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Décisions | Assistance juridique

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AC/3247/2023

DAAJ/39/2024 du 22.04.2024 sur AJC/6197/2023 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3247/2023 DAAJ/39/2024

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 22 AVRIL 2024

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______ [GE],

 

contre la décision du 11 décembre 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : la recourante) et B______ sont les parents divorcés de C______, née le ______ 2009.

b. Par jugement de divorce du 31 janvier 2019, le Tribunal de première instance a notamment maintenu l'autorité parentale conjointe, attribué au père la garde de l'enfant, réservé à la recourante un droit de visite devant s'exercer le mercredi de 11h30 au soir, tous les week-ends, du vendredi soir au dimanche soir, ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires, en présence des grands-parents exception faite des samedis entre 14h et 18h, instauré une curatelle d'assistance éducative et maintenu la curatelle de surveillance et d'organisation du droit de visite.

Le père avait montré les capacités pour s'occuper seul de l'enfant alors que la mère était suivie pour une dépendance à l'alcool et à la cocaïne et s'occupait peu de sa fille, ses parents la suppléant dans son rôle.

c. Dans un rapport du 9 janvier 2023, les curateurs de la mineure ont rapporté au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) que la mineure et son père avaient eu une altercation le 4 décembre 2022, au sujet de son téléphone récemment offert par les grands-parents, à la suite de laquelle le père s'en serait pris physiquement à la mineure, sans que ces allégations aient pour l'heure été vérifiées. La mineure avait été placée temporairement en foyer avant le retour à domicile prévu chez le père. Ce dernier avait accepté une AEMO (action éducative en milieu ouvert) de crise qui allait se poursuivre à plus long terme. La mère, quant à elle, avait porté plainte contre le père et disait vouloir récupérer la garde de sa fille, tout en acceptant de collaborer avec l'AEMO.

Le cadre familial restait très conflictuel. Le père sollicitait l'aide de la grand-mère maternelle et son mari tout en critiquant leur éducation et ces derniers peinaient à prendre la mesure des troubles de la mère, de sorte qu'ils n'en protégeaient pas suffisamment la mineure.

Les curateurs ont sollicité du Tribunal de protection la convocation d'une audience et ont préavisé d'ordonner un suivi thérapeutique pour la mineure, de confirmer la garde au père et de maintenir les curatelles existantes, de réserver à la mère un droit de visite s'exerçant un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires en présence de la grand-mère maternelle et son mari, à l'exception du samedi après-midi entre 14h et 18h, de prendre acte de la mise en place d'une AEMO et d'exhorter la famille à collaborer avec les professionnels.

d. Par décision sur mesures superprovisionnelles du 3 mars 2023 (DTAE/1678/2023), le Tribunal de protection a fait droit aux propositions des curateurs.

e. Par courrier du 4 avril 2023 au Tribunal de protection, la recourante a conclu à la relève des curateurs de sa fille et à la désignation de sa propre mère et de son beau-père en qualité de curateurs, à la suppression de la garde au père et à ce que l'enfant soit confiée à sa grand-mère et son mari, à ce qu'un droit de visite soit réservé au père ainsi qu'à elle-même et à ce qu'il soit pris acte de l'AEMO.

f. Lors de l'audience du 8 juin 2023 du Tribunal de protection, la recourante a confirmé ses conclusions. Elle a allégué ne pouvoir voir sa fille que lorsque le père la laissait et seulement par visioconférence. Elle-même bénéficiait d'un suivi psychiatrique et n'avait actuellement pas de problème avec des consommations de toxiques. Elle souhaitait amener sa fille en Tunisie pour les vacances, en même temps qu'elle allait effectuer une opération de chirurgie esthétique, de sorte qu'elle ne pouvait pas en modifier les dates.

Le père a expliqué être inquiet des possibilités de sorties laissées à sa fille lorsqu'elle était chez ses grands-parents à D______ [GE]. Il n'avait lui-même pas de problèmes à gérer les sorties de C______ lorsqu'elle était chez lui : il avait travaillé cela avec l'AEMO. C______ allait parfois le mercredi à D______ après l'école avec son accord et rentrait entre 16h et 19h.

E______, curatrice de la mineure, représentant le SPMi, a indiqué que l'AEMO intervenait dans le but d'apaiser les tensions et d'organiser le droit de visite, ainsi que pour assurer une cohérence dans la prise en charge de la mineure, si bien que les éducateurs intervenaient chez les parents et les grands-parents maternels. Il existait un problème pour l'organisation des prochaines vacances d'été, prévues à moitié chez le père et à moitié chez les grands-parents, parce que ces derniers n'avaient pas tout de suite répondu au père de sorte qu'il avait posé la période que la mère prisait également. La mineure avait commencé un suivi thérapeutique auprès de l'Office médico-pédagogique (OMP), auquel elle adhérait. Les grands-parents maternels intervenaient beaucoup pour leur petite-fille sans en aviser le père, notamment en prenant des rendez-vous médicaux ou en lui achetant un téléphone portable et le critiquaient régulièrement. Les contacts entre la mineure et sa mère n'étaient pas clairs, en particulier les périodes où elles pouvaient normalement se voir seules le samedi après-midi.

La curatrice de représentation a conclu au maintien d'un droit de visite en faveur de la mère un week-end sur deux du samedi matin au dimanche soir chez les grands-parents, avec quatre heures à disposition de la mère le samedi après-midi. Ces modalités de visite avaient pour but de conduire le père à assumer davantage de son temps de garde avec la mineure, sans recourir à l'aide des grands-parents et à ce qu'il prenne lui-même en charge les rendez-vous de la mineure. Il était en effet arrivé jusqu'au mois de décembre 2022 que la mineure passe plus de temps chez ses grands-parents que chez son père. Elle a indiqué que la mineure exprimerait elle-même ses souhaits quant aux vacances. Elle pensait qu'il fallait que la mineure puisse voir sa mère le mercredi après-midi.

Entendue par le Tribunal de protection, la mineure a indiqué qu'elle acceptait de poursuivre son suivi thérapeutique. Les relations avec sa mère se passaient bien et elle souhaitait la voir plus souvent. Elle s'entendait bien avec la compagne de son père, sa fille, et était très attachée à son demi-frère. Elle se querellait actuellement beaucoup avec son père, sur l'école et sur le fait qu'elle avait toujours envie de sortir à D______. Sa psychologue pourrait parler de la situation à son père.

g. Par décision du 8 juin 2023, le Tribunal de protection a notamment réservé à la recourante un droit de visite devant s'exercer à raison de la moitié des vacances scolaires et d'un week-end sur deux, du samedi 9h au dimanche 18h, en présence des grands-parents maternels, à l'exception du samedi entre 14h et 18h et maintenu les curatelles existantes, considérant que la mère se montrait irrégulière et ambivalente quant au droit de visite qui lui était accordé, ne voyant sa fille que le samedi au lieu du week-end complet; qu'il semblait en outre qu'elle n'envisageait les vacances que selon ses propres besoins, sans concertation préalable avec quiconque; qu'il importait dès lors de maintenir un lien régulier entre mère et fille et que leurs relations gagnent en régularité pour la durée complète prévue.

h. Par acte déposé le 10 novembre 2023 auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice, la recourante a formé recours contre cette décision, alléguant en substance que le père de sa fille logeait chez lui clandestinement sa compagne ainsi que la fille de cette dernière, toutes deux ressortissantes brésiliennes dépourvues de titre de séjour, que le couple avait récemment eu un enfant et que le logement de quatre pièces dans lequel vivait sa fille était dès lors devenu beaucoup trop exigu pour accueillir six personnes. Par ailleurs, le père de l'enfant était alcoolique, ce que cachait le Service de protection des mineurs. Elle a ainsi conclu au relief des curateurs nommés ainsi que la curatrice d'office de la mineure, à la nomination de nouveaux curateurs, à l'attribution de la garde de C______ à ses grands-parents maternels, à ce qu'un droit de visite soit réservé au père et à ce qu'un droit de visite lui soit réservé à raison d'un week-end sur deux ainsi que de la moitié des vacances scolaires.

B.            Le 20 novembre 2023, la recourante a sollicité que le bénéfice de l'assistance juridique lui soit accordé en vue de couvrir les frais du recours susmentionné.

C.           Par décision du 11 décembre 2023, reçue le 15 du même mois par la recourante, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause de la recourante était dénuée de chances de succès.

Elle a considéré que la recourante n'avait pas rendu ses allégations vraisemblables s'agissant du fait que le père ne disposerait pas d'un logement adéquat pour sa fille, qu'il serait alcoolique et qu'il aurait agressé brutalement l'enfant. Il apparaissait que l'altercation qui avait eu lieu entre C______ et son père était intervenue qu'une seule fois de sorte que cet évènement isolé ne semblait pas justifier une modification de la garde de la mineure à ce stade, ce d'autant plus qu'il ne semblait pas que les grands-parents maternels eux-mêmes aient conclu à une telle mesure. Par ailleurs, elle n'apportait aucune preuve du fait que les curateurs n'aient pas agi dans l'intérêt de l'enfant.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 27 décembre 2023 à la Présidence de la Cour de justice. La recourante conclut à ce que la décision querellée soit annulée et à ce que le bénéfice de l'assistance juridique lui soit accordé s'agissant des frais en lien avec la procédure devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile, les 25 et 26 décembre étant des jours fériés fédéraux (art. 142 al. 3 CPC), et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2. 2.1. Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter ; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1 ; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).

Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1). L'autorité chargée de statuer sur l'assistance ne doit pas se substituer au juge du fond; tout au plus doit-elle examiner s'il y a des chances que le juge adopte la position soutenue par le requérant, chances qui doivent être plus ou moins équivalentes aux risques qu'il parvienne à la conclusion contraire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

2.2. En l'espèce, la recourante reproche à la vice-présidence du Tribunal civil d'avoir effectué une lecture biaisée et arbitraire de la procédure, faisant valoir que le succès de son recours devant la Chambre surveillance de la Cour de justice ne saurait se résumer à un survol négligeant d'un dossier épineux ou aucune audition de témoin n'avait eu lieu.

Or, c'est à bon droit que la vice-présidence du Tribunal civil a examiné sommairement, conformément aux principes applicables en la matière, les chances de succès du recours interjeté par la recourante contre le jugement du Tribunal de protection, en comparant celui-ci avec les griefs invoqués. Elle n'avait pas à se substituer au juge du fond en procédant à l'examen approfondi de la cause.

Pour le surplus, la recourante n'indique pas précisément en quoi la vice-présidence du Tribunal civil aurait établi les faits de manière arbitraire et quelle violation de la loi lui est reprochée. En particulier, la recourante ne critique pas la décision en tant qu'elle retient qu'elle a échoué à rendre vraisemblable que le père ne disposerait pas d'un logement adéquat pour sa fille, qu'il serait alcoolique, que les grands-parents n'avaient pas émis le souhait d'obtenir la garde de l'enfant et que les curateurs avaient agi dans l'intérêt de l'enfant. Elle ne critique pas d'avantage la décision en tant qu'elle retient qu'une seule altercation entre le père en l'enfant, même grave, ne justifierait a priori pas le retrait de la garde de l'enfant.

Par conséquent, le recours sera rejeté.

 

3. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 27 décembre 2023 par A______ contre la décision rendue le 11 décembre 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/3247/2023.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.