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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1507/2020

ATA/1091/2020 du 03.11.2020 ( DIV ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1507/2020-DIV ATA/1091/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 novembre 2020

 

dans la cause

 

A______ SA

contre

FAE - FONDATION D'AIDE AUX ENTREPRISES



EN FAIT

1) Fondée en 2009 et ayant son siège à Genève, A______ SA (ci-après : A______) a pour but la représentation d'entreprises sur le plan national et international, des activités de conseil à d'autres entreprises dans les domaines de la communication, du marketing et des relations publiques, sur le plan national et international, la promotion, la représentation, la distribution, la vente, l'import et l'export de produits manufacturés ou non d'entreprises, et des prestations de services et conseils dans les domaines du tourisme, de l'hôtellerie et du transport.

A______ a ouvert le 14 janvier 2020 l'B______ (ci-après : B______), lequel propose aux adultes des formations en management et tourisme, tourisme et hôtellerie, accueil et assistance professionnels, et gestion de carrière, comprenant des cours et des stages en entreprise, ainsi que dans un « laboratoire d'expériences professionnelles », soit une agence de voyages, C______ SA, dirigée par l'actionnaire et administratrice unique d'A______.

2) La Fondation d'Aide aux Entreprises (ci-après : FAE) est une fondation de droit public genevoise constituée le 1er décembre 2005 (PA 410.01) et régie par la loi sur la Fondation d'aide aux entreprises du même jour (LFAE - PA 410.00). Elle est chargée de faciliter l'accès au financement pour les petites et moyennes entreprises genevoises privées d'accès aux sources traditionnelles de financement, aux termes de la loi sur l'aide aux entreprises du 1er décembre 2005 (LAE - I 1 37).

3) A______ est entrée en contact avec la FAE à fin février 2020, et sa directrice, Mme D______, a présenté le projet de l'entreprise à un collaborateur de la FAE, M. E______, lors d'un entretien téléphonique du 5 mars 2020.

Par courriel du 5 mars 2020, M. E______ a communiqué à Mme D______ la liste des premiers éléments « nécessaires à la constitution pour étudier votre demande », soit le formulaire complété de description d'activité, les comptes et bilans des trois dernières années de la société, le registre de ses actionnaires, un business plan, le détail des investissements réalisés pour le lancement de l'école, le budget d'exploitation sur deux ans, le budget mensuel de trésorerie sur deux ans, la situation comptable sur les trois premiers mois de 2020 ainsi que le curriculum vitae des actionnaires et dirigeants.

Par courrier du 24 mars 2020, A______ a remis à la FAE un dossier comprenant un business plan et les pièces demandées, et l'a priée de la cautionner auprès de la banque F______ à hauteur de CHF 100'000.-, ainsi que de lui octroyer d'ici au 1er avril 2020 un prêt immédiat de CHF 35'000.- pour financer les salaires durant trois mois.

4) Par courrier du 17 avril 2020, la FAE a rejeté la demande d'avance de liquidités sous forme de prêt formée par A______ dans le cadre des mesures liées à la crise du Covid-19 au sens de l'art. 7D LAE.

Une analyse complète de la situation sur la base des éléments en sa possession, et notamment une analyse de viabilité de l'entreprise, la conduisait à conclure que l'endettement sollicité ne pourrait pas être supporté au vu de l'absence de revenus.

5) Par courriel du 20 avril 2020, A______ a accusé réception du courrier de la FAE du 17 avril 2020.

La réponse de la FAE paraissait incomplète, car A______ avait également demandé un cautionnement.

La FAE était invitée à se déterminer par retour de courriel et à indiquer les voies et délais de recours.

6) Par courriel du 20 avril 2019, la FAE a reconnu que son courrier n'était pas complet et s'en est excusée en invoquant le grand nombre de dossiers qui lui étaient soumis.

Les critères étaient identiques pour le cautionnement, même si une approche basée sur un business plan pourrait être envisagée. Sur la base des documents remis, toutefois, elle n'avait pas pu déterminer avec suffisamment de certitude qu'A______ serait en mesure, à ce stade, de rembourser le prêt sollicité.

Elle était potentiellement disposée à réévaluer la situation après la réalisation des premiers revenus démontrant la réceptivité du marché aux prestations proposées.

7) Par courriel du 21 avril 2020, A______ a invité la FAE à lui indiquer « quelles pièces (la nature et le nombre) [elle avait] réceptionnées faisant partie du dossier envoyé le 24 mars ».

8) Le 21 avril 2020, la FAE a répondu à A______ que la décision avait été prise sur la base des documents envoyés, et qu'au vu du contexte elle ne pouvait établir la liste de ces documents. La décision était ferme et elle ne comptait pas poursuivre les échanges par courriel.

9) Par acte remis à la poste le 12 mai 2020, A______ a recouru au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision de la FAE du 17 avril 2020 de ne pas octroyer de cautionnement, concluant à ce que le TAPI impose à la FAE de la cautionner dans les plus brefs délais et sans réserve, afin qu'elle puisse approcher une banque et obtenir un prêt.

Le recours ne visait que le refus de cautionnement. Tout dans le traitement du dossier portait à croire que la demande avait été instruite de manière partiale et incomplète. Elle avait apporté le plus grand soin à la constitution du dossier, dont le business plan était la pièce maîtresse. Sa demande visait à financer le paiement de factures urgentes et à parer à la baisse passagère de l'activité, soit précisément les cas envisagés par la loi. Le site de la FAE indiquait qu'un cautionnement était possible si l'entreprise développait une activité économique et des emplois sur le canton de Genève, et si l'affaire était viable et qu'il y avait une possibilité de développement à terme, ce qui était précisément le cas d'A______. L'oubli de traiter la demande de cautionnement suggérait que le dossier n'avait pas été examiné dans les règles de l'art, voire que la demande de cautionnement n'avait pas du tout été traitée.

10) Par jugement du 27 mai 2020, le TAPI a constaté qu'il n'était pas compétent pour connaître du recours d'A______, a déclaré celui-ci irrecevable et l'a transmis à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

11) Le 2 juillet 2020, la FAE a conclu au rejet du recours, avec suite de frais et dépens.

La LAE ne conférait pas de droit à l'obtention d'une aide financière et la LFAE disposait que les décisions de la fondation sur l'attribution de l'aide financière, sa nature et son montant, ne pouvaient faire l'objet d'aucun recours, ce qui correspondait à la volonté du législateur à teneur des travaux préparatoires de 2005, et s'expliquait par le fait que les prestations n'étaient pas un droit mais un prêt remboursable, octroyé au cas par cas après analyse minutieuse et une décision à la majorité d'un collège de neuf membres, venant d'horizons différents.

Un premier tri des demandes était opéré sur la base d'une discussion téléphonique. En cas de « diagnostic favorable » la constitution d'un dossier complet était requise, ainsi que le paiement d'une taxe d'inscription de CHF 300.-.

Selon l'analyse des premiers documents remis par A______, celle-ci ne générait aucun chiffre d'affaires et réalisait depuis trois ans des pertes. De plus, ni le business plan ni aucun élément remis n'appuyaient la demande pour démontrer que la société serait en mesure dans un avenir proche de réaliser des revenus suffisants. Il n'était ainsi pas possible de déterminer de manière suffisamment plausible qu'A______ aurait la capacité d'assumer les charges financières et les remboursements relatifs à un prêt.

A______ n'avait en outre pas formellement déposé de demande complète, puisque l'aide avait été refusée à l'étape du diagnostic préalable. Elle n'avait ni remis ni complété les formulaires adéquats, ni transmis l'ensemble des pièces nécessaires à l'analyse d'une demande, mentionnées dans les formulaires, ni procédé au règlement de la taxe d'inscription. Des modèles de formulaires étaient joints.

Au vu du contexte, l'analyse des pièces remises avait été effectuée tant pour la demande de prêt que pour la demande de cautionnement. Un complément d'information aurait été exigé si la faisabilité avait été établie.

Les difficultés de trésorerie d'A______ étaient antérieures à la crise du Covid.

Les exigences étaient similaires pour une demande de caution, mais la situation était analysée de manière complémentaire sur la base d'un business plan pour prendre en compte le développement futur de l'entreprise. Or, les documents remis ne permettaient pas non plus de conclure de manière plausible à une viabilité à long terme et donc une capacité à rembourser le prêt sollicité.

La situation pourrait être réexaminée après la réalisation par A______ des premiers revenus démontrant l'existence d'un marché pour les services proposés, et la capacité d'atteindre un premier équilibre financier.

12) Le 16 juillet 2020, A______ a répliqué et persisté dans ses conclusions.

La FAE ne lui avait jamais réclamé le versement de la taxe d'inscription de CHF 300.-, ce qui renforçait le soupçon que sa demande n'avait en réalité jamais été examinée. Les cinq membres du comité prévu par la loi n'avaient pu exercer leur pouvoir d'appréciation.

Dès lors, son recours, « qui n'est pas un recours (au sens de l'art. 13 LFAE) contre le refus d'accorder le cautionnement (comme il n'y a pas eu d'examen du dossier !) se transforme en requête réitérée d'obtention de cautionnement pour l'obtention d'un prêt bancaire [...] ».

A______ ne réalisait pas de pertes, mais avait réorienté sa stratégie et était restée en veille durant quelque temps, jusqu'à la fin de l'année 2019 où elle avait commencé à constituer une clientèle sérieusement intéressée à la formation professionnelle. À ce jour, elle avait vingt-deux élèves dont le paiement des écolages générait un chiffre d'affaires, certes modeste, mais prometteur, qui permettait de servir des salaires et de payer le loyer, au point que la régie était d'accord de lui louer dès le 1er septembre 2020 les locaux qu'elle occupait actuellement comme sous-locataire.

Elle appréciait que la FAE soit disposée à réévaluer la situation, mais vu la charge de travail due à la constitution du dossier de demande de cautionnement et la préparation de la rentrée scolaire, elle n'était disposée à fournir qu'une copie des contrats conclus à ce jour.

13) Il ressort notamment des pièces produites par A______ qu'elle n'a enregistré aucun produit entre 2016 et 2019, qu'elle a enregistré des pertes de CHF 166.20 en 2016, CHF 169.20 en 2017, CHF 2'878.85 en 2018 et CHF 11'638.44 en 2019, et qu'elle avait alors pour principaux actifs une créance contre C______ SA ainsi que du mobilier et des installations. Par ailleurs, B______ avait encaissé, respectivement prévoyait d'encaisser, de la part de onze élèves au total, des écolages par CHF 635.- en janvier 2020, CHF 1'353.- en février 2020, CHF 12'580.- en mars 2020, CHF 24'574.- en avril 2020, CHF 19'965.- en mai 2020, CHF 1'116.- en juin 2020, CHF 3'350.- en juillet 2020, 26'000.- en août 2020, CHF 6'000.- en septembre 2020 et CHF 6'000.- en décembre 2020, soit CHF 101'573.- au total pour l'année 2020. Les charges salariales annuelles des sept enseignants étaient évaluées à CHF 34'800.- au total, compte tenu que deux enseignants renonçaient à leur salaire. Le loyer mensuel proposé par la régie dès le 1er septembre 2020 était de CHF 6'485.41 plus CHF 400.- de charges.

14) Le 16 juillet 2020, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sous cet angle (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité à la loi de la décision de la FAE du 20 avril 2020 de refuser à A______ un cautionnement à hauteur de CHF 100'000.-.

3) La conclusion d'A______, selon laquelle son recours, « qui n'est pas un recours (au sens de l'article 13 LFAE [recte : LAE]) contre le refus d'accorder cautionnement (comme il n'y a pas eu d'examen du dossier !) se transforme en requête réitérée d'obtention de cautionnement pour l'obtention d'un prêt bancaire [...] », est irrecevable, une nouvelle requête devant être adressée à l'autorité, soit la FAE.

4) La FAE soutient qu'aucun recours ne serait ouvert contre sa décision, sans toutefois conclure formellement à l'irrecevabilité du recours d'A______. La question doit cependant être examinée d'office.

a. Selon l'art. 13 LAE, la FAE statue sur l'attribution de l'aide financière, sur sa nature et sur son montant, par des décisions ne pouvant faire l'objet d'aucun recours (al. 1), les dispositions de la LPA demeurant réservées (al. 2). L'art. 2
al. 2 LAE dispose en outre que la LAE ne confère pas de droit à l'obtention d'une aide financière.

Le message à l'appui des projets de loi PL 9523 et 9524 déposé par le Conseil d'État le 6 avril 2005 expliquait que l'art. 2 al. 2 LAE concrétisait la norme qui voulait que les subventions, garanties, crédits, etc., ne constituent pas des droits ouvrant la voie du recours au Tribunal administratif, aujourd'hui la chambre administrative (exposé des motifs, p. 33). Tant l'art. 10 de la loi instituant une aide financière aux petites et moyennes industries (LAPMI, abrogée) que l'art. 7 al. 1 de la loi sur la Fondation Start-PME (abrogée) prévoyaient que les décisions du conseil de fondation ne pouvaient faire l'objet d'aucun recours. Cette solution était conservée dans la LAE. Elle était le pendant en outre de l'art. 4
al. 3 LAE, qui déniait le droit à l'obtention de l'aide financière (ibid., pp. 35-36).

Les art. 2 et 13 al. 1 LAE ont ensuite été adoptés à l'unanimité en commission (rapport de la Commission de l'économie du 7 octobre 2005, pp. 8 et 12) puis sans discussion par le Grand Conseil, par septante-huit oui et trois abstentions le 1er décembre 2005.

b. Dès lors qu'il se fait principalement au moyen de deniers publics et dans l'intérêt public, un subventionnement doit être considéré à la base comme une activité étatique. Il est donc soumis au droit, qui est le fondement et la limite de l'activité de l'État (art. 5 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), et il doit intervenir de façon à respecter les droits fondamentaux (art. 35 al. 1 et 2 Cst. ; ACST/12/2015 du 15 juin 2015 consid. 7a).

L'aide financière apportée par la FAE aux petites et moyennes entreprises selon les modalités définies par la LAE constitue une forme de subventionnement.

c. L'État de Genève a délégué la tâche étatique de subventionnement à la FAE, par une loi, ce qui satisfait aux exigences de forme (ATF 137 II 409 consid. 6.3 ; 135 II 38 consid. 4.4 ; Bernhard EHRENZELLER/Benjamin SCHINDLER/ Rainer J. SCHWEIZER/Klaus A. VALLENDER [éd.], Die Schweizerische Bundesverfassung, St. Galler Kommentar, 3ème éd., 2014, n. 32 ss ad art. 178 Cst.).

d. Les rapports entre le délégataire et les tiers sont régis par le droit public lorsqu'il y a délégation de pouvoirs de puissance publique, notamment lorsque le délégataire a reçu compétence de prendre des décisions unilatérales ou est chargé de redistribuer des subventions en application directe de normes étatiques (Pierre MOOR, Droit administratif, vol. III, 1992, n. 3.1.3.3 p. 112).

La délégation de tâches étatiques à des tiers, même à des personnes privées, ne saurait aboutir à un non-respect des droits fondamentaux et des garanties procédurales qui seraient applicables à défaut de délégation (ACST/12/2015 précité consid. 8b).

e. Une garantie générale de l'accès au juge a été introduite en Suisse le 12 mars 2000 dans le cadre de la réforme de la justice fédérale, par l'adoption de l'art. 29a Cst., en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (RO 2006 1059), ayant la teneur suivante : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire. La Confédération et les cantons peuvent, par la loi, exclure l'accès au juge dans des cas exceptionnels ».

L'art. 29a Cst. a entraîné une généralisation du contrôle judiciaire, même au-delà du champ d'application et de la portée des art. 6 § 1 et 13 CEDH et 2 § 3 let. a Pacte II, si bien que la question du droit d'accès à un tribunal peut être examinée au seul regard de cet art. 29a Cst. La Cst.-GE n'offre pas non plus une garantie plus étendue que celle qui se déduit de l'art. 29a Cst.

Ainsi que le précise la 2ème phrase de cette disposition, des exceptions peuvent être prévues par des lois à la garantie de l'accès au juge instituée par cette norme constitutionnelle, ce qui - a indiqué le Tribunal fédéral dans un arrêt 9C_116/2008 du 20 octobre 2008 (ATF 134 V 443), rendu après l'entrée en vigueur de l'art. 29a Cst. - exclut la reconnaissance d'un droit général et absolu à la protection juridictionnelle. Les cas exceptionnels visés par l'art. 29a phr. 2 Cst. concernent les décisions difficilement « justiciables », par exemple des actes gouvernementaux qui soulèvent essentiellement des questions politiques, lesquelles ne se prêtent pas au contrôle du juge (ATF 134 V 443 consid. 3.1 ; Message du Conseil fédéral précité, FF 1997 I 1 ss, p. 531), ainsi que des actes qui, en raison des principes de la séparation des pouvoirs ou de la démocratie, se prêtent mal à un contrôle juridictionnel comme les actes d'un parlement soumis à un référendum (Jean-François AUBERT/Pascal MAHON, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, 2003, n. 6 ad art. 29a Cst.).

L'accès au juge découlant de l'art. 29a Cst. ne doit être exclu que de manière exceptionnelle (ATF 136 I 42 consid. 1.5.3 ; François BELLANGER/ Thierry TANQUEREL [éd.], Les nouveaux recours fédéraux en droit public, 2006, p. 108). Il en découle que l'art. 86 al. 3 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), selon lequel les cantons peuvent instituer une autorité autre qu'un tribunal pour les décisions revêtant un caractère politique prépondérant, trouve seulement application si l'aspect politique prévaut sans discussion (ATF 134 V 443 consid. 3.1 ; ATF 136 I 42, c. 1.5 ; ATF 141 I 172, c. 4.4.1 ; Bernhard EHRENZELLER/Benjamin SCHINDLER/Rainer J. SCHWEIZER/Klaus A. VALLENDER [éd.], op. cit., n. 19 et 20 ad art. 29a Cst. ; Karl SPÜHLER/Heinz AEMISEGGER/Annette DOLGE/Dominik VOCK, Bundesgerichtsgesetz, Praxiskommentar, 2013, n. 37 ad art. 86 LTF ; Urs PORTMANN [éd.], La nouvelle loi sur le Tribunal fédéral, 2007, p. 155 ss ;
Jean-François AUBERT/Pascal MAHON, op. cit., n. 6 ad art. 29a Cst.). La vérification par le juge ne doit pas apparaître admissible (Marcel Alexander NIGGLI/Peter UEBERSAX/Hans WIPRÄCHTIGER [éd.], Bundesgerichtsgesetz, 2ème éd., 2011, n. 19 ad art. 86 LTF). Le fait que la décision émane d'une autorité politique est un indice de son caractère politique, mais n'est pas toujours déterminant. À titre d'exemples de décisions à caractère politique prépondérant, les plans directeurs cantonaux et la grâce sont régulièrement mentionnés (Marcel Alexander NIGGLI/Peter UEBERSAX/Hans WIPRÄCHTIGER [éd.], op. cit., n. 22 ad art. 86 LTF).

L'allocation de subventions étatiques n'entre ainsi pas dans les exceptions admissibles aux garanties procédurales visées par l'art. 29a Cst. (ACST/12/2015 précité consid. 7c).

En l'espèce, les prestations réglées par la LAE correspondent à des subventions étatiques. L'art. 13 al. 1 LAE, en ce qu'il exclut tout recours, est donc contraire à l'art. 29a Cst., de sorte qu'il ne pourra en être fait application.

Le recours d'A______ est ainsi recevable à la forme.

5) Le pouvoir d'examen de la chambre administrative est limité à la violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1
let. a LPA). Sauf exception prévue par la loi, la chambre de céans ne peut pas revoir l'opportunité de la décision litigieuse (art. 61 al. 2 LPA).

Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites de son pouvoir d'appréciation, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et qui sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi ou le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 et les références citées ; ATA/1685/2019 du 19 novembre 2019 consid. 8c).

En l'espèce, l'art. 2 al. 2 LAE dispose que la loi ne confère pas de droit à l'obtention d'une aide financière.

6) La recourante se plaint de ce que sa requête n'aurait pas été instruite correctement.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend le droit d'obtenir une décision motivée. L'autorité n'est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives. Il suffit, de ce point de vue, que les parties puissent se rendre compte de la portée de la décision prise à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (ATF 129 I 232 consid. 3.2 ; 126 I 97 consid. 2). Savoir si la motivation présentée est convaincante est une question distincte de celle du droit à une décision motivée. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée (arrêt du Tribunal fédéral 4A.25/2007 du 25 mai 2007 consid. 3 ; ATA/1235/2018 du 20 novembre 2018 consid. 6a).

b. Il est vrai que la FAE a statué par deux décisions successives sur les deux demandes formées par A______, la première de cautionnement, la seconde de prêt, à la suite d'un oubli.

Cela étant, la motivation des refus, telle qu'elle ressort des deux décisions successives lues conjointement, bien que succincte, est suffisamment dense et compréhensible, et invoque l'incertitude quant à la viabilité de l'entreprise, en l'absence de recettes.

c. La recourante suspecte encore que la FAE n'aurait pas tenu compte de toutes les pièces remises.

Le constat opéré par la FAE ne peut en l'occurrence se fonder que sur la documentation remise par la recourante, ce que la FAE indique d'ailleurs dans sa réponse. Certes, la FAE mentionne dans son courriel du 21 avril 2020 qu'une approche basée sur un business plan « pourrait être envisagée », mais pour ajouter aussitôt que les documents remis n'ont pas permis de déterminer avec suffisamment de certitude la capacité de l'entreprise à rembourser un emprunt.

Cela ne signifie pas, comme le fait valoir la recourante, que la FAE n'aurait pas du tout tenu compte du business plan remis, mais plutôt que celui-ci ne permettait pas d'établir la solvabilité de la recourante. C'est ce qui se comprend des ch. 24 (« De plus, le Business plan ni aucun élément remis n'a pu être apporté en appui de la demande pour démontrer de manière tangible que la société serait en mesure dans un avenir proche d'encaisser des revenus suffisants ») et 30 (« En effet le business plan doit démontrer de manière tangible que les hypothèses faites sont à même de se vérifier. Or, il a été estimé que ce n'était pas le cas [...] ») de la réponse de la FAE.

En faveur de cette compréhension, il peut encore être observé que ni le scénario « optimiste » (vingt-trois élèves) ni le scénario « modeste » (seize élèves) envisagés par le business plan ne sont corroborés par le tableau de prévisions de recettes (onze élèves), et que le total des recettes anticipées pour 2020
(CHF 101'573.-) ne paraît pas apte à couvrir les charges salariales déjà réduites (CHF 34'800.-) et de loyer ([CHF 6'485.41 + CHF 400.-] x 12 = CHF 82'768.92).

Le grief sera écarté.

7) La recourante se plaint que sa demande n'aurait pas été examinée par cinq membres du conseil de fondation.

a. L'art. 19 LFAE assigne au conseil de fondation la tâche d'examiner les dossiers complets de demandes d'aide financière, d'apprécier la probabilité de réussite du projet et de décider du principe, de la forme et du montant de l'aide.

b. En l'espèce, la décision attaquée indiquait expressément que le conseil de fondation avait examiné attentivement la demande. La recourante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la composition régulière du conseil de fondation.

Le grief sera écarté.

8) La recourante se plaint enfin que la FAE aurait retenu à tort, à l'appui du refus, qu'il n'était pas établi qu'elle serait en mesure de rembourser un prêt.

a. L'art. 10 al. 2 LAE dispose que la FAE apprécie la qualité du projet et la viabilité de l'entreprise en fonction de critères stricts, notamment en déterminant sa solvabilité et sa capacité à faire face à ses engagements.

b. En l'espèce, il n'apparait pas que la FAE ait excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation en retenant, sur la base de la documentation remise, qu'il ne pouvait être établi que la recourante pourrait rembourser la dette (de CHF 100'000.-) qu'elle prévoyait de contracter. En effet, la recourante n'a pas eu de recettes mais des pertes de 2016 jusqu'à 2019, pour 2020 ni le scénario « optimiste » (vingt-trois élèves) ni le scénario « modeste » (seize élèves) envisagés par le business plan ne sont corroborés par le tableau de prévisions de recettes (onze élèves). Le total des recettes anticipées (CHF 101'573.-) ne paraît pas apte à couvrir les charges salariales déjà réduites (CHF 34'800.-) et de loyer ([CHF 6'485.41 + CHF 400.-] x 12 = CHF 82'768.92). Il ne paraît à tout le moins pas arbitraire dans ces circonstances de considérer qu'un emprunt de CHF 100'000.- ne pourrait être remboursé.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

9) Vu l'issue du litige un émolument réduit de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 mai 2020 par A______ SA contre la décision de la FAE - Fondation d'Aide aux Entreprises du 20 avril 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge d'A______ SA ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ SA, ainsi qu'à la FAE - Fondation d'Aide aux Entreprises.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory,
Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :