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Décisions | Assistance juridique

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AC/3788/2022

DAAJ/47/2023 du 16.05.2023 sur AJC/1047/2023 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3788/2022 DAAJ/47/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 16 MAI 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

Mademoiselle A______, domiciliée chez B______, ______, représentée par sa curatrice, C______, Service de protection des mineurs, case postale 75, 1211 Genève,

 

contre la décision du 24 février 2023 de la vice-présidente du Tribunal civil.

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Le 11 mai 2022, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant a désigné C______, du Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) aux fonctions de curatrice de l'enfant à naître de B______ et de faire valoir sa créance alimentaire.

Le ______ 2022, B______ a donné naissance à A______ (ci-après : la recourante), dont le père biologique serait D______.

Le 23 août 2022, la mère de l'enfant a versé la somme de 2'800 fr. sur le compte du SPMi à titre d'avance de frais pour former une action en justice.

b. Le 10 octobre 2022, la recourante, représentée par sa curatrice, a déposé une demande en constatation de la filiation paternelle et en fixation de la contribution d'entretien par-devant le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), à l'encontre de D______, lequel réside en Grande-Bretagne (C/1______/2022).

c. Par ordonnance du 3 novembre 2022, le Tribunal a décidé de faire traduire tous les documents de la procédure en anglais (ordonnance précitée, demande du 10 octobre 2022 et pièces y relatives) avant leur transmission au défendeur. Il a renoncé à demander une avance de frais à B______ en retenant à tort qu'elle était au bénéfice de l'assistance juridique.

d. Le 17 novembre 2022, le Tribunal a enregistré des frais de traduction à hauteur de 963 fr.

e. Le 23 décembre 2022, la recourante, par l'intermédiaire de sa curatrice, a requis l'octroi de l'assistance juridique limitée aux frais de traduction.

Selon le décompte d'assurance-chômage de décembre 2022, la mère de la recourante a perçu des indemnités journalières nettes en 4'149 fr. 30, correspondant à 17 jours indemnisés (22 jours contrôlés – 5 jours de délai d'attente). En janvier 2023, elle a perçu des indemnités nettes de 5'325 fr. 85, correspondant à 22 jours indemnisés.

La mère de la recourante a indiqué assumer des charges de loyer (1'710 fr.), d'assurances-maladie de base et complémentaire (743 fr. 10) et d'impôts (156 fr. 47).

Craignant que les "frais de traduction soient considérables", la curatrice a affirmé que la mère de la recourante ne pourrait pas les assumer.

B.            Par décision du 24 février 2023, notifiée le 1er mars 2023, la vice-présidente du Tribunal civil a rejeté la requête précitée.

Selon cette décision, les revenus mensuels de la mère de la recourante totalisaient 5'253 fr. (calculés sur 21,7 jours) pour des charges mensuelles de 4'263 fr. 75 (bases mensuelles d'entretien pour la mère et l'enfant : 1'750 fr., loyer : 1'710 fr., primes d'assurance-maladie obligatoires : 652 fr. 30, impôts ICC et IFD mensualisés : 151 fr. 45).

Le disponible de la mère de la recourante était de 989 fr. 25 par mois selon un calcul du minimum vital strict, respectivement de 551 fr. 75 fr. après augmentation de 25% des bases mensuelles d'entretien sus-évoquées, représentant un montant de 437 fr. 50.

Le disponible d'au moins 551 fr. 75 permettait à la mère de la recourante d'assumer les frais de traduction de la procédure en cours par ses propres moyens.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 9 mars 2023 à la Présidence de la Cour de justice.

La recourante, représentée par sa curatrice, conclut à l'annulation de la décision de la vice-présidente du Tribunal civil du 24 février 2023 et à l'octroi de l'assistance juridique pour la prise en charge des frais de traduction dans la procédure C/1______/2022.

Elle produit des pièces nouvelles.

La recourante conteste le montant des allocations chômage de sa mère, estimant que celles-ci se montent en moyenne à la somme nette de 4'770 fr. 95 pour les mois de décembre 2022 à février 2023.

Elle invoque nouvellement des charges assumées par sa mère, dont elle a produit les justificatifs à l'appui de son recours, faisant valoir que celle-ci n'a ni disponible, ni économies (frais de transports publics, frais dentaires et médicaux non remboursés, assurance ménage et responsabilité civile, de grossesse et d'accouchement, de déménagement de chez ses parents, d'acquisition de meubles pour son appartement et la chambre de sa fille, et de versement d'une provision à un avocat, sans en préciser les raisons).

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. En tant qu'elle refuse l'assistance juridique, la décision entreprise, rendue en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC et 1 al. 3 RAJ), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n° 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

En l'espèce, la recourante a invoqué de nouvelles charges et a produit de nouvelles pièces, de sorte que celles-ci ne peuvent pas être pris en considération puisqu'elle ne les a pas invoquées en première instance.

3.             3.1.
3.1.1
L'octroi de l'assistance juridique est notamment subordonné à la condition que le requérant soit dans l'indigence (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a CPC).

Une personne est indigente lorsqu'elle ne peut assurer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille (ATF 141 III 369 consid. 4.1; 128 I 225 consid. 2.5.1).

