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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1716/2023

ATA/709/2023 du 29.06.2023 sur JTAPI/617/2023 ( MC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1716/2023-MC ATA/709/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 juin 2023

en section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Roxane SHEYBANI, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 juin 2023 (JTAPI/617/2023)


EN FAIT

A. a. A______, née le ______2003, est ressortissante de France. Son casier judiciaire était vierge à la date du 21 mai 2023.

b. Le 20 mai 2023, elle a été interpellée par un agent de sécurité, avec une autre femme, dans le magasin à l’enseigne « B______ PARFUMERIE », alors qu'elles venaient d'y voler des parfums pour un montant total de CHF 953.60 ainsi qu’un set de maquillage et un testeur qu'elles avaient endommagés au préalable. Elles ont également volé, le même jour, de la marchandise aux magasins à l’enseigne « C______ » (pour CHF 199.60) et « D______ », tous sis au centre-ville de Genève.

c. Lors de son audition du même jour par la police, l'intéressée a reconnu les vols. Elle était venue à Genève dans le but de commettre des vols à l'étalage. Elle ne savait pas pourquoi elle avait agi de la sorte, car elle ne comptait pas vendre les objets volés. Elle habitait à Annemasse où elle avait laissé ses documents d'identité et n'avait aucun moyen de subsistance. Elle faisait des allers-retours entre la France et la Suisse et n'y avait aucune attache. Elle envisageait d'y travailler « dans la sécurité » et était en train de faire des démarches dans ce sens.

d. Les magasins « B______ PARFUMERIE » et « C______ » ont déposé plainte pénale. Par ordonnance pénale du 21 mai 2023, l’intéressée a été condamnée par le Ministère public, pour vol au sens de l'art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et vol d’importance mineure (art. 172ter CP).

e. Le 21 mai 2023 à 14h15, en application de l'art. 74 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 LEI), le commissaire de police a prononcé à l'encontre de A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de douze mois.

B. a. Lors de l'audience du 2 juin 2023 devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), A______ a expliqué qu’elle souhaitait pouvoir travailler à Genève. Elle avait postulé auprès de E______ de Rive ainsi qu'à divers castings. Elle regrettait profondément les faits qui avaient conduit à sa condamnation pénale et souhaitait qu’une deuxième chance lui soit donnée. Elle n’avait jamais travaillé en Suisse. Elle avait en revanche déjà postulé par le passé afin de travailler à Genève. Le jour de son interpellation, elle était venue à Genève pour se balader durant quatre heures.

Elle a produit son curriculum vitae, sa carte d’assurance-maladie française ainsi que sa postulation du 22 mai 2023 au E______ de Rive. Elle avait fait opposition à l'ordonnance pénale du 21 mai 2023. Elle a conclu à l'annulation de la mesure d'interdiction, les conditions de l'art. 74 LEI n'étant pas réalisées et la mesure étant, en tout état, disproportionnée et contraire à sa liberté de circulation.

b. La représentante du commissaire de police a indiqué qu’elle maintenait la mesure quand bien même A______ trouverait du travail à Genève. Elle devrait de toute façon préalablement obtenir un permis G de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Le cas échéant, la délivrance d'un sauf-conduit lui permettant de se rendre par le chemin le plus direct possible de son domicile à son lieu de travail pourrait être envisagée.

c. Par jugement du 5 juin 2023, le TAPI a confirmé la mesure, mais réduit sa durée à six mois.

La précitée pouvait être perçue comme une menace pour l'ordre et la sécurité publics, et il apparaissait qu’elle pouvait commettre à nouveau des infractions de même nature. Elle ne justifiait d'aucun motif rendant sa présence à Genève indispensable. En cas de besoin, elle pourrait solliciter un sauf-conduit, si elle devait trouver du travail à Genève et obtenir un permis G. Le périmètre était ainsi confirmé et il était donné acte au commissaire de police de son engagement à réexaminer la situation de l’intéressée en cas de présentation d'un contrat de travail et d’obtention d’un permis G dans le canton de Genève. La durée de la mesure apparaissait en revanche disproportionnée au regard des circonstances et des intérêts en présence.

C. a. Par acte déposé le 19 juin 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, dont elle a demandé l’annulation, concluant à la levée de la mesure d’interdiction de pénétrer dans le canton de Genève.

Le TAPI avait violé son droit d’être entendue en n’examinant pas si elle remplissait les conditions d’une autorisation de séjour. Il avait omis d’exposer en quoi elle ne remplissait pas les conditions de l’art. 24 Annexe I de l’Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681) et pourquoi l’art. 74 LEI était applicable. Même si l’art. 74 LEI était applicable, il ne pouvait être retenu qu’il existait un risque de récidive ni qu’elle menaçait l’ordre et la sécurité publics ni encore que cette menace était d’une certaine gravité.

b. Le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

Il convenait de ne pas confondre les conditions d’entrer en Suisse avec celles relatives à l’octroi d’un permis de séjour. La recourante ne remplissait pas les conditions d’octroi d’un tel titre, étant dépourvue de moyens financiers, n’ayant pas l’intention de s’établir en Suisse, n’y exerçant pas d’activité lucrative ni n’y étant assurée contre le risque maladie. Les conditions de l’art. 24 de l’Annexe I de l’ALCP n’étaient pas remplies. Le TAPI avait expressément mentionné que l’ALCP ne s’opposait pas au prononcé de la mesure contestée.

La menace de l’ordre et de la sécurité publics était manifeste, la recourante ayant commis trois vols, soit des crimes selon l’art. 10 al. 2 CP. L’arrêt auquel elle se référait portait sur une interdiction d’entrer prononcée par le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) et obéissait à d’autres règles de droit.

c. Dans sa réplique, la recourante a relevé que l’application de l’art. 74 al. 1 let. a LEI n’était pas conditionnée à la titularité d’un droit de séjour, de sorte que cette question n’était pas pertinente. Les circonstances du cas d’espèce ne justifiaient pas un revirement de jurisprudence, qui permettrait de s’écarter de l’exigence d’une menace réelle et d’une certaine gravité pour limiter le droit à la libre circulation d’un ressortissant européen.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

1.1 Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 19 juin 2023 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

1.2 À teneur dudit art. 10 LaLEtr, la chambre de céans est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière
(al. 2 2ème phr.).

2.             La recourante conteste que les conditions permettant le prononcé d’une mesure d’interdiction territoriale soient remplies.

2.1 Aux termes de l’art. 2 al. 2, la LEI n'est applicable aux ressortissants des États membres de la Communauté européenne, aux membres de leur famille et aux travailleurs détachés par un employeur ayant son siège ou son domicile dans un de ces États que dans la mesure où l'ALCP n'en dispose pas autrement ou lorsque ladite loi contient des dispositions plus favorables. L'ALCP ne réglemente pas en tant que telle l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée. C'est donc l'art. 74 LEI qui est applicable. Toutefois, cette disposition doit être interprétée en tenant compte des exigences spécifiques de l'ALCP. Ainsi, l'art. 74 LEI ne saurait aboutir à priver les étrangers au bénéfice de l'ALCP des droits que leur confère ce traité (ATF 139 II 121 consid. 5.1 applicable par analogie).

2.2 Examinant une mesure d'interdiction d'entrer en Suisse prononcée à l’égard d’un ressortissant d’un État membre de l’ALPC, le Tribunal fédéral a relevé qu’une telle restriction à la libre circulation des personnes, devait, contrairement à ce qui vaut pour les ressortissants d'États non-parties à l'ALCP, aussi se conformer à l'exigence de l'art. 5 par. 1 annexe I ALCP, selon laquelle le droit de demeurer en Suisse pour y exercer une activité lucrative ne peut être limité que par des mesures d'ordre ou de sécurité publics (ATF 139 II 121 consid. 5.3).

2.3 S’agissant d’une interdiction de pénétrer dans un certain territoire concernant en particulier un ressortissant d'un État partie à l'ALCP, il faut que la personne concernée représente une menace d'une certaine gravité pour l'ordre et la sécurité publics de nature à la priver de son droit de demeurer en Suisse au sens de l'art. 5 Annexe I de l’ALCP (ATF 139 II 121 5.4 et les références citées). Ainsi, le recours par une autorité nationale à la notion d'« ordre public » pour restreindre cette liberté suppose, en dehors du trouble de l'ordre social que constitue toute infraction à la loi, l'existence d'une menace réelle et d'une certaine gravité affectant un intérêt fondamental de la société. La seule existence d'antécédents pénaux ne permet donc pas de conclure (automatiquement) que l'étranger constitue une menace suffisamment grave pour l'ordre et la sécurité publics. Il faut procéder à une appréciation spécifique du cas, portée sous l'angle des intérêts inhérents à la sauvegarde de l'ordre public, qui ne coïncide pas obligatoirement avec les appréciations à l'origine des condamnations pénales. Autrement dit, ces dernières ne sont déterminantes que si les circonstances les entourant laissent apparaître l'existence d'une menace actuelle et réelle et d'une certaine gravité pour l'ordre public (ATF 139 II 121 consid. 5.3 ; 136 II 5 consid. 4.2 ; 134 II 10 consid. 4.3).

2.4 Aux termes de l'art. 74 al. 1 let. a LEI, l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas pénétrer dans une région déterminée notamment lorsque l’étranger n’est pas titulaire d’une autorisation de courte durée, d’une autorisation de séjour ou d’une autorisation d’établissement et trouble ou menace la sécurité et l’ordre publics ; cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants.

2.5 L'art. 6 al. 3 LaLEtr prévoit que l'étranger peut être contraint à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment à la suite d’une condamnation pour vol, brigandage, lésions corporelles intentionnelles, dommages à la propriété ou pour une infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121).

2.6 Aux termes de l’art. 24 al. 1 Annexe I de l’ALCP, une personne ressortissante d’une partie contractante n’exerçant pas d’activité économique dans l’État de résidence et qui ne bénéficie pas d’un droit de séjour en vertu d’autres dispositions du présent accord reçoit un titre de séjour d’une durée de cinq ans au moins, à condition qu’elle prouve aux autorités nationales compétentes qu’elle dispose pour elle-même et les membres de sa famille : a) de moyens financiers suffisants pour ne devoir faire appel à l’aide sociale pendant leur séjour ; b) d’une assurance-maladie couvrant l’ensemble des risques.

2.7 L'interdiction de pénétrer dans une région déterminée ne constitue pas une mesure équivalant à une privation de liberté au sens de l'art. 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et n'a donc pas à satisfaire aux conditions du premier alinéa de cette disposition (Tarkan GÖKSU, in Martina CARONI/Thomas GÄCHTER/Daniela TURNHERR [éd.], Bundesgesetz über die Ausländerinnen und Ausländer, 2010 ; Andreas ZÜND in Marc SPESCHA/Hanspeter THÜR/Peter BOLZLI, Migrationsrecht, 2ème éd., 2013, ad art. 74, p. 204 n. 1).

Selon le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993 (FF 1994 I 325), les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour et d'établissement n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement ; s'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle de l'étranger concerné, « le seuil, pour l'ordonner, n'a pas été placé très haut » ; il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics.

2.8 La mesure doit en outre respecter le principe de la proportionnalité. Tel que garanti par les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), il exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2 ; 135 I 169 consid. 5.6).

Il convient de vérifier, dans chaque cas d’espèce, que l’objectif visé par l’autorité justifie véritablement l’interdiction de périmètre prononcée, c’est-à-dire qu’il existe un rapport raisonnable entre cet objectif et les moyens mis en œuvre pour l’atteindre (ATF 142 II 1 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_884/2020 du 5 août 2021 consid.3.4.2 ; 2C_796/2018 du 4 février 2019 consid. 4.2). L'interdiction de pénétrer peut s'appliquer à l'entier du territoire d'un canton (arrêts du Tribunal fédéral 2C_231/2007 du 13 novembre 2007 ; 2A.253/2006 du 12 mai 2006), même si la doctrine relève que le prononcé d'une telle mesure peut paraître problématique au regard du but assigné à celle-ci (Tarkan GÖKSU, op. cit., p. 725 n. 7). La portée de l'art. 6 al. 3 LaLEtr, qui se réfère à cette disposition et en reprend les termes, ne peut être interprétée de manière plus restrictive. C'est en réalité lors de l'examen du respect par la mesure du principe de la proportionnalité que la question de l'étendue de la zone géographique à laquelle elle s'applique doit être examinée.

Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c ; ATA/304/2020 du 20 mars 2020 consid. 4b).

2.9 Selon l’art. 96 al. 1 et 2 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration. Lorsqu’une mesure serait justifiée, mais qu’elle n’est pas adéquate, l’autorité compétente peut donner un simple avertissement à la personne concernée.

2.10 En l'espèce, il convient, en premier lieu, de relever que le TAPI a retenu que la recourante n’était pas au bénéfice d’un titre de séjour en Suisse et que sa nationalité française ne s’opposait pas à une mesure d’interdiction territoriale, dont il a ensuite examiné les conditions, les estimant remplies. En tant que la recourante se plaint d’un défaut de motivation du jugement entrepris, son grief doit donc être rejeté.

Cela étant relevé, c’est à juste titre que le TAPI a constaté que la recourante n'était pas au bénéfice d'une autorisation de courte durée (art. 32 LEI), de séjour (art. 33 LEI) ou d'établissement en Suisse (art. 34 LEI). Contrairement à ce que l’intéressée soutient, le fait qu’elle disposerait de moyens financiers suffisants pour séjourner pendant quatre heures en Suisse et d’une assurance-maladie, ne permet pas de retenir qu’elle remplirait les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour. Une telle autorisation ne peut, au demeurant, être octroyée pour quelques heures. En outre, la recourante, qui a indiqué à la police être sans emploi et ne pas disposer de moyens de subsistance, ne remplirait manifestement pas les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour selon l’art. 24 al. 1 Annexe I ALCP.

La recourante a reconnu, lors de son audition par la police, qu’elle était venue à Genève dans le but de commettre des vols à l'étalage. Elle a été condamnée pour vol d’importance mineure au sens de l’art. 172 CP, mais également pour vol au sens de l’art. 139 CP. Cette dernière infraction constitue un crime au sens de l’art. 10 al. 2 CP, soit la catégorie d’infractions le plus sévèrement réprimandée par le CP. Ces éléments sont d’une certaine gravité. Ils doivent cependant être appréciés à l’aune de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce. En particulier, il convient de tenir compte du jeune âge de l’intéressée, du fait qu’elle cherche un emploi à Genève, qu’elle n’a pas d’antécédents pénaux et que les infractions commises n’ont pas impliqué de recours à la violence ni la mise en danger de la santé ou de la vie d’autrui.

Dans ces circonstances, l’interdiction de périmètre prononcée à son encontre ne respecte pas le principe de la proportionnalité. En effet, la mesure restreint de manière excessive ses recherches d’emploi dans le canton de Genève, qui impliquent de pouvoir se présenter, y compris spontanément, auprès d’éventuels employeurs, étant rappelé qu’en tant que ressortissante française, elle dispose, en principe, d’un droit à pouvoir accéder au marché de l’emploi en Suisse. En outre, si elle devait trouver un emploi, la mesure querellée l’empêcherait de pouvoir se déplacer dans le canton, que ce soit dans l’accomplissement de son travail ou à l’occasion d’évènements sociaux liés à l’exercice de cette activité. La restriction apportée à la liberté de la recourante de se mouvoir dans le canton de Genève est donc excessive.

Un avertissement, au sens de l’art. 96 al. 2 LEI, permet de respecter le principe de la proportionnalité et apparaît apte et nécessaire pour faire prendre conscience à la recourante de la nécessité de ne pas commettre d’actes délictueux si elle entend continuer à pouvoir librement circuler dans le canton de Genève.

Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. Le jugement attaqué ainsi que l’interdiction de pénétrer dans le canton de Genève prononcée par le commissaire de police seront annulés et le dossier renvoyé à ce dernier, afin qu’il prononce un avertissement au sens de l’art. 96 LEI à l’encontre de la recourante.

3.             Vu la nature du litige, il n’est pas perçu d’émolument. Vu son issue, une indemnité de procédure de CHF 1’000.- sera allouée à la recourante (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 juin 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 juin 2023 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule le jugement précité ainsi que la décision du commissaire de police du 21 mai 2023 ;

renvoie le dossier au commissaire de police pour nouvelle décision, au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à A ______, à la charge de l’État de Genève (commissaire de police) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Roxane SHEYBANI, avocate de la recourante, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :