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Décisions | Assistance juridique

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AC/3023/2022

DAAJ/12/2023 du 13.02.2023 sur AJC/5648/2022 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3023/2022 DAAJ/12/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU LUNDI 13 FEVRIER 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______ (GE),

représenté par Me Eve DOLON, avocate, rue Charles-Bonnet 2, 1206 Genève,

 

contre la décision du 21 novembre 2022 de la vice-présidente du Tribunal de première instance.

 


EN FAIT

A.           B______ et feu C______ sont les parents de A______ (ci-après : le recourant), et de son frère jumeaux, D______, nés le ______ 2001, tous deux encore en formation.

La famille réside dans une villa sise au no. ______ route 1______ dont le recourant et son frère sont copropriétaires depuis que leurs parents leur en ont fait donation.

B.            Le 4 novembre 2021, les voisins de B______ et de C______ ont formé à leur encontre une action en cessation du trouble (cause C/2______/2021), concluant notamment à ce que ceux-ci détruisent des constructions qui empiéteraient sur une zone commune.

C.           Le 12 octobre 2022, le recourant a sollicité l'assistance juridique pour sa défense dans l'action en cessation du trouble susmentionnée, indiquant avoir été attrait à cette procédure en sa qualité d'héritier de sa mère, feu C______.

D.           Par décision du 21 novembre 2022, notifiée le 28 du même mois, la vice-présidente du Tribunal de première instance a rejeté la requête précitée.

En substance, elle a retenu qu'il fallait tenir compte de la situation financière du père du recourant, qui avait une obligation d'entretien à son égard, pour statuer la demande d'assistance juridique. Compte tenu de cela, le recourant ne remplissait pas la condition d'indigence, les revenus de son ménage, soit celui qu'il formait avec son frère et son père, dépassant de 6'261 fr. le minimum vital élargi en vigueur à Genève. Ceux-ci disposaient en effet de ressources mensuelles totales de 12'234 fr., comprenant la rente AVS du père (2'390 fr.), la rente LPP du père (5'122 fr.), la rente AVS pour enfant versée au recourant (783 fr.), la rente d'orphelin versée au recourant (553 fr.), la rente versée au recourant par la caisse LPP de son père (1'025 fr.) et les mêmes montants étant versés à son frère A______ (783 fr. + 553 fr. + 1'025 fr.). Leurs charges mensuelles admissibles étaient de 5'972 fr. (sic), comprenant les frais de logement (895 fr. 50), les primes d'assurance-maladie de base (1'521 fr. 75), l'écolage de A______ (1'500 fr.), les frais de repas pris à l'extérieur pour D______ (242 fr.) et A______ (242 fr.), les frais de transport public (160 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP majorée de 25% (3'187 fr. 50, soit (1'350 fr. + 600 fr. + 600 fr.) x 25%).

E.            a. Recours est formé contre cette décision, par acte déposé le 7 décembre 2022 à la Cour de justice. Le recourant a conclu à son annulation et à ce que le bénéfice de l'assistance judiciaire lui soit octroyé pour la procédure en cessation du trouble C/2______/2021 ouverte à son encontre.

b. Dans ses observations du 14 décembre 2022, la vice-présidente du Tribunal de première instance a relevé qu'une erreur de calcul s'était glissée dans la décision querellée, les charges du ménage totalisant 7'748 fr. 75, au lieu des 5'972 fr. retenus dans la décision, mais qu'en tout état le solde du ménage s'élevait encore à 4'485 fr. par mois de sorte que ce disponible leur permettait d'assumer les frais judiciaires et honoraires d'avocat par leurs propres moyens. En outre, il n'était pas prouvé que la saisie alléguée sur les biens du père du recourant serait effective et, quand bien même, le solde du ménage resterait suffisant à couvrir leurs frais judiciaires et honoraire d'avocat.