L'indigence s'apprécie en fonction de l'ensemble des ressources du recourant, dont ses revenus, sa fortune et ses charges, tous les éléments pertinents étant pris en considération (ATF 135 I 221 consid. 5.1; 120 Ia 179 consid. 3a). La situation économique existant au moment du dépôt de la requête est déterminante (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 du 11 avril 2016 consid. 4.1).

Il incombe au requérant d'indiquer de manière complète et d'établir autant que faire se peut ses revenus, sa situation de fortune et ses charges (art. 119 al. 2 CPC et 7 al. 2 RAJ; ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2015 du 30 novembre 2015 consid. 5).

Seules les charges réellement acquittées sont susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 précité consid. 4.1). Les dettes anciennes, pour lesquelles le débiteur ne verse plus rien, n'entrent pas en ligne de compte (ATF 135 I 221 consid. 5.1).

En vertu du principe de l'effectivité, il y a lieu de mettre en balance, d'une part, la totalité des ressources effectives du requérant et, d'autre part, l'ensemble de ses engagements financiers, et non seulement une partie de celles-là ou de ceux-ci. En effet, si l'on peut attendre certains sacrifices financiers de la part du requérant, cela ne doit pas aller jusqu'à le contraindre à se procurer les moyens nécessaires pour faire valoir ses droits en justice, en contractant de nouvelles dettes, en n'honorant pas les dettes existantes ou en se dessaisissant de biens de première nécessité (ATF 135 I 221 consid. 5.1 et 5.2.1).

Le minimum d'existence du droit des poursuites n'est pas déterminant à lui seul pour établir l'indigence au sens des règles sur l'assistance judiciaire. L'autorité compétente peut certes partir du minimum vital du droit des poursuites, mais elle doit tenir compte de manière suffisante des données individuelles du cas d'espèce (ATF 141 III 369 consid. 4.1; ATF 124 I 1 consid. 2a).

Il appartient au justiciable sollicitant l'aide de l'État d'adapter son train de vie aux moyens financiers dont il dispose en donnant priorité aux dépenses relevant du strict minimum vital (arrêt du Tribunal fédéral 1B_428/2010 du 2 février 2011 consid. 4).

La part des ressources excédant ce qui est nécessaire à la satisfaction des besoins personnels doit être comparée aux frais prévisibles de la procédure pour laquelle l'assistance judiciaire est requise. Celle-ci n'est pas accordée lorsque le solde disponible permet d'amortir les frais judiciaires et d'avocat en une année au plus, pour les procès relativement simples, et en deux ans pour les autres (ATF 141 III 369 consid. 4.1;
135 I 221 consid. 5.1).

3.1.2 Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale (art. 3 ch. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE; RS 0.107).

Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées (ch. 2).

Les États parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié (ch. 3).

Selon l'art. 11 al. 1 Cst., les enfants et les jeunes ont droit à une protection particulière de leur intégrité et à l’encouragement de leur développement.

3.2. En l'espèce, la recourante se prévaut des art. 3 CDE et de l'art. 11 Cst., sans expliquer en quoi ces dispositions légales donneraient une portée différente aux art. 29 al. 3 Cst., 117 let. a CPC et à la jurisprudence y relative, selon lesquels l'octroi de l'assistance juridique est réservée au requérant indigent, y compris lorsque celui-ci est un enfant mineur, respectivement lorsque le parent qui assume son entretien est indigent. Le recours est, dès lors, insuffisamment motivé sur ce point.

Ensuite, le recalcul du minimum vital de la mère de la recourante indique qu'elle perçoit des allocations de chômage nettes de 5'274 fr. 80 sur 21,7 jours, soit un montant supérieur à celui qui a été retenu en première instance en 5'253 fr., étant rappelé que le décompte de l'assurance-chômage de février 2023 ne peut pas être pris en considération car il s'agit d'une pièce nouvellement produite en seconde instance (selon les règles de trois suivantes : décompte de décembre 2022 = 4'149 fr. 30 pour 17 jours, soit X = 21,7 jours et X = 4'149 fr. 30 x 21,7 jours ./. 17 jours = 5'296 fr. 45; décompte de janvier 2023 : 5'325 fr. 85 pour 22 jours, soit X = 21,7 jours et X = 5'325 fr. 85 x 21,7 jours ./. 22 jours = 5'253 fr. 20; 5'296 fr. 45 + 5'253 fr. 20 = 10'549 fr. 65 ./. 2 = 5'274 fr. 80 en moyenne, montant qui inclut déjà les allocations familiales).

Ensuite, la mère de la recourante ne critique pas les charges mensuelles qui ont été retenues à concurrence de 4'263 fr. 75, étant rappelé qu'il lui incombait d'invoquer ses autres charges en première instance.

Il s'ensuit qu'à partir de ressources mensuelles fixées à 5'253 fr. en première instance et de charges mensuelles arrêtées à 4'263 fr. 75, le minimum vital strict de la mère de la recourante est d'au moins de 989 fr. 25 et son minimum vital élargi est d'au moins 551 fr. 75.

Elle dispose donc des ressources financières nécessaires pour assumer les frais de traduction en 963 fr., le cas échéant en plusieurs mensualités.

C'est, par conséquent, avec raison que la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique de la recourante.

Infondé, le recours sera, dès lors, rejeté.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 24 février 2023 par la vice-présidente du Tribunal civil dans la cause AC/3788/2022.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______, représentée par sa curatrice C______ auprès du Service de protection des mineurs (art. 67 al. 2 et 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.