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Décisions | Assistance juridique

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AC/1297/2023

DAAJ/100/2023 du 02.10.2023 sur AJC/3124/2023 ( AJC ) , ADMIS

Normes : CPC.118.letc
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/1297/2023 DAAJ/100/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU LUNDI 2 OCTOBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______ [GE],

 

contre la décision du 19 juin 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 


EN FAIT

A.           a. Le 13 mars 2023, B______ a formé une action en paiement à l'encontre de A______ (ci-après : la recourante) réclamant à cette dernière les sommes de 18'000 euros, 500 fr. et USD 5'000.- qu'elle lui avait prêtées entre décembre 2014 et juin 2015 (C/1______/2023).

b. Le 19 avril 2023, la recourante a sollicité le bénéfice de l'assistance juridique pour sa défense dans le cadre de l'action en paiement susmentionnée.

c. Dans le cadre de l'instruction de la cause, le greffe de l'assistance juridique a sollicité l'apport de la procédure C/1______/2023.

Il résulte de la demande en paiement formée par B______, imprimée par la vice-présidence du Tribunal civil et figurant au dossier, que B______ est défendue par un avocat.

d. Invitée par le greffe de l'assistance juridique à indiquer les arguments qu'elle entendait invoquer dans le cadre de sa défense à la demande en paiement intentée à son encontre par B______, la recourante a répondu qu'elle admettait devoir de l'argent à B______ mais que les montants réclamés ne correspondaient pas à la réalité, dès lors qu'elle avait remboursé une majorité de sa dette en espèces et en échange d'une bague d'une certaine valeur. Elle a ajouté que B______ tentait de l'intimider alors qu'elle était dans une situation financière délicate et qu'elle souffrait de problèmes de santé assez importants.

B.            Par décision du 19 juin 2023, reçue par la recourante le 26 juin 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif qu'il pouvait être exigé de la recourante qu'elle procède sans l'assistance d'une avocate, compte tenu de la procédure simplifiée applicable à l'affaire et au vu de la contestation partielle du montant qui était réclamé à la recourante, celle-ci étant en mesure de produire les documents permettant de prouver que le montant total qui lui était réclamé était excessif. Une personne avisée plaidant à ses propres frais n'engagerait pas de dépenses en honoraires d'avocat sans avoir de bonnes chances d'obtenir intégralement gain de cause, et la certitude de rentrer dans ses frais, ce qui ne semblait pas le cas en l'espèce.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 29 juin 2023 à l'Assistance juridique et transmise à la présidence de la Cour de justice le 24 juillet 2023. La recourante, agissant en personne, conclut à l'annulation de cette décision et à ce que le bénéfice de l'assistance juridique lui soit accordé.

La recourante indique être de santé fragile, dépressive, souffrir d'une anxiété généralisée et de fibromyalgie. Elle fait valoir que la procédure susmentionnée est très difficile émotionnellement pour elle et que faire face à une injustice est pour elle une source de stress supplémentaire, de sorte qu'elle n'est pas en pleine capacité de défendre ses intérêts.

La recourante produit une pièce nouvelle.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès du président de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont la recourante n'a pas fait état en première instance et les pièces nouvelles ne seront pas pris en considération.

3.             3.1. La fourniture d'un conseil juridique rémunéré par l'Etat suppose la réalisation de trois conditions : une cause non dénuée de chances de succès, l'indigence et la nécessité de l'assistance par un professionnel (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a et b CPC; ATF 141 III 560 consid. 3.2.1).

D'après la jurisprudence, il se justifie en principe de désigner un avocat d'office à l'indigent lorsque sa situation juridique est susceptible d'être affectée de manière particulièrement grave. Lorsque, sans être d'une portée aussi capitale, la procédure en question met sérieusement en cause les intérêts de l'intéressé, il faut en sus que l'affaire présente des difficultés de fait ou de droit que le requérant ou son représentant légal ne peuvent surmonter seuls (ATF 130 I 180 consid. 2.2 et les arrêts cités).

La loi mentionne également l'hypothèse où la partie adverse est assistée d'un avocat (cf. art. 118 let. c CPC), accordant ainsi une importance particulière au principe de l'égalité des armes (ATF 120 Ia 217 consid. 1; 119 Ia 134 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_244/2014 du 25 juin 2014 consid. 4.2.1; 5A_838/2013 du 3 février 2014 consid. 2.4 et la référence citée). De nature formelle, ce principe est enfreint lorsqu'une partie est avantagée, sans qu'il soit nécessaire que son adversaire en subisse effectivement un désavantage; ainsi, refuser la désignation d'un avocat d'office au motif que le requérant n'aurait pas démontré en quoi il en aurait concrètement besoin pour affronter une adverse partie elle-même assistée violerait le droit fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 5A_244/2014 précité consid. 4.2.1 et la référence citée).

3.2 En l'espèce, la recourante ne conteste pas, à juste titre, la décision querellée en tant qu'elle retient que la procédure ne présente pas une complexité telle que l'assistance d'un avocat soit nécessaire.

Lors de sa demande d'assistance juridique, la recourante a mentionné souffrir de problèmes de santé assez importants sans toutefois indiquer les conséquences de ceux-ci. Ce n'est qu'en seconde instance que la recourante expose quelle est la gravité de ses problèmes de santé et que celle-ci l'empêcheraient de sauvegarder ses intérêts efficacement sans recourir à un conseil. Or, ce fait nouveau ne peut pas être pris en considération (cf. ch. 2 supra). En outre, la recourante a la possibilité de se faire accompagner à l'audience par une personne de confiance comme soutien moral (art. 68 al. 1 CPC; ATF 140 III 555 consid. 2.3 commenté par Bastons Bulletti in CPC Online, Newsletter du 7 janvier 2015), cette position n'ayant pas à être spécifiquement tenue par un avocat.

Cela étant, l'autorité précédente a consulté et imprimé la demande en paiement objet de la procédure pour laquelle la recourante réclame le bénéfice de l'assistance juridique et il en résulte que B______ est assistée par un avocat. Certes, la recourante ne s'est pas expressément prévalu du principe de l'égalité des armes dans sa requête mais le fait que la demanderesse en paiement soit assistée par un conseil figure au dossier de première instance. Ainsi, force est de constater que l'autorité précédente a omis à tort de tenir compte du principe d'égalité des armes et d'en faire application, la recourante se trouvant désavantagée sans avocat. Par conséquent, l'application du principe d'égalité des armes commande, en l'occurrence, la nomination d'un avocat.

A cela s'ajoute que la cause de la recourante n'est pas totalement dépourvue de chances de succès, puisque le premier juge a admis que les montants réclamés semblaient exagérés. La recourante semble ainsi en mesure de démontrer que la totalité des sommes qui lui sont réclamées ne sont pas dues.

Le recours sera donc admis, la décision querellée annulée et la cause renvoyée à la vice-présidence du Tribunal civil pour examen de la condition d'indigence.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé le 29 juin 2023 par A______ contre la décision rendue le 19 juin 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/1297/2023.

Au fond :

Annule la décision entreprise et, cela fait, statuant à nouveau :

Renvoie la cause à la vice-présidence du Tribunal civil pour nouvelle décision.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.