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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3086/2022

ATA/107/2024 du 30.01.2024 sur JTAPI/132/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3086/2022-PE ATA/107/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 janvier 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 février 2023 (JTAPI/132/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______1998, est ressortissant du Sénégal.

b. Il est arrivé à Genève le 13 février 2017 pour suivre des cours de français auprès de l'école B______, au bénéfice d'une autorisation de séjour pour études délivrée par l'office cantonal de la population, devenu depuis l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

c. Son autorisation de séjour pour études a été renouvelée dans le but d'effectuer un Bachelor en Électronique auprès de l'École C______ (ci‑après : C______), avec une échéance au 31 août 2021.

d. Selon l'attestation de C______ du 25 janvier 2022, A______ l'avait informée de sa décision de poursuivre ses études à D______ (ci-après : D______). En conséquence, il n'avait pas présenté de projet de fin d'études.

e. Le 18 octobre 2021, A______ a déposé une demande de renouvellement de son autorisation de séjour pour études afin de suivre un Bachelor en Génie électrique et électronique auprès de D______.

f. Par courrier du 14 février 2022, il a informé l'OCPM qu'il n'avait pas pu passer l'examen d'admission à D______ en janvier 2022 pour cause de maladie, et qu'il ne recevrait d'attestation d'immatriculation qu'une fois celui-ci réussi.

g. Par courriel du 20 mai 2022, il a indiqué à l'OCPM que l'examen d'admission à D______ avait été reporté à fin janvier 2023. À partir de septembre 2022, il avait été autorisé par D______ à suivre les cours de sa filière en tant qu'auditeur libre.

h. Selon l'attestation du 19 mai 2022 de D______, il s'était inscrit à l'examen d'admission 2022-2023 se déroulant en janvier 2023. En cas de réussite, il serait autorisé à commencer ses études de Bachelor à D______ dès la rentrée de septembre 2023.

i. Le 9 juin 2022, l'OCPM l’a informé de son intention de refuser de renouveler son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai pour faire valoir ses observations, ce qu'il n'a pas fait, malgré la prolongation de délai au 8 août 2022 accordée par l'OCPM.

j. Par décision du 17 août 2022, l'OCPM a refusé de renouveler l'autorisation de séjour pour études de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Il indiquait vouloir suivre des cours à D______ en tant qu'auditeur libre dès septembre 2022 en attendant le début de sa formation (Bachelor en Génie électrique et électronique) en janvier 2023. Les auditeurs libres n'étant pas immatriculés, ils n'étaient pas considérés comme étudiants au sens du statut de D______. Ainsi, il n'était pas immatriculé dans une école.

Il lui était loisible de venir passer son examen d'admission en janvier 2023 au moyen d'un visa type C. Puis, s'il était accepté à D______, il pourrait déposer une nouvelle demande d'autorisation de séjour pour études.

Enfin, l'intérêt public s'opposait à ses intérêts personnels. Dans le contexte de la politique migratoire, il convenait de tenir compte des questions liées à l'évolution sociodémographique auxquelles la Suisse devait faire face, tout en ne perdant pas de vue que l'admission d'un étranger était une décision autonome appartenant à tout État souverain, sous réserve des obligations de droit international public.

B. a. Par acte du 19 septembre 2022, A______ a recouru contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) concluant, à titre préalable, à son audition personnelle, à titre principal à l'annulation de la décision et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'OCPM pour nouvelle décision.

Sans son incident médical, il serait désormais immatriculé. Il suivait les cours en tant qu'auditeur libre, ce qui lui permettrait de réussir sans autre sa première année. L'OCPM reconnaissait que ses motivations étaient louables. Seul l'intérêt public de la politique migratoire s'opposait à ses intérêts privés, de sorte qu'ils devaient primer.

Un renvoi dans son pays d'origine, alors qu'il souhaitait poursuivre ses études en Suisse dans l'optique de rentrer définitivement au Sénégal pour y mettre à profit ses connaissances acquises était déraisonnable et disproportionné, la motivation sommaire de l'autorité quant à l'exigibilité de son renvoi étant insuffisante.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, A______ a relevé que malgré les « louanges initiales », l'OCPM doutait désormais de sa volonté de quitter la Suisse, alors que jusqu'à présent, son parcours, certes difficile, ne lui avait jamais été reproché.

L'examen d'entrée à D______ devait être repassé en janvier 2023, car il avait été en incapacité médicale de passer sa première tentative. Son échec n'avait dès lors rien d'intentionnel ou même lié à une quelconque négligence.

d. Par jugement du 3 février 2023, le TAPI a rejeté le recours.

L’intéressé n’étant inscrit dans aucune formation, il ne remplissait pas l’une des conditions essentielles pour bénéficier d’une autorisation de séjour pour études. Par ailleurs, rien ne s’opposait à son renvoi de Suisse.

C. a. Par acte déposé le 8 mars 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation. Il a repris ses conclusions de première instance.

Il s’était présenté aux examens d’entrée à D______ et attendait ses résultats. Il suivait toujours les cours en qualité d’auditeur libre. Son oncle, E______ le prenait en charge financièrement. Seule la politique migratoire poursuivie par l’OCPM lui imposait de retourner dans son pays, puis de revenir en Suisse pour se présenter aux examens et redemander ensuite une autorisation de séjour pour études, ce qui s’opposait à ses intérêts personnels, qui devaient l’emporter. Dès lors qu’il contestait le refus d’autorisation de séjour pour études, son renvoi était « déraisonnable ». Enfin, la décision était disproportionnée.

b. La recourant a été informé que, conformément à sa demande, il pourrait compléter son recours au stade de la réplique.

c. L’OCPM a conclu au rejet du recours, constatant que le recourant n’était toujours pas inscrit à une quelconque formation en qualité d’étudiant.

d. Dans le délai imparti pour répliquer, le recourant a indiqué qu’il n’avait pas d’observations complémentaires ni de pièces supplémentaires à apporter.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant sollicite son audition.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Ce droit n'empêche cependant pas la juge de renoncer à l'administration des preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1). En outre, il n'implique pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, le TAPI a estimé que le recourant et l’OCPM avaient pu exposer leurs arguments et produire toute pièce utile et que le dossier contenait les éléments suffisants pour statuer en connaissance de cause, de sorte que l’audition du recourant n’apparaissait pas utile.

Ce faisant, le TAPI a procédé à une appréciation anticipée des preuves, qui ne prête pas le flanc à la critique. En effet, le recourant a apporté des pièces au dossier et fourni des explications détaillées tant devant l’OCPM que devant le TAPI et la chambre de céans. Il n’expose pas en quoi son audition permettrait d’apporter des éléments supplémentaires.

Il ne sera donc pas procédé à l’audition du recourant et sera retenu que le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendu du recourant en ne procédant pas à son audition.

3.             Est litigieux le refus de l’OCPM d’octroyer au recourant une autorisation de séjour pour études.

3.1 La loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI -RS 142.20) et ses ordonnances, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI).

3.2 Aux termes de l'art. 27 al. 1 LEI, un étranger peut être admis en vue d'une formation ou d'un perfectionnement si la direction de l'établissement confirme qu'il peut suivre la formation ou le perfectionnement envisagés (let. a), s'il dispose d'un logement approprié (let. b) et des moyens financiers nécessaires (let. c), et s'il a un niveau de formation et les qualifications personnelles requis pour suivre la formation ou le perfectionnement prévus (let. d). Ces conditions étant cumulatives, l'étudiant étranger doit satisfaire à chacune d'elles (ATA/725/2023 du 4 juillet 2023 consid. 2.3 ; ATA/40/2019 du 15 janvier 2019 consid. 6).

3.3 L'art. 27 LEI est une disposition potestative (ou « Kann-Vorschrift »). Ainsi, même dans l'hypothèse où toutes ces conditions sont réunies, l'étranger n'a pas droit à la délivrance d'une autorisation de séjour, à moins qu'il ne puisse se prévaloir d'une disposition particulière du droit fédéral ou d'un traité lui conférant un tel droit (ATF 135 II 1 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_167/2015 du 23 février 2015 consid. 3). L'autorisation doit donc être refusée lorsque ces conditions ne sont pas remplies ; lorsqu'elles le sont, l'autorité n'en dispose pas moins d'un large pouvoir d'appréciation, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties (ATA/725/2023 précité ibid.).

3.4 Compte tenu du grand nombre d'étrangers qui demandent à être admis en Suisse en vue d'une formation ou d'un perfectionnement, les conditions d'admission, de même que les exigences en matière de qualifications personnelles et envers les écoles (art. 23 et 24 OASA), doivent être respectées de manière rigoureuse.

L'expérience démontre que les étudiants étrangers admis à séjourner sur sol helvétique ne saisissent souvent pas l'aspect temporaire de leur séjour en Suisse et cherchent, une fois le but de leur séjour atteint, à s'établir et demeurer dans le pays. Confrontées de façon récurrente à ce phénomène et afin de prévenir les abus, les autorités sont tenues de faire preuve de rigueur dans ce domaine (ATA/725/2023 précité consid 2.5 ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

3.5 En l’espèce, le recourant ne soutient pas avoir été admis en qualité d’étudiant à D______. Alors que lors du dépôt de son recours, il expliquait attendre les résultats de l’examen d’admission auquel il s’était soumis au mois de janvier 2023, il n’a par la suite fourni aucune indication à cet égard. Il n’a, en particulier, pas produit d’attestation d’immatriculation à D______ en qualité d’étudiant. N’étant ni inscrit ni admis à une formation en Suisse, le recourant ne peut bénéficier d’une autorisation de séjour pour études. Le fait d’exiger l’admission à une formation pour bénéficier d’une autorisation de séjour pour études est compatible avec le principe de la proportionnalité. En effet, cette exigence tient dûment compte de la nature particulière du type d’autorisation, destinée à permettre aux étrangers en formation de séjourner en Suisse.

Partant, l’OCPM n’a nullement abusé de son pouvoir d’appréciation ni violé la loi en refusant l’autorisation de séjour convoitée.

4.             La décision querellée ordonne le renvoi du recourant.

4.1 Selon l'art. 64 LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable.

4.2 En l’espèce, dès lors que l’OCPM a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour pour études au recourant, il devait prononcer son renvoi. En l’espèce, aucun motif ne permet de retenir que l’exécution du renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigée.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 mars 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 février 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre OCHSNER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

M. MAZZA

 

 

le président siégeant :

 

J.-M. VERNIORY

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.