F. Lors de son audition par l'Office des poursuites le 7 septembre 2022, B______ a déclaré ne pas être logé gratuitement par ses enfants et que ses frais de logement s'élevaient à 895 fr. 50 par mois, charges comprises. Il s'acquittait mensuellement d'une prime d'assurance-maladie de 609 fr. 65 et de frais de transport de 45 fr. Annuellement, la prime d'assurance-bâtiment était de 3'192 fr., celle de l'assurance-incendie de 1'325 fr., les charges de copropriété étaient de 1'277 fr. et la facture des SIG de 23'000 fr. Il n'est pas fait état d'une charge hypothécaire.

Selon le calcul du minimum vital de B______ annexé au protocole d'audition du débiteur, ses charges mensuelles comprenaient sa prime d'assurance-maladie en 609 fr. 65, ses frais de transport (45 fr.) et son loyer charges comprises de 895 fr. 50. Il avait d'"autres charges" pour 2'399 fr. 45. Mensuellement et par enfant, les primes d'assurance-maladie étaient de 456 fr. 05, les frais de repas pris à l'extérieur de 242 fr., les frais de transport de 45 fr. Les autres frais des enfants - correspondant à l'écolage - étaient de 50 fr. pour D______ et de 1'500 fr. pour A______.

EN DROIT

1.             1.1 En tant qu'elle refuse l'assistance juridique, la décision entreprise, rendue en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC et 1 al. 3 RAJ), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             2.1
2.1.1
L'octroi de l'assistance juridique est notamment subordonné à la condition que le requérant soit dans l'indigence (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a CPC).

Une personne est indigente lorsqu'elle ne peut assurer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille (ATF 141 III 369 consid. 4.1 ; 128 I 225 consid. 2.5.1).

L'indigence s'apprécie en fonction de l'ensemble des ressources du recourant, dont ses revenus, sa fortune et ses charges, tous les éléments pertinents étant pris en considération (ATF 135 I 221 consid. 5.1; 120 Ia 179 consid. 3a). La situation économique existant au moment du dépôt de la requête est déterminante (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 du 11 avril 2016 consid. 4.1).

2.1.2 Les ressources effectives des personnes qui ont à l'égard du requérant une obligation d'entretien doivent être prises en compte (ATF 127 I 202 consid. 3b et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 5A_507/2007 du 23 avril 2008 consid. 7), le devoir de l'Etat d'accorder l'assistance judiciaire à un plaideur impécunieux dans une cause non dénuée de chances de succès étant subsidiaire à l'obligation d'entretien qui résulte du droit de la famille (ATF 138 III 672 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_556/2014 du 4 mars 2015 consid. 3.1).

La fortune d'un requérant est prise en compte dans la mesure où l'on peut exiger qu'il entame, aliène ou gage ses biens, mobiliers ou immobiliers, pour financer la défense juridique de ses intérêts (ATF 124 I 1 consid. 2a; 120 Ia 179 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_147/2011 du 20 juin 2011).

2.1.3 Le minimum d'existence du droit des poursuites n'est pas déterminant à lui seul pour établir l'indigence au sens des règles sur l'assistance judiciaire. L'autorité compétente peut certes partir du minimum vital du droit des poursuites, mais elle doit tenir compte de manière suffisante des données individuelles du cas d'espèce (ATF 141 III 369 consid. 4.1; ATF 124 I 1 consid. 2a).

Seules les charges réellement acquittées sont susceptibles d'entrer dans le calcul du minimum vital (ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 4D_19/2016 précité consid. 4.1).

2.1.4 La part des ressources excédant ce qui est nécessaire à la satisfaction des besoins personnels doit être comparée aux frais prévisibles de la procédure pour laquelle l'assistance judiciaire est requise. Celle-ci n'est pas accordée lorsque le solde disponible permet d'amortir les frais judiciaires et d'avocat en une année au plus, pour les procès relativement simples, et en deux ans pour les autres (ATF 141 III 369 consid. 4.1; 135 I 221 consid. 5.1).

2.2
2.2.1
En l'espèce, le recourant reproche au Tribunal d'avoir calculé les revenus et les charges de toutes la famille alors qu'il aurait dû procéder en deux temps en calculant d'abord sa propre capacité financière à faire face aux frais du procès puis, après avoir constaté qu'il n'était pas en mesure de les assumer, examiner si les ressources de son père étaient suffisantes pour l'aider.

