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Décisions | Assistance juridique

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AC/3273/2017

DAAJ/123/2022 du 15.12.2022 sur AJC/4582/2022 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3273/2017 DAAJ/123/2022

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU JEUDI 15 DECEMBRE 2022

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______ [VD],

 

 

contre la décision du 27 septembre 2022 de la vice-présidente du Tribunal de première instance.

 


EN FAIT

A.           a. Les époux B______ et A______ (ci-après : le recourant) sont les parents de C______, née le ______ 2011, et de D______, né le ______ 2012.

b. Le 13 mai 2016, B______ a formé une demande en divorce à l'encontre du recourant devant le Tribunal de première instance (C/1______/2016).

c. Par décision du 23 octobre 2017, A______ a été mis au bénéfice de l'assistance juridique pour sa défense dans le cadre de la procédure de divorce, limitée à la première instance.

d. Le 20 juin 2022, A______ a sollicité différentes mesures probatoires, notamment la production par la curatrice de représentation des enfants du journal d'appels de son opérateur, la production par son épouse de tous documents permettant de démontrer que ses enfants auraient tenté de le joindre par téléphone pour la période du 31 août 2021 à ce jour, son dossier AI complet, ainsi que l'audition de témoins, tous de sa famille.

e. Par ordonnance du 15 septembre 2022, le Tribunal de première instance a admis la production par B______ de la preuve du paiement du loyer du 15 novembre 2021 à février 2022, du certificat de salaire 2021 et des fiches de salaire 2022 de son compagnon ainsi que des charges de l'enfant E______.

Il a en revanche refusé d'ordonner la production du journal d'appels de l'opérateur de la curatrice de représentation dans la mesure où cette pièce avait déjà été produite, de même que la production de tous documents permettant de démontrer que les enfants auraient tenté de joindre A______ par téléphone, ces documents étant sans pertinence pour l'appréciation du litige eu égard aux explications déjà données tant par la curatrice de représentation que par B______ et aux pièces produites dans le cadre de la procédure. Il a encore refusé d'ordonner la production du dossier AI de B______, laquelle n'était pas nécessaire eu égard à l'expertise familiale à laquelle elle s'était soumise, à son évaluation psychiatrique par le Dr F______ ainsi qu'à l'étude de son dossier médicale dans le cadre de l'expertise.

Le Tribunal a également refusé d'écarter l'expertise de la procédure, les compétences des experts étant remplies tant en ce qui concernait les enfants que les parents.

Enfin, il a également refusé de procéder aux auditions de témoins sollicitées, soit la belle-sœur, la mère et le frère du requérant, dès lors que de nombreux rapports et comptes rendus du SEASP, des curateurs et de la curatrice de représentation des enfants avaient été établis et renseignaient suffisamment le Tribunal à ce sujet.

B.            Le 22 septembre 2022, le recourant a sollicité une extension de l'assistance juridique afin de pouvoir recourir contre cette ordonnance.

Il reproche au Tribunal d'avoir refusé d'auditionner les différents témoins susceptibles de témoigner du bon déroulement des droits de visite et du bien-être des enfants durant ces visites, ainsi que de ses capacités parentales et de ses aptitudes éducatives. Il fait également grief au Tribunal de ne pas avoir écarté l'expertise psychiatrique familiale établie par le CURML en date du 7 avril 2022, les experts, dont il remet en cause la légitimité, n'ayant pas eu accès à l'intégralité du dossier – un courrier au moins ne leur avait pas été transmis –, et n'ayant pas eu accès au dossier AI de B______. L'expertise était en outre remplie d'erreurs factuelles graves démontrant sa nullité et son manque de fiabilité. Enfin, il reproche encore au Tribunal de ne pas avoir ordonné la production de l'intégralité du dossier AI de B______.

A______ ne soutenait pas, dans sa requête, qu'il subirait un dommage difficilement réparable s'il n'était pas donné suite à ses réquisitions et ne s'est donc pas exprimé sur la recevabilité de son recours.

C.           Par décision du 27 septembre 2022, notifiée le 3 octobre 2022, la vice-présidente du Tribunal de première instance a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause du recourant était dénuée de chances de succès. En effet, le recours contre l'ordonnance du Tribunal du 16 septembre 2022 n'est recevable qu'à la condition que la décision puisse causer un préjudice difficilement réparable, au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC.

Or, le requérant n'alléguait pas qu'il subirait un tel préjudice difficilement réparable si les documents qu'il avait requis n'étaient pas produits et si l'expertise psychiatrique familiale n'était pas écartée, ces éléments pouvant, cas échéant, être contestés dans le cadre d'un appel de la décision finale. Le recourant n'indiquait pas non plus en quoi les documents requis, de même que la mise à l'écart de la procédure d'expertise, pourraient éventuellement l'avantager dans le cadre de la procédure de divorce, étant rappelé que même une administration des preuves contraire à la loi, cas échéant, ne constituait pas un préjudice difficilement réparable au sens du Message du Conseil fédéral.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 13 octobre 2022 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant, agissant en personne, conclut préalablement à la confirmation des points 1 et 2 de l'ordonnance du Tribunal de première instance du 16 septembre 2022 et, principalement, à l'annulation de la décision de l'assistance juridique du 27 septembre 2022 ainsi qu'à l'octroi de l'extension de l'assistance juridique, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité précédente.

Le recourant, lequel formule une cinquantaine de nouveaux allégués de faits à l'appui de son recours, indique produire des pièces nouvelles, numérotées 2 à 12, ces pièces n'étant toutefois pas annexées à son bordereau de pièces du 13 octobre 2022.

b. La vice-présidente du Tribunal de première instance a renoncé à formuler des observations.

c. La cause a été gardée à juger le 20 octobre 2022.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidente de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Par conséquent, les nombreux allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance de même que les pièces nouvelles, soit le bordereau de pièces relatif à son recours du 13 octobre 2022, lequel ne comportait par ailleurs pas les pièces indiquées en première page, ne seront pas pris en considération.

Il en va de même s'agissant de sa conclusion préliminaire, par laquelle il sollicite la confirmation partielle de l'ordonnance du Tribunal de première instance du 16 septembre 2022 (ORTPI/1006/2022), une telle conclusion n'étant pas recevable dans le cadre de la présente procédure de recours à l'encontre d'un refus d'extension de l'assistance juridique.

3.             3.1. Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).

Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

3.1.1. Selon l'art. 319 let. b ch. 2 CPC, le recours contre les ordonnances d'instruction de première instance est recevable lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable.

La notion de "préjudice difficilement réparable" est plus large que celle de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF relatif aux recours dirigés contre des décisions préjudicielles ou incidentes, dès lors qu'elle ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable (y compris financière ou temporelle), pourvu qu'elle soit difficilement réparable. L'instance de recours doit se montrer exigeante, voire restrictive, avant d'admettre l'accomplissement de cette dernière condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu (ATF 138 III 378 consid. 6.3; 137 III 380 consid. 2, SJ 2012 I 73; ACJC/327/2012 du 9 mars 2012, consid. 2.4; Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n°22 ad art. 319 CPC; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2010, n°2485). L'admissibilité d'un recours contre une ordonnance d'instruction – admettant ou rejetant des réquisitions de preuve – doit demeurer exceptionnelle et le seul fait que le recourant ne puisse se plaindre d'une violation des dispositions en matière de preuve qu'à l'occasion d'un appel sur le fond ne constitue pas en soi un préjudice difficilement réparable, sauf dans des cas exceptionnels à l'instar du refus d'entendre un témoin mourant ou du risque que les pièces dont la production est requise soient finalement détruites. Autrement dit, une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne constitue pas un préjudice difficilement réparable (ATF 137 III 380 consid. 1.2.1; 134 III 188 consid. 2.2, Jeandin, op. cit., n. 22B ad art. 319 CPC).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 134 III 426 consid. 1.2 par analogie). Lorsque la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, la décision incidente ne pourra être attaquée qu'avec le jugement rendu au fond (Message du Conseil fédéral relatif au CPC, FF 2006 6841, p. 6984).

3.2. En l'espèce, la décision contre laquelle le recourant veut recourir est une ordonnance d'instruction au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC. A______ reproche au Tribunal d'avoir refusé d'ordonner les auditions de témoins sollicitées et l'apport à la procédure de l'intégralité du dossier AI de son épouse, ainsi que de n'avoir pas écarté l'expertise psychiatrique familiale.

Le recourant ne démontre pas en quoi l'ordonnance querellée, en tant qu'elle écarte une offre de preuve par témoin, serait susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable. Il n'allègue ni ne rend vraisemblable aucune circonstance susceptible de compromettre la sauvegarde de ses droits s'il n'est pas procédé à bref délai à l'audition des témoins qu'il a sollicitée. Le refus d'entendre ces témoins pourra, le cas échéant et en cas de jugement défavorable pour le recourant, être contesté dans le cadre de l'appel contre le jugement au fond.

S'agissant des preuves que le Tribunal a refusé de produire ou d'écarter de la procédure, soit le dossier AI de son épouse ou l'expertise psychiatrique familiale, le recourant ne démontre pas qu'il subirait un préjudice difficilement réparable, puisqu'il conserve la possibilité – s'il devait persister à considérer que le Tribunal a écarté ou admis, à tort, un moyen de preuve pertinent pour l'issue du litige – de requérir que ces pièces soient produites, respectivement retranchées du dossier, dans le cadre d'un appel contre la décision à rendre sur le fond.

L'instance d'appel aura la possibilité d'administrer des preuves ou de renvoyer la cause en première instance pour complément d'instruction. Ainsi, le recourant ne subit pas de préjudice difficilement réparable du fait de l'ordonnance querellée, puisqu'il conserve ses moyens dans le cadre de l'appel contre le jugement au fond. La seule prolongation de la procédure par le fait que l'instance d'appel pourrait, le cas échéant, retourner le dossier au Tribunal pour complément d'instruction, ne cause pas de dommage difficilement réparable au recourant. Il en va de même des éventuels frais supplémentaires que pourrait engendrer un renvoi de la procédure devant le premier juge.

Partant, c'est à juste titre que le premier juge a considéré qu'un recours contre l'ordonnance de preuves était dénué de chances de succès au sens de l'art. 117 CPC.

Le recours, infondé, sera rejeté et la décision querellée confirmée.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé par A______ le 13 octobre 2022 contre la décision rendue le 27 septembre 2022 par la vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/3273/2017.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Notifie une copie de la présente décision à A______ (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.