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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2213/2022

ATA/439/2023 du 25.04.2023 sur JTAPI/1440/2022 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2213/2022-LCI ATA/439/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 avril 2023

3ème section

 

dans la cause

 

Messieurs A______ recourants
représentés par Me Philippe Eigenheer, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 décembre 2022 (JTAPI/1440/2022)


EN FAIT

A. a. Messieurs A______, représentant l’hoirie A______ (ci-après : l’hoirie A______), sont copropriétaires de la parcelle n° 231 de la commune du B______, à l’adresse chemin C______, à B______. Une maison est notamment érigée sur cette parcelle. Elle est composée de plusieurs appartements locatifs dont un est occupé par Madame D______.

b. Par courrier du 21 décembre 2021, le département du territoire (ci-après : le département) a informé l’hoirie A______ avoir eu connaissance d’importants problèmes d’humidité et de moisissures dans le logement de Mme D______. Un délai de dix jours lui était imparti pour indiquer les mesures qu’elle entendait prendre pour remédier à cet état d’insalubrité et présenter ses observations.

c. L’hoirie A______ a expliqué, dans un courrier le 21 janvier 2022, que les problèmes d’humidité étaient ponctuellement connus depuis plusieurs années et localisés, durant les périodes les plus froides de l’année, en façade nord, dans des angles mal ventilés et des placards fixes. Ces problèmes étaient aisément résolus par une ventilation plus assidue de la pièce ainsi qu’un nettoyage. Compte tenu de l’âge du bâtiment, érigé en 1935, et de son isolation constituée d’un doublage intérieur en brique, ces problèmes avaient tendance à apparaître avec les habitudes actuelles de chauffage et d’aération.

Au début du bail, en 1995, l’appartement était en bon état, mais « pas de première jeunesse », ce dont le loyer tenait compte. La locataire avait été autorisée à peindre l’appartement dans le cadre d’un arrangement s’inscrivant dans la réflexion en cours sur la probable démolition de l’habitation dans un futur proche. Un mauvais réglage de la chaudière par les locataires avait provoqué une surchauffe des appartements et aurait pu être à l’origine du développement de moisissures. L’hoirie ne comptait pas faire de travaux de rénovation ou d’isolation, la maison étant vouée à être démolie à brève échéance, dès lors qu’elle avait signé une promesse de vente avec un promoteur dans l’objectif de construire quatre maisons. Les demandes d’autorisation de construire seraient déposées au premier trimestre 2022.

d. Le 30 mars 2022, le département a requis de l’hoirie A______ un point de situation de l’état du logement ainsi qu’une copie du dernier contrôle de sécurité périodique des installations électriques. Une visite des lieux était à prévoir.

e. Le 11 avril 2022, l’hoirie A______ a renvoyé le département à son courrier du 21 janvier 2022. Une promesse de vente avait été signée et la demande d’autorisation de construire déposée. La demande de baisse de loyer introduite par Mme D______ n’avait pas lieu d’être car le loyer avait, d’emblée, été fixé très bas, afin de tenir compte des défauts soulevés.

f. Une visite du logement concerné a été effectuée le 5 mai 2022 à 15h30 par un inspecteur du département, en compagnie de Mme D______ et d’un membre de l’hoirie.

g. Par décision du 30 mai 2022, le département a fait part à l’hoirie A______ des éléments constatés, à savoir, dans les menuiseries extérieures, des verres simples et des infiltrations d’eau (verres vétustes dont certains se décollaient) et, dans la salle de bains, une turbinette hors-service et un radiateur sans vanne thermostatique et présentant une fuite. Cette situation constituait une infraction au sens de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Il ordonnait donc, dans un délai de trente jours, la réfection du mastic des verres pour assurer une meilleure étanchéité, la pose de joints dans la feuillure, la réparation du radiateur et de la turbinette ainsi que l’installation d’une vanne thermostatique.

Un planning décisionnel du projet de construction des quatre villas ainsi que le numéro d’autorisation de construire y relatif devaient lui être communiqués. Enfin, si elle souhaitait exercer son droit d’être entendue, elle était invitée à le faire, par écrit et dans un délai de dix jours.

B. a. Par acte reçu le 5 juillet 2022, l’hoirie A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) à l’encontre de cette décision du 30 mai 2022.

Son droit d’être entendue avait été violé puisqu’elle n'avait été consultée qu’après que la décision avait été rendue, concomitamment au délai de recours. Cette violation l’obligeait, pour faire valoir ses arguments, à supporter les frais d'une procédure judiciaire.

La décision violait l’art. 130 LCI en lien avec l’art. 121 LCI. Elle ne contenait aucune appréciation de la situation. En particulier, elle n'expliquait pas en quoi les constats effectués permettraient de penser que les conditions de sécurité et de salubrité exigées par la LCI n’étaient pas remplies. Les éléments relevés étaient tout au plus des défauts dont la locataire avait la possibilité de demander l'élimination dans le cadre d'une procédure civile, qu'elle avait d'ailleurs intentée.

Le principe de la proportionnalité était violé puisqu’il lui était demandé d'engager des frais relativement conséquents, d'au moins CHF 16'100.- (désamiantage des ventaux pour CHF 5'300.- ; remplacement des carreaux et des joints pour CHF 6'400.- ; dépose/repose du radiateur et de la vanne thermostatique pour CHF 700.- ; remplacement de la turbinette pour CHF 500.- ; divers et imprévus pour CHF 1'200.- ; renchérissement sur anciens devis pour CHF 2'000.-) pour rénover partiellement une villa destinée à être démolie avant l'été 2023. Le fait que la locataire semblait décidée à rester dans l'appartement n'était pas de nature à modifier cette appréciation, puisque la villa serait de toute façon détruite.

b. Le département a conclu au rejet du recours. Il a notamment exposé que les éléments relevés étaient tout sauf mineurs puisqu’il était indéniable que les problèmes d’humidité importants induisaient l’apparition de moisissure. La liste des travaux et les coûts allégués contenaient des postes qui n’étaient pas nécessaires à l’exécution de l’ordre qui avait été prononcé.

c. Dans une réplique du 28 septembre 2022, l’hoirie a soutenu que le département n’était pas compétent pour rendre une telle décision. Le dossier ne contenait aucune précision quant à l’étendue et au risque que la moisissure présenterait. Une brochure de l’Office fédéral de santé publique avait mis en avant le fait que de nombreux logements en Suisse rencontraient des problèmes d’humidité sans que cela entraîne des risques pour la santé.

d. Le département a dupliqué le 20 octobre 2022 pour relever que l’hoirie A______ avait admis sans réserve la situation d’insalubrité dans son courrier du 21 janvier 2022, outre ce qui avait été constaté par l’inspecteur le 5 mai 2022.

e. Le TAPI a, par jugement du 22 décembre 2022, rejeté le recours.

L’hoirie A______ avait donné suite aux demandes d’observations du département des 21 décembre 2021 et 30 mars 2022 par des courriers des 21 janvier 2022 et 11 avril 2022. Dans ce second courrier, elle avait renvoyé à sa précédente écriture et indiqué qu’elle ne voyait pas ce qu’elle pouvait ajouter. Elle avait donc eu la possibilité de s’exprimer sur sa situation juridique et d’exposer l’ensemble de ses arguments.

La présence de problèmes relevant de la LCI avait été constatée par le département à la suite d'une plainte de la locataire. Les fenêtres présentaient clairement des problèmes d’isolation et d’étanchéité, étant précisé par ailleurs que le simple vitrage était proscrit depuis de nombreuses années. L’absence de turbinette dans la salle de bains, et, par conséquent, de ventilation de cette pièce, contrevenait à l’art. 116 let. a du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01. Un radiateur qui fuyait et ne comportait pas de vanne thermostatique ne pouvait qu’être considéré comme inutilisable au point de porter atteinte aux conditions de sécurité et de salubrité (art. 121 al. 3 let. a ch. 1 LCI). La possibilité pour la locataire d’agir sur le plan civil n’autorisait pas l’hoirie à ne pas respecter les dispositions de police des constructions.

Elle avait admis les problèmes d’humidité à l’origine des moisissures, connues depuis plusieurs années, de même que leur localisation, au point que le loyer en avait tenu compte. Ce logement ne remplissait visiblement pas, déjà au moment de sa mise en location, les conditions de salubrité exigées par la loi en raison de l’humidité durant les périodes les plus froides de l’année. Il en résultait que le département était l’autorité compétente et fondé à ordonner les mesures d’assainissement litigieuses prévues dans la LCI et le RCI, quand bien même le logement aurait été repeint ou les moisissures nettoyées.

Sur le plan de la proportionnalité, l’intérêt économique de l’hoirie A______ ne pouvait pas primer sur l’intérêt public à un rétablissement d’une situation conforme au droit. L’assainissement ordonné semblait être un minimum pour éviter les infiltrations d’eau, fuites d’un radiateur et le dysfonctionnement du système de ventilation des WC. Le département n’avait pas exigé de désamiantage des ventaux ou de remplacement des carreaux, de sorte que ces deux postes, chiffrés à eux seuls à hauteur de CHF 11'700.-, n’avaient aucune raison d’être, tout comme ceux « divers et imprévus » et « renchérissement sur anciens devis 15 % » pour un total de CHF 3'200.-. En définitive, les travaux d’assainissement litigieux s’élèveraient à moins de CHF 2'000.- (CHF 16'000.- – CHF 14'900.- = CHF 1'200.-), soit un montant supportable pour l’hoirie A______ qui n’avait pas fait valoir être dans l’indigence.

L’assertion que la maison serait démolie avant l’été 2023 ne reposait sur aucun élément objectif vu au contraire le stade d’avancement de l’instruction de la demande d’autorisation de construire. La démolition de la maison risquait de ne pas intervenir avant plusieurs mois, voire années. Partant, il n’était pas admissible d’accepter qu’un logement ne satisfasse pas aux règles sur la salubrité durant ce laps de temps.

C. a. L’hoirie A______ a formé recours contre ce jugement par acte déposé à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) le 31 janvier 2023. Elle a conclu à l’annulation dudit jugement et, cela fait, à celle de la décision du département du 30 mai 2022, subsidiairement au renvoi de la cause au TAPI pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Il n’était pas contesté que le logement occupé par Mme D______ fût vétuste, ce dont il avait été tenu compte dans la fixation du loyer. En revanche, il était contesté que le département ait la compétence d’ordonner les travaux imposés, relevant de l’entretien du bâtiment, dont l’état ne justifiait en aucune façon l’intervention d’une autorité étatique. On ne voyait pas en quoi des infiltrations, que le département n’avait pas pris la peine de quantifier ni le TAPI d’aller constater, menaçaient la sécurité de la locataire et justifieraient une intervention étatique spéciale et immédiate. La mention par le TAPI du fait que les simples vitrages étaient proscrits depuis de nombreuses années n’était pas pertinente, puisque le remplacement des vitres n’avait pas été ordonné. Le vitrage n’avait été cité que pour donner l’impression générale négative du logement dans le but de justifier l’intervention du département. Le fait que, selon le TAPI, les travaux ordonnés soient « très mesurés » démontrait qu’une telle intervention n’était pas nécessaire et partant non fondée. En effet, les tribunaux civils ordinaires étaient parfaitement compétents pour ordonner des mesures d’entretien ciblées. Le TAPI n’avait pas discuté son argument selon lequel la chambre administrative avait confirmé jusqu’ici la compétence du département dans des cas beaucoup plus graves uniquement, aucun arrêt ne semblant faire référence à un cas semblable.

Le TAPI s’était basé sur le postulat que la maison ne serait pas prochainement démolie, de sorte qu’il se justifiait de l’entretenir. Elle maintenait que le projet immobilier présenté au département serait prochainement réalisé et qu’il serait disproportionné de consacrer des ressources à l’entretien du bâtiment actuel.

b. Le département a conclu, le 2 mars 2023, au rejet du recours.

Il a rappelé que son intervention se justifiait dans toute situation relative à des problèmes de sécurité et de salubrité au sens de l’art. 121 LCI, en l’espèce en présence de problèmes relevant de l’art. 116 RCI.

