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Décisions | Assistance juridique

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AC/647/2022

DAAJ/34/2023 du 11.04.2023 sur AJC/6244/2022 ( AJC ) , RENVOYE

Normes : RAJ.3
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/647/2022 DAAJ/34/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 11 AVRIL 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée ______, représentée par Me C______, avocat,

 

contre la décision du 20 décembre 2022 de la vice-présidente du Tribunal de première instance.

 


EN FAIT

A.           a. Par décision du 21 mars 2022, la vice-présidente du Tribunal de première instance a octroyé l'assistance juridique à A______ (ci-après : la recourante), avec effet au 4 mars 2022, pour la procédure devant le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : Tribunal de protection) tendant à la fixation des relations personnelles entre son fils, B______, et le père de celui-ci (C/1______/2021). Cet octroi a été limité à la première instance et à six heures d'activité d'avocat, audiences et forfait courriers/téléphones en sus, et "jusqu'à droit jugé au fond sur le droit de visite du père, à l'exclusion des étapes ultérieures de mise en œuvre de la décision pour lesquelles une extension de l'assistance juridique devra être requise". Me C______, avocat de choix, a été commis à cette fin.

b. Par courrier du 28 juillet 2022, Me C______ a sollicité une extension du nombre d'heures prises en charge par l'assistance juridique, expliquant avoir d'ores et déjà atteint 6h30 d'activité.

c. Par décision du 15 août 2022, la vice-présidente du Tribunal de première instance a octroyé à la recourante six heures d'activité d'avocat supplémentaires, soit 12h au total, audience et forfait courriers/téléphones en sus, "jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur le droit de visite du père, à l'exclusion des étapes ultérieures de mise en œuvre de la décision pour lesquelles une extension de l'assistance juridique devra être requise", et sous réserve de l'appréciation des heures nécessaires en vertu de l'art. 16 al. 2 RAJ au moment de la taxation de l'état de frais.

d. Une audience s'est tenue le 10 octobre 2022 à l'issue de laquelle le Tribunal de protection a rendu sa décision au fond réservant au père de B______ un droit de visite d'une demi-journée par semaine avec un passage au Point rencontre.

e. Par courrier du 11 octobre 2022, Me C______ a sollicité une nouvelle extension de l'assistance juridique, dès lors que d'autres interventions étaient prévues dans le cadre de la procédure au fond. Il a exposé qu'à la suite de l'audience du 10 octobre 2022, le Tribunal de protection avait invité les parties à lui soumettre une convention portant notamment sur l'autorité parentale conjointe et la contribution d'entretien à verser à l'enfant. Ainsi des pourparlers entre les parties étaient à prévoir.

f. Le 19 octobre 2022, à la requête du greffe de l'assistance juridique, il a déposé un état de frais de son activité déployée entre le 21 mars et le 10 octobre 2022.

B.            Par décision du 20 décembre 2022, reçue par la recourante le 10 janvier 2023, la vice-présidente du Tribunal de première instance a rejeté la requête d'extension d'assistance juridique précitée.

Elle a considéré que les heures d'ores et déjà effectuées par son conseil semblaient excessives. Considérant que certains actes n'étaient pas justifiés et que certaines activités présentes dans le poste procédure de l'état de frais faisaient partie du forfait courriers/téléphones, le premier juge a considéré que l'activité effectuée depuis le 28 juillet 2022 ne devait pas dépasser un total de 4h30 d'activité maximum, de sorte qu'il restait encore à Me C______ 1h30 d'activité (6h d'activité supplémentaire accordée moins 4h30) pour prendre connaissance de l'ordonnance du TPAE du 10 octobre 2022 et recevoir éventuellement sa cliente pour en discuter, étant encore précisé que le mandat de Me C______ avait pris fin avec le prononcé de cette décision, laquelle avait été rendue sur le fond.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 18 janvier 2023 à la présidence de la Cour de justice. La recourante conclut à ce que son recours soit admis, à ce que la demande d'extension de l'assistance juridique formulée le 11 octobre 2022 soit admise, à ce qu'il soit reconnu que les entretiens des 4, 7 et 10 octobre 2022 et la consultation du dossier du SEASP du 6 septembre 2022 étaient justifiés et doivent être indemnisés et à ce qu'il soit prononcé que le mandat de son conseil n'a pas pris fin avec le prononcé de la décision du 10 octobre 2022, les frais et dépens devant être mis à la charge de l'Etat.

b. La vice-présidente du Tribunal de première instance a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1. 1.1 En tant qu'elle refuse une extension de l'assistance juridique, la décision entreprise, rendue en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice (art. 121 CPC et 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et art. 11 RAJ).

1.2 En l'espèce, le recours a été interjeté auprès de l'autorité compétente et en la forme prescrite par la loi.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2. La recourante reproche à la vice-présidente du Tribunal de première instance d'avoir considéré que son mandat avait pris fin et d'avoir refusé l'extension de son assistance juridique.


 

2.1
2.1.1
Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès (art. 29 al. 3 Cst. et 117 CPC).

La fourniture d'un conseil juridique rémunéré par l'Etat suppose la réalisation de trois conditions : une cause non dénuée de chances de succès, l'indigence et la nécessité de l'assistance par un professionnel (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a et b CPC; ATF 141 III 560 consid. 3.2.1). L'assistance d'un conseil juridique peut déjà être accordée pour la préparation du procès (art. 118 al. 1 let. c 2ème phrase).

2.1.2 A teneur de l'art. 118 al. 2 CPC, l'assistance judiciaire peut être accordée totalement ou partiellement, ce qui signifie qu'elle doit être accordée, conformément au principe de proportionnalité, à la mesure de sa véritable nécessité (Message du Conseil fédéral relatif au Code de procédure civile, FF 2006, p. 6912, ad art. 116 du projet CPC; Huber, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], Brunner/ Gasser/Schwander, 2ème éd., 2016, n. 17 ad art. 118 CPC), soit en quelque sorte "à la carte" (Ruegg, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2017, n. 2 ad art. 118 CPC).

En application du principe de proportionnalité ainsi rappelé, l'art. 3 al. 1 première phrase RAJ, prévoit que l'assistance juridique peut être limitée à certains actes de procédure ou démarches déterminées, ainsi que dans la quotité des heures nécessaires à l'activité couverte.

2.1.3 Le mandat d'office constitue une relation tripartite dans laquelle l'Etat confère au conseil d'office la mission de défendre les intérêts du justiciable démuni, lui conférant une sorte de mandat en faveur d'un tiers. Le conseil juridique commis d'office n'exerce pas un mandat privé, mais accomplit une tâche de droit public, à laquelle il ne peut se soustraire et qui lui confère une prétention de droit public à être rémunéré équitablement. En dépit de ce rapport particulier avec l'Etat, il n'est obligé que par les intérêts de l'assisté, dans les limites toutefois de la loi et des règles de sa profession (ATF 141 III 560 consid. 3.2.2).

2.2 En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que le mandat de Me C______ avait pris fin avec le prononcé de la décision du 10 octobre 2022 statuant sur le droit de visite du père de B______ dès lors que le bénéficie de l'assistance juridique a été accordé à la recourante pour la procédure de première instance "jusqu'à droit jugé au fond sur le droit de visite du père, à l'exclusion des étapes ultérieures de mise en œuvre de la décision pour lesquelles une extension de l'assistance juridique devra être requise".

Dès lors que la partie de la procédure pour laquelle le bénéfice de l'assistance juridique a été accordé a pris fin, c'est de manière logique que la recourante, dans son pli du 11 octobre 2022, a sollicité le bénéfice de l'assistance juridique pour un nouvel aspect de la procédure, soit des pourparlers en vue de déposer une convention devant le Tribunal de protection s'agissant de l'autorité parentale et de la contribution à l'entretien de l'enfant B______, aspects qui n'étaient pas couverts par l'assistance juridique octroyée le 21 mars 2022.

Or, en examinant si des heures supplémentaires pouvaient être accordées en lien avec la partie de la procédure pour laquelle le bénéfice de l'assistance juridique avait déjà été octroyé, le premier juge n'a pas statué sur la nouvelle demande de la recourante, que celle-ci avait maladroitement qualifié de "demande d'extension".

Le recours sera donc admis, la décision querellée annulée et la cause retournée au premier juge afin que soit examiné si la recourante rempli les conditions (indigence, chances de succès, nécessité d'un avocat) pour bénéficier de l'assistance juridique dans le cadre de pourparlers s'agissant de l'autorité parentale et l'étendue de la contribution à l'entretien de l'enfant.

Il est encore relevé que l'indemnisation du conseil de la recourante pour la partie de la procédure pour laquelle elle a obtenu le bénéficie de l'assistance juridique devra faire l'objet d'une décision de sorte qu'il n'y a pas lieu, dans le cadre du présent recours, de statuer sur le bienfondé des actes entrepris par son conseil.

3. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, l'Etat de Genève sera condamné à verser 400 fr. à la recourante à titre de dépens (ATF 140 III 501 consid. 4).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé le 18 janvier 2023 par A______ contre la décision rendue le 20 décembre 2022 par la vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/647/2022.

Au fond :

Annule cette décision.

Renvoie la cause à l'Autorité de première instance pour instruction et nouvelle décision au sens des considérants.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Condamne l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à verser la somme de 400 fr. à A______ à titre de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Etude de Me C______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La vice-présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.