Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3763/2022

ATA/469/2023 du 02.05.2023 ( FORMA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3763/2022-FORMA ATA/469/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mai 2023

2ème section

 

dans la cause

 

Mme A______ recourante

contre

SERVICE ÉCOLES ET SPORT, ART, CITOYENNETÉ intimé



EN FAIT

A. a. B______, de nationalité suisse, est née le ______ 2017 à Genève de l’union de Mme A______, ressortissante C______, célibataire, et de M. D______, ressortissant suisse, célibataire.

b. Il ressort de la base de données « Calvin » de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), consultée le 26 avril 2023, les données suivantes.

B______ a résidé au chemin E______ ______ de sa naissance au 19 juin 2019 et réside depuis le 19 juin 2019 chemin F______ ______ chez M. G______.

Mme A______ a résidé au chemin E______ ______ chez M. D______ du 6 octobre 2017 au 5 février 2018, à la route H______ ______ chez M. I ______ du 5 février 2018 au 12 juin 2018, au chemin F ______ ______ chez M. G______ du 12 juin 2018 au 19 septembre 2021 et réside depuis le 19 septembre 2021 rue J ______ ______ chez Mme K______.

Mme A______ s’est vu délivrer le 24 janvier 2023 par l’OCPM une autorisation de séjour pour cas de rigueur échéant le 5 janvier 2024 car elle a un enfant de nationalité suisse.

M. D______ est né le ______ 1991 à Genève et y a toujours vécu, jusqu’au 22 avril 2020, date à laquelle son départ pour L______ a été enregistré.

B. a. Le 17 juillet 2022, Mme A______ a formé auprès du service des bourses et prêts d’études (ci-après : SBPE) une demande d’exonération partielle pour les taxes d’enseignement artistique en faveur de sa fille et pour des cours d’éveil suivis à l’école de danse de Genève durant l’année scolaire 2021-2022 (recte : 2022-2023) en filière loisirs. Elle a indiqué être la répondante légale de sa fille et être domiciliée comme elle rue J ______ ______. B______ était en 2P.

b. L’accusé de réception du 19 juillet 2022 est revenu au SBPE avec la mention que la destinataire était introuvable à l’adresse mentionnée.

c. Le SBPE a consulté « Calvin » le 12 octobre 2022. À cette date, seul M. D______ y figurait comme parent de B______.

d. Par décision du 12 octobre 2022, le service écoles et sport, art, citoyenneté (ci-après : SESAC) qui avait entre-temps repris les tâches du SBPE, a rejeté la demande de Mme A______, au motif qu’elle n’était pas contribuable dans le canton de Genève.

C. a. Par acte remis à la poste le 14 novembre 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation et au renvoi de la procédure à l’autorité pour nouvelle décision.

Le 14 janvier 2022, l’OCPM avait préavisé favorablement sa demande d’autorisation de séjour.

Elle payait effectivement ses impôts dans le canton de Genève et produisait les avis de taxation établis le 12 octobre 2022 pour l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et pour l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) pour l’année 2021, mentionnant un revenu brut de CHF 6'637.-, une déduction pour charge de famille et un revenu total imposable nul.

b. Le 15 décembre 2022, le département de l’instruction publique, de formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) a conclu au rejet du recours.

La base de données scolaire mentionnait que B______ habitait avec M. G______ (logeur) et Mme A______ chemin F______ ______.

La plateforme informatique qui permettait de calculer le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) indiquait que l’adresse connue par l’OCPM pour Mme A______ ne permettait pas de lui envoyer l’attestation de façon automatique et que l’usagère était dans l’obligation de s’adresser « au CCRDIU ou à un des services Métiers lui délivrant une prestation sociale ».

Le 21 mars 2022, Mme A______ était au bénéfice d’une aide financière de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) pour CHF 1'554.-.

Le salaire net obtenu par Mme A______ de son employeur, le M______ Sàrl, était de CHF 1'853.45 au 20 juin 2022.

Le SESAC avait demandé à Mme A______ le 11 novembre 2022 de lui transmettre son avis de taxation pour 2021 ainsi que son RDU pour 2023, si elle l’avait reçu.

Au moment de l’examen de sa demande, Mme A______ n’était pas domiciliée officiellement dans le canton et n’avait pas fourni une attestation d’assujettissement à l’impôt sur le revenu d’une activité rémunérée exercée de manière permanente dans le canton. Son RDU n’avait pu être calculé automatiquement par le SESAC en raison de l’absence de domiciliation officielle à Genève attestée par l’OCPM.

Dans le cadre de son recours, Mme A______ avait établi que l’OCPM attendait une approbation pour la délivrance d’une autorisation de séjour, mais n’avait pas démontré que sa demande de permis avait été acceptée, ni n’avait fourni le RDU de son groupe familial.

Le RDU ne pouvait être calculé manuellement car les informations manquaient concernant le groupe familial de Mme A______, s’agissant de savoir si elle vivait en ménage avec une autre personne percevant un revenu, quel était son état civil, si elle percevait une pension alimentaire du père de sa fille, cas échéant sur la base d’un jugement ou d’une convention, et enfin si ce dernier travaillait à Genève, y payait des impôts et contribuait à l’entretien de sa fille.

Les cours de danse avaient commencé selon l’école, la semaine du 29 août 2022 et la demande d’exonération aurait pu être transmise jusqu’au 1er mars 2023. Si la situation de Mme A______ était régularisée avant cette date, le SESAC serait disposé à entrer en matière sur une demande de reconsidération.

c. Le 3 janvier 2023, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

Le 29 décembre 2022, le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) lui avait délivré une autorisation de séjour (recte : avait approuvé la délivrance d’une autorisation de séjour).

Elle se tenait à disposition du SESAC pour répondre à toutes ses questions concernant le calcul de son RDU.

d. Le 23 janvier 2023, le DIP a persisté dans ses conclusions.

Mme A______ n’apportait pas dans sa réplique les informations manquantes concernant son groupe familial, pourtant listées dans la réplique du SESAC.

Ainsi, en l’absence d’une domiciliation officielle dans le canton et en l’absence de la production d’un RDU du groupe familial qui entrerait dans le barème, elle n’était toujours pas éligible à l’exonération partielle des écolages pour sa fille.

e. Le 15 février 2023, Mme A______ a produit une facture de l’OCPM et une invitation à se rendre au centre cantonal de biométrie. Elle s’y était rendue le 14 février 2023 et allait recevoir son permis B. Elle persistait pleinement dans ses conclusions.

f. Le 17 février 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige a pour objet le bienfondé du refus du SESAC d’exonérer partiellement des écolages du cours d’éveil à la danse de B______.

2.1 Selon l’art. 1 du règlement concernant l’exonération partielle des écolages aux élèves des écoles accréditées pour l’enseignement de la musique, de la rythmique, de la danse et du théâtre du 5 septembre 2012 (REPEM – 1 20.08), les élèves réguliers des écoles accréditées pour l'enseignement de la musique, de la rythmique, de la danse et du théâtre ont droit à l'exonération partielle des écolages, aux conditions définies par le règlement. Peuvent prétendre à l’exonération les enfants mineurs et les personnes majeures, âgées au plus de 25 ans, qui ont commencé leurs études musicales dans l’un des établissements mentionnés avant d’avoir atteint leur majorité (art. 2 REPEM).

Ont droit à une exonération partielle des écolages tous les élèves quelle que soit leur nationalité, dont le responsable légal est contribuable et domicilié dans le canton de Genève ou en zone frontalière (art. 3 al. 1 REPEM).

Les ayants droit ne peuvent bénéficier d’une exonération partielle des écolages que pour autant qu’ils suivent normalement leurs études, que le revenu du groupe familial ne dépasse pas les limites du barème des revenus et que leurs parents ou les autres personnes pour lesquelles ils constituent une charge de famille au sens de l’art. 39 de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) ne soient pas exemptés des impôts sur le revenu et la fortune en vertu des immunités fiscales en matière internationale prévues à l’art. 16 LIPP (art. 3 al. 2 REPEM).

L'exonération partielle est égale à 90% du montant des écolages (art. 5 REPEM).

Selon l’art. 6 REPEM, le calcul du droit à l'exonération est fondé sur le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU ; al. 1). La limite du barème du revenu du groupe familial est fixée à CHF 50’332.-, montant auquel s’ajoutent CHF 8'393.- (a) par responsable légal (mère ou père) dont les revenus sont retenus pour l'application du barème ; (b) pour le conjoint ou le partenaire enregistré du responsable légal ; (c) pour chaque enfant mineur ; (d) pour chaque élève majeur (dans les limites de l’art. 2, let. b) ; (e) pour chaque enfant majeur, reconnu comme charge par l’administration des contributions publiques dans la déclaration fiscale du répondant (al. 3).

Le RDU résulte de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06 ; art. 6 al. 2 REPEM). Les éléments énoncés aux art. 4 à 7 LRDU constituant le socle du RDU se définissent conformément à la législation fiscale genevoise, en particulier la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08). Le socle du RDU est égal au revenu calculé en application des art. 4 et 5 LRDU, augmenté d'un quinzième de la fortune calculée en application des art. 6 et 7 LRDU. Le résultat donne le socle RDU (art. 8 al. 2 LRDU).

Le socle du RDU est calculé automatiquement sur la base de la dernière taxation fiscale définitive (art. 9 al. 1 LRDU). Il peut être actualisé (art. 9 al. 2 LRDU). Il est en principe actualisé sur la base des derniers éléments de revenus et de fortune connus de la personne (art. 10 al. 1 LRDU), à la demande d'un service et/ou lorsque la condition économique de l'intéressée ou intéressé s'est modifiée entre la période qui a servi de base au calcul de la prestation et le moment où elle ou il présente sa demande. Ces changements sont annoncés et justifiés par l'intéressée ou intéressé (art. 10 al. 2 LRDU). Le processus d'actualisation du RDU selon l'art. 10 al. 1 LRDU s'applique à l'examen ou au réexamen des seules demandes de prestations catégorielles et de comblement visées à l'art. 13 al. 1 LRDU. Les exceptions définies par le Conseil d'État sont réservées (art. 10 al. 3 LRDU).

Selon l’art. 12 LRDU, les prestations catégorielles visent à soutenir les bénéficiaires dans un segment particulier de dépenses et consistent en un transfert monétaire en direction du bénéficiaire ou d'un tiers (let. a) ; les prestations de comblement visent à garantir des conditions de vie dignes ; elles sont subsidiaires à toute autre forme d'aide et consistent en un transfert monétaire en direction du bénéficiaire (let. b) et les prestations tarifaires sont des prestations en nature ou de rabais qui sont accordés sous condition de ressources, dont les tarifs dépendent du revenu déterminant unifié et qui se fondent sur une loi, un règlement ou un arrêté (let. c).

L’art. 13 LRDU énumère les prestations catégorielles et de comblement ; l’exonération de taxes n’y figure pas. Les exceptions prévues dans le règlement d’exécution de la LRDU du 27 août 2014 (RRDU - J 4 06.01) permettant le processus d'actualisation du revenu déterminant unifié selon l'art. 10 al. 1 et 3 LRDU n’incluent pas les prestations tarifaires relatives à l’exonération partielle des écolages (art. 6B RRDU ; ATA/4369/2022 du 28 mars 2023 consid. 2.3).

Les formulaires de demande doivent être transmis au SESAC au plus tard six mois à partir de la date du début du cours. Au-delà de ce délai, la demande n’est pas prise en compte (art. 4 REPEM).

2.2 En l’espèce, au moment du dépôt de la demande, Mme A______ n’apparaissait pas encore dans la base de données Calvin, ce qui a empêché l’intimé d’établir qu’elle était contribuable et domiciliée officiellement dans le canton.

Le SESAC a cependant accepté, dans le cours de la procédure de recours contre sa décision, de réexaminer celle-ci si la situation de la recourante venait à être régularisée dans le délai de six mois depuis le début des cours imparti par la loi pour demander l’exonération partielle, soit avant le 1er mars 2023.

Or, la recourante s’est vu délivrer le 24 janvier 2023 par l’OCPM une autorisation de séjour pour cas de rigueur et elle a établi dans son recours déjà qu’elle était contribuable, en tout cas dès 2022 pour le revenu réalisé durant l’année 2021.

La chambre de céans donnera acte à l’intimé qu’il accepte de reconsidérer sa décision, admettra le recours pour ce motif et lui retournera la cause pour instruction des autres conditions du droit à l’exonération au sens notamment de l’art. 6 REPEM.

L’intimé s’est, certes, plaint dans ses dernières écritures que la recourante n’avait pas produit ni documenté avec sa réplique toutes les informations manquantes pour l’examen de son droit aux prestations sous l’angle financier. La recourante pouvait toutefois comprendre de bonne foi qu’elle ne devait établir que la régularisation de son séjour et sa qualité de contribuable – ce qu’elle a fait.

Il apparaît plus conforme aux principe d’économie de procédure et de garantie de la protection judiciaire de retourner la procédure à l’intimé pour qu’il instruise les éléments déterminants et prenne une nouvelle décision.

3.             Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourante n’y ayant pas conclu et n’ayant pas exposé avoir subi des frais (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 novembre 2022 par Mme A______ contre la décision du service écoles et sport, arts et citoyenneté du 12 octobre 2022 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule la décision et retourne la cause au service écoles et sport, arts et citoyenneté pour complément d’instruction et nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______ ainsi qu'au service écoles et sport, art, citoyenneté.

Siégeant : Claudio Mascotto, Président, Jean-Marc Verniory, Francine Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

Sibilla Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

Claudio Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :