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Décisions | Assistance juridique

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AC/3532/2021

DAAJ/102/2023 du 26.09.2023 sur AJC/1826/2023 ( AJC ) , RENVOYE

Normes : CPC.117
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3532/2021 DAAJ/102/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 26 SEPTEMBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :


Monsieur A______, domicilié c/o Doctor B______, ______, ESPAGNE,

représenté par Me Elvira GOBET-CORONEL, avocate, rue de Lausanne 91, case postale 267, 1701 Fribourg,

 

contre la décision du 3 avril 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : le recourant) est un bijoutier domicilié en Espagne.

b. C______ est la petite-fille du ______ [titre de noblesse] D______ et de la ______ [titre de noblesse] E______.

c. Il est admis que, par le passé, la couronne de F______ a détenu un bijou, soit une ______ taillée d'une seule pièce dans une émeraude de 45,02 carats de quatre centimètres de long.

B.            a. Par acte du 3 novembre 2021, le recourant a ouvert une action en constatation de droit à l'encontre de C______, afin qu'il soit constaté qu'il est le légitime propriétaire d'un bijou, soit une ______ taillée d'une seule pièce dans une émeraude de 45,02 carats de quatre centimètres de long, avec une monture ornée de ______ diamants, et qu'il soit ordonné à C______ de lui restituer ce bijou.

En substance, le recourant a expliqué avoir acquis l'émeraude de son père, bijoutier de profession tout comme lui, le 10 décembre 1994. Le recourant avait transmis l'émeraude le 27 novembre 2015 à la succursale de G______ SA [ventes aux enchères] à H______, Espagne, dans le but de la vendre aux enchères. Suite aux recherches effectuées, G______ SA avait informé le recourant en 2016 que cette émeraude provenait de la I______ [bijouterie] et qu'elle avait appartenu par le passé à la ______ [titre de noblesse] E______, avant de le transférer à la succursale de G______ SA à Genève pour sa mise aux enchères. Le séquestre de l'émeraude avait été ordonné le 23 février 2017 par le Ministère public en mains de G______ SA à Genève, à la suite d'une plainte pénale déposée le 16 février 2023 par C______. Celle-ci prétendait être la propriétaire légitime de l'émeraude, qu'elle soutenait s'être fait voler en 1989 lors d'un vol Genève-J______ [France], alors que cet objet avait été placé dans sa valise, elle-même transportée dans la soute à bagage de l'avion. Elle avait déposé une plainte pénale auprès des autorités françaises dans ce sens le 24 novembre 1989.

b. Par décision du 28 février 2022, le recourant a été mis en bénéfice de l'assistance juridique pour cette action. Cette octroi a été limité à la première instance et à 12 heures d'activité d'avocate, audiences et forfait courriers/téléphones en sus, en l'état et à l'exclusion du temps de déplacement de son avocate. La vice-présidente du Tribunal de première instance a réservé le réexamen de la situation financière du recourant à l'issue de la procédure.

La procédure tendant à la constatation du droit du recourant a toutefois été suspendue jusqu'à l'issue de la procédure pénale initiée par C______ contre le recourant, alors toujours pendante.

c. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure pénale concernée :

ca. Par ordonnance du 28 septembre 2021, le Tribunal pénal a notamment classé la procédure pénale P/1______/2017 dirigée contre le recourant pour défaut de compétence des autorités pénales suisses et pour cause de prescription, ordonné la levée du séquestre portant sur l'émeraude et ordonné sa restitution à C______.

En substance, le Tribunal pénal a retenu que C______ était la propriétaire légitime de l'émeraude au moment de son vol en novembre 1989 et que le recourant avait acquis l'émeraude de mauvaise foi. En cachant l'objet pendant plusieurs années et en se comportant ensuite comme son légitime propriétaire, il avait violé le droit de propriété de C______.

cb. Par arrêt du 2 mai 2022, la Chambre pénale de recours (ci-après : la CPR) a annulé l'ordonnance pénale querellée et ordonné la restitution de l'émeraude au recourant. Seul demeurait en effet établi que ce dernier avait possédé la pierre durant plus de vingt ans avant son séquestre, en son nom ou par le biais de K______ SL, société dont il était l'unique administrateur. Il avait ainsi détenu la pierre plus longtemps que C______. Cette possession du recourant, nonobstant l'historique de l'émeraude et ses rattachements à la famille de C______, ne pouvait pas être niée et devait, au contraire, conduire l'autorité intimée, par le jeu de la présomption institué par l'art. 930 CC, à considérer – prima facie et sans trancher la question sur le fond – le recourant comme le plus légitime à se voir restituer le bijou.

cc. Cet arrêt est entré en force, le Tribunal fédéral ayant déclaré irrecevable, par arrêt du 6 décembre 2022, le recours formé par C______ à son encontre.

d. Dans l'intervalle, soit le 2 juin 2022, C______ a déposé une requête de conciliation à l'encontre du recourant et de K______ SL, concluant à ce qu'il soit constaté qu'elle est la propriétaire de l'émeraude et que celle-ci lui soit restituée, dès lors qu'elle était la fille de la ______ [titre de noblesse] M______.

Cette procédure a elle aussi été suspendue jusqu'à l'issue de la procédure pénale, alors toujours pendante.

e. Par acte du 3 janvier 2023, C______ a déposé une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles par-devant le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal). Elle a conclu, à titre de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, à ce qu'il soit fait interdiction à la succursale de G______ SA de Genève de se dessaisir de l'émeraude en mains du recourant ou de K______ SL, ou en mains de quiconque prétendrait en avoir la propriété.

Elle a notamment allégué que son beau-père, le commandement L______ avait acquis l'émeraude en 1981 pour la somme de USD 800'000.-, avant de lui en faire cadeau en 1984 ou 1985 pour la naissance de l'une de ses filles.

f. Par ordonnance du 3 janvier 2023, statuant sur mesures superprovisionnelles, le Tribunal a donné suite aux conclusions de C______.

g. Par ordonnance du 4 janvier 2023, le Tribunal a imparti un délai au 30 janvier 2023 au recourant pour se déterminer sur la requête déposée par C______.

h. Le 25 janvier 2023, le recourant a, par le biais de son conseil, sollicité une prolongation du délai pour produire ses déterminations.

i. Par ordonnance du 26 janvier 2023, le Tribunal a prolongé au 2 février 2023 le délai fixé au recourant et l'a enjoint à signifier directement ses écritures à C______ le jour de l'échéance du délai, précisant qu'à défaut, celles-ci ne seraient pas prises en considération.

j. Le 2 février 2023, le recourant a déposé ses déterminations à la Poste, lesquelles ont été reçues par le greffe du Tribunal le lendemain et par le conseil de C______ le 6 février 2023, la copie adressée à cette dernière ayant été envoyée par pli simple.

k. Par ordonnance OTPI/146/2023 du 28 février 2023, statuant sur mesures provisionnelles, le Tribunal a confirmé son ordonnance de mesures superprovisionnelles du 3 janvier 2023.

Dans sa partie en fait, le Tribunal a retenu que, dans ses déterminations du 2 février 2023, le recourant avait conclu au rejet de la requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, affirmant qu'il était le possesseur de l'émeraude depuis 1994 et qu'il avait reçu celle-ci de son père. En droit, il a estimé que ces déterminations étaient recevables.

Le Tribunal a également constaté que l'acquisition de la propriété de l'émeraude par chacune des parties, laquelle avait fait l'objet de maintes donations, apparaissait opaque. A ce stade de la procédure, les faits allégués par C______ étaient toutefois rendus suffisamment vraisemblables pour admettre qu'elle était propriétaire de l'émeraude avant sa disparition en novembre 1989 et qu'elle disposait d'une prétention en revendication à l'encontre du recourant. Compte tenu de la levée du séquestre pénal, l'urgence à prononcer les mesures requises était rendue vraisemblable. Le risque d'un préjudice difficilement réparable devait aussi être admis, dès lors qu'il serait extrêmement difficile pour C______ de retrouver l'émeraude si celle-ci devait être restituée au recourant, qui souhaitait la vendre.

l. Par acte du 22 mars 2023, le recourant a formé appel contre l'ordonnance de mesures provisionnelles du 28 février 2023, concluant principalement, sous suite de frais judiciaires et dépens, à son annulation. Subsidiairement, il a conclu au renvoi de cette ordonnance au Tribunal pour nouvelle décision, et au rejet des mesures superprovisionnelles et provisionnelles litigieuses.

Il soutient en particulier que "l'ordonnance querellée ne mentionne ni ne tient compte des déterminations du 2 février 2023 produites par [ses soins], ni d'ailleurs du bordereau de pièces correspondant" et que "contrairement à ce que semble soutenir l'ordonnance querellée, le mémoire et le dossier de pièces ont été déposés en temps voulu". Il estime pourtant y avoir démontré, pièce à l'appui, qu'il avait reçu l'émeraude en 1994 de son feu son père, en contrepartie du travail qu'il effectuait dans la joaillerie de ce dernier, qui était un marchand d'objets de même nature que l'émeraude. Il y a aussi démontré avoir effectué des actes que seul un possesseur et propriétaire légitime pouvait accomplir, comme faire estimer la valeur du bijou le 3 octobre 2008 et le 5 juin 2014, le confier le 15 décembre 2009 pour sertir ce bijou de diamants et s'adresser à G______ SA avec l'intention de faire estimer l'émeraude pour sa mise en vente aux enchères. Il a par ailleurs rappelé le contenu de l'arrêt de la CPR, concluant que sa possession de l'émeraude ne pouvait pas être niée et devait, au contraire, par le jeu de la présomption de l'art. 930 CC, conduire l'autorité à considérer, prima facie, sans trancher la question sur fond, qu'il était le plus légitime à se voir restituer le bijou.

Le recourant considère par ailleurs que C______ n'aurait pas réussi à rendre vraisemblable, par les documents produits, qu'elle était propriétaire de l'émeraude : l'appartenance à une famille n'impliquait pas automatiquement la possession ou la propriété d'un objet; les trois photos sur laquelle C______ portait l'émeraude pouvaient tout aussi bien démontrer que le bijou lui avait été prêté pour une occasion déterminée; la note retraçant l'historique de l'émeraude établie par la ______ [titre de noblesse] E______ ne devait être assimilée qu'à un simple allégué de partie; le document, établi sur une simple feuille, intitulé "règlement de la ______" et portant sur une transaction de USD 800'000.- ne mentionnait ni le nom du vendeur, ni celui de l'acheteur, faisant douter de son authenticité, et ne devait pas être tenu pour crédible au stade de mesures provisionnelles; ce document n'avait enfin aucun lien avec le fait que le beau-père de C______ lui aurait offert l'émeraude.

C______ n'avait en outre pas établi une liste ininterrompue des différents propriétaires de l'émeraude jusqu'à elle, ce qu'elle aurait dû faire, de sorte qu'elle ne pouvait pas requérir des mesures provisionnelles pour un éventuel trouble de la propriété. Le recourant n'avait lui-même entrepris aucune démarche pour demander la restitution de l'émeraude, alors qu'il en avait la possibilité pendant certaines périodes, de sorte que la condition de l'urgence faisait défaut. Enfin, l'examen du Tribunal était lacunaire, dès lors qu'il avait omis d'analyser les dispositions relatives à la protection de la propriété et de la possession au regard des art. 930 ss CC, en particulier l'art. 934 al. 1 CC, qui exclut en principe après cinq ans la revendication de choses volées.

m. Le 22 mars 2023 également, le recourant a sollicité l'extension de l'assistance juridique pour la procédure d'appel engagée à l'encontre de l'ordonnance querellée.

C.           Par décision du 3 avril 2023, notifiée au recourant le 13 avril 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause du recourant était dénuée de chances de succès.

Le premier juge a en particulier estimé que la propriété de C______ sur l'émeraude avait été rendue vraisemblable de par son seul statut, en tant que fille de la ______ [titre de noblesse] M______, et par son dépôt de plainte pénale en 1989, rappelant que la vraisemblance est suffisante s'agissant de mesures provisionnelles. Le fait que le recourant n'aurait pas sollicité la restitution de l'émeraude était sans pertinence, dès lors qu'il envisageait de la vendre et que ce bijou était conservé par G______ SA dans cette attente. La condition de l'urgence était de ce fait réalisée. Enfin, il apparaissait que l'action de C______ était fondée sur l'art. 641 al. 1 CC et non pas sur les art. 927 ou 934 CC, étant donné qu'elle sollicitait, au fond, un jugement sur la conformité de son droit en tant que propriétaire et non pas en tant que possesseur. Il était précisé que le Tribunal appliquait le droit suisse pour les mesures provisionnelles, alors qu'il devra, par la suite, trancher du droit applicable vu le domicile du recourant en Espagne et celui de C______ en Italie.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 20 avril 2023 au greffe de l'assistance juridique et transmis le 24 avril 2023 au greffe de la Cour civile. Le recourant conclut principalement à la modification de la décision attaquée en tant qu'elle le met au bénéfice de l'assistance juridique, et à la désignation d'un défenseur d'office en la personne de son avocate. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de la décision contestée et à son renvoi au premier juge pour nouvelle décision.

En substance, le recourant invoque une violation du droit en tant que le premier juge aurait omis d'examiner les conditions relatives à la protection de la propriété et de la possession selon les art. 930 ss CC, applicables selon lui en sus de l'art. 641 CC dans le cas d'espèce. Il fait en outre valoir que le premier juge serait tombé dans l'arbitraire en retenant que C______ avait rendu vraisemblable son droit de propriété sur l'émeraude de par sa filiation avec la ______ [titre de noblesse] M______ et par son dépôt de plainte pénale en 1989, alors que son acte d'appel, respectivement sa demande d'assistance juridique du 22 mars 2023, contenait des éléments démontrant le contraire. Enfin, la décision du premier juge serait empreinte de considérations générales et non argumentées.

Le recourant produit, outre des pièces déjà soumises au premier juge, des pièces nouvelles, soit ses fiches de salaire des mois de janvier à mars 2023.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1 La décision entreprise est sujette à recours auprès du président de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du règlement de la Cour de justice (RCJ; RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et art. 11 RAJ).

1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrits par la loi.

Il n'y a au surplus pas lieu d'examiner plus avant la recevabilité des déterminations déposées le 23 février 2023 par le recourant, dans la mesure où, contrairement à ce que celui-ci fait valoir, leur recevabilité a bien été reconnue par le Tribunal dans l'ordonnance querellée (cf. ordonnance querellée, page 7, dernier paragraphe). Ce grief, infondé, sera par conséquent écarté.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Les pièces nouvelles dont le recourant n'a pas fait état en première instance ne sont en principe pas prises en considération. Les fiches de salaire produites permettront toutefois de statuer sur la situation financière du recourant et sont dès lors recevables au vu des considérants qui suivent.

3.             3.1 Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 128 I 225 consid. 2.5.3).

La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 133 III 614 consid. 5).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

3.2 Selon l'art. 261 CPC, le Tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a), respectivement que cette atteinte est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).

L'octroi de mesures provisionnelles suppose la vraisemblance du droit invoqué. Cela implique de rendre vraisemblable, d'une part, les faits à l'appui de la prétention et, d'autre part, que celle-ci fonde vraisemblablement un droit. Le requérant doit ainsi avant tout rendre vraisemblable que le droit matériel invoqué existe et que le procès a des chances de succès (ATF 131 III 473 consid. 2.3). A défaut, la requête doit être rejetée (arrêts du Tribunal fédéral 5D_219/2017 du 24 août 2018 consid. 4.2.2; 5A_1016/2015 du 15 septembre 2016 consid. 5.3), en particulier lorsque les prétentions que le requérant a l'intention de faire valoir au principal se révèlent manifestement mal fondées en présence de ses propres allégués ou d'une preuve péremptoire (Bohnet, Commentaire romand, Code de procédure civile, n. 8 ad art. 261 CPC; arrêt du Tribunal cantonal de NE CACIV.2022.76 du 31 octobre 2022 consid. 3c, in: RJN 1 I 301).

3.3 Selon l'art. 641 CC, le propriétaire d'une chose a le droit d'en disposer librement, dans les limites de la loi (al. 1). Il peut la revendiquer contre quiconque la détient sans droit et repousser toute usurpation (al. 2), ce qui signifie que le défendeur ne doit pas être titulaire d'un droit opposable au demandeur lui permettant de refuser la restitution de la chose. Il incombe au défendeur de prouver l'existence et le contenu du "droit préférable" qu'il invoque, le cas échéant en s'appuyant notamment sur la présomption de l'art. 930 CC (Foëx, Commentaire romand, Code civil II, n. 32 ad art. 641 CC).

Selon l'art. 930 CC, le possesseur d'une chose mobilière en est présumé propriétaire (al. 1). Les possesseurs antérieurs sont présumés avoir été propriétaires de la chose pendant la durée de leur possession (al. 2).

Procéduralement, si le défendeur à une action pétitoire (art. 641 CC) démontre sa maîtrise de fait directe ou indirecte sur la chose, il peut se prévaloir de la présomption de propriété. Lorsque cela est établi, l'autre partie devra renverser la présomption et supportera donc le fardeau de la preuve de son droit de propriété. Si celui qui veut se prévaloir de sa possession ne parvient pas à le faire de manière suffisante pour que la présomption soit activée, il peut alors apporter la preuve de l'acquisition régulière auprès du propriétaire précédent, à savoir du possesseur précédent, lui-même au bénéfice de la présomption de propriété. La présomption tombe dès que la possession est équivoque (zweideutig), notamment si les circonstances à l'origine de cette possession sont douteuses. On peut alors exiger du possesseur qu'il s'explique sur l'origine de sa possession (Pichonnaz, Commentaire romand, Code de procédure civile, n. 5 à 8 et 19 ad art. 930 CPC).

L'art. 930 al. 2 CC présume quant à lui que le possesseur antérieur était le propriétaire de la chose mobilière durant toute la durée de sa possession. En principe, la perte de la possession entraîne la perte de la propriété (et la fin de la présomption de propriété au sens de l'art. 930 al. 1 CC). Pourtant, par exemple en cas de vol, il est possible que, malgré la perte de la possession, le droit de propriété demeure chez le possesseur précédent, car le nouveau possesseur a acquis sa possession de manière clandestine, c'est-à-dire qu'elle a été dissimulée aux tiers. Dans de tels cas, la présomption résultant de la possession actuelle prime celle de la possession antérieure. Une fois que la présomption de la possession actuelle, liée au régime des art. 934 et 936 CC, aura été mise en échec, alors la présomption de l'art. 930 al. 2 CC trouvera toute son utilité (Pichonnaz, op. cit., n. 19 et 47 ad art. 930 CC).

3.4 En l'espèce, il apparaît que le recourant a présenté plusieurs arguments à l'appui de sa demande d'assistance juridique destinés à démontrer que la requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles de C______ était infondée.

Il a notamment soutenu qu'il aurait reçu l'émeraude de feu son père et qu'une pièce, non demandée par le premier juge, attesterait de ce transfert de possession.

Le recourant a par ailleurs fait valoir que sa possession de l'émeraude, et donc son droit de propriété sur cet objet, serait acté par le jeu de la présomption instituée par l'art. 930 CC, disposition qui n'a pas été examinée par le premier juge. Il ressort toutefois du dossier que la possession du recourant sur l'émeraude a été validée par un arrêt de la CPR, entré en force, dont le contenu a valablement été allégué par le recourant. Les conclusions de cet arrêt n'ont en revanche pas été citées par le premier juge, qui n'a pas non plus exposé pour quelles raisons il s'était écarté de l'analyse du juge pénal.

Le recourant a enfin soulevé plusieurs arguments à l'encontre des moyens de preuve présentés par C______ à l'appui de sa requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles pour témoigner de son prétendu "droit préférable" sur l'émeraude. La question de savoir si C______ aurait dû établir une liste ininterrompue des différents propriétaires de l'émeraude jusqu'à elle, comme l'a invoqué le recourant, est par exemple pertinente, au vu des principes juridiques rappelés ci-dessus.

Au stade de la vraisemblance et s'agissant de mesures provisionnelles, il doit être admis que les explications données par le recourant ne font pas apparaître son appel comme étant dépourvu de toutes chances de succès, l'issue de la procédure initiée par C______ semblant suffisamment ouverte à ce stade.

C'est donc à tort que le bénéfice de l'assistance juridique a été refusé au recourant, au motif que les chances de succès de sa cause n'étaient pas données.

Partant, le recours sera admis. La décision litigieuse sera annulée et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision après examen de la condition d'indigence, la décision entreprise ne comportant aucun élément de fait relatif à la situation financière du recourant.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Par ailleurs, aucune indemnité de dépens ne sera allouée, le recourant n'en sollicitant pas l'octroi.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé le 20 avril 2023 par A______ contre la décision rendue le 3 avril 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/3532/2021.

Au fond :

Annule ladite décision.

Renvoie la cause à l'Autorité de première instance pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me Elvira GOBET-CORONEL (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.