Le fait de permettre au locataire de vivre dans un logement salubre pendant plusieurs mois, en comparaison avec les CHF 1'200.- qu’impliquaient les travaux, justifiait pleinement sa décision du point de vue de la proportionnalité. L’hoirie n’avait aucune assurance que la maison serait démolie avant l’été 2023. Des compléments et modification du projet soumis pour autorisation avaient été exigés et il paraissait peu probable qu’elle démolisse la maison existante sans certitude que son projet de construction soit autorisé.

c. Dans sa réplique du 6 avril 2023, l’hoirie A______ a réaffirmé que la situation n’était pas de la compétence du département, preuve en étant les arrêts de la chambre administrative qu’elle avait cités et le fait que le département n’en ait pas mentionné d’autres où sa compétence aurait été admise pour des cas d’une gravité similaire à celui discuté.

d. Les parties ont été informées, le 12 avril 2023, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             L’objet du litige est la décision du département ordonnant à la recourante, dans un délai de trente jours, de procéder à la réfection du mastic des verres pour assurer une meilleure étanchéité, la pose de joints dans la feuillure, la réparation du radiateur et de la turbinette, ainsi que l’installation d’une vanne thermostatique, dans un appartement actuellement occupé par une locataire de leur immeuble.

2.1 Selon l'art. 121 LCI, une construction, une installation et, d’une manière générale, toute chose doit remplir en tout temps les conditions de sécurité et de salubrité exigées par la LCI, son règlement d’application ou les autorisations délivrées en application de ces dispositions légales et réglementaires (al. 1). Une construction, une installation et, d’une manière générale, toute chose doit être maintenue en tel état et utilisée de telle sorte que sa présence, son exploitation ou son utilisation ne puisse, à l’égard des usagers, du voisinage ou du public ni porter atteinte aux conditions exigibles de sécurité et de salubrité (al. 3 let. a ch. 1), ni être la cause d’inconvénients graves (al. 3 let. a ch. 2), notamment.

2.2 Selon l’art. 116 RCI, doivent être ventilés : a) les locaux de travail dépourvus de fenêtres ouvrant directement sur l’extérieur et ceux dans lesquels se dégagent des odeurs, tels que cuisines, salles d’eau, W.-C., buanderies ; b) les locaux à conteneurs et de réception des dévaloirs.

2.3 Les propriétaires sont responsables, dans l’application de la LCI et sous réserve des droits civils, de la sécurité et de la salubrité des constructions et installations (art. 122 LCI).

2.4 Lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu’elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le département peut notamment ordonner, à l’égard des constructions, des installations ou d’autres choses, la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI).

2.5 Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le département en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu’il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu’il n’invoque l’urgence (art. 132 al. 1 LCI).

2.6 Dans un arrêt ACJC/1148/2015 du 28 septembre 2015, la chambre des baux et loyers de la Cour de justice a eu à connaître d’un cas similaire à la présente cause s’agissant notamment d’une demande de réduction de loyer pour défaut de la chose louée en relation avec la présence de moisissures dans un logement. Les locataires s’étaient, en sus d’une procédure en consignation de loyer, adressés à la Sécurité civile, Police du feu pour signaler « des moisissures importantes voire des champignons » dans leur logement, ajoutant que leur fils se plaignait de troubles respiratoires ayant lieu uniquement dans la maison. Ce service s'était rendu sur place et avait constaté des moisissures dans la chambre au premier étage ainsi qu'à l'angle du bâtiment, ce qui consacrait une infraction au sens de l'art. 121 LCI. Il en avait informé le bailleur en l’invitant à se déterminer et à lui faire connaître les mesures qu'il entendait prendre pour remédier à l'état d'insalubrité. Après un nouveau passage sur place quelques mois plus tard, en présence des parties, il avait été constaté l’existence d'un pont de froid sur l'angle du mur de la chambre, qui proviendrait d'un manque de ventilation. Il avait été convenu la pose d'une tirette de ventilation sur la fenêtre de la chambre, le remplacement de la turbinette de la salle de bains et des travaux de peinture de la chambre. L'exécution de ces travaux n'avait pas mis fin aux problèmes d'humidité ; des champignons et moisissures étaient réapparus. Nonobstant l’exécution de travaux, une réduction de loyer a été confirmée par la chambre des baux et loyers.

3.             En l’espèce, c’est vainement que la recourante tente de minimiser la problématique qu’elle a elle-même admise dans son courrier du 21 janvier 2022, à savoir des problèmes d’humidité dans son bâtiment, ponctuellement connus depuis plusieurs années et localisés, durant les périodes les plus froides de l’année, en façade nord dans des angles mal ventilés et des placards fixes. Il ne suffit pas à cet égard de considérer qu’ils pourraient être résolus par une ventilation plus assidue de la pièce ainsi qu’un nettoyage. Dans ce même courrier, elle a concédé que ces problèmes avaient tendance à apparaître avec les habitudes de chauffage et d’aération de nos jours. Elle a également concédé que le loyer avait été fixé en tenant compte de cet état, ce qui n’empêche pas sa responsabilité de bailleur d’entretenir la chose louée. La recourante n’amène aucun élément venant contredire le constat, sur place, le 5 mai 2022, par un inspecteur du département, en présence de la locataire et d’un membre de l’hoirie, dans les menuiseries extérieures, des verres simples et des infiltrations d’eau, puisque les verres étaient vétustes dont certains se décollaient, la turbine hors service dans la salle de bains, et un radiateur sans vanne thermostatique et présentant une fuite.

Il est notoire que des infiltrations d’eau, une turbine hors service dans une salle de bains et un radiateur défectueux, s’ils ne sont pas forcément la seule cause de la présence d’humidité et de moisissures dans un logement, y contribuent dans une très large mesure.

C’est donc à juste titre que le département a remis en cause la salubrité du logement en question et ordonné les réfections nécessaires, à savoir du mastic des verres pour assurer une meilleure étanchéité, la pose de joints dans la feuillure, la réparation du radiateur et de la turbine, ainsi que l’installation d’une vanne thermostatique.

Certes, le bailleur pourrait être amené à avoir à effectuer de tels travaux dans le cadre d’un litige l’opposant au locataire devant les juridictions civiles. Ceci n’empêche toutefois pas le département, chargé notamment de la salubrité des constructions, d’intervenir si une situation lui est dénoncée, ce qui a été par exemple le cas dans la cause civile évoquée ci-dessus.

Ainsi, le département avait la compétence d’intervenir sur la base de la LCI et l’a fait à bon escient, au vu des problèmes de salubrité constatés.

4.             La recourante conteste la proportionnalité des travaux ordonnés.

4.1 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées).

4.2 Comme retenu par le TAPI, c’est un assainissement de ce qui semble être un minimum pour éviter infiltrations d’eau, fuites d’un radiateur et dysfonctionnement du système de ventilation des WC qui est exigé par le département, au courant d’une démolition envisagée de la maison. La recourante n’amène aucun élément permettant de remettre en cause le calcul du TAPI selon lequel les travaux requis s’élèveraient à moins de CHF 2'000.-, voire à environ CHF 1'200.- selon les projections du département.

Certes, il n’est pas agréable pour un propriétaire de procéder à des travaux alors qu’il entend démolir son bien. Toutefois, en l’état du dossier en cours auprès de département dans le cadre de la demande d’autorisation de construire quatre villas, il n’est de loin pas certain que le bâtiment soit démoli avant l’été 2023, étant en outre rappelé la problématique de la situation de la locataire en place qui n’entend a priori pas quitter son logement au rythme où le souhaiterait la recourante.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que la décision querellée respecte le principe de proportionnalité, aucune autre mesure moins incisive ne pouvant être ordonnée, sauf à laisser un logement occupé dans des conditions d’insalubrité.

En conséquence, l’autorité intimée n’a pas violé le droit ni abusé de son pouvoir d’appréciation en exigeant de la recourant les mesures querellées, ni le TAPI en les confirmant.

Partant, le recours, infondé, est rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 900.- sera mis à la charge solidaire des trois hoirs et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

* * * * *

 

 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 janvier 2023 par Messieurs A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 décembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 900.- à la charge solidaire de Messieurs A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe Eigenheer, avocat des recourants, au département du territoire-oac, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :