Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/775/2022 du 09.08.2022 ( FPUBL ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/426/2022-FPUBL ATA/775/2022 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 9 août 2022 |
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dans la cause
Mme A______
représentée par Me Romain Jordan, avocat
contre
DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI
1) Mme A______, née le ______ 1970, titulaire d'un certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) d'employée de commerce a été engagée le 15 novembre 1995, en qualité de secrétaire 1 au service B______ (ci-après : B______). Elle a été nommée fonctionnaire le 1er novembre 1998.![endif]>![if>
2) Mme A______ a été promue : le 1er janvier 2001 à la fonction de commise administrative 5/assistante ressources humaines (ci-après : RH) à l'B______, en classe de traitement 12 ; le 1er mai 2009 à la fonction d’adjointe administrative 1 au service des RH (ci-après : SRH) de l’ancien département C______, en classe 15 ; le 1er juillet 2012 à la fonction d’adjointe administrative au SRH de l’ancien département D______, en classe 17.![endif]>![if>
3) Au terme d'un entretien d’évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP) du 12 juin 2013, un plan de formation progressif associé à une évolution de carrière en tant que responsable de secteur a été établi et devait être réalisé entre le 1er janvier 2014 et le 1er janvier 2019. Mme A______ devait passer un certificat de formation continue en ressources humaines (ci-après : CAS-RH). ![endif]>![if>
4) Au terme d'un EEDP du 12 décembre 2013, les prérequis de formation de Mme A______ n’étaient pas encore atteints pour prétendre à la fonction de cadre et un plan de formation a été mis en place entre janvier 2014 et janvier 2019. Il lui appartiendrait de réussir les objectifs fixés par la direction des RH (ci-après : DRH), d’entreprendre une formation universitaire de type CAS-RH et d’obtenir le diplôme permettant d’atteindre le niveau de formation exigé pour la fonction occupée. Mme A______ indiquait qu’aucune formation ne pourrait être mise en place en 2014 compte tenu de la charge de travail importante.![endif]>![if>
5) Le 1er janvier 2014, Mme A______ a été promue à la fonction de RRH 2 à la DRH de l’ancien département E______, en classe 23, assortie du code complémentaire 9F impliquant une diminution de traitement de deux classes pendant cinq ans.![endif]>![if>
6) Lors d’un entretien du 14 juillet 2014 avec la directrice RH du département, Mme A______ a confirmé son intérêt de suivre une formation de type MAS-RH ou CAS-RH, à déterminer au moment opportun et prévoir une inscription pour l’année 2016, à confirmer dans le cadre de l’enveloppe budgétaire allouée en 2016 à la DRH. La formation MAS-RH serait planifiée plutôt en 2017 pour des raisons d’organisation. ![endif]>![if>
7) L’EEDP du 27 octobre 2015 ne mentionnait pas de plan de formation.![endif]>![if>
8) L’EEDP du 4 octobre 2016 mentionnait qu’il était souhaitable que Mme A______ puisse entreprendre une formation de type CAS-RH, comme il était prévu depuis quelques années. ![endif]>![if>
9) Lors de l’EEDP du 13 octobre 2017, Mme A______ a précisé qu’elle souhaitait suivre sa formation CAS en 2019. Cela faisait partie d’un plan de formation en lien avec sa promotion de 2014.![endif]>![if>
10) Le 1er juin 2018, suite à une réorganisation de l’administration cantonale, Mme A______ a été transférée au département F______ en qualité de RRH 2 et affectée à l’B______.![endif]>![if>
11) Le 5 février 2020, le Conseil d’État a ordonné l’ouverture d’une enquête et suspendu Mme A______ de ses fonctions avec effet immédiat.![endif]>![if>
12) L’enquêtrice a conclu le 31 juillet 2020 notamment que Mme A______ avait modifié à deux reprises des documents d’évaluation de ses prestations par ses supérieurs hiérarchiques, à l’insu de ces derniers. Les modifications concernaient la levée des codes 9.![endif]>![if>
13) Le 14 octobre 2020, le Conseil d’État a révoqué Mme A______ avec effet immédiat. ![endif]>![if>
Elle n’avait, entre autres, pas rempli son obligation de formation et de perfectionnement. Elle avait utilisé sa position de RRH 2 pour contourner les procédures RH et obtenir un avantage financier indu. Elle avait commis une violation grave de ses devoirs de service, qui avait définitivement rompu le lien de confiance.
14) Le 6 juillet 2021, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a partiellement admis le recours formé par Mme A______, annulé l’arrêté du Conseil d’État et renvoyé la cause à ce dernier pour nouvelle décision au sens des considérants (ATA/715/2021).![endif]>![if>
Mme A______ avait considéré à tort que le seul écoulement du temps lui permettait d’obtenir la levée du code sans satisfaire à l’exigence de formation. Elle avait procédé à des modifications sur les EEDP à l’insu de ses supérieurs, la réalité de ces faits étant établie par l’enquête administrative. En raison de ses manquements, elle avait obtenu un traitement supérieur à celui auquel elle aurait eu droit dès le 1er janvier 2019, sans être titulaire d'une formation universitaire ou jugée équivalente selon le plan de formation. Le stratagème reproché n’était toutefois pas établi et la sanction était excessive au vu de l’ensemble des circonstances. Mme A______ devait être réintégrée dans un poste correspondant à sa formation et aux années d’expérience acquises au 14 octobre 2020.
15) Le 23 septembre 2021, Mme A______ a indiqué au département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DEE) se tenir dans l’attente des modalités de son retour au travail.![endif]>![if>
Elle a également réclamé le règlement rétroactif du salaire dû sous dix jours.
16) Le 14 octobre 2021, le DEE a annoncé à Mme A______ qu’un entretien afin d’aborder les modalités de son retour au travail lui serait proposé.![endif]>![if>
Il l’a invitée à indiquer et documenter les revenus de substitution reçus depuis le 16 octobre 2020 ainsi que la fin de son arrêt de travail commencé le 11 novembre 2019. Le versement de son traitement serait réactivé dès le mois d’octobre 2021.
17) Lors de l’entretien du 3 novembre 2021, le DEE a exposé que des calculs en vue du paiement du rétroactif étaient en cours et que la levée du code était injustifiée depuis le 1er janvier 2019.![endif]>![if>
Les formations dont Mme A______ demandait la prise en charge avaient eu lieu à des périodes où celle-ci n’était pas engagée par l’État et n’avaient pas été validées par la hiérarchie. La demande serait toutefois réexaminée compte tenu des montants en jeu et il serait vérifié qu’elles entraient dans une logique de formation professionnelle sous l’angle du poste occupé ou à occuper à l’avenir.
Un poste de conseillère en personnel au sein de l’B______ (classe 15 annuité 5) lui était proposé. Il faisait appel à son expérience et restait dans la filière RH.
Mme A______ a indiqué qu’elle attendait de pouvoir réintégrer le poste qu’elle occupait jusqu’à sa révocation, au DEE ou dans un autre département. La classe de son traitement devait être la même que celui qu’elle percevait alors.
18) Le 11 novembre 2021, le DEE a transmis à Mme A______ le procès-verbal de l’entretien du 3 novembre 2021.![endif]>![if>
Il envisageait de refuser la prise en charge du coût des formations « CAS en violences plurielles » de la HES-SO et « CAS en leadership et GRH publics » de l’IDHEAP qu’elle avait suivies, car ces formations n'étaient pas utiles pour le service et la fonction occupée par le passé ni pour celle proposée pour le futur et n’avaient pas été préavisées par le supérieur hiérarchique et les RH du département, ni par le service de formation de l’État.
Mme A______ pouvait reprendre dès le 22 novembre 2021 et à titre provisoire un poste vacant de conseillère en personnel auprès de l’B______.
19) Le 25 novembre 2021, Mme A______ a déploré l’humiliation continue qui lui était infligée. ![endif]>![if>
L’arrêt de la chambre administrative était clair : elle devait être réintégrée dans son poste ; le renvoi de la cause ne pouvait s’entendre que dans le cadre légal ; à supposer que l’État considère avoir été trompé, il lui incombait d’invalider ses actes dans les délais, ce qu’il n’avait pas fait, ratifiant la situation.
20) a. Par décision du 22 décembre 2021, déclarée exécutoire nonobstant recours, le DEE a prononcé le changement d’affectation de Mme A______.![endif]>![if>
À compter du 1er janvier 2022, elle était affectée à la fonction de « conseillère en personnel G______ à 100 % - 5.09.014/9E » auprès de l’B______, en classe 16, soit, compte tenu du code 9E, en classe 15 annuité 5, pour un traitement annuel brut de CHF 92'067.-.
b. Par acte déposé au greffe le 12 janvier 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à son annulation. Préalablement, l’effet suspensif devait être restitué au recours et une audience de comparution personnelle des parties ainsi que la production par l’autorité du dossier intégral de la cause devaient être ordonnées.
Le 15 décembre 2021, le Conseil d’État avait prononcé à titre de sanction le retour au statut d’employée en période probatoire pour une durée de deux ans, au motif qu’elle avait commis d’importants manquements et que le lien de confiance avait été sérieusement ébranlé.
La décision querellée lui imposait un traitement inférieur de sept classes et de cinq annuités, et une diminution du traitement mensuel brut de CHF 11'303.80 à CHF 7'082.10, laquelle mettait en cause sa solvabilité à moyen et court terme et impliquait une réorganisation incompatible avec le caractère subit du changement opéré.
La prise en charge des formations lui avait été refusée.
c. Par ATA/389/2022 du 12 avril 2022, la chambre administrative a rejeté le recours de Mme A______ déposé contre la décision du 22 décembre 2021.
Faute d'avoir accompli la formation nécessaire au poste, elle ne remplissait pas les conditions pour occuper la fonction de RRH 2, même si elle l'avait assumée à la pleine satisfaction de son employeur. L'obtention des titres constituait précisément une condition de la satisfaction et du maintien au poste.
La diminution du traitement n'était que la conséquence de la réaffectation dont il était établi qu'elle était fondée et ne constituait pas une sanction déguisée, ni une seconde sanction pour les mêmes agissements.
d. Le recours interjeté le 23 mai 2022 par Mme A______ à l’encontre de l’ATA/389/2022 précité est toujours pendant devant le Tribunal fédéral (procédure 8C_324/2022).
21) Par décision du 22 décembre 2021 également, reçue le 23 décembre 2021, le DEE a fixé la rémunération due rétroactivement, selon les décomptes et calculs annexés, à :![endif]>![if>
- CHF 133'115.45 de rétroactif de traitement brut dû pour les mois d'octobre 2020 à septembre 2021, sous déduction des primes et cotisations légales et sociales usuelles ;![endif]>![if>
- CHF 16'225.50 brut, au titre de traitement du mois de décembre 2021 et de la seconde moitié du 13ème salaire pour l'année 2021 sous déduction des primes et cotisations légales et sociales usuelles ;![endif]>![if>
- CHF 1'970.50 net pour les intérêts moratoires dus sur le rétroactif de traitement pour les mois d'octobre ;![endif]>![if>
- le montant de CHF 83'300.85, correspondant aux indemnités de chômage versées par la CCGC pour les mois d'octobre 2020 à septembre 2021, était soustrait ;![endif]>![if>
- le montant de CHF 9'295.70 était compensé avec le rétroactif de traitement dû au titre de la restitution du trop-perçu sur le traitement pour les mois de janvier 2019 à septembre 2020.![endif]>![if>
Le caractère indu de la levée du code 9E assorti au traitement avait été reconnu par la chambre administrative dès le 1er janvier 2019. Sans cette levée indue, le traitement aurait dû se situer en classe 22, position 9 pour l'année 2019 et en classe 22 position 10 pour les années 2020 et 2021, et non en classe 23, compte tenu également de la suppression légale de l'annuité pour 2021.
Le rétroactif du traitement dès le mois d'octobre 2020, se fondait sur un traitement en classe 22 position 10, y compris le solde de la moitié du treizième salaire de décembre 2020 et de juin 2021 ainsi que la gratification de CHF 2'000.- pour les vingt-cinq années de services.
La subrogation de la CCGC à concurrence des indemnités journalières versées pour les mois d'octobre 2020 à septembre 2021 donnait lieu à une soustraction et le montant serait remboursé directement à la CCGC.
Le total net dû était de CHF 35'244.65.
22) Par acte mis à la poste le 1er février 2022, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision du DEE en concluant à son annulation et à la condamnation du DEE à payer, sous déduction des cotisations sociales légales, le montant brut de CHF 11'303.80 par mois pour les mois d'octobre 2020 à décembre 2021 inclus, avec intérêts à 5 % l'an depuis chaque mensualité ; à payer, sous déduction des cotisations sociales légales, le montant brut de CHF 16'955.70 à titre de treizième salaire, avec intérêts à 5 % l'an depuis la date moyenne du 1er juin 2021 ; à payer le montant de CHF 2'000.- avec intérêts à 5 % l'an depuis le 30 novembre 2020 et au versement d'une indemnité de procédure. ![endif]>![if>
L'annulation de la décision de révocation entraînait sa réintégration et en principe le rétablissement du statu quo ante, ce qui induisait notamment le versement de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir si elle avait continué à exercer ses fonctions. Le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi était violé par la décision qui fixait le traitement en classe 22, en dessous de celui touché précédemment. La décision s'apparentait à une sanction déguisée et violait le principe ne bis in idem.
La décision violait également le principe de la bonne foi car le plan de formation prévoyait la levée du code après l'écoulement d'un délai de cinq ans. Ce plan avait été approuvé par sa hiérarchie d'alors et validé par le secrétaire général du département. La levée du code au 1er janvier était donc légitime. La perception du soi-disant « trop perçu » n'avait jamais donné lieu à une décision, ni n'avait été décidée lors de la suspension le 5 février 2020, ni à réception du rapport d'enquête le 31 juillet 2020, ni même lors du prononcé de l'arrêt de révocation le 14 octobre 2020.
Par analogie, la décision violait les art. 62, 63 et 64 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). Il n'y avait pas lieu à restitution dans la mesure où celui qui avait reçu indûment établissait qu'il n'était plus enrichi lors de la répétition et surtout il n'y avait pas de cause valable, ou de cause qui aurait cessé d'exister fondant une action en répétition de l'indu.
La décision violait les dispositions relatives au traitement, notamment en déduisant le montant correspondant aux indemnité chômage.
23) Le 16 mars 2022, le département a déposé des observations, concluant au rejet du recours.![endif]>![if>
Le fait que la révocation ait été annulée n'empêchait aucunement de tenir compte des considérants de l'arrêt en formalisant par le biais de la décision querellée l'existence de l'indu et le caractère injustifié de la levée du code 9 au 1er janvier 2019 afin d'exiger la répétition des prestations indûment versées. Les conditions d'une répétition de l'indu étaient remplies et elle était intervenue dans le délai de prescription.
La recourante n'apportait aucun élément à l'appui de l'allégation de ne plus être enrichie des montants en cause.
La recourante n'était plus titulaire de la créance correspondant aux prestations reçues de la caisse de chômage en raison de la subrogation légale opposable à l'employeur sans aucune formalité.
Le calcul et les décomptes établis n'étaient pas contestés.
24) Le 20 avril 2022, la recourante a répliqué.![endif]>![if>
La correspondance intégrale avec la CCGC devait être produite.
L'annulation de la révocation avec effet ex tunc impliquait le versement de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir si elle avait continué à exercer ses fonctions, soit une rémunération en classe 23.
Elle reprenait pour le surplus son argumentation développée dans le recours.
25) Le 21 avril 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger. ![endif]>![if>
1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).![endif]>![if>
2) Le recours porte notamment contre la détermination du traitement à verser à la recourante suite à l'ATA/715/2021 du 6 juillet 2021 ordonnant sa réintégration. La classe du traitement est litigieuse, l'autorité intimée ayant fixé le traitement en classe 22 alors que la recourante estime que c'est la classe 23 qui doit être appliquée. La recourante soutient que l'instauration à titre rétroactif d'un code 9 pénalisant, alors qu'il avait été levé et qu'elle remplissait pleinement les exigences relatives à son poste, est contraire au droit. ![endif]>![if>
En l'occurrence, le grief de la recourante tombe à faux puisque dans son argumentation, elle ne fait que répéter sa vision des événements qui s'avère contraire aux faits établis par la chambre de céans. En effet la chambre administrative a déjà reconnu expressément, dans un arrêt devenu définitif, que les manquements répréhensibles sur le plan disciplinaire de la recourante lui avaient permis d'obtenir le paiement d'un traitement supérieur à celui auquel elle aurait eu droit dès le 1er janvier 2019, en l'absence de la formation requise (ATA/389/2022 du 12 avril 2022 consid. 3 et ATA/715/2021 précité consid. 15).
Il n'y a donc pas lieu de revenir sur ces considérants et c'est à juste titre que l'autorité intimée a considéré que s'agissant du traitement dû suite à l'annulation de la décision de révocation immédiate, celui-ci devait être fixé en classe 22, soit dans la classe correspondant à celle avant levée du code 9. L'application dès cette date d'un code complémentaire 9, impliquant une diminution maximale de deux classes par rapport à la classe prévue pour la fonction, applicable aux candidats engagés ou nommés n'ayant pas encore le titre correspondant au niveau d'exigence requis pour la fonction, est donc conforme au droit (art. 4 du règlement d’application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 - RTrait - B 5 15.01).
Les griefs de la recourante à cet égard seront donc écartés et la décision confirmée quant à la fixation des traitements dus pour octobre 2020 à septembre 2021, conformément au calcul détaillé figurant dans les décomptes annexés à la décision, lequel n'est pas contesté en soi.
3) La recourante conteste que le paiement en classe 23 tel qu’effectué depuis le 1er janvier 2019 jusqu'à la révocation, doive être considéré comme indu et donc que la différence du traitement avec celui recalculé en classe 22 puisse être compensée avec les montants encore dus.![endif]>![if>
a. Tant la doctrine que la jurisprudence reconnaissent que le principe de la répétition de l'indu, énoncé aux art. 62 ss CO, constitue une règle générale de l'ordre juridique, applicable en droit public. L'obligation de restituer l'indu se fonde en premier lieu sur les dispositions des lois spéciales qui la prévoient et, à défaut, sur les règles générales de l'enrichissement illégitime au sens des art. 62 à 67 CO. Dès lors que l'on soumet l'obligation de restituer aux art. 62 ss CO, il convient en principe d'appliquer ces dispositions avec leurs avantages et inconvénients respectifs pour l'enrichi et le lésé, sans en dénaturer le sens ou la portée, quand bien même elles s'incorporent dans un système régi en partie par le droit public (ATF 138 V 426 consid. 5.1 ; ATA/368/2022 du 5 avril 2022 consid. 3a ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011,
p. 168-169).
Ainsi, l'administré qui verse à l'État une somme dont il n'est pas redevable est en droit d'en réclamer la restitution, même en cas de silence de la loi, si le versement est intervenu sans cause valable et l'État qui verserait à l'administré une somme dont il n'est pas redevable est en droit d'en réclamer la restitution même si le versement est intervenu sans cause valable, alors même que le cas n'est pas prévu expressément par la loi (ATA/368/2022 précité consid. 3a et les références citées).
Dès lors, sur la base de l’art. 62 CO, qui constitue la règle de principe (Pierre TERCIER/Pascal PICHONNAZ, Le droit des obligations, 5ème éd., 2012, n. 1824) ou clause générale (Benoît CHAPPUIS, in Luc THÉVENOZ/ Franz WERRO, Code des obligations I, Commentaire romand, 2ème éd., 2012, n. 1 ad art. 62 CO) et selon lequel celui qui, sans cause légitime, s'est enrichi aux dépens d'autrui, est tenu à restitution, une prestation est indue lorsqu'elle repose sur une cause illégitime, soit non valable, qui ne s'est pas réalisée ou qui a cessé d'exister (art. 62 al. 2 CO).
Selon l'art. 63 al. 1 CO, celui qui a payé volontairement ce qu'il ne devait pas ne peut le répéter que s'il prouve qu'il a payé en croyant, par erreur, qu'il devait ce qu'il a payé.
En outre, à teneur de l’art. 64 CO, il n'y a pas lieu à restitution, dans la mesure où celui qui a reçu indûment établit qu'il n'est plus enrichi lors de la répétition ; à moins cependant qu'il ne se soit dessaisi de mauvaise foi de ce qu'il a reçu ou qu'il n'ait dû savoir, en se dessaisissant, qu'il pouvait être tenu à restituer. Dans ce cadre, la jurisprudence a précisé que, si l'enrichi a utilisé ce qu'il a obtenu sans droit pour une dépense qu'il aurait, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, autrement faite avec ses propres moyens, son enrichissement prend la forme d'une économie de dépenses et il est en principe tenu à restitution (arrêt du Tribunal fédéral 2C_534/2013 du 17 octobre 2013 consid. 5.4. et les références citées).
b. La compensation d’une obligation pécuniaire avec une dette du créancier de cette obligation est possible en droit public, même sans base légale, en vertu d’une institution générale du droit, si elle n’est pas exclue par la loi, les dispositions du CO qui en fixent les conditions étant alors applicables par analogie (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, p. 264 n. 751).
Faute d’une base légale spéciale, la compensation est admise aux conditions posées par l’art. 120 CO, en tant que règle ou institution générale du droit, aux conditions cumulatives suivantes : la réciprocité des créances, l’identité des prestations dues, l’exigibilité de la créance compensante, la possibilité de faire valoir la créance compensante en justice et l’absence de cause d’exclusion (ATA/1180/2021 du 2 novembre 2021 consid. 2a ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 432 n. 1244 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 264 n. 751).
4) a. En l'espèce, comme vu ci-dessus, la chambre de céans a déjà retenu que la levée du second code 9 au 1er janvier 2019, n'était pas fondée et que le paiement d'un traitement en classe 23, depuis cette date, au lieu d'un traitement en classe 22, n'était ainsi pas justifié (ATA/389/2022 précité consid. 3 ; ATA/715/2021 précité consid. 15). La différence de traitement constitue donc une prestation indue, la recourante s'étant enrichie aux dépens de l'autorité intimée avec des prestations reposant sur une cause illégitime, son traitement ayant été établi de manière erronée dès les 1er janvier 2019, dès lors que l'autorité intimée se fondait sur la levée du code, dont le caractère indu a été constaté ultérieurement par la chambre de céans. ![endif]>![if>
b. La recourante estime que la prétention est tardive et prescrite, la connaissance du plan de formation constituant le point de départ du délai de prescription. Or, s'agissant d'une répétition de l'indu, soit en l'occurrence des différences de traitement payés dès le 1er janvier 2019, l'art. 67 CO fixe ce délai à trois ans depuis le 1er janvier 2020 pour les prétentions non prescrites à cette date, alors que le délai était auparavant d'un an, dès la connaissance du droit à la répétition, lequel est forcément postérieur au versement du salaire de janvier 2019, après la levée du code 9. Le délai de prescription relatif est ainsi respecté par la décision rendue le 14 décembre 2021.
c. La recourante allègue, sans toutefois expliquer ou démontrer, qu'elle ne serait plus enrichie des montants en cause. Or, elle supporte le fardeau de la preuve sur ce point (ATF 92 II 168 consid. 6c ; ATAF A-5824/2020 du 14 septembre 2021 consid. 6.3.2) compte tenu du fait qu'elle ne pouvait, de bonne foi, croire que cette différence de traitement lui était due, comme cela ressort déjà des deux arrêts rendus par la chambre de céans (ATA/715/2021 précité consid. 15 ; ATA/389/2022 précité consid. 6d).
Les griefs de la recourante seront écartés.
5) Finalement, la recourante s'oppose à la déduction du montant pour lequel la caisse de chômage est subrogée.![endif]>![if>
Ce grief doit être écarté car en opérant le versement, la caisse de chômage s'est subrogée à son assurée dans tous ses droits, y compris le privilège légal, jusqu'à concurrence de l'indemnité journalière versée (art. 29 al. 2 1ère phr. de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 - loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0). Cette cession légale est opposable aux tiers sans aucune formalité et même indépendamment de toute manifestation de volonté du créancier. L'assuré perd la créance qu'il aurait pu faire valoir contre l'employeur, à concurrence des prestations de l'assurance-chômage et la caisse devient titulaire de cette créance, le travailleur ne conservant ses prétentions que pour la part non couverte par les indemnités journalières (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 24/06 du 25 octobre 2006 consid. 4.2.1).
Il découle de ce qui précède que le recours, en tout point infondé, doit être rejeté.
6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera alloué aucune indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA). ![endif]>![if>
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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2022 par Mme A______ contre la décision du département de l'économie et de l'emploi du 22 décembre 2021;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 500.- à la charge de Mme A______ ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;
- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;
- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;
- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;
le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de l'économie et de l'emploi.
Siégeant : M. Mascotto, présidente Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Payot
Zen-Ruffinen et Michon Rieben, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. Scheffre
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| le président siégeant :
C. Mascotto |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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