Le recourant bénéficie de rentes pour un montant total de 2'361 fr. et ses charges s'élèvent à 2'993 fr. par mois comprenant la prime d'assurance-maladie (456 fr.), les frais de repas hors domicile (242 fr.), les frais d'écolage (1'500 fr.), les frais de repas pris à l'extérieur (242 fr.), les frais de transport (45 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP majorée de 25% (750 fr.). Son déficit mensuel est ainsi de 632 fr. (2'361 fr. – 2'993 fr.). Il ne sera donc pas en mesure de couvrir les frais de la procédure.

Le frère du recourant bénéficie également de 2'361 fr. (783 fr. de rente AVS, 1'025 fr. de rente LPP et 553 fr. de rente d'orphelin) de revenus par mois et ses charges mensuelles s'élèvent à 1'543 fr. comprenant, la prime d'assurance-maladie (456 fr.), les frais de repas hors domicile (242 fr.), les frais d'écolage (50 fr.), les frais de repas pris à l'extérieur (242 fr.), les frais de transport (45 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP majorée de 25% (750 fr.). Il est vraisemblable que son solde de 818 fr. (2'361 fr.
– 1'543 fr.) par mois ne suffira pas à couvrir les frais de la procédure (environ 20'000 fr., soit 818 fr. x 24 mois).

2.2.2 Il n'est pas contesté par le recourant que son père est juridiquement tenu de lui apporter son aide financière, dès lors qu'il est encore en formation, reste à examiner si son père dispose de la capacité financière à lui venir financièrement en aide.

Le père du recourant perçoit des rentes totales de 7'512 fr. (2'390 fr. de rente AVS et 5'122 fr. de rente LPP) et ses charges admissibles s'élèvent à 3'262 fr. 65 comprenant les frais de logement qu'il a allégués devant l'Office des poursuites (895 fr. 50), qui doivent notamment couvrir les primes d'assurance du bâtiment ainsi que les charges de copropriété et comprend pour le solde un montant raisonnable de 400 fr. par mois de charges de chauffage et d'électricité pour le logement, la prime d'assurance-maladie (609 fr. 65), les frais de transport (70 fr.) et l'entretien de base selon les normes OP majorée de 25% (1'687 fr. 50). Il n'y a pas lieu de tenir compte de la facture des SIG alléguée pour 1'916 fr. par mois dès lors que cette facture n'a pas été produite et qu'un tel montant paraît disproportionné par rapport à une consommation régulière. C'est également avec raison que le premier juge n'a pas tenu compte d'une éventuelle saisie sur les rentes du père du recourant puisqu'elle n'a pas été rendue vraisemblable, ni dans son montant ni dans sa durée, aucun procès-verbal de saisie ayant été produit pas plus que la preuve de l'effectivité d'une telle saisie.

Le père du recourant dispose ainsi d'un solde mensuel de 4'249 fr. (7'512 fr. – 3'263 fr.), qui sera encore de 3'617 fr. (4'249 fr. – 632 fr.) une fois le déficit du recourant couvert. Ce montant permettra à celui-ci d'aider ses enfants à couvrir les frais de la procédure dans laquelle ceux-ci se retrouvent défendeurs à ses côtés du fait du décès de leur mère. A cet égard, on relèvera qu'à priori le père et les enfants pourraient avoir recours aux services du même avocat pour les représenter dans la procédure au fond dès lors que leurs intérêts semblent convergents.

A cela s'ajoute que le recourant n'a pas rendu vraisemblable qu'il lui serait impossible d'hypothéquer son bien immobilier, étant relevé que son frère étant également partie à la procédure ne devrait pas s'y opposer, pour disposer des liquidités afin d'assumer les honoraires d'avocat de la procédure.

Compte tenu de ce qui précède, c'est à juste titre que la vice-présidente du Tribunal de première instance a refusé d'octroyer le bénéfice de l'assistance juridique au recourant au motif que la condition d'indigence n'était pas réalisée.

3.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 7 décembre 2022 par A______ contre la décision rendue le 21 novembre 2022 par la vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/3023/2022.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Etude de Me Eve DOLON (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La vice-présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.