Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/431/2024 du 26.03.2024 sur JTAPI/443/2023 ( PE ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/2981/2022-PE ATA/431/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 26 mars 2024 1ère section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Me Nicola MEIER, avocat
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 avril 2023 (JTAPI/443/2023)
A. a. A______, né le ______1976 et ressortissant de Guinée, est arrivé à Genève le 16 avril 2005 est a épousé à C______, le même jour, B______, citoyenne suisse.
b. Le 13 mai 2005, l'office cantonal de la population, devenu l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a délivré à A______ une autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial.
c. Le 22 avril 2010, A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement.
d. Leurs enfants, D______ et E______, sont nés à Genève respectivement le ______ 2011 et le ______ 2015.
e. Selon un rapport d'arrestation de la police genevoise du 13 février 2018, lors d'une perquisition du domicile du couple A______ et B______ sis ______ avenue de F______ à C______, un ou plusieurs individus avaient fui par le balcon, la porte-fenêtre étant ouverte. Des traces de présence étaient visibles (couverture et oreiller sur le canapé). L'appartement ne semblait pas habité par une famille avec des enfants, aucun jouet ni aucun vêtement d'enfant n'ayant été retrouvé.
Lors de son audition du même jour, A______ a déclaré avoir acquis en 2009 ou 2010, avec sa femme, un appartement en France voisine, à G______. Il avait conservé son appartement à C______ car il avait besoin d'une adresse en vue de sa demande de naturalisation suisse et qu'en qualité d'indépendant, avec permis C, il avait besoin d'un domicile en Suisse. Il ne sous-louait pas l'appartement mais des membres de sa famille y vivaient.
B______ a déclaré qu'elle habitait à G______ depuis environ deux ans, sans avoir annoncé son départ de Suisse. Elle et son mari avaient agi de la sorte, entre autres, en raison de la demande de naturalisation en cours de son époux et de diverses démarches administratives. Le couple possédait un bien immobilier en France depuis quelques années et son époux dormait à de rares occasions dans l'appartement à C______.
f. Par formulaire du 26 janvier 2019, B______ a annoncé son départ définitif de Suisse avec ses enfants à destination de G______ pour le 20 février 2019.
g. Selon un rapport d'enquête de l'OCPM du 15 mai 2019, malgré divers passages à l'appartement situé à C______, l'enquêteur de l'OCPM n'avait atteint personne. Le nom de A______ figurait sur une boîte aux lettres ainsi que sur la porte palière d'un appartement au 1er étage. Quand il avait la sonnette, l'appartement avait résonné comme s'il était vide. D'après les renseignements recueillis auprès du voisinage, A______ n'était vu que de manière sporadique pour relever sa boîte aux lettres.
h. Le 23 juillet 2019, A______ a déclaré que lui et son épouse avaient décidé qu'elle déménagerait provisoirement en France voisine avec les enfants. Il s'y rendait pour rendre visite à sa famille, mais son centre de vie se trouvait toujours en Suisse, où il résidait et travaillait à plein temps. Son domicile à C______ était resté inchangé, raison pour laquelle il continuait à s'acquitter du loyer.
i. Selon un nouveau rapport d'enquête de l'OCPM du 2 octobre 2020, il n'y avait toujours aucune trace d'une présence de A______ à l'appartement sis à C______.
j. Par arrêt du 12 janvier 2021, la Chambre d'appel et de révision du canton de Genève a condamné A______ à une peine privative de liberté de douze mois avec sursis pour blanchiment d'argent.
k. Par courrier du 26 avril 2021, l'OCPM a informé A______ de son intention de prononcer la caducité de son autorisation d'établissement et d'enregistrer un départ de Suisse six mois après qu'il avait quitté le pays, soit au 13 août 2018. Un délai de 30 jours lui était imparti pour faire valoir ses observations, ce qu'il a fait le 27 juin 2022. Son épouse et lui avaient mis en vente l'appartement de G______. Une fois vendu, B______ et les enfants se réinstalleraient à C______.
l. Par décision du 15 juillet 2022, l'OCPM a constaté la caducité de l'autorisation d'établissement de A______. Une fois la décision entrée en force, son départ serait enregistré six mois après qu'il avait quitté le pays, soit au 13 août 2018.
A______ résidait en France. Il avait quitté la Suisse à tout le moins depuis le 13 février 2018. Selon le rapport de police et son audition du 13 février 2018, il avait acquis, avec sa femme, en 2009 ou 2010, un appartement en France voisine. Il avait conservé son appartement à C______, car il avait besoin d'une adresse en vue de sa demande de naturalisation suisse et en raison du fait qu'en tant qu'indépendant, avec permis C, il devait être domicilié en Suisse. Son épouse avait déclaré qu'elle résidait en France voisine depuis 2016 et que son époux dormait à de rares occasions au ______ avenue de F______, mais qu'elle ignorait qui y logeait.
L'épouse de A______ et les enfants avaient quitté définitivement Genève le 20 février 2019, à destination de G______. Ils n'avaient pas annoncé de retour à Genève depuis. Leur départ avait donc eu lieu trois ans auparavant et n'était pas provisoire.
A______ avait continué de s'acquitter du loyer mensuel de son appartement à Genève, ce qui ne constituait pas une preuve de résidence à Genève. Selon les pièces du dossier, le couple n'était pas séparé. Par conséquent, il apparaissait clairement que le centre des intérêts de A______ se trouvait en France voisine, là où résidaient son épouse et ses enfants.
B. a. Par acte du 14 septembre 2022, A______ a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).
L'OCPM avait constaté les faits de manière inexacte. Si son épouse et ses enfants vivaient en France voisine, cela ne permettait pas de retenir que sa résidence et son centre d'intérêts y avaient également été déplacés, ce d'autant que le centre d'intérêts de la famille était toujours à Genève. Sa femme travaillait en effet à C______ en tant qu'enseignante dans le degré primaire et que leurs enfants y étaient scolarisés et y avaient l'ensemble de leurs loisirs. Ils se trouvaient donc régulièrement sur le territoire genevois.
A______ exerçait son activité lucrative à Genève et résidait la majorité de l'année dans l'appartement de C______, dont il acquittait le loyer. L'ensemble de ses assurances, impôts et prévoyances professionnelles étaient à Genève. Il n'avait aucun projet en France. Il séjournait de manière occasionnelle dans l'appartement en France voisine afin d'être aux côtés de sa famille, mais ce faisant, il n'avait jamais quitté le territoire durant six mois consécutifs.
L'OCPM estimait que ses déclarations sur son lieu de résidence ne constituaient pas des éléments probants, alors qu'il considérait comme telles des déclarations faites il y a plus de quatre ans lors de son audition par les services de police. Le raisonnement de l'autorité était donc contradictoire.
En tout état, même en admettant qu'il avait déplacé son domicile en France, le maintien de ses activités lucratives dépendante et indépendante ainsi que de son logement en Suisse ne pouvaient être qualifiés de simple séjour d'affaires. En 2014, il avait fondé une raison individuelle et exerçait notamment en qualité de chauffeur de taxi indépendant. En cette qualité, il avait contracté une assurance-accident à Genève. Il exerçait parallèlement une activité de commercial et négociant auprès de la société H______ SA (ci-après : H______). Il ne comptait pas cesser ces activités lucratives et n'en exerçait aucune en France.
Il avait en outre été diagnostiqué diabétique de type 2 en janvier 2022. Il devait suivre un traitement médical quotidien. Son suivi médical était effectué à Genève, tous les trois mois. Enfin, les époux A______ et B______ ayant décidé de vendre l'appartement en France voisine, son épouse et leurs enfants reviendraient vivre à Genève.
b. Par jugement du 25 avril 2023, le TAPI a rejeté le recours.
L'autorité intimée ne pouvait que constater que la validité de l'autorisation d'établissement de A______ avait pris fin de jure six mois après son départ de Suisse pour la France, soit au plus tard en février 2018. C'était ainsi à juste titre qu’elle avait constaté la caducité de son autorisation, A______ ayant selon toute vraisemblance déplacé son centre de vie vers la France et ne maintenant une relation avec Genève qu'au même titre qu'un frontalier.
Les nombreuses pièces que A______ avait versées à la procédure n'étaient pas aptes à démontrer qu’il séjournait effectivement à Genève, et en particulier dans l'appartement à C______. Alors qu’il prétendait y avoir vécu et y vivre encore, il n’avait produit aucun document ou attestation de tiers susceptible de rendre vraisemblable son séjour effectif et quotidien dans l'appartement de C______. Au contraire, le rapport d'arrestation de la police genevoise du 13 février 2018 exposait que lors de sa perquisition, cet appartement ne semblait pas habité par une famille avec des enfants, aucun jouet ni aucun vêtement d'enfant n'ayant été retrouvé. Par ailleurs, A______ avait admis avoir conservé son appartement à C______ à des fins administratives. De surcroît, son épouse avait indiqué qu'elle vivait en France avec leurs enfants depuis deux ans, soit depuis 2016 et que le recourant dormait à C______ à de rares occasions.
Au surplus, le fait que son épouse travaillait à Genève et que ses enfants y étaient scolarisés et y déployaient leurs loisirs, malgré leur domiciliation en France, ne conduisait pas à un autre résultat. En effet, conformément à la jurisprudence, de tels séjours en Suisse ne sauraient être considérés autrement que comme des séjours temporaires, dans le cadre desquels, une fois l'activité (scolaire, professionnelle ou de loisir) terminée, ils regagnaient le domicile familial en France, où la famille disposait selon toute vraisemblance de son cercle de vie et d'intérêts.
C. a. A______ a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) le 26 mai 2023 contre ce jugement, concluant principalement à son annulation, de même qu'à celle de la décision de l'OCPM du 28 mars 2022.
Le jugement violait les art. 61 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 79 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Il ne faisait pas que mentionner une adresse genevoise sur diverses factures ou attestations, mais s'acquittait du loyer de son appartement à C______, y dormait à intervalles réguliers et y avait domicilié son entreprise. Son épouse travaillait à C______, leurs enfants y étaient scolarisés et leurs loisirs étaient en Suisse. Aussi, le recourant ne passait pas l'essentiel de son temps hors de Suisse et n'y avait pas transféré le centre de ses intérêts. En tout état, il gardait manifestement la présence physique nécessaire au maintien de son autorisation d'établissement.
b. Le 30 juin 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.
c. Le 17 août 2023, le recourant a indiqué ne pas souhaiter répliquer.
d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
e. Le détail des pièces et de l’argumentation des parties sera repris, ci-après, dans la mesure utile.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le litige porte sur le bien-fondé de l'extinction de l'autorisation d'établissement du recourant constatée par l’OCPM à compter du 13 août 2018.
2.1 Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
2.2 La constatation des faits, en procédure administrative, est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves, qui signifie que le juge forme librement sa conviction, en analysant la force probante des preuves administrées, dont ni le genre, ni le nombre n'est déterminant, mais uniquement leur force de persuasion (art. 20 al. 1 2e phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; ATA/769/2015 du 28 juillet 2015 consid. 6b).
2.3 Selon l’art. 61 al. 1 let. a LEI, l’autorisation prend fin lorsque l’étranger déclare son départ de Suisse. Si un étranger quitte la Suisse sans déclarer son départ, l’autorisation de courte durée prend automatiquement fin après trois mois, l’autorisation de séjour ou d’établissement après six mois. Sur demande, l’autorisation d’établissement peut être maintenue pendant quatre ans (art. 61 al. 2 LEI).
Selon la jurisprudence, l'autorisation d'établissement au sens de l'art. 34 LEI s'inscrit dans la durée, et confère à l'étranger le statut le plus favorable en lui garantissant un droit de résidence stable. Le maintien d'une autorisation de résidence de droit des étrangers présuppose néanmoins une présence physique minimale sur le territoire suisse, pour la définition de laquelle le législateur a sciemment renoncé au renvoi à des notions telles que le centre des intérêts vitaux ou même le domicile (ATF 145 II 322 consid. 2.2).
Les délais prévus à l’art. 61 al. 2 LEI, ne sont pas interrompus en cas de séjour temporaire en Suisse à des fins de visite, de tourisme ou d’affaires (art. 79 al. 1 OASA).
2.4 L’extinction de l’autorisation de séjour au sens de l’art. 61 LEI s’opère de jure (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-139/2016 du 11 avril 2017 consid. 5.1), quelles que soient les causes de l’éloignement et les motifs de l’intéressé (ATF 120 Ib 369 consid. 2c). Peu importe ainsi si le séjour à l'étranger était volontaire ou non (arrêt du Tribunal fédéral 2C_691/2017 du 18 janvier 2018 consid. 3.1). Sous cet angle, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à l'art. 96 LEI, à un examen de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_19/2017 du 21 septembre 2017 consid. 5).
Si l'étranger se constitue un domicile à l'étranger et y rentre les week-ends, mais qu'il séjourne en Suisse toute la semaine pour y exercer une activité indépendante, il y maintient la présence physique nécessaire au maintien de son autorisation d'établissement (ATF 145 II 322 consid. 2.5).
Une autorisation ne peut subsister lorsque l'étranger passe l'essentiel de son temps hors de Suisse, voire y transfère son domicile ou le centre de ses intérêts, sans jamais toutefois y rester consécutivement plus du délai légal, revenant régulièrement en Suisse pour une période relativement brève, même s'il garde un appartement en Suisse. Dans ces conditions, il faut considérer que le délai légal n'est pas interrompu lorsque l'étranger revient en Suisse avant l'échéance de ce délai non pas durablement, mais uniquement pour des séjours d'affaires ou de visite (ATF 120 Ib 369 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_853/2010 du 22 mars 2011 et 2C_581/2008 du 6 novembre 2008 consid. 4.1). Un étranger titulaire d'une autorisation d'établissement perd cette dernière s'il s'établit en France voisine et y vit comme un frontalier (ATA/1793/2019 du 10 décembre 2019 et les références citées).
2.5 En l'espèce, la question est de savoir si le recourant était réellement domicilié à Genève à partir de février 2018, puisque le litige porte sur la décision de l'OCPM de constater la caducité de son permis en raison de son départ de Suisse six mois à compter de cette date. Aussi, l'argumentation du recourant relative à sa situation actuelle ou les pièces produites postérieures à cette période ne sont pas pertinentes pour l'issue du litige.
Si le recourant n'a apporté aucune nouvelle offre de preuve au stade de la présente procédure, il convient de retenir que les pièces qu'il a versées devant le TAPI, à savoir le contrat de bail portant sur la location de l'appartement à C______, un contrat de leasing du 25 juillet 2018, une attestation d'affiliation du 27 juin 2022 de l'office cantonal des assurances sociales, sa carte de chauffeur voiture de transport avec chauffeur du 18 mai 2021, ses décomptes de primes d'assurances-accident de juin à août 2022, une attestation médicale du 27 juin 2022 de la Dre I______, son avis de taxation pour l'année 2020 daté du 27 avril 2022, son attestation d'emploi du 24 juin 2022 auprès de la société H______, ainsi que les attestations de scolarité et de loisirs de ses enfants à Genève, ne sont pas aptes à démontrer qu’il séjournait effectivement à Genève, et en particulier dans ledit appartement. Plus particulièrement, le fait d'être titulaire d'un contrat de bail ne signifie pas encore que le recourant a effectivement résidé dans le logement de C______ depuis l'acquisition du logement familial en France voisine. À cet égard, et alors qu’il prétend y avoir vécu et y vivre encore, le recourant n’a produit aucun document ou attestation de tiers susceptible de rendre vraisemblable son séjour effectif et quotidien dans l'appartement de C______.
La mention d’une adresse genevoise sur diverses factures ou attestations, le fait de consulter des médecins genevois, de souscrire une assurance-accident, d'y exercer une activité lucrative à titre dépendant ou indépendant, de payer des impôts en Suisse ou encore que ses enfants soient scolarisés à Genève et y déploient leurs activités de loisirs, ne signifient pas encore que le domicile effectif et le centre d’intérêts du recourant se trouvent à Genève. En tout état, l’adresse genevoise a été fournie par le recourant à ses divers cocontractants, sans qu’ils n’aient en aucune manière à en vérifier l’effectivité. S'il n'est pas contesté que le recourant se soit toujours acquitté de son loyer de l'appartement à C______, qu'il y ait domicilié son entreprise ou qu'il y dormît à « intervalles réguliers » comme il le reconnait lui‑même, n'y change rien. Cela signifie au contraire que l'adresse à C______ est toujours utilisée par le recourant après que les autres membres de sa famille se sont installés en France-voisine dans l'appartement qu'ils ont acquis en 2009-2010, à des fins administratives. Le recourant a admis devant la police avoir conservé son appartement à C______ uniquement parce qu'il avait besoin d'une adresse en Suisse pour la domiciliation de sa société et aux fins de sa naturalisation suisse. De surcroît, son épouse a déclaré qu'elle vivait en France avec leurs enfants depuis deux ans, soit depuis 2016 et que le recourant dormait à C______ à de rares occasions. Contrairement à ce que le recourant soutient, ses déclarations de 2018 et celles de son épouse revêtent le caractère de la spontanéité, à un moment où ils ignoraient encore quelles pouvaient en être les conséquences, à l'inverse de celles qu'il a faites ensuite, manifestement pour les besoins de la cause.
Le rapport d'arrestation de la police genevoise du 13 février 2018 expose que lors de la perquisition de l'appartement à C______, la police a relevé qu'hormis quelques traces de présence humaine (couverture et oreiller sur le canapé), l'appartement ne semblait pas habité par une famille avec des enfants, aucun jouet ni aucun vêtement d'enfant n'ayant été retrouvé. À cela s'ajoute que malgré plusieurs passages à l'appartement sis à C______, l'OCPM n'a relevé aucune trace de vie, le voisinage ayant confirmé que le recourant n'était vu que pour relever le courrier.
Au surplus, comme l'a relevé à juste titre le TAPI, le fait que l'épouse du recourant travaille à Genève et que ses enfants y sont scolarisés et y déploient leurs loisirs, malgré leur domiciliation, ne conduit pas à un autre résultat. En effet, conformément à la jurisprudence, de tels séjours en Suisse ne sauraient être considérés autrement que comme des séjours temporaires, dans le cadre desquels, une fois l'activité (scolaire, professionnelle ou de loisirs) terminée, ils regagnent le domicile familial en France, où la famille dispose selon toute vraisemblance de son cercle de vie et d'intérêts. L'ATF 145 II 322 cité ci-devant au consid 2.4, dont se prévaut le recourant, ne permet pas d'arriver à une autre solution.
Il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent que le centre d’intérêts du recourant se trouvait, à tout le moins dès le 13 février 2018, non pas à Genève mais en France voisine où, partant, il séjournait au sens de la loi.
Au vu de ce qui précède, la décision de l'OCPM prononçant la caducité de l'autorisation d'établissement du recourant, en application de l'art. 61 al. 2 LEI, six mois après son départ de Suisse, soit au 13 août 2018, est conforme au droit et ne consacre aucun abus du pouvoir d’appréciation de cette autorité.
Il s’ensuit que le recours sera rejeté.
3. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).
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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 26 mai 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 avril 2023 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Me Nicola MEIER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.
Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
M. MAZZA
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| la présidente siégeant :
F. PAYOT ZEN-RUFFINEN |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html
Recours en matière de droit public | Recours constitutionnel subsidiaire |
Art. 82 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours : a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ; … Art. 83 Exceptions Le recours est irrecevable contre : … c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent : 1. l’entrée en Suisse, 2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit, 3. l’admission provisoire, 4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi, 5. les dérogations aux conditions d’admission, 6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ; d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues : 1. par le Tribunal administratif fédéral, 2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ; … Art. 89 Qualité pour recourir 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ; b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. … Art. 95 Droit suisse Le recours peut être formé pour violation : a. du droit fédéral ; b. du droit international ; c. de droits constitutionnels cantonaux ; d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ; e. du droit intercantonal. Art. 100 Recours contre une décision1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ______________________________________________ | Art. 113 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89. Art. 115 Qualité pour recourir A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Art. 116 Motifs de recours Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels. Art. 100 Recours contre une décision 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ___________________________________________
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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)
1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.
3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.