réservées les exceptions prévues par la loi.

3.2 En vertu de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 1 LPA, les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

3.3 En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (ATA/599/2021 du 8 juin 2021 consid. 5b ; ATA/1656/2019 du 12 novembre 2019 consid. 2b). Il ne suffit pas que l'acte querellé ait des effets juridiques, encore faut‑il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu'acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l'administré par la volonté de l'autorité, mais sur la base de et conformément à la loi (ATA/599/2021 précité consid. 5b ; ATA/1656/2019 précité consid. 2c). La décision a pour objet de régler une situation juridique, c'est-à-dire de déterminer les droits et obligations de sujets de droit en tant que tels (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2e éd., 2015 p. 339 ss).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, en droit public, la notion de
« décision » au sens large vise habituellement toute résolution que prend une autorité et qui est destinée à produire un certain effet juridique ou à constater l'existence ou l'inexistence d'un droit ou d'une obligation ; au sens étroit, c'est un acte qui, tout en répondant à cette définition, intervient dans un cas individuel et concret (ATF 135 II 328 consid. 2.1 ; 106 Ia 65 consid. 3 ; 99 Ia 518 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_282/2017 du 4 décembre 2017 consid. 2.1). La notion de décision implique donc un rapport juridique obligatoire et contraignant entre l'autorité et l'administré. De simples déclarations, comme des opinions, des communications, des prises de position, des recommandations et des renseignements n'entrent pas dans la catégorie des décisions, faute de caractère juridique contraignant (arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2016 du 11 septembre 2017 consid. 2.2 ; 8C_220/2011 du 2 mars 2012 consid. 4.1.2). Pour déterminer s'il y a ou non décision, il y a lieu de considérer les caractéristiques matérielles de l'acte. Un acte peut ainsi être qualifié de décision (matérielle), si, par son contenu, il en a le caractère, même s'il n'est pas intitulé comme tel et ne présente pas certains éléments formels typiques d'une décision, telle l'indication des voies de droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_282/2017 précité consid. 2.1 et les références citées).

3.4 Toute décision administrative, au sens de l'art. 4 LPA, doit avoir un fondement de droit public. Il ne peut, en effet, y avoir décision que s'il y a application, au travers de celle-ci, de normes de droit public (ATA/268/2021 du 2 mars 2021 consid. 1b ; ATA/48/2017 du 24 janvier 2017 consid. 3).

Un acte matériel est défini comme un acte qui n’a pas pour objet de produire un effet juridique, même s’il peut en pratique en produire, notamment s’il met en jeu la responsabilité de l’État (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, Vol. I, 3e éd., 2012, 12s ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 52 ; cf. également MGC 2007‑2008/XI 1 A – 10’926). Du point de vue de la mise en œuvre du droit administratif, les contrats de droit privé ne créent pas des droits et obligations de droit administratif et peuvent, pour cette raison, être classés dans la catégorie des actes matériels (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 665).

3.5 À teneur de l'art. 4A LPA, intitulé « Droit à un acte attaquable », toute personne qui a un intérêt digne de protection peut exiger que l'autorité compétente pour des actes fondés sur le droit fédéral, cantonal ou communal et touchant à des droits ou des obligations (al. 1) : s'abstienne d'actes illicites, cesse de les accomplir, ou les révoque (let. a) ; élimine les conséquences d'actes illicites (let. b) ; constate le caractère illicite de tels actes (let. c). L'autorité statue par décision (art. 4A al. 2 LPA). Lorsqu'elle n'est pas désignée, l'autorité compétente est celle dont relève directement l'intervention étatique en question (art. 4A al. 3 LPA).

3.6 Selon les travaux préparatoires relatifs à l'art. 4A LPA, cette disposition est une « reprise presque à l'identique » de l'art. 25a de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021), l'intérêt étant de
« profiter de la jurisprudence sur cette disposition » (MGC 2007-2008/VIII A - 6551). Selon l'art. 25a PA, intitulé « Décision relative à des actes matériels », toute personne qui a un intérêt digne de protection peut exiger que l'autorité compétente pour des actes fondés sur le droit public fédéral et touchant à des droits ou des obligations (al. 1) : s'abstienne d'actes illicites, cesse de les accomplir ou les révoque (let. a) ; élimine les conséquences d'actes illicites (let. b) ; constate l'illicéité de tels actes (let. c). L'autorité statue par décision (art. 25a al. 2 PA).

3.7 À teneur de l'art. 25a al. 1 PA, l'acte matériel doit « [toucher] à des droits ou des obligations » (« Rechte oder Pflichten berühren ») ; cela suppose un rapport juridique de droit administratif au moins latent. Le requérant doit en outre établir un « intérêt digne de protection » à obtenir une décision sur un acte matériel. L'art. 25a PA subordonne ainsi la protection juridique, cumulativement, à un critère relatif à l'acte (« aktbezogenes [Kriterium] ») - c'est-à-dire que l'acte matériel doit toucher (« berühren ») à des droits ou obligations - et à un critère relatif au requérant (« subjektbezogenes Kriterium ») - c'est-à-dire que le requérant a un intérêt digne de protection à obtenir une décision sur un acte matériel. Bien que ces deux critères vont dans le même sens, l'art. 25a PA les distingue clairement, suivant la distinction traditionnelle entre l'acte attaquable (« Anfechtungsobjekt », art. 44 PA) et la qualité pour recourir (« Beschwerdebefugnis », art. 48 PA) pour les actes juridiques (ATF 144 II 233 consid. 7.1 = JdT 2019 I p. 58, 62 ; ATF 140 II 315 consid. 4.1).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'art. 25a al. 1 PA doit conférer aux personnes concernées un droit à une procédure administrative subséquente et indépendante (ATF 144 II 233 consid. 3 = JdT 2019 I p. 58, 59 ; ATF 140 I 315 consid. 2.1). Cependant, la prétention fondée sur l'art. 25a PA n'existe pas si la législation a exclu (« bewusst ausgeschlossen hat ») la protection juridique contre l'acte matériel ; cette prétention est en outre subsidiaire en ce sens qu'elle cède le pas à d'autres voies si une protection juridique suffisante est assurée d'une autre manière (ATF 140 II 315 consid. 3.1 = RDAF 2015 I p. 300, 302 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_601/2016 du 15 juin 2018 consid. 6.1 et 6.2 non publiés dans l'ATF 144 II 233).

Le droit à l'acte attaquable suppose ainsi que le requérant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, l'intérêt invoqué qui peut être un intérêt de pur fait devant se trouver, avec l'objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF 140 II 315 consid. 4.2). Une véritable atteinte à des droits fondamentaux ou à des positions juridiques n'est à cet égard pas nécessaire, mais il faut tout de même que des droits et obligations de la personne soient touchés avec une certaine intensité, ou un certain degré de gravité. Il faut en outre que la situation puisse être imputable à l'acte matériel en cause et que la relation de cause à effet ne soit pas interrompue par des événements ou facteurs tiers (ATF 144 II 233 consid. 7).

L'art. 4A LPA vise à transposer, en droit genevois, la garantie de l'accès au juge ancrée à l'art. 29a Cst. (arrêt du Tribunal fédéral 2C_709/2020 du 18 juin 2021 consid. 4.1 ; MGC 2007-2008/VIII A - 6520). Lesdits travaux préparatoires précisent que le droit d'accès au juge peut être soumis à des conditions de recevabilité telles que la qualité pour recourir ou la définition de l'objet attaquable (MGC 2007-2008/VIII A - 6527 s). Sur cet élément-ci, lesdits travaux font référence non seulement aux décisions (MGC 2007-2008/VIII A - 6529 s), mais également aux actes matériels (MGC 2007-2008/VIII A - 6530 ss), pour conclure qu'il ressort de la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la doctrine que les cantons sont tenus d'ouvrir la possibilité de demander à l'autorité compétente une décision attaquable et de prévoir une voie de droit analogue à celle de l'art. 25a PA (MGC 2007-2008/VIII A - 6535).

3.8 La garantie de l'art. 29a Cst., qui prévoit que toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire, ne s'oppose pas à ce qu'une voie de droit soit assortie des conditions de recevabilité usuelles (ATF 143 I 344
consid. 8.2). Ainsi, pour pouvoir invoquer l'art. 29a Cst., le justiciable doit se trouver dans une situation de contestation juridique, c'est-à-dire qu'il existe un litige portant sur un différend juridique qui met en jeu des intérêts individuels dignes de protection. En d'autres termes, l'art. 29a Cst. ne confère pas à quiconque le droit d'obtenir qu'un juge examine la légalité de toute action de l'État, indépendamment des règles procédurales applicables et ne garantit ainsi pas la protection de l'action populaire. Il est en particulier admissible de faire dépendre le caractère justiciable d'une cause d'un intérêt actuel et pratique (ATF 144 II 233 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_651/2019 du 21 janvier 2020 consid. 5.1.1 et les références citées). L'art. 29a Cst. exige toutefois que la protection juridique soit accessible au moins lorsqu'un acte matériel ou une mesure administrative interne touche des positions juridiques individuelles dignes de protection, ce qui relève du jugement à porter sur le fond (ATF 143 I 336 consid. 4.2).

La garantie de l'accès au juge selon l'art. 29a Cst. ne s'applique pas aux actes internes de l'administration qui n'ont pas le caractère d'une décision (ATF 143 I 336 consid. 4.2; 136 I 323 consid. 4.4; arrêt 8D_8/2020 du 6 juillet 2021 consid. 5.2). Le droit d'accès au juge tel que prévu par ces dispositions ne vise pas à créer de nouveaux droits matériels sans fondement légal, mais à accorder une protection procédurale à des droits reconnus (ACEDH H. c. Belgique du 30 novembre 1987, série A no 127-B, § 41 ss cité dans l'exposé des motifs du Conseil d’État à l'appui du PL 10'253, p. 25, MGC [en ligne], séance 42 du 22 mai 2008 à 17h00 ; ATA/497/2018 du 22 mai 2018 consid 3c ; ATA/225/2014 du 8 avril 2014 consid. 8 ; ATA/164/2011 du 15 mars 2011 consid. 5 et les références citées).

3.9 Selon l'art. 122 de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), le Conseil d'État fixe la composition, les droits et devoirs, ainsi que les caractéristiques de chaque catégorie des membres du personnel enseignant par voie réglementaire.

Concernant le statut des remplaçants, les dispositions y relatives se trouvent au titre X du règlement fixant le statut des membres du corps enseignant primaire, secondaire et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles du 12 juin 2002 
(RStCE - B 5 10.04). L'art. 151 de ce règlement définit comme remplaçant ou remplaçante la personne engagée ponctuellement pour remplacer une maîtresse ou un maître absent pendant moins d'une année scolaire. L'engagement d'un remplaçant est du ressort de la direction générale concernée qui respecte les directives du département précisant en particulier les conditions d'engagement, titre et taux d'activité (art. 152 RStCE).

Quant à la nature de l'engagement, selon l'art. 153 RStCE, il s'agit d'un contrat de droit privé conclu oralement entre l'autorité d'engagement et le remplaçant pour une période inférieure à trois mois et conclu par écrit, soit par lettre d'engagement, pour une période supérieure à trois mois. Selon l'art. 153 al. 3 RStCE, les dispositions du titre X de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) (contrat de travail) s'appliquent dans la mesure où le règlement n'y déroge pas.

Selon l'art. 157 du RStCE, les rapports de service cessent dès le moment où le contrat arrive à échéance. Par ailleurs, le contrat est révocable en tout temps par les deux parties avec effet immédiat conformément à l'art. 136 al. 1 LIP.

La juridiction compétente pour les litiges éventuels pouvant naître entre la remplaçante ou le remplaçant et le département sont de la compétence des tribunaux des prud'hommes (art. 158 RStCE).

3.10 Dans l’ATA/1259/2020 du 15 décembre 2020, la chambre administrative a déjà examiné la question de savoir si un courrier par lequel le DIP informait un remplaçant qu’il ne ferait « plus appel à ses services pour des remplacements de courte ou longue durée » revêtait la qualité de décision au sens de l'art. 4 LPA. Elle a d’abord relevé que la législation topique ne contenait aucune prescription régissant les modalités de recrutement des remplaçants, ni disposition relative à la tenue des listes des remplaçants, énumérant les personnes susceptibles d'être appelées à effectuer ces remplacements. Bien qu'ayant été appelé à travailler comme remplaçant depuis 2013 à différentes périodes, le recourant ne pouvait invoquer aucun droit à continuer d'être engagé ; en particulier, aucun droit acquis en cette matière n'était possible, s'agissant d'une série de contrats de droit privé signés ponctuellement entre le DIP et le recourant pour différents remplacements dans différentes écoles. Par conséquent, le recourant ne pouvait pas se prévaloir d'une décision au sens de l'art. 4 LPA. Le fait de l'écarter des listes des personnes susceptibles d'être appelées pour remplacer des enseignants n'avait pas modifié ou annulé des droits, du moment que le recourant n'en avait aucun basé sur une loi ou aucun droit acquis à être appelé pour ces remplacements. Le même raisonnement était applicable à l'art. 4A LPA, s'agissant d'un acte qui n'était pas fondé sur le droit fédéral, cantonal ou communal et ne touchait pas à des droits du recourant.

Cet arrêt a été confirmé par le Tribunal fédéral (8C_128/2021) le 10 septembre 2021. Celui-ci a retenu en particulier qu’en dehors des périodes couvertes par un contrat de travail ponctuel au sens de l’art. 153 RStCE, les personnes intéressées à conclure de tels contrats n’étaient pas titulaires de droits et d'obligations envers l’État et ne disposaient d’aucun droit à être engagées, la relation contractuelle étant soumise au droit privé et donc à la liberté contractuelle. Dans la mesure où le recourant n’avait aucun droit à être engagé ponctuellement par l'intimé pour l'un ou l'autre remplacement dans l'école primaire, il n’était pas arbitraire de considérer que la manifestation de la volonté de l'intimé de ne plus faire appel à ses services pour de tels remplacements ne créait ni ne modifiait ni n'annulait des droits ou des obligations, ni ne constatait l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations, et qu'elle ne constituait donc pas une décision au sens de l'art. 4 LPA. Le fait que la volonté exprimée avait entraîné la suppression du nom du recourant de la liste des personnes intéressées à conclure des contrats de remplacement ne l’atteignait pas davantage dans sa situation juridique. En effet, la liste en cause et les conséquences qui découlaient d'une intégration à celle-ci ne faisaient l'objet d'aucune réglementation particulière. On ne pouvait donc retenir qu'il existait, sous conditions, un droit d'y figurer, ni d'ailleurs que son intégration garantirait tôt ou tard un engagement. Il ne ressortait pas non plus des constatations de l'arrêt attaqué que seule une inscription sur la liste permettait un engagement ponctuel au sens de l'art. 153 RStCE (consid. 4.3.2).

Dans un récent ATA/478/2024 du 16 avril 2024, qui concernait un cas de « retrait d’habilitation » au remplacement, la chambre administrative a estimé que la question de la recevabilité du recours pouvait rester indécise. Elle a retenu que courrier litigieux n’était pas désigné comme étant une décision et ne comportait aucune indication des voies de droit. Il visait à « formaliser la situation » du recourant en confirmant qu’il ne lui sera plus confié de remplacements. Or, ainsi que l’avait retenu la chambre de céans dans un cas similaire, le recourant n’avait aucun droit à être engagé ponctuellement par l'intimé pour l'un ou l'autre remplacement dans un établissement scolaire, si bien que la manifestation de volonté de l’intimé de ne plus faire appel à ses services pour de tels remplacements ne crée ni ne modifie ni n’annule des droits ou obligations. Certes, contrairement à la situation qui prévalait dans l’arrêt du Tribunal fédéral précité, le courrier litigieux indiquait expressément que « l’habilitation » du recourant était retirée et que son autorisation de contracter avec les établissements scolaires était annulée. Ainsi, par sa formulation, et quand bien même le RStCE ne prévoyait aucune disposition sur l’autorisation de contracter avec des établissements scolaires, l’intimé laissait entendre que le recourant était au bénéfice d’une autorisation et que celle-ci lui avait été retirée. Or, ce retrait impliquait de facto son exclusion du cercle des personnes pouvant conclure un contrat avec l’autorité d’engagement. Si, certes, la règlementation applicable ne prévoyait pas que seule une inscription sur la liste permet un engagement ponctuel au sens de l'art. 153 RStCE, le courrier litigieux indiquait que l’annulation de son autorisation avait pour effet qu’il ne lui était plus confié de remplacements. Par ailleurs, le recours devait être rejeté au fond, les obligations légales imposant à l’autorité d’engagement de prendre des mesures adéquates pour assurer une protection particulière de l’intégrité physique et psychique des élèves et, dans le cas particulier, l’autorité disposait en effet d’un très large pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité d’engager un remplaçant correspondant véritablement aux besoins du service.

3.11 En l'espèce, le litige concerne la manifestation de volonté des autorités intimées, figurant dans les courriers de résiliation avec effet immédiat des contrats de droit privés conclus avec le recourant du 16 mai 2023, de ne plus « le convoquer pour effectuer des remplacements ». Le recourant estime que les courriers précités constituent des décisions sujettes à recours. La manifestation de volonté figurant dans les courriers précités porterait gravement atteinte à son droit à la sphère privée.

En premier lieu, il sera souligné que pour tout litige concernant les contrats signés par le recourant avec le DIP et B______ doit être soumis aux juridictions civiles, les contrats précités étant de droit privé. Tous les arguments en lien avec la manière dont le contrat a été résilié et les motifs de résiliation sont donc irrecevables. L’objet du litige est ainsi limité à la phrase « Vous ne serez par ailleurs pas convoqué pour des remplacements », figurant dans les deux courriers de licenciement.

Il n’existe pas de relation administrative liant le recourant aux deux autorités intimées. Le recourant n’argumente à juste titre pas qu’il ferait l’objet d’une relation relevant de la fonction publique, ni qu’il devrait être traité comme un agent public. Il n’est effectivement pas contesté que le recourant a été engagé en qualité de remplaçant sous contrat de droit privé. Comme l'admet par ailleurs ce dernier, le RStCE ne contient aucune prescription régissant les modalités de recrutement des remplaçants. Par ailleurs, on ne trouve aucune disposition se référant à la tenue des listes des remplaçants par le D______, énumérant les personnes susceptibles d'être appelées à effectuer ces remplacements. La loi cantonale a délibérément soumis la relation entre le DIP et ses services et les remplaçants au droit privé, de sorte que sa situation ne peut être comparée à celle d'un fonctionnaire. Hors des périodes couvertes par un contrat de travail ponctuel au sens de l’art. 153 RstCE, les personnes intéressées à conclure de tels contrats ne sont pas titulaires de droits et obligations envers l’État. Même s’ils figurent dans le « carnet d’adresse » des remplaçants, ils ne disposent d’aucun droit à être engagés comme remplaçant, la relation contractuelle étant soumise au droit privé.

Dans ces conditions, la manifestation de volonté des intimés de ne plus faire appel au recourant pour de tels remplacements ne crée, ne modifie ni n’annule de droits ou d’obligations, ni ne constate l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits ou d’obligations et ne constitue pas une décision au sens de l’art. 4 LPA. Le fait que la volonté exprimée par souci de transparence par les autorités intimées, aurait entraîné la suppression du nom du recourant du cercle des personnes intéressées à conclure des contrats de remplacements ne l’atteint pas dans sa situation juridique, puisqu’il n’existe aucun droit à être appelé comme remplaçant, même en en remplissant les conditions. Le fait de figurer sur la « liste des remplaçants » ne garantit pas non plus un engagement ponctuel. On ne peut retenir qu’il existe, sous condition, un droit d’y figurer. Il ne ressort pas non plus des explications de l’autorité intimée, qui n’a pas été contredite sur ce point par le recourant, que seule une inscription sur cette liste permettrait la conclusion d’un engagement ponctuel au sens de l’art. 153 RStCE. Force est de constater que le refus du DIP de continuer à engager le recourant comme remplaçant est une action matérielle de l'État et non pas une décision sujette à recours devant la chambre de céans. Le recourant ne peut donc pas se prévaloir d'une décision au sens de l'art. 4 LPA.

Pour le surplus, il n’existe pas d’autre relation administrative particulière qui lierait le recourant à l’autorité intimée. Celui-ci n’est en particulier ni bénéficiaire de prestations des autorités intimées, ni dans un rapport autre que celui relevant de ses contrats ponctuels effectués auprès des deux autorités intimées, contrats relevant en l’occurrence du droit privé.

En ce sens, ce cas diffère de l’ATA/478/2024 précité. Ce dernier ne conduit pas à apporter un regard différent sur le cas d’espèce, puisqu’il se penchait sur un « retrait d’habilitation et d’autorisation » à pouvoir exercer comme remplaçant. En effet, contrairement au cas d’espèce, la formulation du courrier querellé permettait de se demander s’il n’emportait pas les effets d’une décision, mais la question de la recevabilité du recours pouvait rester indécise, celui-ci devant de toute manière être rejeté sur le fond. Il apparait en outre que dans tous les deux cas, la chambre administrative est arrivée à la conclusion que les remplaçants ne bénéficiaient d’aucun droit à pouvoir être appelés ou engagés comme tels.

Dès lors, le recourant ne peut pas se prévaloir d'un droit à une décision au sens de l'art. 4 LPA. Le fait que l’intimé ait décidé de ne plus faire appel à ses services n'a pas modifié ou annulé les droits de ce dernier, du moment qu’il n'avait aucun droit basé sur un rapport juridique de droit administratif à recevoir une telle décision. Le même raisonnement est applicable à l'art. 4A LPA, s'agissant d'un acte qui n'est pas fondé sur le droit fédéral, cantonal ou communal et ne touchant pas à des droits du recourant. À cet égard, si le recourant mentionne l'art. 4A al. 2 LPA, la volonté de ne plus faire appel à ses services a été clairement exprimée par l’autorité, et on ne voit pas quelle autre « décision » le recourant entendrait provoquer par l’application de cette disposition.

3.12 Le recourant semble vouloir se prévaloir de la théorie des deux niveaux, estimant avoir « un droit à l’embauche », soit un droit à figurer dans le carnet d’adresses des remplaçants.

3.12.1 Dans le contexte de la conclusion d'un contrat par une collectivité publique, la doctrine a élaboré une théorie appelée « théorie des deux niveaux » ou « théorie des actes détachables ». Cette théorie considère que l'on doit distinguer des phases distinctes, la première étant la décision de l'administration (unilatérale et fondée sur le droit public) de conclure le contrat et la deuxième étant le contrat lui-même, en principe rattaché au droit privé (Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON/Héloïse ROSELLO, Les influences du droit privé du travail sur le droit de la fonction publique, 2016, p. 160). Selon certains auteurs la théorie des deux niveaux permet de soumettre des actes relatifs au droit privé (et donc à la justice civile) à la compétence du juge administratif et autoriserait donc un contrôle juridictionnel en cas de refus d'embauche au sein du contentieux administratif. Dans ce cadre, le refus de conclure une convention avec un candidat pourrait être considéré comme une décision négative, et ce, que la future relation juridique soit ou non soumise au droit public (Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON/Héloïse ROSELLO, op. cit., p. 160).

Dans deux arrêts, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) est arrivé à la conclusion que sur le plan fédéral, tout candidat évincé lors du processus de recrutement a qualité pour recourir alors même que la loi sur le personnel de la Confédération du 24 mars 2000 (LPers - RS 172.220.1) ne règle pas cette question. Dans l'ATAF 2010/53 du 12 octobre 2010, le TAF a reconnu sa compétence pour examiner les décisions du Conseil fédéral en matière de rapports de travail du personnel de la Confédération, de même que dans l'ATAF A-3991/2010 du 18 juin 2011 où il était question d'un refus d'embauche, plus précisément d'une non proposition de promotion. Les auteurs concluent à ce que la jurisprudence du TAF ne peut avoir d'un point de vue formel un effet direct sur les cantons car elle concerne une loi fédérale (la LPers) et non une loi cantonale et qu'il ne s'agit pas non plus de la jurisprudence du Tribunal fédéral (Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON/Héloïse ROSELLO, op. cit., p. 163). Le Tribunal fédéral a récemment confirmé qu'il n'avait pas encore tranché la question de savoir si cette théorie devait être reçue comme telle en droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1198/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5).

Or, dans le cas d'espèce, il ne s'agit pas d'un candidat à la fonction publique ni fédérale, ni cantonale, mais un candidat à une fonction de remplaçant que la loi cantonale a délibérément soumis au droit privé, de sorte que sa situation ne peut être comparée à celle d'un fonctionnaire. Cette jurisprudence ne lui est dès lors pas applicable.

3.13 Même sous l’angle de l’art. 29a Cst., le recourant ne peut pas se prévaloir d'être atteint au moins indirectement dans ses droits propres. On ne peut pas invoquer la garantie de l'accès au juge par-devant la chambre administrative sans que la cause implique des droits ou des obligations individuelles du particulier découlant d’un rapport de droit administratif, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Enfin, l’argumentation du recourant relative à une atteinte à ses données personnelles du fait de cette manifestation de volonté tombe également à faux, dès lors qu’il existe des normes tant fédérales que cantonales réglementant l’usage des données par un employeur privé ou public, normes prévoyant notamment de la rectification ou de l’effacement de données traitées illicitement, selon une procédure formelle, non utilisée par le recourant dans le cas d’espèce. Il sera à cet égard souligné qu’un traitement de données auquel le titulaire consent est licite. En outre, il sera rappelé que l’action idoine pour obtenir réparation d’un acte illicite dont le recourant s’estimerait victime de la part de l’autorité intimée est celle prévue par la loi sur la responsabilité de l’État et des communes (LREC - A 2 40), qui est cependant du ressort du Tribunal civil de première instance (art. 7 LREC) et non de la chambre administrative. Le recourant, qui considère que ses droits fondamentaux ont été violés par une autorité étatique, n’est ainsi pas privé du droit d’accès à un juge.

3.14 Compte tenu de ce qui précède, il ne se justifie pas d'ordonner la production des pièces requises ainsi que l’audition des parties et de témoins, lesquelles n’auraient une utilité éventuelle qu’en cas d’examen au fond du litige. À cela s'ajoute que le recourant a été en mesure de s'exprimer par écrit tant durant la procédure non contentieuse que devant la chambre de céans et de faire valoir son point de vue et ses arguments à plusieurs reprises.

Ainsi, en l'absence de décision au sens de l'art. 4 LPA ou de droit à obtenir une décision, la chambre de céans doit déclarer les recours irrecevables.

4.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

prononce la jonction des causes A/2048/2023 et A/2049/2023 sous le numéro A/2048/2023 ;

déclare irrecevables les recours interjetés le 15 juin 2023 par A______ contre les courriers du département de l'instruction publique, de la culture et du sport et de B______ du 16 mai 2023 ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain JORDAN, avocat du recourant, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la culture et du sport et à B______.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Valérie MONTANI, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Claudio MASCOTTO, Michèle PERNET, juges.

 

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :