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Décisions | Assistance juridique

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AC/582/2019

DAAJ/68/2022 du 09.08.2022 sur AJC/896/2022 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/582/2019 DAAJ/68/2022

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU MARDI 9 AOÛT 2022

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______, France,

 

contre la décision du 29 mars 2022 de la Vice-présidente du Tribunal de première instance.

 

 

 

 


EN FAIT

A.           a. Par décisions successives des 11 mars 2019 et 25 janvier 2021, A______ (ci-après : le recourant), dont le domicile se situe en France, a été admis au bénéfice de l'assistance juridique pour des procédures prud'homales à l'encontre de son ancien employeur B______ SA (C/1______/2019 et C/2______/2019), le réexamen de sa situation financière ayant été réservé à l'issue desdites procédures. Me C______, avocat, a été désigné pour défendre les intérêts du recourant.

Lors de sa mise au bénéfice de l'assistance juridique, le recourant ne disposait d'aucune ressource propre.

b. Le 8 novembre 2021, l'Etat de Genève a versé une indemnité de 6'795 fr. 15 à Me C______ pour l'activité déployée en faveur du recourant dans le cadre des procédures pour lesquelles l'assistance juridique a été accordée.

c. Par courrier du 1er décembre 2021, le greffe de l'assistance juridique a imparti au recourant un délai au 21 décembre 2021 pour lui fournir les éléments utiles au réexamen de sa situation financière.

Après l'octroi d'un délai supplémentaire, le recourant a fourni les informations et documents sollicités.

B.            Par décision du 29 mars 2022, remise selon le suivi des envois postaux au recourant le 14 avril 2022 après une première distribution infructueuse le 6 avril 2022, la Vice-présidente du Tribunal de première instance a condamné le précité à rembourser à l'État de Genève le montant versé à son avocat pour l'activité déployée en sa faveur à hauteur de 4'000 fr. et l'a invité, le cas échéant, à contacter les Services financiers du Pouvoir judiciaire pour convenir d'un arrangement de paiement par mensualités, l'art. 123 al. 1 CPC étant réservé s'agissant du solde de la dette d'un montant de 2'795 fr. 15.

Il a été retenu que la situation financière du recourant s'était améliorée, de sorte qu'il pouvait être exigé de lui qu'il rembourse partiellement les prestations obtenues de l'État, au besoin par mensualités, sans que cela ne porte atteinte à ses besoins fondamentaux. Les revenus mensuels nets moyens du recourant, qui exerçait une activité d'auto-entrepreneur installateur en réseau et télécommunication, s'élevaient en effet à 2'583 fr. 30, montant correspondant à son chiffre d'affaires du quatrième semestre 2021 après déduction des cotisations, contributions et impôts, pour des charges admissibles totalisant 1'780 fr. 05. Le recourant bénéficiait ainsi d'un solde disponible dépassant de 803 fr. 25 le minimum vital élargi qui lui permettait de rembourser sa dette de 6'795 fr. 15 à hauteur de 4'000 fr., le solde de 2'795 fr. 15 devant être remboursé dès qu'il serait en mesure de le faire.

Au pied de ladite décision figurait la mention suivante: "Voie de recours: La présente décision peut faire l'objet d'un recours formé par écrit auprès de la Présidence de la Cour de justice [ ] dans les 10 jours dès sa notification. La procédure applicable en matière d'assistance juridique étant la procédure sommaire, les délais ne sont jamais suspendus (art. 145 al. 3 CPC)".

C.           a. Aux termes d'un courrier remis à un office postal français le 22 avril 2022, parvenu à la Poste Suisse le 27 avril 2022 et réceptionné par le greffe de la Cour de justice le 28 avril 2022, le recourant a formé recours contre la décision du 29 mars 2022 de la Vice-présidente du Tribunal de première instance, concluant à son annulation et au réexamen de sa situation.

Le recourant a, à l'appui de son recours, fait valoir que, comme il l'avait précédemment exposé, sa situation financière était très difficile, son activité d'auto-entrepreneur ne lui offrant aucune garantie de revenus ni de pérennité de son entreprise. Il avait en conséquence été contraint de cesser son activité indépendante le 20 mars 2022 et ne percevait depuis plus aucun revenu. Il s'octroyait un congé non rémunéré de deux semaines, n'ayant plus pris de vacances depuis deux ans et devant terminer les démarches relatives à la cession de son entreprise, puis s'inscrirait au chômage. Il ignorait toutefois le montant de ses futures indemnités de chômage.

b. La Vice-présidente du Tribunal de première instance a renoncé à formuler des observations.

c. Par pli du 28 juin 2022, le recourant a été informé de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de remboursement prises par la Vice-présidente du Tribunal de première instance, rendues en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), peuvent faire l'objet d'un recours, écrit et motivé (art. 321 al. 1 CPC), auprès de la présidente de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC, 11 et 19 al. 5 RAJ) dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

Conformément à l’art. 10 let. a de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (CLaH65), les autorités suisses peuvent notifier des actes judiciaires en France directement par voie postale. Le droit suisse s'applique pour déterminer le moment de la notification de l'acte transmis par voie postale (arrêt du Tribunal fédéral 2D_23/2016 du 30 juin 2016 consid. 6.1).

Selon le droit suisse, en cas d’absence lors de la tentative de remise de l’envoi recommandé, la notification intervient le jour du retrait du pli au guichet ou, au plus tard, à l’échéance d’un délai de sept jours dès cette tentative et la remise d’un avis de retrait dans la boîte aux lettres pour autant que le destinataire devait s'attendre à recevoir une décision (cf. art. 138 al. 3 CPC; Bohnet, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 19 ad art. 138 CPC).

Le délai de recours commence à courir le lendemain de la notification de la décision attaquée (art. 142 al. 1 CPC). Si le dernier jour du délai de recours est un samedi ou un dimanche, le délai expire le premier jour ouvrable qui suit (art. 142 al. 3 CPC). Le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai soit au tribunal soit à l'attention de ce dernier, à la poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 143 al. 1 CPC).

Hormis celui du Liechtenstein, les offices postaux étrangers ne sont pas assimilés à un bureau de poste suisse; pour que le délai soit sauvegardé en cas de dépôt auprès d'un office postal étranger, il faut que le pli contenant l'écriture arrive le dernier jour du délai au plus tard ou que la Poste Suisse en prenne possession avant l'expiration du délai (arrêts du Tribunal fédéral 5A_427/2018 du 2 juillet 2018 consid. 4.1; 4A_468/2013 du 21 octobre 2013 consid. 3.1). Lorsque le destinataire d'une décision est domicilié à l’étranger, l’indication des voies de droit doit mentionner que le mémoire de recours doit être remis, au plus tard le dernier jour du délai, à La Poste suisse ou auprès d’une représentation diplomatique ou consulaire suisse. A défaut, si le recourant n'avait pas connaissance de cette règle, l'acte déposé dans les délais à la poste étrangère est réputé remis en temps utile, une partie ne devant pas subir de préjudice du fait d'une notification irrégulière d'une décision (ATF 145 IV 259 consid. 1 = JdT 2019 IV 323; Abbet, Petit commentaire CPC, 2020, n. 4 ad art. 143 CPC).

1.2 En l'espèce, le recourant, qui devait s'attendre à recevoir un acte judiciaire compte tenu de l'interpellation du greffe le 1er décembre 2021, était absent lors de la distribution, le 6 avril 2022, à son domicile en France, du courrier recommandé contenant la décision attaquée. Il convient en conséquence de considérer que celle-ci a été notifiée au plus tard à l'expiration d'un délai de sept jours suivant la tentative infructueuse, soit le 13 avril 2022, peu importe à cet égard que le recourant n'ait retiré le courrier recommandé que le lendemain. Le délai de recours de dix jours a ainsi commencé à courir le 14 avril 2022 et est arrivé à échéance le 25 avril 2022, le 24 avril 2022 étant un dimanche. Or, le recours, déposé auprès d'un office postal français le 22 avril 2022, n'est parvenu à la Poste Suisse que le 27 avril 2022, soit après l'échéance du délai de recours. Le recours est dès lors tardif.

Cela étant, la décision attaquée ne mentionne pas dans les voies de droit que le recours devait être remis, au plus tard le dernier jour du délai, à La Poste suisse ou auprès d’une représentation diplomatique ou consulaire suisse. Or, compte tenu de la domiciliation en France du recourant, cette mention aurait dû être présente. Ainsi, dans la mesure où le recourant comparaît en personne, il y a lieu d'admettre, conformément à la jurisprudence susmentionnée, que son recours, remis dans le délai de 10 jours à une poste étrangère, a été introduit en temps utile.

Le recours ayant pour le surplus été déposé auprès de l'autorité compétente dans la forme prescrite par la loi, sa recevabilité sera admise.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515, p. 453).

2. À teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours.

Par conséquent, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance, soit ceux en relation avec la modification de sa situation financière, ne seront pas pris en considération.

3. 3.1 D'après l'art. 123 al. 1 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ, une partie est tenue de rembourser l'assistance juridique dès qu'elle est en mesure de le faire. L'art. 19 al. 3 RAJ précise que si la situation de la personne bénéficiaire s'est améliorée ou si elle est de toute manière en mesure d'effectuer un paiement, le paiement de l'intégralité des prestations de l'État peut être exigé.

La capacité du bénéficiaire de l'assistance juridique de rembourser tout ou partie des prestations effectuées par l'Etat doit être appréciée selon les mêmes critères que l'indigence au sens de l'art. 117 let. a CPC. Un remboursement peut ainsi être exigé lorsque, et dans la mesure où, la situation du bénéficiaire s'est améliorée depuis la décision d'octroi de l'assistance judiciaire de manière à ce que l'on puisse attendre de sa part qu'il s'acquitte, serait-ce partiellement ou par acomptes, du montant de l'assistance fournie (Wuffli/Fuhrer, Handbuch unentgeltliche Rechtspflege im Zivilprozess, 2019, p. 362 n. 1039; Huber, in Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], Kommentar, 2ème éd. 2016, n. 8 ad art. 123 CPC; Bühler, in Commentaire bernois, Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], vol I, 2012, n. 7 ad art. 123 CPC).

3.2 En l'espèce, si le recourant se prévaut de la précarité de sa situation financière en raison de son statut d'indépendant, il ne conteste toutefois pas les montants retenus par l'autorité précédente pour établir son budget.

Par ailleurs, les difficultés liées à sa situation professionnelle ont été prises en compte puisque seul le remboursement d'un montant de 4'000 fr. a été demandé alors que sa dette totale s'élève à 6'795 fr. 15.

Enfin, comme susmentionné (cf. consid. 2), les modifications alléguées par le recourant relativement à sa situation financière ne peuvent être prises en compte s'agissant d'éléments nouveaux.

Il s’ensuit que la Vice-présidente du Tribunal de première instance n'a pas violé la loi en condamnant le recourant au remboursement du montant de 4’000 fr.

Partant, le recours, infondé, sera rejeté.

L'attention du recourant sera toutefois attirée sur la possibilité de payer la somme due par mensualités, en convenant d'un arrangement de paiement avec les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

4. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens, le recourant n'en sollicitant au demeurant pas l'octroi.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 29 mars 2022 par la Vice-présidente du Tribunal de première instance dans la cause AC/582/2019.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.