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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1817/2023

ATA/1180/2023 du 31.10.2023 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1817/2023-AIDSO ATA/1180/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 octobre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ et B______ recourants

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé

 



EN FAIT

A. a. B______ , né le ______ 1988, est de nationalité suisse.

b. Dans sa demande d’aide financière adressée en janvier 2018 à l’Hospice général (ci-après : hospice), il a indiqué avoir obtenu à Paris, en 2015, un diplôme dans le domaine audiovisuel, être de retour à Genève depuis décembre 2017 et vivre chez ses parents.

Il a indiqué dans sa demande d’aide, signée le 5 février 2018, qu’il n’était pas propriétaire d’un bien immobilier. Le même jour, il a signé le document « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général », par lequel il a notamment pris acte de la subsidiarité des prestations d’aide financière à toute ressource de travail ou de la fortune et s’est notamment engagé à donner immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, tant en Suisse qu’à l’étranger et d’informer immédiatement et spontanément de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière. Il a également pris acte, par sa signature, que l’hospice se réservait de réduire ou de supprimer ses prestations d’aide financière en cas de violation de la loi, notamment de cet engagement, et qu’il pouvait être amené à rembourser toute prestation exigible selon l’art. 12 al. 2 et 36 à 41 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04).

c. B______ a perçu des prestations d’aide financière à compter du 1er février 2018.

d. Le ______ 2020, il a épousé A______ au Maroc. Il est revenu ensuite en Suisse, alors que son épouse ne l’y a rejoint qu’en juillet 2021, chez les parents de celui-ci.

e. Lors d’un contrôle réalisé par le service des enquêtes de l’hospice (ci-après : SEC) le 15 mars 2022, la mère du bénéficiaire a déclaré que celui-ci était rarement à la maison et qu’elle ignorait où il logeait.

f. Dans un complément d’enquête, B______ et son épouse ont déclaré ne pas être propriétaire immobilier en Suisse ou à l’étranger.

g. Dans leur demande de prestations du 4 juillet 2022, les époux ont également répondu par la négative à la question de savoir s’ils étaient propriétaires d’un bien immobilier et indiqué loger dans un appartement au______, avenue C______ à Genève, qu’ils sous-louaient à D______ .

h. Lors de l’entretien du 30 septembre 2022 avec l’assistante sociale chargée du dossier auprès de l’hospice, B______ a déclaré détenir un bien immobilier en France.

i. Par décision du 5 décembre 2022, l’hospice a octroyé aux époux une aide exceptionnelle, limitée à trois mois et remboursable, en raison du fait que le bénéficiaire était propriétaire d’un studio en France. Cette aide était conditionnée à son engagement de vendre ledit studio et à la signature par les époux d’une reconnaissance de dette à chaque renouvellement de l’aide financière. Un délai au 2 janvier 2023 leur a été imparti pour fournir tout document justifiant de la propriété de B______ et de la valeur du bien.

j. Ce dernier a été hospitalisé début janvier 2023, ce dont il a informé son assistante sociale.

k. Lors de l’entretien du 13 janvier 2023, l’assistante sociale a rappelé aux époux l’obligation de fournir les documents demandés précédemment et leur a accordé un délai supplémentaire pour les présenter, compte tenu de leurs problèmes de santé.

l. Par courrier du 23 janvier 2023, l’assistante sociale a averti les bénéficiaires qu’à défaut de transmettre les documents sollicités le 15 février 2023 au plus tard, il serait mis fin aux prestations.

m. Par pli du 8 février 2023, la mère du bénéficiaire, F______ , a expliqué avoir acheté un studio sis ______, route G______ à Annemasse, courant 2017, mis au nom de son fils « pour des raisons familiales ». Celui-ci devait effectuer les travaux de réhabilitation et de rénovation qu’elle prenait à sa charge, et il louerait le studio et lui reverserait les loyers. Il devait aussi s’occuper des charges et impôts, qu’elle acquitterait. Elle avait fait signer à son fils une reconnaissance de dette de CHF 96'000.- relative à l’achat du bien et une autre de CHF 27'000.- relative aux travaux. Son fils avait fait faire les travaux, mais omis de payer les taxes foncières et d’habitation. Il n’avait, en raison de ses problèmes de santé, pas mis le studio en location. Il était convenu qu’en cas de problème, son fils prendrait contact avec un notaire pour lui restituer le bien, ce qu’il n’avait pas fait depuis plusieurs années, prétextant ses problèmes de santé et son incapacité à gérer la situation. Elle envisageait d’agir en justice afin de faire valoir ses droits en lien avec la reconnaissance de dettes et d’obtenir le transfert de la propriété. Elle avait envisagé cette acquisition comme investissement pour sa retraite et avait également acheté l’appartement voisin dans la perspective de l’agrandir en y intégrant le studio.

Elle a joint l’acte de vente du studio du 26 janvier 2018, dont il ressort qu’elle a viré la somme d’Euro 82'640.- sur le compte du notaire le 22 janvier 2018, la reconnaissance de dettes de son fils du 22 janvier 2018 reconnaissant avoir reçu la somme précitée, directement versée au notaire, pour acquérir le studio. Son fils s’engageait à faire effectuer les travaux de rénovation dans un délai de trois mois. Ceux-ci ainsi que les charges, impôts et taxes seraient avancés par la mère et prélevés sur les loyers qu’il lui reverserait. En cas de problème, il s’engageait à transférer la propriété à sa mère. En contrepartie de la gestion du studio, sa mère renonçait à lui demander le remboursement de ses frais d’études de EUR 24'000.-.

Était également jointe la seconde reconnaissance de dette, du 18 juillet 2018, indiquant que les travaux de rénovation de EUR 27'000.- avaient été acquittés par sa mère. Il s’engageait à mettre le studio en location, sa mère percevant directement les loyers et s’acquittant des charges et taxes y relatives. Le fils reconnaissait devoir rembourser à sa mère les sommes de CHF 97'260.- et CHF 31'455.-.

n. B______ a formé opposition à la décision du 5 décembre 2022. Le studio avait été acquis par sa mère. Celle-ci lui avait demandé de le prendre à son nom, car elle ne souhaitait pas l’acquérir « en communauté de bien » avec son mari. Elle lui avait demandé de s’occuper des travaux et de la mise en location. En contrepartie, elle renonçait à sa créance liée au financement de ses études. Elle avait financé tous les travaux. Étant tombé malade, il n’avait pas pu s’occuper du studio, au sujet duquel un conflit était né avec sa mère. Elle lui avait demandé de signer une reconnaissance de dettes de CHF 120'000.- et de lui remettre tous les documents se rapportant au studio, ce qu’il avait fait. Il avait en vain tenté à plusieurs reprises de prendre rendez-vous avec un notaire. Les taxes foncières et d’habitation n’étaient pas réglées. Sa mère était disposée à les payer, dès qu’il lui aurait transféré la propriété. Il demandait un délai supplémentaire pour pouvoir effectuer les démarches auprès du notaire et de l’administration fiscale française.

o. Lors de l’entretien du 17 février 2023, confirmé par courriel du 21 février 2023, l’assistante sociale a informé les époux que lhospice maintenait que ceux-ci étaient propriétaires d’un bien immobilier, de sorte que les prestations versées étaient remboursables et conditionnées à la vente de celui-ci.

p. Par décision du 18 avril 2023, l’hospice a rejeté l’opposition.

B. a. Par acte expédié le 25 mai 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, B______ et A______ ont recouru contre cette décision. Le recourant a repris les explications déjà fournies et ajouté que le studio n’avait jamais été loué. Son incapacité à gérer le studio était liée à sa maladie. Depuis 2015, il souffrait d’un syndrome anxieux avec perte de motivation et de diverses pathologies, liées à un syndrome de Crushing diagnostiqué que plusieurs années plus tard. Pendant ses périodes de rémission, il avait cherché un emploi. Il avait ainsi travaillé auprès de H______ d’avril à novembre 2018, puis de janvier à juillet 2019 auprès de I______. En juillet 2019, sa dépression s’était aggravée au point de nécessiter une hospitalisation en 2020. Pendant une période de rémission, il s’était marié le 30 décembre 2020. Sa maladie n’avait été diagnostiquée qu’en janvier 2021. En juin 2021, il avait subi une opération au cerveau, qui ne lui avait cependant pas permis de guérir. Une nouvelle opération, du genou, avait eu lieu en août 2021, puis une au cerveau en février 2022 et enfin une opération d’appendicite en janvier 2023. La maladie dont il souffrait avait entraîné une dépression chronique. Jusqu’en avril 2022, son épouse et lui avaient habité chez ses parents. Il était erroné de prétendre qu’il n’y était jamais. Il produisait une attestation de sa mère du 25 mai 2023 indiquant qu’elle avait dit à l’enquêteur que son fils n’était pas à la maison le jour en question et qu’il arrivait souvent à celui-ci de s’absenter.

Il avait signalé à l’enquêteur, le 25 mai 2022, qu’un bien immobilier avait été acquis par sa mère en son nom en France. Celui-ci lui avait demandé de produire toute pièce justificative à cet égard. Compte tenu du conflit avec sa mère, il n’avait pas pu produire les pièces. Son épouse et lui n’avaient pas mentionné le bien les 21 juin et 4 juillet 2022, étant convaincus qu’ils n’avaient pas de droit de propriété sur ce bien. Il avait compris de l’entretien avec l’enquêteur qu’il suffisait que sa mère explique qu’elle était propriétaire du bien. Elle ne l’avait fait qu’en février 2023, après qu’il eût insisté.

Il ne s’était jamais comporté en propriétaire et avait signalé de bonne foi l’existence de ce bien. Il n’avait, en raison de ses problèmes de santé, pas réussi à organiser le transfert du bien à sa mère. Lorsqu’il n’avait pas déclaré être propriétaire d’un bien immobilier, il n’avait pas eu pour intention de cacher l’existence de ce bien ; il ne bénéficiait nullement de celui-ci. Ses problèmes de santé ne lui avaient pas permis d’apprécier pleinement la situation et ses conséquences administratives. Son comportement volontaire et coopératif et ses opérations lourdes devaient conduire à nier l’existence de malice ou mauvaise foi de sa part. Lui demander de vendre le bien reviendrait à ne pas tenir compte de sa situation particulière.

b. L’hospice a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, le recourant a indiqué qu’il avait, avec l’accord de sa mère, requis la vente du bien immobilier. Vu sa situation psychologique et matérielle précaire, il demandait à pouvoir utiliser le bénéfice de la vente pour rembourser sa mère. Subsidiairement, il sollicitait que le montant dû à l’hospice soit fixé en équité.

Il a produit une attestation J______ , notaire à Annemasse, indiquant être chargée de la vente de l’appartement de « deux pièces-cuisine » appartenant au recourant, un certificat médical du 1er juin 2023 de la docteure K______ , médecin-cheffe auprès de l’Hôpital universitaire de Bâle, selon lequel, en raison de ses affections, il avait besoin d’une situation d’habitation stable et devait être priorisé dans l’attribution d’un logement ainsi qu’un certificat médical du docteur L______ du 5 juin 2023 selon lequel le patient était sans domicile fixe depuis le début du mois et était hébergé par ses parents, ce qui affectait son état de santé. Il avait besoin d’un lieu de vie adapté à sa situation personnelle et médicale.

d. Invité par la chambre de céans à préciser le nom de l’acquéreur, le recourant a répondu que malgré deux relances, la notaire ne lui avait pas répondu. Il allait vendre le bien à son père, qui avait payé les arriérés de charges et taxes. Il était redevable à celui-ci des arriérés d’impôts et de taxes foncières pour les cinq dernières années. Son père allait assumer les frais de rénovation des canalisations d’égouts.

e. Se déterminant sur ces éléments, l’hospice a maintenu sa position. Il continuait à considérer que le recourant était propriétaire du bien en question, qui ne lui servait pas de demeure. L’aide accordée devait ainsi être remboursable et était exceptionnelle. La décision de remboursement ne serait prononcée qu’une fois le bien vendu. L’affectation du produit de la vente ne faisait pas l’objet du litige, de sorte que la chambre administrative n’avait pas à se prononcer à cet égard. L’hospice rappelait néanmoins au recourant que même si l’existence d’une dette envers sa mère était établie, il n’appartenait pas à la collectivité de désintéresser d’éventuels créanciers.

f. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             L’objet du litige est limité au bien-fondé des conditions d’octroi de l’aide accordée le 5 décembre 2022 au recourant et à son épouse, à savoir qu’il s’agit d’une aide exceptionnelle, remboursable, limitée dans le temps, conditionnée à leur engagement de réaliser leur bien immobilier ainsi qu’à la signature d’une reconnaissance de dette lors de chaque renouvellement de l’aide financière.

Les autres points soulevés par le recourant, à savoir l’existence d’une dette envers sa mère, d’arriérés de charges et de taxes à acquitter en lien avec le bien immobilier ainsi que la quotité du montant futur à rembourser à l’hospice ne font pas l’objet de la décision précitée. Sortant du cadre du litige, ils ne seront pas examinés.

3.             Aux termes de l’art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. L’art. 39 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) contient une garantie similaire.

3.1 En droit genevois, la LIASI et son règlement d’exécution du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) concrétisent ces dispositions constitutionnelles, en ayant pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI). Les prestations de l’aide sociale individuelle sont l’accompagnement social, des prestations financières et l’insertion professionnelle (art. 2 LIASI). La personne majeure qui n’est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont il a la charge a droit à des prestations d’aide financière. Celles-ci ne sont pas remboursables sous réserve notamment de leur perception indue (art. 8 al. 1 et 2 LIASI). Elles sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI).

3.2 Ont droit à des prestations d'aide financière prévues par la présente loi les personnes qui : a) ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire de la République et canton de Genève, b) ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et c) répondent aux autres conditions de la LIASI (art. 11 al. 1 LIASI).

Ont droit à des prestations d'aide financière les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de la famille dont ils ont la charge (art. 8 al. 1 LIASI). Ces prestations ne sont pas remboursables, sous réserve des art. 12 al. 2 et 36 à 41 LIASI (al. 2).

3.3 Le demandeur doit fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI). La LIASI impose ainsi un devoir de collaboration et de renseignement. Le bénéficiaire doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/1446/2019 du 1er octobre 2019 consid. 5a). Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'hospice » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a).

3.4 Les prestations d'aide financière sont accordées aux personnes dont le revenu mensuel déterminant n'atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d'État (art. 21 al. 1 LIASI). L'art. 1 al. 1 let. a RIASI prévoit ainsi que les limites de fortune permettant de bénéficier des prestations d'aide financière sont de CHF 4'000.- pour une personne seule majeure.

Dès lors que la valeur d'un immeuble dépasse pratiquement toujours les limites de fortune fixées à l'art. 1 al. 1 RIASI, une personne propriétaire d'un immeuble n'aura pratiquement jamais droit à des prestations d'aide financière (ATF 146 I 1 consid. 6.4). L'art. 12 al. 2 LIASI prévoit toutefois qu'exceptionnellement une aide financière peut être accordée à une personne propriétaire d'un bien immobilier, si ce bien lui sert de demeure permanente. Dans ce cas, l'aide financière accordée est remboursable, l'immeuble pouvant être grevé d'une hypothèque au profit de l'hospice. L'hospice demande le remboursement de ces prestations dès que le bénéficiaire ne remplit plus les conditions du besoin (art. 39 al. 2 LIASI).

La volonté du législateur était d’offrir l’aide de l’hospice à une personne propriétaire de son logement pour éviter que celle-ci soit obligée de réaliser son bien et qu’elle se retrouve sans toit, à certaines conditions notamment que ledit logement constitue sa demeure permanente (MGC 2006-2007/V A - Séance 25 du 23 février 2007 ; ATA/10/2020 du 7 janvier 2020 consid. 2f et les références citées).

3.5 En l’espèce, il n’est pas contesté que le recourant a répondu par la négative à la question de savoir s’il était propriétaire d’un bien immobilier en Suisse ou à l’étranger, lors de ses demandes d’aide sociale signées par ses soins le 5 février 2018 et le 23 avril 2021 et par les conjoints en juillet 2022. Il ressort, toutefois, du dossier que le recourant est propriétaire d’un bien immobilier de « deux pièces-cuisine », sis______, route G______ à Annemasse. Ce bien a été acquis, selon acte notarié, en son nom le 26 janvier 2018 pour le prix de EUR 80'000.-. Le fait que le recourant aurait prêté son nom parce que sa mère ne souhaitait pas apparaître comme propriétaire ne permet pas de lui dénier la qualité de propriétaire du bien immobilier. En effet, celle-ci lui permet d’exercer les droits qui y sont rattachés, notamment celui de le vendre, ce qu’il a d’ailleurs chargé la notaire de faire. Partant, sa qualité de propriétaire de l’appartement sis à Annemasse est établie. Le rapport d’enquête a constaté que les époux occupaient un appartement en sous-location sis avenue C______ à Châtelaine ; ils n’utilisent donc pas ledit bien comme domicile.

Or, le recourant étant propriétaire d’un bien immobilier sans l’utiliser à titre de logement, son épouse et lui ne peuvent en principe, conformément à l’art. 12 LIASI, pas accéder aux prestations de l’hospice. L’hospice a néanmoins, afin de tenir compte de leurs difficultés et pour faire face aux besoins urgents, accepté de leur octroyer une aide aux conditions fixées à l’art. 12 LIASI. Il a subordonné cette aide à la condition que le recourant réalise le bien immobilier rapidement, s’engage à rembourser l’aide accordée jusqu’à la vente du bien et limité l’aide à trois mois, renouvelable.

La fixation de ces conditions est conforme à la loi et au principe de proportionnalité. En effet, dès lors que le recourant et son épouse ne remplissent pas les conditions d’octroi d’une aide, étant propriétaires d’un bien immobilier, l’hospice était fondé à limiter ses prestations à une aide exceptionnelle, limitée dans le temps et à la conditionner à la vente du bien immobilier et à l’engagement de la rembourser après perception du produit de la vente.

Comme le relève l’hospice, la question de savoir si le recourant a agi de bonne foi en ne déclarant pas le bien immobilier dont il est propriétaire ne fait pas l’objet de la décision querellée. À juste titre, l’autorité intimée a, par ailleurs, attiré son attention sur le fait qu’une fois qu’il aurait perçu le bénéfice de la vente, celui‑ci devait, en priorité, servir au remboursement de l’aide accordée à bien plaire à l’hospice et non à désintéresser des tiers, fût-ce la mère du recourant.

Enfin, les problèmes de santé du recourant, dont il n’y a pas lieu de minimiser l’importance, ne l’ont nullement empêché de mandater un agent immobilier en vue d’estimer la valeur du bien, de faire établir des devis relatifs aux travaux à entreprendre dans celui-ci, de sorte que les conditions posées par l’hospice ne se heurtent pas à l’état de santé du recourant, qui ne le soutient ni ne l’établit.

Mal fondé, le recours doit donc être rejeté.

4.             Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument. Il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure, vu l’issue du litige (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 mai 2023 par A______ et B______ contre la décision de l’Hospice général du 18 avril 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ et B______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :