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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3133/2022

ATA/890/2023 du 22.08.2023 sur JTAPI/79/2023 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 11.10.2023, rendu le 06.11.2023, IRRECEVABLE, 2C_566/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3133/2022-PE ATA/890/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 août 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ et B______, agissant en leur nom et pour le compte de leurs enfants mineures C______, D______ et E______

recourants

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 janvier 2023 (JTAPI/79/2023)


EN FAIT

A. a. B______, né le ______ 1971, son épouse A______, née le ______ 1976, et leurs enfants mineures, C______, née le ______ 2010, D______ et E______, nées le ______ 2011, sont ressortissants du Sénégal.

b. Chacun d'eux a été mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement (permis C) entre 2007 et 2011.

B. a. Le 4 févier 2021, B______ et A______ ont été appréhendés par le corps des gardes-frontière à la douane de F______, à G______. Ils ont indiqué que leur adresse se trouvait à H______, en I______.

b. Ils ont été entendus séparément par la police le jour même, ce qui a donné lieu, le lendemain, à l’établissement d’un rapport de renseignement.

Selon le procès-verbal d'audition de B______, si ce dernier avait indiqué une adresse en I______, alors qu'il ressortait de la base de données de la police qu'il séjournait à M______, au chemin de J______ à K______, c'était parce que l'adresse I______ était temporaire. Sa vie et celle de sa famille se trouvait en Suisse et les enfants y allaient à l'école. Ils avaient quitté leur logement à K______ six mois auparavant. Avant d'aller vivre en I______, où lui et sa famille résidaient depuis environ cinq à sept semaines, il avait habité chez des amis à M______. Il avait informé l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) deux semaines auparavant que la famille cherchait un logement à G______, sans préciser habiter en I______. Il n'avait entrepris aucune démarche pour annoncer le changement d'adresse mais avait prévu de le faire. Il recevait encore son courrier au chemin de J______ et pouvait également le recevoir au ______, avenue L______, à M______.

Selon le procès-verbal d'audition d'A______, cette dernière avait également indiqué qu'elle et sa famille résidaient en I______ temporairement et qu'ils cherchaient un logement à G______. Les enfants y allaient à l'école et elle travaillait à proximité. La famille était installée en I______ depuis environ deux mois et n'habitait plus au chemin de J______ depuis presque une année. Entretemps, ils avaient vécu brièvement au chemin S______, à K______, mais n'avaient pas eu le temps d'effectuer le changement d'adresse. Ils avaient également habité chez sa cousine. Ils voulaient retourner vivre à M______ et recevaient du courrier à leur ancienne adresse, au chemin de J______. Son mari avait également une adresse à T______.

c. Le 8 juin 2022, l'OCPM a informé B______ de son intention de prononcer la caducité de son autorisation d'établissement, celle de son épouse ainsi que celles de ses trois enfants.

Il ressortait du dossier, notamment des auditions menées le 4 février 2021, qu'ils ne résidaient pas à M______, mais en I______, et qu'ils avaient donc quitté la Suisse à tout le moins depuis le mois de décembre 2020.

d. Dans le délai imparti pour répondre, B______ a indiqué habiter à M______ avec sa famille depuis 1996. Les faits relatés par l'OCPM remontaient à la période de la pandémie de Covid-19, au cours de laquelle il avait perdu son emploi et été évacué de son logement. Pour éviter de devoir demander l'aide sociale, il avait préféré trouver une chambre à H______. Son épouse avait désormais trouvé un emploi comme enseignante à M______ et lui-même comme professeur des universités. Ses enfants étaient toujours inscrits à l'école à G______.

e. Par décision du 5 août 2022, l'OCPM a constaté la caducité des autorisations d'établissement de B______ et d'A______ ainsi que celles de leurs trois enfants, et enregistré un départ de Suisse à destination de la I______ à compter du 1er juin 2021.

C. a. B______ et A______ ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) contre cette décision.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Par jugement du 20 janvier 2023, le TAPI a rejeté le recours.

B______ et A______ avaient fourni des indications contradictoires au sujet de leur domiciliation depuis 2020.

Entendus séparément devant la police le 4 février 2021, ils avaient reconnu être domiciliés en I______ depuis cinq à sept semaines, voire deux mois. B______ avait confirmé à l'OCPM avoir vécu à H______ pendant la période de la pandémie de Covid-19.

Toutefois, dans le cadre de leur recours, ils avaient soutenu habiter toujours à M______. Ils avaient d'abord prétendu habiter au chemin de J______ à K______. Dans leur réplique, ils avaient ensuite soutenu avoir habité chez plusieurs amis dans le canton de Genève, avant de finalement affirmer habiter au ______, avenue L______ depuis le 27 novembre 2020 à tout le moins.

En présence de telles déclarations contradictoires, la préférence devait être accordée à celles que les époux avaient données en premier lieu, ce d'autant plus qu'ils avaient tenu des déclarations concordantes au sujet de leur domiciliation lors de leur audition séparée devant la police.

Aucune pièce prouvant leur résidence effective et continue à M______ depuis le 1er décembre 2020 n’avait été produite. En particulier, le bail portant sur la dernière adresse fournie, à savoir le ______, route de N______, au O______, avait débuté le 15 octobre 2022, soit après l'expiration du délai de six mois.

Dès lors, sans le déclarer à l'autorité compétente, les époux avaient quitté la Suisse au plus tard le 1er décembre 2020, date à partir de laquelle ils n'avaient pas été en mesure de prouver l'existence d'un domicile effectif à M______ et ce pendant une période supérieure à six mois.

D. a. Par acte remis à la poste le 27 février 2023, complété le 17 mars 2023, B______ et A______ ont interjeté recours contre le jugement du TAPI auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à ce que celle-ci « [revienne] sur la décision de l'OCPM ».

Ils vivaient à M______ depuis 30 ans et n'avaient jamais quitté la Suisse.

Durant les derniers mois, il leur était arrivé de confier leurs enfants à leur grand‑mère, qui vivait à P______, ce qui avait conduit l'OCPM à considérer qu'ils avaient quitté la Suisse.

Ils enseignaient respectivement à Q______ et entre M______ et R______. Leurs enfants allaient à l'école à G______ et y pratiquaient le karaté. Leurs véhicules étaient immatriculés à M______ et ils étaient assurés en Suisse.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours, persistant dans les termes de sa décision, faute d'éléments nouveaux et probants.

c. Dans leur réplique, complétée à plusieurs reprises, B______ et A______ ont indiqué que, pendant la période litigieuse, ils avaient toujours vécu à K______.

Ils n'avaient jamais dit à la police qu'ils habitaient en I______ et demandaient à pouvoir lire le rapport de police.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA - E 5 10).

1.1 L'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (art. 65 al. 2 1ère phr. LPA).

1.2 En l'espèce, les recourants n'ont pas pris de conclusions formelles en annulation du jugement attaqué. Cela étant, ils ont indiqué faire recours contre celui-ci et demandé à la chambre de céans de revenir sur la décision de l'intimé. Ces éléments suffisent pour comprendre qu'ils sont en désaccord avec les deux décisions précitées.

Le recours répond ainsi aux exigences de l’art. 65 LPA et est donc recevable.

2.             Les recourants semblent se plaindre de la constatation inexacte des faits pertinents, dans la mesure où ils allèguent ne jamais avoir quitté M______. Ils soutiennent également qu’ils n’auraient jamais dit à la police l’avoir fait, et ont demandé à ce titre à pouvoir consulter le rapport de police.

2.1 Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).

2.2 L'étranger est tenu de collaborer à la constatation des faits et en particulier de fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (art. 90 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_161/2013 du 3 septembre 2013 consid. 2.2.1). Il est tenu de fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s’efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (art. 90 al. 1 let. b LEI).

Selon la jurisprudence, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 3.1 et 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.3, non publié in ATF 142 I 152).

2.3 En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/730/2023 du 04.07.2023 consid. 5.2 et les arrêts cités).

2.4 De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/791/2023 du 18 juillet 2023 consid. 7.7).

2.5 De jurisprudence constante, la chambre administrative accorde généralement valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés (ATA/449/2023 du 27 avril 2023 consid. 5d et les arrêts cités), sauf si des éléments permettent de s’en écarter.

2.6 En l'espèce, lors de leur audition séparée devant la police le 4 février 2021, les recourants ont affirmé de manière unanime et concordante être domiciliés en I______, depuis cinq semaines à deux mois. Ils ont tous les deux précisé avoir quitté leur logement à K______, six mois auparavant selon le mari et plus d'une année auparavant d'après sa femme.

Puis, le mari a indiqué à l'OCPM avoir vécu en I______, à H______, pendant la pandémie de Covid-19, après avoir été évacué de son logement.

Devant le TAPI, les recourants sont revenus sur leurs premières déclarations. Ils ont, dans un premier temps, prétendu habiter à K______ et, dans un deuxième temps, soutenu avoir habité chez plusieurs amis dans le canton de M______. Ils ont finalement avancé habiter au ______, avenue L______ depuis, à tout le moins, novembre 2020. Par ailleurs, dans leur réplique, ils ont affirmé que l'appartement situé à H______ appartenait à la grand-mère de leurs enfants.

Devant la chambre de céans, ils ont à nouveau modifié leur version des faits. Ils ont prétendu ne jamais avoir quitté la Suisse et avoir confié leurs enfants à leur grand‑mère, qui vivrait à P______, ce qui avait conduit l'OCPM à considérer qu'ils avaient quitté le pays. Ils ont également soutenu avoir toujours vécu à K______ et n'avoir jamais dit à la police qu'ils avaient habité en I______.

En agissant de la sorte, les recourants se contredisent de façon manifeste dans leur argumentation, en particulier sur leur séjour en I______. Devant l'intimé et le TAPI, ils ont clairement indiqué y avoir habité, de sorte qu'ils ne sauraient, de bonne foi, désormais le nier, simplement pour éviter les conséquences juridiques découlant de ce fait. La chambre de céans relève également qu'ils se contredisent sur le lieu d'habitation de la grand-mère de leurs enfants – qui se situerait tantôt à H______, tantôt à P______ –, de sorte que leurs déclarations selon lesquelles l'intimé aurait considéré à tort qu'ils avaient quitté la Suisse uniquement parce que la précitée aurait parfois gardé ses petits-enfants n'emportent aucune conviction.

De plus, le mari ne peut être suivi quand il affirme désormais ne jamais avoir dit à la police qu'il avait quitté la Suisse. Ses déclarations ressortent de son procès-verbal d'audition et de celui de sa femme, qu'il ne soutient pas avoir contesté. Rien ne justifie dès lors de s’écarter du contenu de ce document, qui a été rédigé par des policiers assermentés et a ainsi, conformément à la jurisprudence précitée, une valeur probante.

Il sera encore précisé que les recourants ont eu connaissance des procès‑verbaux de leur audition après avoir été entendus par la police, leur signature respective apposée sur ces documents en attestant. Ils ne peuvent dès lors prétendre ne pas les avoir lus avant l'ouverture de la procédure administrative dont ils font l'objet. Quoiqu'il en soit, ils ont consulté, à tous le moins devant la chambre de céans, le dossier de la cause, qui contient le rapport de police du 5 février 2021 et lesdits procès-verbaux. Ils ont donc également pris connaissance de ces documents en cours de procédure, de sorte que leur demande a été satisfaite et leur droit d'être entendus pleinement respecté.

Enfin, aucun document fourni par les recourants ne permet de retenir qu'ils auraient habité à M______ pendant la période litigieuse (décembre 2020 à juin 2021). En particulier, presque aucune des photos qu'ils ont produites, plus d'une quinzaine, ne porte sur ladite période, trois d'entre elles seulement ayant été capturées à ce moment-là, de surcroît uniquement au début de celle‑ci, plus précisément les 6 et 24 décembre 2020 et 8 janvier 2021. Aucun élément apparaissant sur ces trois images ne permet d'ailleurs de retenir qu'elles auraient été prises à M______. Pour le surplus, si les recourants produisent un nouveau contrat de bail genevois, celui-ci a toutefois pris effet le 15 octobre 2022, bien après l'expiration du délai de six mois à compter de leur départ de la Suisse. Ne concernant ainsi pas la période litigieuse, ce document n'est pas pertinent.

Ainsi, et comme l'a retenu à juste titre le TAPI, en présence de telles déclarations contradictoires, la préférence doit être donnée aux premières déclarations des recourants. Il sera donc retenu que ceux-ci ont, sans le déclarer, quitté la Suisse au plus tard le 1er décembre 2020, date à partir de laquelle ils n'ont pas prouvé l'existence d'un domicile effectif à M______, et ce pendant une période supérieure à six mois. Il est à ce titre indifférent qu'ils allèguent enseigner en Suisse et que leurs enfants sont toujours allés à l'école à M______, ces éléments ne les empêchant nullement, dans les faits, d'avoir habité en I______ pendant la période litigieuse.

Au vu de tout ce qui précédé, l'intimé et le TAPI ont correctement établi les faits en retenant que les recourants avaient quitté la Suisse à tout le moins au mois de décembre 2020 sans y revenir avant le 30 juin 2021 en tout cas.

Le grief sera écarté.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit du jugement de la décision de l'OCPM constatant la caducité des autorisations d'établissement des recourants.

3.1 La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Sénégal.

3.2 L’autorisation prend fin lorsque l’étranger déclare son départ de Suisse (art. 61 al. 1 let. a LEI).

Si un étranger quitte la Suisse sans déclarer son départ, l’autorisation d’établissement prend automatiquement fin après six mois (art. 61 al. 2 ab initio LEI). Cette extinction s’opère de iure (arrêt du Tribunal administratif fédéral 139/2016 consid. 5.1 et les références citées), quels que soient les causes de cet éloignement et les motifs de l'intéressé (ATF 120 Ib 369 consid. 2c ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_19/2017 du 21 septembre 2017 consid. 4.1). Sous cet angle, les autorités ne jouissent pas d'un pouvoir d'appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder à un examen de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_19/2017 du 21 septembre 2017 consid. 5 et les arrêts cités).

Sur demande, l’autorisation d’établissement peut être maintenue pendant quatre ans (art. 61 al. 2 in fine LEI).

Les délais prévus à l’art. 61 al. 2 LEI ne sont pas interrompus en cas de séjour temporaire en Suisse à des fins de visite, de tourisme ou d’affaires (art. 79 al. 1 LEI). La demande de maintien de l’autorisation d’établissement doit être déposée avant l’échéance du délai de six mois (art. 79 al. 2 OASA). Elle sera adressée, dûment motivée, à l’autorité cantonale compétente en matière d’étrangers, qui statue librement dans les limites de sa compétence (directives et commentaires du secrétariat d’État au migrations [ci-après : SEM], domaine des étrangers, état au 1er novembre 2019, ch. 3.5.3.2.3).

3.3 Si l'étranger se constitue un domicile à l'étranger et y rentre les week-ends, mais qu'il séjourne en Suisse toute la semaine pour y exercer une activité indépendante, il y maintient la présence physique nécessaire au maintien de son autorisation d'établissement (ATF 145 II 322 consid. 2.5).

Une autorisation ne peut subsister lorsque l'étranger passe l'essentiel de son temps hors de Suisse, voire y transfère son domicile ou le centre de ses intérêts, sans jamais toutefois y rester consécutivement plus du délai légal, revenant régulièrement en Suisse pour une période relativement brève, même s'il garde un appartement en Suisse. Dans ces conditions, il faut considérer que le délai légal n'est pas interrompu lorsque l'étranger revient en Suisse avant l'échéance de ce délai non pas durablement, mais uniquement pour des séjours d'affaires ou de visite (ATF 120 Ib 369 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_853/2010 du 22 mars 2011 et 2C_581/2008 du 6 novembre 2008 consid. 4.1).

Un étranger titulaire d'une autorisation d'établissement perd cette dernière s'il s'établit en I______ et y vit comme un frontalier (ATA/1227/2022 du 6 décembre 2022 consid. 8b et les arrêts cités).

3.4 En l'espèce, il est désormais établi que les recourants ont, sans en faire la déclaration, quitté la Suisse à tout le moins au mois de décembre 2020 et qu'ils n'y ont pas été domiciliés jusqu'au 30 juin 2021 en tout cas, soit pendant une période supérieure à six mois. Leur autorisation d’établissement a donc automatiquement pris fin le 30 juin 2021.

Si certaines hypothèses permettent certes le maintien de l'autorisation, aucune d'entre elles n'est toutefois réalisée en l'occurrence. Les recourants n'allèguent pas avoir fait une telle demande avant le 30 juin 2021 et échouent à démontrer avoir séjourné en Suisse toute la semaine pendant la période litigieuse pour revenir en I______ seulement les week-ends. À ce titre, le fait que l'épouse ait continué à travailler à M______, que les filles des recourants y aient poursuivi leur scolarité et que ces derniers aient encore reçu du courrier à leurs anciennes adresses à M______, soit au demeurant des adresses postales et non de domiciliation, ne suffit pas pour retenir qu'ils auraient maintenu en Suisse une présence physique telle qu'elle justifierait le maintien de leur autorisation d'établissement. En effet, conformément à la jurisprudence précitée, ces circonstances ne constituent que des séjours temporaires n'interrompant pas le délai légal de l'art. 61 al. 2 LEI.

Au vu de ce qui précède, l'intimé a constaté à bon droit la caducité des autorisations d'établissement des recourants, celles-ci ayant pris fin le 1er juin 2021.

Le grief sera donc écarté et le recours, entièrement mal fondé, rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 février 2023 par A______ et B______, agissant pour eux-mêmes et pour C______, D______ et E______, enfants mineures, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 janvier 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge solidaire de A______ et B______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. de Lausanne 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ et B______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.