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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3459/2007

ATA/689/2011 du 08.11.2011 sur JTAPI/267/2011 ( ICC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3459/2007-ICC ATA/689/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 novembre 2011

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur S______
et
Madame F______

contre

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 

et

 

 

 

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS


_______


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 mars 2011 (JTAPI/267/2011)


EN FAIT

1. Monsieur S______ et son épouse, Madame F______ (ci-après : les époux) sont contribuables à Genève.

2. Le 2 mai 2007, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC-GE) leur a notifié deux bordereaux de taxation, l’un portant sur l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2006, le second sur l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) 2006.

3. Invoquant des déductions fiscales, dont l'AFC n'avait pas tenu compte, les époux ont élevé réclamation le 31 mai 2007 contre ces bordereaux.

Les déductions sollicitées concernaient les frais médicaux de chacun des contribuables, les frais de repas de M. S______ ainsi que les frais de déplacement de son épouse.

4. Par deux décisions du 6 août 2007, l’AFC-GE a admis partiellement les deux réclamations et émis deux bordereaux rectificatifs ICC et IFD 2006.

5. Le 16 août 2007, M. S______ a écrit à l’AFC-GE. Il maintenait son désaccord concernant les frais de déplacement de son épouse (code 41.61), en concluant à la prise en compte d’une distance quotidienne de 10 km au lieu de 8 km.

6. Par acte déposé le 11 septembre 2007, les contribuables ont recouru auprès de la commission cantonale de recours en matière d’impôts, remplacée par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission) et devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

7. Le 26 mai 2008, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Pour l'ICC et l'IFD 2006, le litige ne portait plus que sur les frais de déplacement de Mme F______ (code 41.70), lesquels avaient été calculés sur la base du logiciel Twixroute qui retenait l’itinéraire le plus court entre le domicile et le lieu de travail (8,3 km).

Elle concluait à la confirmation des bordereaux rectificatifs IFD et ICC 2006 du 6 août 2007.

8. Le 7 octobre 2008, les contribuables ont répliqué en maintenant leurs calculs relatifs aux frais de déplacement de Mme F______.

Le lieu de travail de cette dernière en 2006 se trouvait au 2, chemin du P______ à Chêne-Bourg, mais elle devait faire un circuit supplémentaire pour accéder au Centre de traitement de linge (ci-après : CTL), son lieu de travail à l’intérieur du domaine.

9. Le 10 novembre 2008, l’AFC-GE a renoncé à dupliquer, persistant dans ses conclusions.

10. Par décision du 26 octobre 2009, la commission a rejeté les recours. Les frais de déplacement avaient été calculés conformément à la loi.

Cette décision, reçue le 3 novembre 2009, mentionnait la possibilité de recourir auprès du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative). Les contribuables n’ont pas fait usage de cette voie de droit.

11. Le 7 septembre 2010, ils ont écrit à la présidente de la commission.

La décision du 26 octobre 2009 était tout à fait injuste. Ils reprenaient leur argumentation et laissaient le soin à la présidente de la commission de se « déterminer sur l’annulation de la décision du 26 octobre 2009 et de leur faire parvenir une nouvelle décision conforme à la réalité des faits ». Ils avaient adressé à l’AFC-GE, le 6 septembre 2010, une demande de révision de leurs taxations 2006, dont ils transmettaient une copie.

12. Le 14 septembre 2010, la commission a considéré la lettre précitée comme un recours et l'a transmise au Tribunal administratif pour raison de compétence.

13. Par arrêt du 23 novembre 2010 (ATA/825/2010), le Tribunal administratif a déclaré le recours irrecevable. Il a transmis la cause à la commission, afin qu’elle la traite comme une demande de révision.

14. Le 28 mars 2011, le TAPI a déclaré irrecevable la demande des contribuables en tant que telle.

La révision étant une voie de droit extraordinaire, elle était exclue lorsque le requérant invoquait des motifs qu’il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s’il avait fait preuve de toute la diligence requise conformément aux art. 147 al. 2 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct (LIFD - RS 642.11) et 55 al. 2 de la loi de procédure fiscale (LPFisc - D 3 17).

Il n’était pas nécessaire d’examiner si la demande de révision avait été déposée dans le délai légal de nonante jours suivant la découverte du motif de révision, ce motif n’étant de toute évidence pas établi. Les contribuables n’établissaient aucun fait nouveau susceptible d’être pris en considération comme motif de révision des taxations ICC et IFD 2006.

Ainsi, les arguments développés par les recourants auraient déjà pu être invoqués par la voie de droit ordinaire.

15. Par acte déposé le 31 mai 2011, les époux ont recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, reçu le 19 avril 2011. Ils ont conclu, sur le fond, à l’annulation de celui-ci et à celle de la décision de la commission du 26 octobre 2009, à la restitution de l’émolument de CHF 400.- versé à la commission ainsi qu’à l'octroi d’une indemnité de procédure.

La fiabilité du logiciel Twixroute était douteuse. Celui-ci avait, dans un premier temps, calculé une distance de 8 km entre leur domicile et le lieu de travail de la contribuable, puis, dans un deuxième temps, de 8,3 km pour le même parcours.

Il fallait, par conséquent, considérer le « voyage réel » parcouru par le véhicule en tenant compte de plusieurs détails, notamment le déplacement à l’intérieur du parking, le parcours à l’intérieur du domaine de Belle-Idée et le fait que la configuration de l’itinéraire aller-retour n’était pas identique. Pour plus de précision, il fallait vérifier la longueur du trajet sur le compteur du véhicule.

Mme F______ avait reçu de son employeur un courrier daté du 2 novembre 2009. Au vu de l’inscription figurant en pied de page, l’adresse de son lieu de travail n’était pas celle qu’elle avait indiquée sur sa déclaration fiscale 2006, à savoir chemin du P______ 1225 Chêne-Bourg, mais chemin de la M______ 1226 Thônex.

Les recourants avaient mentionné cette nouvelle adresse sur leur déclaration fiscale 2009. Celle-là avait été prise en compte par l’AFC-GE et avait donné lieu à une déduction de 8,6 km au titre des déplacements nécessaires entre le domicile et le lieu de travail pour l’année 2009.

16. Le 5 juillet 2011, le TAPI a persisté dans son jugement du 28 mars 2011 et a transmis son dossier.

17. Le 20 juillet 2011, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Les recourants n’avaient pas exposé de façon convaincante la raison pour laquelle la décision du 26 octobre 2009 n’avait pas été contestée en temps utile par la voie du recours ordinaire. La détermination de la distance du domicile au lieu de travail de la contribuable constituait manifestement un élément qu'ils auraient pu faire valoir dans le cadre d’un recours dans les trente jours suivant la notification de la décision du 26 octobre 2009, ceci d’autant plus qu’ils avaient découvert dans le courant du mois de novembre 2009 un document susceptible de remettre en question ladite décision. Rien ne justifiait qu’ils aient attendu jusqu’au 7 septembre 2010 pour déposer une demande de révision de cette décision.

Le fait que la taxation d’une période fiscale ultérieure ait été effectuée sur une autre base de calcul que celle retenue par la commission pour l’année 2006 ne pouvait en tout état avoir d’influence sur l’issue du recours. En vertu des principes de périodicité et d’étanchéité des exercices fiscaux, chacun d'eux devait être considéré comme un tout autonome sans que le résultat d’un exercice puisse avoir une influence sur les suivants.

18. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, l’art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) institue une suspension des délais en jours ou en mois du septième jour avant Pâques au septième jour après Pâques inclusivement. Les délais de recours étaient ainsi suspendus du 17 avril au 1er mai 2011.

En l’espèce, il est établi que le jugement du TAPI du 28 mars 2011 a été reçu par les recourants le 19 avril 2011, à savoir pendant la période de suspension des délais. Le délai de recours de trente jours a donc commencé à courir dès le 2 mai 2011, de sorte qu’il courait jusqu’au 31 mai 2011, date de dépôt du recours au greffe de la chambre administrative.

Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a LPA).

2. La teneur des art. 147 al. 1 et 2 LIFD et 55 al. 1 et 2 LPFisc est strictement identique, comme le sont les art. 148 LIFD et 56 LPFisc s’agissant du délai dans lequel la demande en révision doit être déposée.

Aux termes de l’art. 55 al. 1 LPFisc, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d’office ;

a. lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts ;

b. lorsque l’autorité qui a statué n’a pas tenu compte des faits importants ou des preuves concluantes qu’elle connaissait ou devait connaître ou qu’elle a violé de quelque autre manière l’une des règles essentielles de procédure ;

c. lorsqu’un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé.

La révision est exclue lorsque le requérant a invoqué des motifs qu’il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s’il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui (art. 55 al. 2 LPFisc).

3. Constituent des faits nouveaux des faits qui se sont produits antérieurement à la procédure précédente, mais dont l’auteur de la demande a été empêché, sans sa faute, de faire état dans la procédure précédente. Quant aux preuves nouvelles, celles-ci doivent, pour justifier une reconsidération, se rapporter à des faits antérieurs à la décision attaquée. Encore faut-il qu’elles n’aient pas pu être administrées lors du premier procès ou que les faits à prouver soient nouveaux, au sens où ils ont été définis (ATA/12/2011 du 11 janvier 2011).

4. La demande de révision doit être déposée dans les nonante jours qui suivent la découverte du motif de révision, mais au plus tard dans les dix ans qui suivent la notification de la décision ou du prononcé (art. 56 LPFisc).

5. En l’espèce, les recourants, se fondant sur le courrier datant du 2 novembre 2009 que l’employeur de la contribuable a adressé à celle-ci, considèrent que ces éléments sont nouveaux et de nature à permettre une révision de la manière dont l’AFC a calculé la distance séparant le domicile de la recourante de son lieu de travail et donc le montant des frais de déplacement déductibles fiscalement.

Dans la mesure où les recourants ont reçu le 3 novembre 2009 la décision de la commission du 26 octobre 2009, ils ont eu connaissance des éléments précités pendant que courait le délai de recours ordinaire contre cette décision. De ce fait, s'ils avaient fait preuve de toute la diligence requise, ils auraient pu interjeter recours auprès de la juridiction compétente. La voie extraordinaire de la révision est dès lors clairement exclue au sens de l’art. 55 al. 2 LPFisc.

En déposant leur demande de révision le 7 septembre 2010, les contribuables n’ont pas respecté le délai de nonante jours de l’art. 56 LPFisc, qui courait dès la connaissance du motif de révision. La demande de révision est donc tardive, et partant irrecevable. Pour ces deux motifs, c’est à juste titre que le TAPI a refusé d’entrer en matière sur la demande de révision qui lui était présentée.

6. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 500.- sera mis, conjointement et solidairement, à la charge des recourants, qui succombent. Aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 mai 2011 par Madame F______ et Monsieur S______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 mars 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame F______ et Monsieur S______ a, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il ne leur est pas alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur S______ et Madame F______, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Vuataz Staquet

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :