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Décisions | Assistance juridique

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AC/1866/2023

DAAJ/130/2023 du 22.11.2023 sur AJC/4078/2023 ( AJC ) , REJETE

Normes : CPC.119.al2
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/1866/2023 DAAJ/130/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DECISION DU MERCREDI 22 NOVEMBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______ [GE],

représentée par Me Pierre SIEGRIST, avocat, Grand-Rue 17, 1204 Genève,

 

contre la décision du 10 août 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : la recourante) a été engagée le 15 septembre 2021 par B______ SA en qualité d'employée polyvalente exploitante.

b. Par courrier du 31 mars 2023, B______ SA l'a licenciée pour le 30 avril 2023.

c. Elle s'est inscrite au chômage le 6 avril 2023.

d. Le 24 avril 2023, B______ SA s'est rétractée et a annulé le congé.

e. Par courrier du 7 juin 2023, la recourante a refusé l'annulation de son congé en raison d'une rupture du lien de confiance.

f. Par décision du 7 juin 2023, C______ Caisse de chômage (ci-après : la C______) a sollicité de la recourante la restitution de la somme de 1'925 fr. 80 correspondant au trop-perçu versé pour la période de mai 2023, soit les indemnités journalières déduction faite du gain intermédiaire perçu de B______ SA en 2'166 fr. 70.

g. Par courrier du 14 juin 2023, A______ a formé opposition à l'encontre de cette décision.

h. Par courrier du 16 juin 2023, C______ a maintenu sa décision de restitution et a informé la recourante qu'à défaut de réponse d'ici au 3 juillet 2023, elle considérerait qu'elle était toujours employée auprès de B______ SA, que cet emploi était convenable au sens de la loi et qu'elle percevait de ce fait le salaire correspondant.

B.            a. La recourante a, le 26 juin 2023, requis le bénéfice de l'assistance juridique pour une "procédure civile contre B______ SA" et pour une "procédure administrative contre C______".

b. Invitée, par courrier du greffe de l'Assistance juridique du 27 juin 2023, à indiquer notamment le montant qu'elle souhaitait réclamer à son précédent employeur en détaillant, cas échéant, les différents postes, la recourante n'a pas répondu sur ce point, mais a produit plusieurs documents.

Ainsi, il apparaît que la recourante a versé le montant réclamé par C______ à celle-ci, puis s'est déterminée, par courriers des 3 et 6 juillet 2023, indiquant en substance que c'était à tort qu'elle avait reversé à C______ le montant que celle-ci lui avait réclamé en restitution, dans la mesure où elle devait le reverser à son ancien employeur, les rapports de travail ayant valablement pris fin au 30 avril 2023. Par ailleurs, son choix de refuser l'annulation de son congé ne devait pas entraîner des sanctions sur son droit au chômage, vu le comportement de B______ SA, laquelle modifiait régulièrement son taux d'activité et ne l'employait qu'en raison du fait qu'elle détenait une patente.

C.           Par décision du 10 août 2023, notifiée le 18 août suivant, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que l'assistance d'un avocat n'était pas nécessaire pour se déterminer sur les courriers de la caisse de chômage et que le litige prud'homal, soit les prétentions que la recourante entendait formuler, n'avait été suffisamment explicité.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 24 août 2023 à la Présidence de la Cour de justice. La recourante conclut à l'annulation de la décision entreprise.

Elle expose, soit pour elle son conseil, avoir suffisamment renseigné le greffe de l'Assistance juridique, contrairement à ce qui était retenu dans la décision entreprise. Elle se réfère à des faits nouveaux, soit notamment une seconde décision de C______ du 18 juillet 2023 et des échanges avec son ancien employeur, dont il ressort notamment que la caisse-chômage avait finalement reversé le montant trop-perçu directement à l'employeur. Selon elle, la situation était complexe et nécessitait l'intervention d'un avocat : c'était à la suite d'une recommandation de son assistant social de l'Hospice général que la recourante en avait consulté un. Elle entendait désormais s'opposer à la décision de suspendre son droit aux indemnités chômage et s'opposer à "toute réclamation émanant, cas échéant, de son ex-employeur".

La recourante produit des pièces nouvelles.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont la recourante n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles ne seront pas pris en considération.

3.             3.1. Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Selon la jurisprudence, une cause est vouée à l'échec, respectivement dépourvue de toute chance de succès, lorsque la perspective d'obtenir gain de cause est notablement plus faible que le risque de succomber et qu'elle ne peut donc être considérée comme sérieuse, de sorte qu'une personne raisonnable disposant des ressources financières nécessaires renoncerait à engager la procédure en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter. En revanche, l'assistance judiciaire doit être accordée lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près, ou que les premières n'apparaissent que légèrement inférieures aux seconds. La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête d'assistance judiciaire, sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 139 III 396 consid. 1.2, 475 consid. 2.2; 138 III 217 consid. 2.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_161/2023 du 7 juillet 2023 consid. 4.1).

3.2. Applicable à la procédure portant sur l'octroi ou le refus de l'assistance judiciaire, la maxime inquisitoire est limitée par le devoir de collaborer des parties. Ce devoir de collaborer ressort en particulier de l'art. 119 al. 2 CPC qui prévoit que le requérant doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l'affaire et les moyens de preuve qu'il entend invoquer. Il doit ressortir clairement des écritures de la partie requérante qu'elle entend solliciter le bénéfice de l'assistance judiciaire et il lui appartient de motiver sa requête s'agissant des conditions d'octroi de l'art. 117 CPC et d'apporter, à cet effet, tous les moyens de preuve nécessaires et utiles (arrêts du Tribunal fédéral 4A_480/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.2 et 5A_287/2023 du 5 juillet 2023 consid. 3.2). L'autorité saisie de la requête d'assistance judiciaire n'a pas à faire de recherches approfondies pour établir les faits ni à instruire d'office tous les moyens de preuve produits. Elle ne doit instruire la cause de manière approfondie que sur les points où des incertitudes et des imprécisions demeurent, peu importe à cet égard que celles-ci aient été mises en évidence par les parties ou qu'elle les ait elle-même constatées (Ibid.).

Le juge doit inviter la partie non assistée d'un mandataire professionnel dont la requête d'assistance judiciaire est lacunaire à compléter les informations fournies et les pièces produites afin de pouvoir vérifier si les conditions de l'art. 117 CPC sont valablement remplies. Ce devoir d'interpellation du tribunal, déduit de l'art. 56 CPC, vaut avant tout pour les personnes non assistées et juridiquement inexpérimentées. Il est en effet admis que le juge n'a pas, de par son devoir d'interpellation, à compenser le manque de collaboration qu'on peut raisonnablement attendre des parties pour l'établissement des faits, ni à pallier les erreurs procédurales commises par ces dernières. Or, le plaideur assisté d'un avocat ou lui-même expérimenté voit son obligation de collaborer accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire et des obligations de motivation qui lui incombent pour démontrer que celles-ci sont remplies. Le juge n'a de ce fait pas l'obligation de lui octroyer un délai supplémentaire pour compléter sa requête d'assistance judiciaire lacunaire ou imprécise (arrêts du Tribunal fédéral 4A_480/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.2 et 5A_287/2023 du 5 juillet 2023 consid. 3.2).

3.3. En l'espèce, il apparaît, s'agissant en premier lieu des rapports entre la recourante et sa caisse de chômage, que le litige pour lequel elle avait demandé l'assistance juridique, à savoir la question d'un éventuel remboursement de montants objet de la décision du 7 juin 2023, est clos : la caisse aurait, selon les dires de la recourante, directement versé à l'employeur le montant litigieux. Ainsi, les motifs de la décision entreprise gardent leur actualité : il n'apparaît pas que l'intervention d'un avocat était nécessaire pour solder ce contentieux, d'apparence seulement comptable et qui pouvait se résoudre sans qu'il soit fait usage d'une voie de droit avec l'aide d'un avocat. La recourante invoque encore dans son recours une décision ultérieure du 18 juillet 2023 qui porte sur un autre objet (la suspension de son droit aux indemnités). Ce faisant, elle se base sur des faits nouveaux et irrecevables, qui n'ont pas été soumis à l'autorité précédente. Celle-ci ne pouvait donc statuer sur l'octroi de l'assistance juridique pour une décision dont elle n'avait pas connaissance. Ainsi, devant l'autorité précédente, seule se posait la question de la nécessité de l'assistance d'un avocat pour fournir des explications à la caisse de chômage avant le prononcé de toute décision. Ici encore, la recourante pouvait agir seule pour décrire en quoi il était ou n'était pas convenable pour elle de conserver son emploi précédent. Comme cela ressort de son recours, il s'agissait seulement d'exposer une rupture du lien de confiance, ce que la recourante était en mesure de faire seule. Le recours sera rejeté sur ce point déjà.

Concernant ensuite un prétendu procès prud'homal qu'elle veut intenter, la recourante reste, comme en première instance, dans l'incapacité d'articuler ses prétentions et/ou leur fondement. S'agissant de la valeur litigieuse, elle se contente d'écrire que celle-ci n'était pas "aisément déterminable" jusqu'à une décision de la caisse de chômage, finalement rendue le 20 juillet 2023; pourtant, même dans son recours et alors qu'elle est désormais en possession de cette prétendue décision, elle ne précise pas ses prétentions. Plus loin, elle déclare souhaiter s'opposer à toute éventuelle prétention de son employeur. Il va de soi que l'aide financière de l'Etat ne peut pas être octroyée pour mener des actions hypothétiques et non chiffrées. A ce sujet, comme le montre le recours, interpeller une seconde fois la recourante, assistée d'un avocat, pour qu'elle complète son dossier n'était pas seulement excessif au regard des maximes applicables, mais surtout inutile. L'autorité précédente y a renoncé à bon droit.

La décision est donc fondée et le recours sera rejeté.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 10 août 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/1866/2023.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Etude de Me Pierre SIEGRIST (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La vice-présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.