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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1634/2022

ATA/731/2023 du 04.07.2023 sur JTAPI/212/2023 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1634/2022-ICCIFD ATA/731/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 juillet 2023

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par B______, mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 février 2023 (JTAPI/212/2023)


EN FAIT

A. a. Le litige concerne une procédure en rappel d’impôt, ainsi qu’une procédure pour soustraction d’impôt ouverte à l’encontre de A______ (ci-après : la société ou la contribuable) pour les années 2010 à 2018.

b. Inscrite au Registre du commerce (ci-après : RC) en 2008 et active dans le domaine du polissage pour l'horlogerie et la bijouterie, la société a pour actionnaire C______. Celui-ci est également titulaire de l’entreprise individuelle C______ (ci-après : l’entreprise individuelle), active dans le même secteur.

c. Au moment du transfert d’exploitation de l’entreprise individuelle à la société en 2008, ces deux entités ont conclu plusieurs contrats, à savoir :

-          un contrat de bail à loyer du 1er février 2008, pour une durée de cinq ans, par lequel C______ a donné en location à la société du mobilier et du matériel moyennant un loyer mensuel de CHF 7'500.-. Cette convention prévoyait également que lors de l’arrêt de l’activité du propriétaire, l’ensemble du mobilier et du matériel serait cédé pour CHF 1.- au locataire. Pour la société, le contrat a été signé par C______.

-          un contrat de bail à loyer du même jour, selon lequel le précité a sous-loué à la société des locaux commerciaux et quatre places de parc à D______ ;

-          un contrat de collaboration (mandat), à teneur duquel C______ devait apporter son expertise à la société en matière de gestion et lui permettre de poursuivre la marche des affaires.

B. a. Le 28 août 2020, la société a expliqué à l’administration fiscale cantonale
(ci-après : AFC‑GE), à la suite d’une demande de renseignements émanant de cette dernière dans le cadre d’une procédure de contrôle ouverte contre C______, que le mobilier et le matériel, bien qu’amortis, conservaient une valeur certaine d’exploitation. Le montant du loyer avait été déterminé en partant du principe que si elle les avait acquis neufs, elle aurait dû investir CHF 450'000.-. Par ailleurs, elle avait pratiqué un amortissement de 20%.

C’est à cette date que la contribuable a porté à la connaissance de l’AFC-GE les trois contrats susmentionnés.

b. Par pli du 17 septembre 2020, l’AFC-GE a ouvert à l’encontre de la société une procédure en rappel d’impôt, ainsi qu’une procédure pour soustraction d’impôt concernant les années 2010 à 2018, au motif qu’elle aurait accordé des distributions dissimulées à C______. Celles-ci prenaient la forme de loyer excessif, voire fictif, ainsi que de revenus versés par la société E______ (ci-après : E______), consistant en la vente de poussière et de déchets d’or.

Un délai a été accordé à la société pour se déterminer sur les reprises envisagées, explicitées dans ce courrier.

c. La société a présenté des observations.

d. Le 18 décembre 2020 et 7 avril 2021, l’AFC-GE a informé la contribuable de la clôture des procédures ouvertes le 17 septembre 2020. Elle lui a notifié des bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2010 à 2018, en explicitant le calcul des reprises.

L’AFC-GE lui a également notifié des bordereaux d’amende pour ces mêmes périodes, en arrêtant leur quotité à 0.5 fois les impôts soustraits. En accordant une rémunération surfaite à son actionnaire unique dans le cadre d’un contrat de location, ainsi que des distributions dissimulées de bénéfice, la société n’avait pas été imposée selon sa réelle capacité contributive.

e. Les 12 janvier et 6 mai 2021, la société a élevé réclamation à l’encontre de ces bordereaux.

S’agissant des loyers excessifs se rapportant au mobilier et au matériel, ce n’était pas la valeur du produit qui déterminait son prix locatif, mais sa valeur d’utilisation ou d’exploitation. À titre d’exemple, un loueur de voitures continuait à louer un véhicule totalement amorti aux mêmes conditions que lorsqu’il l’avait mis sur le marché. La valeur locative d’un mobilier totalement amorti ne saurait être proche de zéro.

C______ ne détenait que 80% des actions de la société, mais non la totalité du capital. Il s’était par ailleurs toujours montré transparent envers l’AFC-GE, si bien que la quotité des amendes devait être réduite au tiers des impôts éludés.

f. La réclamation portait également sur un autre point (loyer des locaux commerciaux), qui n’est actuellement plus litigieux.

g. Le 7 juillet 2021, l’AFC-GE a informé la contribuable qu’elle entendait modifier ses bordereaux de rappel d’impôt et d’amendes 2010 en sa défaveur pour tenir compte d’une erreur de calcul qu’elle avait commise. La reprise devait être portée de CHF 50'754.- à CHF 55'368.-. Un délai a été accordé à la société pour faire valoir d’éventuelles observations.

h. Par pli du 15 juillet 2021, la société a contesté la reformatio in pejus envisagée par l’AFC-GE.

i. Par deux décisions du 21 avril 2022, l’AFC-GE a :

-          réformé in pejus les bordereaux de rappel d’impôt et d’amendes pour l’année 2010 dans le sens de son courrier du 7 juillet 2021 ;

-          rejeté la réclamation en tant qu’elle concernait les périodes fiscales 2011 à 2013 et

-          admis partiellement celle-ci dans la mesure où elle se rapportait aux années 2014 à 2018.

S’agissant des reprises portant sur le loyer et le matériel, la société avait versé 131 mensualités de CHF 7'500.- pour la période du 1er février 2008 au 31 décembre 2018, soit CHF 982'500.-. Dans sa lettre du 28 août 2020, la recourante avait expliqué que le loyer avait été déterminé sur la base d’une valeur à neuf de CHF 450'000.- et d’une durée de 60 mois (CHF 450'000.- / 60). Comme seul justificatif, elle avait remis une copie de l’assurance choses, souscrite le 2 février 2007 par C______, faisant état de valeur à neuf de CHF 430'000.-.

Selon le bilan au 31 décembre 2007 de l’entreprise individuelle, le prix d’acquisition du matériel s’élevait à CHF 245'443.- et la valeur comptable à CHF 75'552.-. En versant à C______ des loyers pour CHF 982'500.-, alors que le coût d’acquisition des biens s’élevait tout au plus à CHF 245'443.-, la société lui avait accordé une distribution dissimulée de bénéfice. Il n’existait aucun motif économique pouvant justifier que C______ ait obtenu un revenu locatif correspondant à quatre fois la valeur d’acquisition des actifs loués sur la période du 1er février 2008 au 31 décembre 2018.

Afin de déterminer le montant de la location qui aurait été pratiqué entre tiers indépendants, il convenait de se fonder sur le modèle du leasing, dont les tarifs apparaissaient être les plus adéquats. La valeur vénale des biens au moment de la conclusion du contrat avait été estimée à deux fois la valeur comptable figurant au bilan de l’entreprise individuelle au 31 décembre 2007, soit CHF 151'104.-. Le coût d’acquisition des biens loués s’élevant au maximum à CHF 245'443.-.

Le taux d’intérêt du leasing avait été arrêté à 5.5%, conformément à la circulaire de l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC‑CH) sur les taux d’intérêt admissibles en 2008 et n’avait pas été modifié pour les périodes ultérieures. La durée de vie économique avait été fixée à cinq ans, comme retenu par la société.

La redevance mensuelle de leasing durant les 60 mois s’élevait à CHF 2'886.- et non à CHF 7'500.-. Le montant de CHF 2'886.- avait été déterminé à partir des données ci-dessous et d’un calculateur en ligne.

 

 

Taux d'intérêt

5.50%

Nombre de mensualités

60

Valeur marchande au début du contrat

151'104

Valeur marchande à l'échéance du contrat

0

Montant de la mensualité

2'886

Intérêts payés durant la totalité du contrat

22'071

L’AFC-GE a annulé les reprises relatives aux loyers payés pour la location de locaux commerciaux. Elle a, en revanche, maintenu les redressements portant sur la vente non déclarée de déchets de métaux précieux, étant donné qu’ils n’étaient pas contestés.

La quotité des amendes avait été arrêtée à 0.5 fois le montant des impôts éludés, au vu de la bonne collaboration de la contribuable et du fait que les soustractions avaient été commises par négligence. Cela étant, pour les années 2010, ainsi que 2014 à 2018, leur montant avait été revu à la hausse, compte tenu de la reformatio in pejus, et la baisse en raison de l’admission partielle de la réclamation.

C. a. Par acte du 19 mai 2022, la société a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) à l’encontre des décisions du 21 avril 2022 en concluant à l’annulation des reprises relatives à la location du mobilier et du matériel.

b. Par jugement du 23 février 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Les rubriques figurant dans les comptes annexés aux déclarations fiscales 2010 à 2013 et 2015 à 2018 avaient été rédigées de manière large, de sorte que rien ne permettait de déterminer que, durant les années en cause, la contribuable avait pris en location du mobilier et du matériel à C______. L’AFC-GE n’avait ainsi pas fait preuve de négligence en taxant la société sans procéder à des investigations relatives aux charges de loyer comptabilisées par la précitée. Ce n’était que le 28 août 2020, soit après l’entrée en force des taxations litigieuses, que l’autorité intimée avait eu connaissance du contrat de bail du 1er février 2008 conclu entre la société et C______. Il existait ainsi un fait nouveau inconnu jusque-là de l’autorité, justifiant l’ouverture d’une procédure de rappel d’impôt à l’encontre de la société.

Il résultait du bilan au 31 décembre 2007 de l’entreprise individuelle que la valeur d’acquisition des actifs mobilisés (mobilier et matériel) s’élevait à CHF 245'443.07. Ce montant devait être ramené à CHF 75'552.72, si l’on tenait compte des amortissements de CHF 169'890.35, comptabilisés dans le fonds d’amortissement. La société – dont l’actionnaire unique ou à tout le moins majoritaire était C______ – n’avait fourni ni explication, ni pièce justificative quant à la raison pour laquelle elle estimait que le prix d’acquisition des biens s’établissait à CHF 450'000.-, alors que ce coût avait été enregistré pour CHF 245'000.- dans la comptabilité de l’entreprise individuelle du précité. Une valeur de CHF 450'000.- déterminante pour fixer le loyer se révélait manifestement excessive. La société n’aurait jamais versé un loyer de CHF 7'500.- à un tiers indépendant. En d’autres termes, elle n’avait accepté de payer une telle somme qu’en raison de la qualité d’actionnaire (unique ou majoritaire) du bailleur. Ce faisant, elle avait accordé à ce dernier une prestation appréciable en argent.

Afin d’évaluer le montant des reprises, il convenait de déterminer le loyer du marché. Il n’existait manifestement aucun marché permettant d’estimer à quelle valeur devait être loués des équipements de catégories aussi diverses (soit machine et paniers de lavage, déminéralisateurs, 22 postes de travail établis et machines à polir, appareil à vapeur, sableuse de marque Bremor, coffre, armoires avec outillage, appareil de meulage, matériel informatique : 3 postes de travail, microscope, petite sableuse, climatisation et aspiration des poussières, outillage à polir, mobilier divers comprenant des chaises de travail, diverses armoires, bureaux, vestiaires, téléphonie, etc.). Pour déterminer la valeur des biens loués, l’AFC-GE avait pris comme point de départ la valeur comptable au 31 décembre 2007 des objets en question (amortissement déduits) qu’elle avait doublée en considérant que ce montant représentait le prix du marché au moment de la location. En raison des prescriptions du droit commercial, la valeur comptable était certes souvent inférieure à la valeur vénale. Il n’était toutefois pas établi que la société aurait procédé à des amortissements excessifs sur les biens pris en location. En retenant comme valeur du marché le double de la valeur comptable, à savoir CHF 151'104.-, l’AFC-GE avait favorisé la recourante. Au surplus, celle-ci ne proposait aucune valeur réaliste.

Pour ce qui était du taux d’intérêt applicable, il convenait de se référer, conformément à la jurisprudence, à la circulaire de l’AFC-CH sur les taux d’intérêt 2008 déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent. En ce qui concernait les prêts des actionnaires ou des associés, le taux s’élevait au maximum à 5.5% en cas d’octroi de crédits d’exploitation dans le commerce et l’industrie.

La société avait pratiqué un amortissement sur cinq ans, ce qui équivalait à 60 mensualités.

Il en découlait que la mensualité de leasing s’élevait à CHF 2'873.-, selon le calculateur de leasing en ligne MultiPoints (https://www.multipoints.ch/index.
php?id=23&L=1). Ce montant était très proche de celui retenu par l’AFC-GE, soit CHF 2'886.-, lequel était très légèrement plus favorable à la société.

Pour le calcul des reprises, l’AFC-GE avait considéré que la société avait accordé un loyer excessif durant les cinq premières années à compter de la conclusion du contrat, le 1er février 2008, étant rappelé que les années 2008 et 2009 n'étaient pas concernées par la présente procédure de rappel d’impôt. Le montant mensuel des reprises devait être fixé par différence entre le loyer convenu (CHF 7'500.-) et le loyer du marché (CHF 2'886.-), à savoir CHF 4'614.-, comme calculé à juste titre par l’AFC-GE. Pour la période subséquente, l’AFC-GE avait estimé que le loyer versé par la recourante était fictif et avait arrêté le montant de la reprise mensuelle à CHF 7'500.-. Selon elle, dans le cadre d’un leasing financier, le locataire devenait propriétaire du bien à l’échéance du contrat ou possédait une option d’achat. Ce point de vue devait être approuvé.

La quotité des amendes, fixée à 0.5 fois les impôts éludés, se révélait appropriée. En faveur de l’intéressée, l’AFC-GE avait retenu sa bonne collaboration. À son détriment, il convenait de retenir la réitération des soustractions, qui s’étaient déroulées durant dix ans.

D. a. Par acte du 23 mars 2023, la contribuable a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, en concluant à son annulation.

Le calcul retenu par l’AFC-GE ne permettait pas un résultat économiquement acceptable. Elle s’efforçait de péjorer son parc matériel. L’AFC-GE ne semblait elle-même pas certaine du bien-fondé de son mode de calcul.

L’arrêt 2C_333/2017 cité par le TAPI ne s’appliquait pas dans sa situation puisqu’il avait été rendu en 2018, alors que les périodes litigieuses s’étendaient de 2010 à 2018.

Ce n’était pas la valeur du produit qui déterminait son prix locatif mais sa valeur d’utilisation ou d’exploitation. Même amorti, un mobilier pouvait continuer à être loué.

b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours. Contrairement à ce qu’indiquait la recourante, l’arrêt 2C_333/2017 concernait les périodes fiscales 2002 à 2010. Elle ne voyait pas pourquoi cette jurisprudence ne pourrait pas s’appliquer aux périodes fiscales 2010 à 2018.

c. Par réplique du 26 avril 2023, la société a contesté l’application rétroactive de l’arrêt 2C_333/2017, étant rappelé qu’il s’agissait d’une procédure de rappel d’impôt et que les taxations fiscales 2010 à 2018 avaient été entérinées par
l’AFC-GE. Cet arrêt n’était pas pertinent. Il traitait de la location de véhicules à prix surfaits par l’actionnaire à sa société, alors que dans son cas, il s’agissait de location de matériel productif servant à l’exploitation et donnant une valeur de rendement à l’entreprise. L’actionnaire n’avait pas appliqué de prix surfaits et il n’y avait eu aucun enrichissement personnel. Il n’était pas possible de réduire la vie économique d’un objet professionnel à une durée de vie de 60 mois. Un objet en exploitation ne pouvait être considéré comme obsolète. Même après amortissement, il ne saurait être mis à disposition gratuitement à un tiers indépendant.

d. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17); art. 145 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11)).

2.             Se pose en premier lieu la question du droit applicable.

2.1 De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues en fonction du droit au vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (ATA/1727/2019 du 26 novembre 2019 consid. 3a).

2.2 En l'espèce, le litige porte sur l'ICC et l’IFD 2010 à 2018 de la recourante. La cause est ainsi régie par le droit en vigueur durant ces périodes, à savoir, s'agissant de l'IFD, par les dispositions de la LIFD et, pour ce qui est de l'ICC, par celles de la loi sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15). La question à trancher dans le cadre du recours étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme l'admet la jurisprudence (ATF 135 II 260 ; ATA/463/2020 du 7 mai 2020 consid. 6b).

3.             Il convient de préciser, à titre liminaire, que le droit de procéder au rappel d’impôt n’est pas prescrit (art. 152 al. 1 et 3 LIFD ; art. 53 al. 2 et 3 LHID ; art. 61 al. 1 et 3 LPFisc), pas plus que la poursuite pénale de l’infraction de soustraction d’impôt consommée, et ce tant en application de l’ancien (art. 184 al. 1 let. b et al. 2 aLIFD, art. 58 al. 2 aLHID et art. 81 LPFisc, dans leur teneur avant le 1er janvier 2017) que du nouveau droit (art. 184 al. 1 let. b ch. 1 et al. 2 LIFD, art. 58 al. 2 let. a et al. 3 LHID et art. 77 al. 1 let. b et al. 2 LPFisc, dans leur teneur depuis le 1er janvier 2017).

4.              

4.1 Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque-là inconnus de l’autorité fiscale lui permettent d’établir qu’une taxation n’a pas été effectuée, alors qu’elle aurait dû l’être, ou qu’une taxation entrée en force est incomplète ou qu’une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou à un délit commis contre l’autorité fiscale, cette dernière procède au rappel de l’impôt qui n’a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 151 al. 1 LIFD ; art. 53 al. 1 LHID ; art. 59 al. 1 LPFisc).

4.2 En l’espèce, la recourante ne remet pas en cause les conditions de l’ouverture d’une procédure en rappel d’impôt. Elle ne conteste en particulier pas que les rubriques mentionnées dans les comptes annexés à ses déclarations fiscales 2010 à 2013 étaient rédigées de manière large, de sorte qu’il n’était pas possible de déterminer qu’elle avait pris du matériel en location à son actionnaire principal. La connaissance du contrat de bail du 1er février 2008 constituait dès lors un fait nouveau, ce que la recourante ne conteste pas. Seules sont donc litigieuses les reprises effectuées par l’autorité intimée pour les années fiscales 2010 à 2018 pour l’ICC et l’IFD à titre de distribution dissimulée de bénéfice.

5.             Devant la chambre de céans, la recourante conteste avoir accordé une prestation appréciable en argent à son actionnaire, faisant valoir que le matériel et le mobilier auraient pu être loués à un tiers dans les mêmes conditions.

5.1 Aux termes de l’art. 57 LIFD, l’impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Selon l’art. 58 al. 1 LIFD, le bénéfice net imposable comprend notamment le solde du compte de résultats (let. a), ainsi que tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats, qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l’usage commercial (let. b). Au nombre de ces prélèvements figurent les distributions dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l’usage commercial (let. b 5ème tiret).

Selon l’art. 24 al. 1 let. a LHID, l’impôt sur le bénéfice a pour objet l’ensemble du bénéfice net, y compris les charges non justifiées par l’usage commercial, portées au débit du compte de résultats. Cette règle est concrétisée en droit genevois par l’art. 12 let. a et h LIPM dans sa teneur en vigueur en 2008 et qui correspond sur ce point à l’art. 58 al. 1 let. a et b LIFD.

5.2 Selon la jurisprudence, il y a distribution dissimulée de bénéfice constitutive de prestation appréciable en argent lorsque les quatre conditions cumulatives suivantes sont remplies ; la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante ; cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près ; elle n’aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers ; la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que les organes de la société auraient pu se rendre compte de l’avantage qu’ils accordaient (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1006/2020 du 20 octobre 2021 consid. 5).

Il convient ainsi d’examiner si la prestation aurait été accordée dans la même mesure à un tiers étranger à la société, soit si la transaction a respecté le principe de pleine concurrence (« dealing at arm’s length » ; ATF 140 II 88 consid. 4.1). Le droit fiscal suisse ne connaissant pas, sauf disposition légale expresse, de régime spécial pour les groupes de sociétés, les opérations entre sociétés d’un même groupe doivent également intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence. En conséquence, il n’est pas pertinent que la disproportion d’une prestation soit justifiée par l’intérêt du groupe (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_181/2020 du 10 août 2020 consid. 5.2).

Une prestation appréciable en argent peut prendre la forme d’une renonciation à un produit, qui conduit à une diminution correspondante du résultat chez la société. Tel est par exemple le cas lorsqu’une société renonce totalement ou en partie à un revenu qui lui revient en faveur d’un détenteur de part ou d’un proche, ou qu’elle n’obtient pas, pour la prestation qu’elle a effectuée, la contre-prestation qu’elle aurait exigée d’un tiers (ATF 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_377/2014 du 26 mai 2015 consid. 9.4.1 ; ATA/533/2021 du 18 mai 2021 consid. 5b).

5.3 La mise en œuvre du principe de pleine concurrence suppose l’identification de la valeur vénale du bien transféré ou du service rendu. Lorsqu’il existe un marché libre, les prix de celui-ci sont déterminants et permettent une comparaison effective avec les prix appliqués entre sociétés associées (ATF 140 II 88 consid. 4.2 et les références citées).

S’il n’existe pas de marché libre permettant une comparaison effective, il convient alors de procéder selon la méthode de la comparaison avec une transaction comparable (ou méthode du prix comparable), qui consiste à procéder à une comparaison avec le prix appliqué entre tiers dans une transaction présentant les mêmes caractéristiques, soit en tenant compte de l’ensemble des circonstances déterminantes (ATF 140 II 88 consid. 4.2 ; 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_49/2018 du 23 avril 2019 consid. 4.2.2).

Dans un arrêt 2C_333/2017 du 12 avril 2018, le Tribunal fédéral a confirmé la position de l’AFC-GE selon laquelle le prix des biens – loués pour la totalité de leur vie économique – se rapprochait d’un leasing, qui calculait des marges tenant précisément compte d’une location couvrant toute la vie économique du bien. Le leasing pouvait aussi être un leasing de pure location (sans option d’achat). En outre, il intégrait un montant pour le remplacement du bien loué, voire son acquisition. Les taux d’intérêt retenus pour le leasing étaient basés sur ceux définis dans les circulaires pour les crédits commerciaux consentis aux actionnaires à leur société et étaient calculés sur la valeur résiduelle des biens à la fin de l’année (consid. 6.2).

5.4 Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d’office l’ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.4).

En matière fiscale, il appartient à l’autorité de démontrer l’existence d’éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d’impôts. S’agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve, ces règles s’appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5 ; ATA/1105/2021 du 19 octobre 2021 consid. 5a).

Par ailleurs, en droit fiscal, le principe de la libre appréciation des preuves s’applique. L’autorité forme librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées, en choisissant entre les preuves contradictoires ou les indices contraires qu’elle a recueillis. Cette liberté d’appréciation, qui doit s’exercer dans le cadre de la loi, n’est limitée que par l’interdiction de l’arbitraire. Il n’est pas indispensable que la conviction de l’autorité de taxation confine à une certitude absolue qui exclurait toute autre possibilité ; il suffit qu’elle découle de l’expérience de la vie et du bon sens et qu’elle soit basée sur des motifs objectifs (ATA/1105/2021 précité consid. 5a).

Dans le domaine des prestations appréciables en argent, telles que des distributions dissimulées de bénéfice, le fardeau de la preuve se répartit comme suit : les autorités fiscales doivent apporter la preuve que la société a fourni une prestation et qu’elle n’a pas obtenu de contre-prestation ou une contre-prestation insuffisante ; si les preuves recueillies par l’autorité fiscale fournissent suffisamment d’indices révélant l’existence d’une telle disproportion, il appartient alors au contribuable d’établir l’exactitude de ses allégations contraires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_343/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.2 et les références citées), étant précisé que, selon la jurisprudence, le devoir de collaboration du contribuable est particulièrement qualifié dans les relations internationales (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 du 20 décembre 2019 consid. 11.4 et les références citées). Ainsi, lorsqu’une disproportion est avérée, on peut fiscalement présumer de l’existence d’une prestation appréciable en argent en faveur du détenteur de parts ou de l’un de ses proches et il appartient alors au contribuable d’établir l’exactitude de ses allégations contraires. S’il n’y parvient pas, il doit supporter les conséquences de l’absence de preuve, qui consistent en l’imposition (ATF 144 II 427 consid. 8.3.1).

5.5 En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a loué du mobilier et du matériel à son actionnaire pour un montant de CHF 7'500.- par mois. Questionnée par l’intimée, la société a expliqué que le loyer avait été fixé en partant du principe que si elle avait dû acquérir ces biens neufs, elle aurait été contrainte de débourser la somme de CHF 450'000.-. Sur la base de ces explications, l’AFC-GE, suivi en cela par le TAPI, a considéré qu’il y avait eu une prestation appréciable en argent. Il résultait en effet du bilan de l’entreprise individuelle de l’actionnaire au 31 décembre 2007 que la valeur d’acquisition des actifs mobilisés s’élevait à CHF 245'443.07. Ce montant devait être ramené à CHF 75'552.72, si l’on tenait compte des amortissements de CHF 169'890.35, comptabilisés dans le fonds d’amortissement. Or, la recourante n’avait fourni aucune explication, ni produit de pièce justificative, quant à la raison pour laquelle elle estimait que le prix d’acquisition des biens s’élevait à CHF 450'000.- alors que ce coût avait été enregistré pour CHF 245'000.- dans la comptabilité de l’entreprise individuelle de l’actionnaire. Pour la période du 1er février 2008 au 31 décembre 2018, la recourante avait versé un loyer total de CHF 982'500.-. Le prix pratiqué pour la location du mobilier et du matériel appartenant à l’actionnaire était ainsi manifestement excessif. Il s’ensuivait que la société n’aurait jamais versé un tel loyer à un tiers indépendant.

La recourante ne conteste pas avoir calculé le montant de la location sur la base d’une valeur totale des biens de CHF 450'000.-, alors que le bilan de l’entreprise individuelle de son actionnaire pour l’année 2007 retenait, pour ces biens, une valeur de CHF 75'552.72, amortissements déduits. Elle reproche toutefois à l’autorité intimée d’avoir recouru à la méthode du leasing développée par le Tribunal fédéral dans l’arrêt 2C_333/2017, estimant que cette jurisprudence ne s’appliquait pas à sa situation, les périodes fiscales litigieuses étant antérieures au prononcé de l’arrêt.

L’arrêt précité porte sur la méthode à appliquer afin de déterminer de façon objective et concrète le montant de la location de véhicules qui aurait été convenu entre personnes indépendantes, c’est-à-dire en fonction du principe de pleine concurrence. Il s’agissait donc d’interpréter le droit fédéral, en particulier l’art. 58 LIFD, afin de déterminer si la méthode choisie par les autorités fiscales respectait le principe de la pleine concurrence. Dans la mesure où la présente espèce porte sur l’application des mêmes dispositions, l’interprétation qui en a été faite par le Tribunal fédéral trouve application. Le fait qu’il s’agit d’une procédure de rappel d’impôt pour l’IFD et les ICC des années 2010 à 2018 n’y change rien. L’arrêt 2C_333/2017 portait d’ailleurs également sur une procédure de rappel d’impôts pour l’IFD et les ICC des années 2002 à 2010.

Quant à savoir si la méthode choisie par l’autorité intimée respecte le principe de pleine concurrence, il y a lieu de relever ce qui suit. À l’instar de la situation prévalant dans l’arrêt précité, les biens étaient loués pour la totalité de leur vie économique. Le prix tel qu’il devrait être pris en compte se rapproche ainsi d’un leasing qui calcule les marges tenant compte d’une location couvrant toute la vie économique du bien. Dans le cadre d’un leasing, les redevances sont calculées de manière à couvrir et rentabiliser le coût d’acquisition du bailleur compte tenu de la période de location convenue. En règle générale, à l’expiration du contrat, le bien n’a plus ou que peu de valeur marchande. Dans le cas d’espèce, le modèle du leasing apparaît comme celui dont les tarifs sont les plus adéquats pour déterminer les reprises à effectuer compte tenu de la façon dont a procédé la société. On ne saurait donc faire grief à l’autorité précédente d’avoir choisi cette méthode de calcul. Dans ses écritures, la recourante se plaint de ce que la vie économique de ses biens ait été réduite à une durée de 60 mois. Elle perd cependant de vue que le loyer mensuel facturé par son actionnaire tenait précisément compte d’une durée de vie de cinq ans. Elle a en effet expliqué, dans son courrier du 28 août 2020, que le loyer avait été déterminé sur la base d’une valeur à neuf de CHF 450'000.- et d’une durée de 60 mois (CHF 450'000.- / 60 = CHF 7'500.- par mois). S’ajoute à cela que le contrat de location de mobilier et de matériel a été conclu pour une durée de cinq ans, renouvelable tacitement.

Pour le calcul des reprises, l’intimée a pris comme point de départ la valeur comptable au 31 décembre 2007, soit CHF 75'552.- (amortissements déduits), qu’elle a doublée en considérant que ce montant représentait le prix du marché au moment de la location, soit CHF 151'104.-. Ainsi, tenant compte d’un taux de 5.5%, tel qu’il ressort de la circulaire de l’AFC-CH sur les taux d’intérêt 2008 et d’un amortissement sur cinq ans, la mensualité de leasing s’élevait à CHF 2’886.26. Le TAPI a confirmé ce raisonnement, relevant que le leasing s’élevait à CHF 2'873.-, selon le calculateur de leasing en ligne MultiPoints. Or, dans la mesure où le montant retenu à ce titre par l’intimée était légèrement plus favorable à la recourante, il convenait de le confirmer. Le montant mensuel des reprises s’élevait ainsi à CHF 4'614.-, ce qui correspond à la différence entre le loyer convenu (CHF 7'500.-) et le loyer du marché (CHF 2'886.-). Considérant que la recourante avait accordé un loyer excessif durant les cinq premières années à compter de la conclusion du contrat, le 1er février 2008, l’intimée a procédé à des reprises de CHF 55'368.- (CHF 4'614.- x 12) pour les années 2010, 2011 et 2012, de CHF 87'114.- pour l’année 2013 (CHF 4'614.- + CHF 7'500 x 11) et CHF 90'000.- pour les années 2014 à 2018. En effet, pour la période subséquente à l’amortissement de cinq ans, l’AFC-GE a estimé que le loyer versé par la recourante était fictif, de sorte que la reprise mensuelle s’élevait à CHF 7'500.-.

Ce raisonnement n’est pas critiquable. Malgré les demandes de l’intimée, la recourante n’a jamais fourni d’inventaire détaillé des biens mis en location, mentionnant la date et leur prix d’achat, ainsi que leur valeur vénale au début de la location. On ne saurait dès lors reprocher à l’AFC-GE de s’être fondée sur le prix d’acquisition du mobilier et du matériel tel qu’il ressortait du bilan de l’entreprise au 31 décembre 2007. En doublant le montant de la valeur comptable ainsi indiquée, l’AFC-GE a dûment tenu compte du fait que la valeur comptable est souvent inférieure à la valeur vénale. De son côté, la recourante ne prétend pas que l’entreprise aurait procédé à des amortissements excessifs, ni que la valeur comptable indiquée dans les comptes de l’entreprise serait manifestement
sous-évaluée. Elle ne remet pas non plus en cause les taux d’intérêt retenus pour le leasing. L’intéressée se limite à relever que, mêmes amortis, les biens conservent une valeur de location. Or, ainsi que l’a relevé le TAPI, il est difficilement concevable qu’un tiers indépendant accepte de continuer à verser un loyer pour bénéficier du droit d’utiliser du mobilier et du matériel ne comportant plus aucune valeur comptable. Il demanderait le transfert de propriété des biens loués ou la location d’objets plus récents. Le fait, pour la société, d’avoir continué à payer un loyer de CHF 7'500.- alors que les biens étaient totalement amortis ne peut s’expliquer qu’en raison de la proximité entre la société et son actionnaire.

C’est ainsi à bon droit que l’AGC-GE a procédé aux reprises litigieuses.

6.             En dernier lieu, il convient d'examiner si les amendes infligées à la recourante sont conformes au droit.

6.1 La quotité de l'amende est, en général, fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 2 LHID et art. 69 al. 2 LPFisc). Il en découle qu'en présence d'une infraction intentionnelle sans circonstances particulières, l'amende équivaut en principe au montant de l'impôt soustrait. Ce dernier constitue donc le premier critère de fixation de l'amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d'augmentation de sa quotité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.2 ; ATA/1368/2021 du 14 décembre 2021 consid. 9b ; ATA/1168/2020 du 17 novembre 2020 consid. 7a).

Il convient notamment de réduire le montant de l'amende lorsque le contribuable a agi par négligence, celle-ci devant être considérée comme un cas de faute légère au sens de l'art. 175 LIFD (Diane MONTI, Les contraventions fiscales en droit fiscal harmonisé, 2001, p. 70).

La quotité précise de l'amende doit par ailleurs être fixée en tenant compte des dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Ainsi, conformément à l'art. 106 al. 3 CP, l'amende doit être fixée en tenant compte de la situation de l'auteur, afin que la peine corresponde à la faute commise. Les principes régissant la fixation de la peine, tels que prévus à l'art. 47 CP, s'appliquent. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l'impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l'auteur. Les circonstances atténuantes de l'art. 48 CP sont aussi applicables par analogie en droit pénal fiscal (pour tout ce qui précède, ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 9.1 ; ATA/1168/2020 précité).

6.2 Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales disposent d'un large pouvoir d'appréciation lors de la fixation de l'amende (ATF 114 Ib 27 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013 consid. 5.2) et l'autorité de recours ne censure que l'abus ou l'excès du pouvoir d'appréciation (ATA/42/2011 du 25 janvier 2011 consid. 6 ; ATA/693/2009 du 22 décembre 2009 consid. 10a).

6.3 En l'espèce, la recourante ne conteste plus le montant des amendes. L'AFC-GE a retenu une quotité de base de la moitié des impôts soustraits, ce qui apparaît justifié au regard, d’une part, de la bonne collaboration de la société, et, d’autre part, de la durée et de la répétition de la soustraction (sur une période de dix ans).

Le jugement du TAPI sera aussi confirmé sur ce point.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

7.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe intégralement (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 mars 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 février 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à B______, mandataire de la recourante, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :