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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3306/2023

ATA/1373/2023 du 20.12.2023 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3306/2023-EXPLOI ATA/1373/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 décembre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______, B______ et C______ recourants

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimé



EN FAIT

A. a. Selon le rapport du 2 aout 2023 du secteur inspectorat du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN), l’établissement public à l’enseigne « D______ », sis rue E______ à Genève était exploité sans autorisation. Le précédent exploitant avait cessé de s’occuper du kebab le 31 mai 2023. La requête d’autorisation d’exploiter par le nouvel exploitant et propriétaire avait été retournée deux fois, car elle était incomplète.

b. Le PCTN a, le même jour, invité A______ et C______, qui étaient apparus, respectivement comme exploitant et propriétaire, à s’exprimer au sujet des constats du rapport. Il était envisagé de prononcer une amende ; l’auteur de l’infraction était prié de retourner le formulaire relatif à sa situation personnelle et financière.

c. Par courrier du lendemain, B______

d. , associé gérant de C______, a indiqué qu’il avait déposé, le 2 août 2023, une requête en changement de propriétaire et d’exploitant. Il a retourné le formulaire relatif à sa propre situation personnelle.

e. Le 4 septembre 2023, l’autorisation d’exploiter a été délivrée à A______.

f. Par décision du 14 septembre 2023, le PCTN a prononcé à l’encontre de A______ une amende de CHF 1'000.- pour avoir exploité l’établissement alors qu’il ne disposait pas encore de l’autorisation idoine.

B. a. Par acte expédié le 12 octobre 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, C______, sous la signature d’B______ et de A______, a recouru contre cette décision.

Elle avait sollicité les 21 juin et 11 juillet 2023 les autorisations nécessaires pour procéder au changement de propriétaire et d’exploitant, mais ses requêtes lui avaient été retournées, car incomplètes. À la suite du contrôle du 2 août 2023, elle avait écrit au PCTN pour expliquer qu’il ne manquait plus que l’inscription de A______ au Registre du commerce. Si le PCTN leur avait répondu plus tôt, ils auraient disposé des autorisations nécessaires plus tôt. En outre, B______ avait donné les indications relatives à sa situation financière. Ils demandaient donc l’annulation de l’amende.

b. Le PCTN a conclu au rejet du recours. Il a renvoyé à sa décision.

c. La partie recourante n’ayant pas répliqué dans le délai imparti à cet effet, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

La décision inflige une amende à l’exploitant. Ainsi, seul celui-ci est habilité à la contester. Le recours, formé conjointement par lui et l’associé gérant de la propriétaire, sera ainsi déclaré recevable en ce qui concerne l’exploitant, mais irrecevable en tant qu’il est formé par la société et son associé gérant.

2.             Est litigieuse l’amende infligée à l’exploitant de l’établissement.

2.1 L'art. 8 de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22) soumet l'exploitation de toute entreprise vouée à la restauration et au débit de boissons à l'obtention préalable d'une autorisation d'exploiter (al. 1), qui doit être requise lors de chaque changement d'exploitant ou de propriétaire de l'entreprise ou de modification des conditions de l'autorisation antérieure (al. 2 ; art. 18 al. 1 let. a du règlement d'exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement du 28 octobre 2015 - RRDBHD - I 2 22.01).

Toute exploitation exercée avant l’obtention d’une décision favorable du service, respectivement sans autorisation en vigueur, est passible des sanctions prévues par la loi et peut entraîner un rejet de la requête en autorisation (art. 18 al. 3 RRDBHD).

2.2 En l’espèce, il n’est pas contesté que le 2 août 2023, le recourant ne disposait pas d’une autorisation d’exploiter l’établissement. Certes, il avait soumis une requête en vue de l’obtenir en juin, puis en juillet 2023. Toutefois, comme il le reconnaît lui‑même, ces requêtes étaient incomplètes, car remplies de manière lacunaire et dépourvues de l’ensemble des pièces exigées. Ce n’est qu’après le passage de l’inspectorat du PCTN, le 2 août 2023, le jour même, que le recourant a redéposé une nouvelle requête, cette fois-ci complète.

En exploitant l’établissement alors qu’il ne disposait pas encore de l’autorisation nécessaire, le recourant a enfreint l’art. 8 LRDBHD et 18 al. 1 let. 1 RRDBHD.

Le principe d’une sanction administrative est donc fondé, conformément à l’art. 18 al. 3 RRDBHD.

3.             Il convient encore d’examiner l’adéquation du montant de l’amende.

3.1 Aux termes de l'art. 65 LRDBHD intitulé « amendes administratives », en cas d'infraction à ladite loi et à ses dispositions d'exécution, ainsi qu'aux conditions des autorisations, le département peut notamment infliger une amende administrative de CHF 300.- à CHF 60'000.- (al. 1). L'art. 3 RRDBHD précise que le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé est chargé de l'application de la LRDBHD et du RRDBHD et qu’il délègue cette compétence au PCTN (al. 1 et 2).

3.2 L'autorité qui prononce une amende administrative ayant le caractère d'une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0 ; principes applicables à la fixation de la peine ; par renvoi de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 - LPG - E 4 05 ; ATA/1375/2021 du 16 décembre 2021 consid. 7 et les références citées). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence.

3.3 Par ailleurs, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). Il y a lieu de tenir compte de la culpabilité de l'auteur et de prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/1375/2021 précité consid. 7b).

3.4 Le PCTN jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour fixer le montant de l'amende. La juridiction de céans ne le censure qu'en cas d'excès ou d'abus (ATA/1375/2021 précité consid. 7b ; ATA/331/2018 du 10 avril 2018 consid. 8b et les références citées).

3.5 En l’espèce, l'amende de CHF 1'000.-, qui se situe dans le bas de la fourchette, sanctionne l'ouverture au public d’un établissement sans autorisation d'exploiter en vigueur. Rien n'obligeait le recourant à agir de la sorte. Il ressort du dossier que l'autorité intimée a tenu compte de la culpabilité du recourant, mais pas de sa situation financière, dans la mesure où il n'avait au moment de la décision attaquée, nonobstant l'invitation expresse à le faire, fourni aucun document en lien avec sa situation personnelle et financière. En effet, seules des indications concernant la situation financière de B______ ont été fournies. Le recourant n’a pas davantage donné de renseignements sur sa situation financière dans son recours.

Au vu de ce qui précède, il n'apparaît pas que l'autorité intimée ait violé la loi ou abusé de son large pouvoir d'appréciation en fixant l'amende à CHF 1'000.-.

Mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

4.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge solidaire du recourant, de C______ et B______ et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare irrecevable le recours interjeté le 12 octobre 2023 par C______ et B______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 14 septembre 2023 ;

déclare recevable le recours interjeté le 12 octobre 2023 par A______ contre la décision précitée ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge solidaire de C______, B______ et A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à C______, B______ et A______ ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. DESCHAMPS

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :