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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3001/2020

ATA/302/2021 du 09.03.2021 ( AIDSO ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3001/2020-AIDSO ATA/302/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 mars 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______

contre

SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS



EN FAIT

 

1) Madame et Monsieur A______ sont les parents (ci-après : parents) de B______ né le ______2003.

2) Par ordonnance provisionnelle du 25 août 2020, le Tribunal des mineurs (ci-après : TMin) a ordonné le placement de leur fils.

3) Par décision du 31 août 2020, le service de protection des mineurs
(ci-après : SPMi) a facturé la contribution des parents aux frais d'entretien mensuels relatifs au placement de B______.

Celle-ci s'élevait à un total mensuel de CHF 1'255.- (CHF 900.- représentant les frais de pension et CHF 355.- pour l'entretien personnel de B______, compte tenu de la tranche d'âge de 16 à 18 ans).

Cette contribution tenait compte d'un rabais de 0 % dès lors que les parents n'avaient pas transmis l'autorisation au SPMi pour qu'il accède à leur revenu déterminant unifié (RDU).

4) Par acte du 24 septembre 2020, les parents ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision précitée en contestant uniquement leur participation aux frais d'entretien personnel de leur fils, ce qu'ils ont confirmé par courrier subséquent du 1er octobre 2020.

Par ordonnance provisionnelle du 25 août 2020, le TMin avait ordonné le placement de leur fils. Celui-ci était en séjour de rupture auprès de l'association « C______ » (ci-après : C______ ou l'association) et naviguait en Méditerranée. Ce séjour demandait qu'il soit équipé, aux frais des parents. C______ ne prenait pas à sa charge les frais d'entretien personnel de leur fils. Un éducateur leur avait expliqué que C______ les contacterait si quelque chose venait à manquer à leur fils. Dans ces conditions, le SPMi ne pouvait pas percevoir des frais d'entretien personnel.

5) Dans sa réponse du 19 octobre 2020, le SPMi a conclu au rejet du recours.

Selon le règlement fixant la contribution des père et mère aux frais d'entretien du mineur placé hors du foyer familial ou en structures d'enseignement spécialisé (RCFEMP - J - 6 26.04), le prix de pension et les frais d'entretien étaient constitués d'un montant global de participation, déterminé sur la base du RDU, et non celui de la dépense effective. Le montant de CHF 355.- relatif aux frais d'entretien personnel de leur enfant ne pouvait être négocié.

B______ faisait l'objet d'un placement pénal. Le SPMi n'était pas le placeur auprès de C______, son rôle se limitant à régler les factures de cette association et à refacturer la participation règlementaire des parents.

Au demeurant, en cas de désaccord sur les prestations réclamées ou facturées par C______, les parents devaient, pour des raisons de compétence, s'adresser à ladite association ou au TMin.

6) Le juge délégué a interpellé le SPMi par courrier du 14 janvier 2021 sur la facturation effective de frais d'entretien par C______, dans la mesure où, dans un cas semblant similaire et traité dans un arrêt ATA/81/2016 rendu par la chambre administrative le 26 janvier 2016, ladite association ne le faisait pas.

7) Le SPMi a transmis à la chambre de céans, par pli du 28 janvier 2021, un courriel adressé la veille à ladite association demandant à cette dernière de lui remettre une liste exhaustive des demandes de frais d'entretien présentées aux parents de B______, ajoutant que dès lors que le SPMi facturait aux parents une participation au budget personnel de l'enfant (habits, argent de poche, petits frais...), C______ ne devrait pas leur en demander. En cas de nécessité, l'association devait s'adresser au SPMi pour accord préalable et facturation de frais « véritablement nécessaires et justifiés ».

8) Nonobstant une prolongation du délai accordée au SPMi à sa demande jusqu'au 15 février 2021, celui-ci ne s'est pas manifesté.

9) Sur ce, les parties ont été informées, le 22 février 2021, que la cause était gardée à juger en l'état.

10) Le SPMI a, le 2 mars 2021, adressé à la chambre de céans, dans un souci de transparence et dans la mesure où ces pièces étaient à l'avantage des recourants, un courrier de C______ mentionnant que les frais liés à l'entretien de B______ s'étaient montés à EUR 218.08, selon quittances jointes des 9 et 10 décembre 2020, en lien avec des achats de vêtements pour un séjour « chez M. D______ ». Mme A______avait de son côté réglé pour ce même séjour un montant de CHF 86.85 pour des vêtements également. Les jeunes pouvaient par ailleurs venir à bord avec approximativement EUR 10.- par semaine au titre d'argent de poche. B______ avait remis un montant de EUR 92.- à cet effet à son éducateur au moment de son départ le 12 août 2020 et sa mère l'avait complété par deux versements de EUR 40.- et EUR 50.- par la suite dans la mesure où le séjour s'était prolongé au-delà de la fin du mois de septembre.

11) Ces pièces ont été transmises aux recourants pour information le 4 mars 2021.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Les père et mère doivent pourvoir à l'entretien de l'enfant et assumer, par conséquent, les frais de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (art. 276 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre l907 - CC - RS 210). L'entretien est assuré par les soins et l'éducation ou, lorsque l'enfant n'est pas sous la garde de ses père et mère, par des prestations pécuniaires (art. 276 al. 2 CC).

Cette obligation dure jusqu'à la majorité de l'enfant (art. 277 al. 1 CC). La contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère ; il est tenu compte de la fortune et des revenus de l'enfant, ainsi que de la participation de celui des parents qui n'a pas la garde de l'enfant à la prise en charge de ce dernier (art. 285 al. 1 CC).

b. La décision litigieuse est fondée sur le RCFEMP du 21 novembre 2012 en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020 (ci-après : aRCFEMP).

c. Lorsqu'un mineur est placé dans une institution d'éducation spécialisée, dans une institution prévue par la loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 20 juin 2003 (DPMin - RS 311.1), auprès de parents nourriciers ou d'un proche parent, dans une structure d'enseignement spécialisé ou thérapeutique à caractère résidentiel ou dans une structure d'enseignement spécialisé de jour, l'office de l'enfance et de la jeunesse et l'office médico-pédagogique perçoivent une contribution financière aux frais de pension et d'entretien personnel auprès de ses père et mère. La part du financement non couverte par cette contribution est à la charge de l'État (art. 1 al. 1 et 3 aRCFEMP).

d. Le montant de la contribution financière des parents aux frais de pension est calculé, lors d'un placement résidentiel, sur une base journalière forfaitaire fixée à CHF 30.-, représentant CHF 900.- par mois, au maximum (art. 2 al. 1 aRCFEMP).

À ce montant se rajoutent les frais d'entretien personnel du mineur (art. 2 al. 2 aRCFEMP), au montant de CHF 355.- pour un enfant dès 16 ans (art. 3 aRCFEMP).

D'autres frais nécessaires aux activités ordinaires peuvent être mis à la charge des père et mère (camps par exemple) à concurrence des frais effectifs (art. 2 al. 4 aRCFEMP).

3) En l'espèce, les recourants ne remettent pas en cause leur devoir de s'acquitter du montant mensuel de CHF 900.- relatif aux frais de pension de leur fils sur décision du TMin. Ils contestent en revanche le montant de CHF 355.- correspondant aux frais d'entretien, dès lors que l'association qui l'accueille les contacterait directement pour leur demander une participation auxdits frais en fonction des besoins effectifs.

Il ressort de l'arrêt précité ATA/81/2016, que dans le cas d'un jeune placé auprès de la même association que le fils des recourants, le débat sur les frais d'entretien n'avait pas de réelle importance, dans la mesure où le SPMi avait indiqué dans ses observations qu'il n'entendait facturer aucun frais lié à l'entretien personnel de l'adolescent, puisque ceux-ci ne lui avaient pas été décomptés par l'association. Il lui en avait été donné acte.

Il ne résulte pas des éléments figurant à la présente procédure que l'association en question aurait modifié sa pratique depuis lors. Le SPMi ne démontre de son côté pas qu'il s'acquitterait de factures émises par elle pour des frais d'entretien du fils des recourants. Aucun élément ne permet de douter de l'allégation des recourants selon laquelle ladite association viendrait à eux en cas de besoins spécifiques. Au contraire, les pièces nouvellement produites attestent de la seule facturation d'un montant de EUR 218.08 au SPMI en décembre 2020, en lien avec l'achat d'habits et pour le reste, de la prise en charge par la mère du mineur d'autres vêtements et de son argent de poche.

Dans ces circonstances et à l'instar de ce qui a été fait dans l'affaire susmentionnée, le SPMi n'est pas légitimé à facturer des frais d'entretien forfaitaires pour cet adolescent, alors que lui-même ne verse qu'une faible contribution en fonction de besoins vestimentaires rares et avérés, ce qu'il ne conteste au demeurant pas.

Sa décision du 31 août 2020 doit être partiellement annulée en tant qu'elle fixe à CHF 355.- l'entretien personnel mensuel dû par les recourants.

Le recours sera partant admis.

4) Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure aux recourants qui se sont défendus seuls et qui n'y ont pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 septembre 2020 par Madame et Monsieur A______ contre la décision du service de protection des mineurs du 31 août 2020 ;

au fond :

l'admet ;

annule partiellement la décision du service de protection des mineurs du 31 août 2020 en tant qu'elle fixe à CHF 355.- le montant mensuellement dû pour l'entretien personnel du fils de Madame et Monsieur A______;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame et Monsieur A______, ainsi qu'au service de protection des mineurs.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :