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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1402/2023

ATA/784/2023 du 18.07.2023 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1402/2023-FORMA  ATA/784/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______, agissant pour son fils B______ recourante

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES intimé



EN FAIT

A. a. Le 17 novembre 2022, A______, agissant pour son fils B______, né le ______ 2007, a sollicité une bourse pour l’année de transition professionnelle que celui-ci allait suivre auprès du centre de formation préprofessionnelle.

b. Par décision du 7 mars 2023, le service des bourses et prêts d’études (ci-après : SBPE) a refusé ses prestations, le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) de la mère de l’étudiant permettant de couvrir les charges de ces deux personnes.

c. Dans sa réclamation, la mère a fait valoir que le père de son enfant ne contribuait pas à l’entretien de celui-ci et que le RDU était erroné.

d. Par décision du 30 mars 2023, le SBPE a rejeté la réclamation.

Il avait pris en compte un RDU de CHF 66'672.-, fondé sur les indications de l’administration fiscale cantonale, quand bien même la demanderesse avait indiqué un revenu annuel brut de CHF 108'850.-. Il n’avait pas pris en compte les revenus du père, mais uniquement la rente pour enfant perçue par la mère et n’avait pas tenu compte d’éventuelles prestations complémentaires. Les conditions d’un cas de rigueur ne s’appliquaient pas au mode de calcul.

B. a. Par acte expédié le 27 avril 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, la mère a recouru contre cette décision. Elle avait trois enfants à charge et ne percevait pas de contributions d’entretien. Elle ne comprenait pas la décision et avait un sentiment d’injustice. Le RDU ne tenait pas compte de l’augmentation du coût de la vie. Ses revenus n’avaient augmenté ni en 2021 ni en 2022. Elle s’interrogeait s’il était normal que ses enfants soient souvent « dans la survie financière » et ne pouvaient pas mettre en place des petits projets personnels, tels un voyage linguistique. Le SBPE n’avait pas répondu à son argument relatif à sa situation financière fragile.

b. Le SBPE a conclu au rejet du recours.

c. La recourante ne s’est pas manifestée dans le délai imparti pour répliquer.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             La recourante semble contester que le RDU soit défini sur les revenus 2020 et 2021 et demande l’application d’un cas de rigueur.

2.1 Le financement de la formation incombe aux parents et aux personnes tierces qui y sont légalement tenus ainsi qu'à la personne en formation elle-même (art. 1 al. 2 de la loi sur les bourses et prêts d'études du 17 décembre 2009 - LBPE - C 1 20). L'aide financière est subsidiaire (art. 1 al. 3 LBPE).

2.2 Si les revenus de la personne en formation, de ses parents (père et mère), de son conjoint ou sa conjointe ou sa ou son partenaire enregistré et des autres personnes qui sont tenues légalement au financement de la formation, ainsi que les prestations fournies par des personnes tierces ne suffisent pas à couvrir les frais de formation, le canton finance, sur demande, les besoins reconnus par le biais de bourses ou de prêts (art. 18 al. 1 LBPE).

Une aide financière est versée s'il existe un découvert entre les frais reconnus engendrés par la formation et l'entretien de la personne en formation et les revenus qui peuvent être pris en compte selon l'art. 18 al. 1 et 2 LBPE. Le découvert représente la différence négative entre les revenus de la personne en formation et des personnes légalement tenues de financer les frais de formation et les coûts d'entretien et de formation de ces mêmes personnes (art. 19 al. 2 LBPE). Le calcul du découvert est établi à partir du budget des parents ou des personnes légalement tenues au financement de la personne en formation. Ce budget tient compte des revenus et des charges minimales pour couvrir les besoins essentiels (art. 19 al. 3 LBPE).

Le budget des parents ou des personnes légalement tenues au financement de la personne en formation sert à déterminer la situation financière de la personne en formation (art. 9 al. 1 du règlement d'application de la LBPE du 2 mai 2012 - RBPE - C 1 20.01). Si le budget présente un excédent de ressources, il est divisé par le nombre d'enfants et pris en considération dans le calcul du budget de la personne en formation (let. a) ; s'il présente un excédent de charges, il est divisé par le nombre de personnes qui composent la famille et considéré comme une charge dans le calcul du budget de la personne en formation (let. b ; art. 9 al. 4 RBPE).

Sont intégrés dans le budget de la personne en formation tous les revenus réalisés par la personne pendant son année de formation, ainsi que ceux des personnes définies à l'al. 1 (art. 10 al. 2 RBPE).

2.3 Selon l’art. 20 al. 1 LPBE, sont considérés comme frais résultant de l'entretien : (a) un montant de base défini par le règlement ; (b) les frais de logement sur la base des forfaits par nombre de personnes définis dans le règlement ; (c) les primes d'assurance-maladie obligatoire dans les limites des forfaits définis par le règlement ; (d) le supplément d'intégration par personne suivant une formation dans les limites des forfaits définis par le règlement ; (e) les impôts cantonaux tels qu'ils figurent dans les bordereaux établis par l'administration fiscale cantonale et (f) les frais de déplacement et de repas sur la base des forfaits définis dans le règlement. Selon l’art. 20 al. 2, sont considérés comme frais résultant de la formation les forfaits fixés par le règlement.

2.4 Le revenu déterminant est celui résultant de la LRDU (art. 18 al. 2 LBPE). Le calcul du RDU est individuel. Il s'applique aux personnes majeures et à l'ensemble des prestations sociales visées à l'art. 13 LRDU, parmi lesquelles les bourses d'études (art. 13 al. 1 let. b ch. 5 LRDU ; art. 8 al. 1 LRDU).

Les éléments énoncés aux art. 4 à 7 LRDU, constituant le socle du RDU, se définissent conformément à la législation fiscale genevoise, en particulier la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08). Le socle du RDU comprend l'ensemble des revenus conformément à l'art. 4 LRDU, lequel fait une énumération exemplative de ceux-ci. Le socle du RDU est calculé automatiquement sur la base de la dernière taxation fiscale définitive (art. 9 al. 1 LRDU). Il peut être actualisé (art. 9 al. 2 LRDU). Du montant obtenu à l'art. 4 LRDU, sont imputées les déductions mentionnées à l'art. 5 LRDU.

2.5 En l’espèce, l’autorité intimée n’a pas tenu compte des revenus du père, quand bien même celui-ci est légalement tenu à contribuer aux frais de formation de son fils. Il s’est uniquement référé au revenu annuel de la mère de l’étudiant et a établi le RDU en se fondant, à juste titre, sur la dernière année de taxation fiscale définitive, soit celle de 2021. Le RDU s’est élevé, subsides d’assurance-maladie et aide au logement compris, à CHF 96'194.-. Les charges annuelles de la recourante et ses trois enfants, dont le détail ressort du procès-verbal de calcul effectué par le SBPE, lequel est conforme aux forfaits fixés dans le règlement, se montent à CHF 74'074.-. Compte tenu de l’excédent annuel de plus de CHF 20'000.-, c’est à juste titre que le SBPE a retenu qu’en l’absence de découvert, l’étudiant ne pouvait prétendre à une aide financière. Tel serait également le cas, si les charges devaient être augmentées pour tenir compte du renchérissement du coût de la vie, vu l’important excédent.

3.             La recourante sollicite l’allocation d’une bourse pour son fils pour « cas de rigueur ».

3.1 Selon l’art. 23 LBPE, lors de l'octroi des bourses et des prêts d'études, il est tenu compte des particularités que comportent les filières d'études en matière d'organisation dans le temps ou de contenu (al. 1). La bourse peut être complétée par un prêt lorsqu'une formation fortement structurée rend plus difficile l'exercice d'une activité professionnelle en parallèle. Il en va de même lorsque les frais de formation dépassent largement les frais reconnus (al. 2). Des bourses pour des cas de rigueur peuvent être octroyées dans les limites des disponibilités budgétaires (al. 3). L’art. 16 RBPE, intitulé « cas de rigueur », prévoit l’allocation de bourses pour les personnes en formation qui, pour des raisons familiales, personnelles ou de santé, se trouveraient dans une situation de précarité (art. 16 RBPE).

Il ressort des travaux préparatoires qu'il était nécessaire de prévoir un régime particulier pour les personnes en formation se trouvant dans des situations difficiles, notamment en raison du refus des parents de prendre en charge les frais de formation ou en cas de reprise d'une formation après des années consacrées à l'entretien de personnes à charge (MGC 2008-2009 XI/2, p. 14'941).

3.2 En l’espèce, le SBPE a considéré que l’étudiant ne remplissait pas les conditions du cas de rigueur. Celles-ci ne s’appliquaient pas au mode de calcul. Comme cela vient d’être vu, l’excédent de ressources de la recourante ne permet, en effet, pas l’octroi d’une aide financière.

La recourante, quand bien même elle soutient se trouver dans une situation financière délicate, ne se prévaut pas d'une des situations évoquées dans les travaux préparatoires. Ceux-ci mentionnent la reprise d’une formation après des années consacrées à l'entretien de personnes à charge ou un refus des parents de prendre en charge les frais de formation (ATA/458/2021 du 27 avril 2021 consid. 4h ; ATA/610/2020 du 23 juin 2020 consid. 7d). Tel n’est pas le cas en l’espèce, le fils de la recourante ne reprenant pas une formation après des années consacrées à l’entretien d’un proche et la recourante n’alléguant pas qu’elle refuserait de prendre en charge les frais de formation de son fils.

C’est en conséquence sans violer le droit ni son large pouvoir d’appréciation que le SBPE a refusé l’octroi d’une bourse pour cas de rigueur.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Il ne sera pas perçu d’émolument, vu la nature du litige, et il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 avril 2023 par A______, agissant pour son fils B______, contre la décision du service des bourses et prêts d’études du 30 mars 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, agissant pour son fils B______, ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Florence KRAUSKOPF, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :