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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3756/2023

ATA/29/2024 du 11.01.2024 ( MARPU ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3756/2023-MARPU ATA/29/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 11 janvier 2024

sur effet suspensif et suspension de la procédure

 

dans la cause

A______ recourante
représentée par Me Jean-Yves REBORD, avocat

contre

B______ SA et C______
représentées par Mes Amanda BURNAND SULMONI

et Yves JEANRENAUD, avocats

et

AÉROPORT INTERNATIONAL DE GENÈVE

représenté par Me Nicolas WISARD, avocat intimés

 



Vu le recours interjeté auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 13 novembre 2023 par A______ (ci-après : A______) contre la décision d’adjudication publiée sur la plateforme simap.ch le 2 novembre 2023 dans le cadre de la procédure sélective (2ème tour organisé en mandats d’étude parallèles [ci-après : MEP]) par l’Aéroport international de Genève (ci-après : AIG) en faveur du consortium formé par B______ SA et C______ (ci‑après : les adjudicataires) ; que le marché concerne le projet intitulé « B______ » ; que A______ conclut à l’annulation de l’adjudication en faveur des adjudicataires et au renvoi du dossier à l’AIG pour nouvelle évaluation des offres recevables après droit définitivement connu sur son recours contre la décision d’exclusion la concernant (cause A/3755/2023) ; que préalablement, elle a conclu à ce que le recours soit assorti de l’effet suspensif en ce sens qu’il était fait interdiction à l’AIG de conclure avec les adjudicataires les deux contrats d’entreprise totale pour la réalisation des projets B______ jusqu’à notification de la décision sur le recours ;

que des mesures superprovisionnelles ont été prononcées le 14 novembre 2023 faisant interdiction à l’AIG de conclure le contrat d’exécution de l’offre jusqu’à droit jugé sur la requête en octroi de l’effet suspensif ;

que, par correspondance du 17 novembre 2023, l’AIG a relevé que le sort du présent recours dépendait de celui déposé par A______ contre son exclusion de la procédure ; que si la chambre de céans devait annuler la décision d’exclusion de son offre, la société serait réintégrée dans la procédure de MEP ; qu’il devrait révoquer les décisions d’adjudication prononcées le 1er novembre 2023 et publiées le lendemain, et, après avoir évalué l’offre de A______, rendre de nouvelles décisions d’adjudication et de non adjudication ; qu’il demandait que l’instruction du présent recours devait donc être suspendue jusqu’à droit jugé sur le recours de A______ contre la décision d’exclusion ; que l’AIG confirmait qu’il ne conclurait pas le contrat avec les adjudicataires et, partant, ne s’opposait pas à ce que l’effet suspensif soit accordé dans la présente procédure jusqu’à ce qu’une décision exécutoire dans la procédure contre la décision d’exclusion soit rendue ;

que A______ a pris acte de la position de l’AIG ; qu’il convenait dès lors de restituer formellement l’effet suspensif dans la présente procédure ; qu’elle ne s’opposait pas à ce que l’instruction de la présente cause soit suspendue telle que proposée par l’AIG ;

que les adjudicataires s’en sont rapportés à justice s’agissant de la requête de suspension de la procédure et ont conclu au rejet de la requête en octroi de l’effet suspensif ; que, prima facie, le recours apparaissait dénué de toute chance de succès ; que l’intérêt privé de l’AIG à poursuivre le processus de mise en concurrence et d’attribution du marché l’emportait sur l’intérêt privé de A______ à voir son offre être déclarée recevable, sans garantie de se voir attribuer le marché concerné ; que tout retard significatif mènerait à un blocage de fait du processus de signature du contrat, puis du chantier, conduisant au final à un report du projet ce qui serait contraire au développement de l’AIG ; qu’il existait un intérêt public évident au projet qui visait notamment à permettre à l’AIG non seulement de répondre aux besoins accrus de sécurité ainsi qu’à ceux organisationnels des transports publics, mais aussi de répondre à ses engagements en matière de développement durable ;

qu’à teneur de la recommandation d’adjudication des MEP, l’offre de A______, « bien qu’étudiée par les experts » de l’AIG et des CFF, n’a pas été « évaluée par le jury au regard du respect des exigences de base et des critères d’adjudication » ;

qu’en droit, aux termes des art. 17 al. 1 de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et 58 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01), le recours n’a pas d’effet suspensif. Toutefois, en vertu des art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP, l’autorité de recours peut, d’office ou sur demande, octroyer cet effet pour autant que le recours paraisse suffisamment fondé et qu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose ;

que l’examen de la requête suppose une appréciation prima facie du bien-fondé du recours ; le but est alors de refuser l’effet suspensif au recours manifestement dépourvu de chances de succès, dont le résultat ne fait aucun doute ; inversement, un diagnostic positif prépondérant ne suffit pas d’emblée à justifier l’octroi d’une mesure provisoire mais suppose de constater et de pondérer le risque de préjudice (ATA/217/2021 du 1er mars 2021 consid. 2 ; ATA/1170/2020 du 19 novembre 2020 consid. 3 ; Benoît BOVAY, Recours, effet suspensif et conclusion du contrat, in Jean-Baptiste ZUFFEREY/Hubert STÖCKLI, Marchés publics 2010, Zurich 2010, pp. 311-341, p. 317 n. 15) ;

que l’octroi de l’effet suspensif constitue cependant une exception en matière de marchés publics (arrêt du Tribunal fédéral 2D_34/2018 du 17 août 2018 consid. 5.2), et représente une mesure dont les conditions ne peuvent être admises qu’avec restriction (ATA/1170/2020 précité consid. 3) ;

que statuant sur effet suspensif, l'autorité judiciaire peut procéder à un examen sommaire du droit et se contenter d'une analyse juridique globale (arrêt du Tribunal fédéral 2D_34/2018 précité consid. 4.4.1) ;

qu’en l’espèce, la recevabilité du recours, prima facie, dépend de l’issue du recours contre la décision d’exclusion laquelle demeure en l’état réservée ;

qu’à teneur du communiqué de presse de l’AIG du 22 novembre 2023 l’investissement pour le présent marché est « estimé aujourd’hui à quelque 600 millions de francs » ;

que l’intérêt privé de la recourante à pouvoir participer à la procédure d’adjudication si elle devait obtenir gain de cause dans le recours interjeté contre son exclusion est évident ;

qu’il doit être tenu compte de l’intérêt privé des adjudicataires à pouvoir conclure le marché ; qu’il est important que les travaux voulus par l’AIG puissent être entrepris sans tarder ;

que l’intérêt public à ce que la réglementation en matière de marchés publics soit scrupuleusement respectée et le meilleur adjudicataire désigné pour des travaux d’une telle envergure est important ; qu’il prime les intérêts privés précités ;

que l’AIG ne s’oppose pas à l’octroi de l’effet suspensif au présent recours afin de traiter prioritairement celui interjeté par A______ contre son exclusion, relativisant ainsi l’urgence que les travaux soient entrepris ; que l’issue du recours contre la décision d’exclusion de A______ pourrait influencer la présente cause, dans l’hypothèse où cette dernière devait obtenir gain de cause et être réintégrée dans la procédure d’adjudication ; qu’à teneur de la recommandation d’adjudication des MEP, l’offre de A______ n’a pas été, en l’état, dûment évaluée, conformément à l’art. 42 al. 3 RMP, qui prévoit que les offres écartées ne sont pas évaluées ;

que l’effet suspensif sera dès lors octroyé au recours ;

que dans l’attente de l’issue de la procédure A/3755/2023 dirigée contre la décision d’exclusion, la présente cause sera suspendue en application de l’art. 14 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) selon lequel lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions ;

qu’aucune partie ne s’est opposée à ladite suspension ;

que les écritures sur le fond du 14 décembre 2023 sont transmises par pli séparé ;

qu’il sera statué sur les frais avec le fond ;

vu les art. 21 et 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ;

vu l’art. 9 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 26 mai 2020 ;

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

octroye l’effet suspensif au recours ;

transmet les écritures de l’Aéroport international de Genève et de B______ SA et C______ du 14 décembre 2023 ;

prononce la suspension de la présente procédure jusqu’à droit jugé dans la procédure A/3755/2023 ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

si elle soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Jean-Yves REBORD, avocat de la recourante, à Mes Amanda BURNAND SULMONI et Yves JEANRENAUD, avocats de B______ SA et C______, à Me Nicolas WISARD, avocat de l'Aéroport international de Genève, ainsi qu’à la Commission de la concurrence (COMCO).

 

 

 

Le président

 

 

C. MASCOTTO

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :