Décisions | Chambre civile
ACJC/1479/2024 du 25.11.2024 sur JTPI/13140/2024 ( SDF )
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/189/2024 ACJC/1479/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU LUNDI 25 NOVEMBRE 2024 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 28 octobre 2024, représenté par Me Patricia MICHELLOD, avocate, rue Nicole 3, Case postale 1075, 1260 Nyon 1,
et
Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Nicolas PERRET, avocat, route du Stand 76, case postale 2467, 1260 Nyon 2.
Vu, EN FAIT, le jugement JTPI/13140/2024 du 28 octobre 2024, par lequel le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l’union conjugale, a autorisé les époux B______ et A______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à l’épouse la jouissance exclusive du domicile conjugal, charge à elle d’en assumer les frais courants et les intérêts hypothécaires (ch. 2), condamné A______ à quitter le domicile conjugal au plus tard le 2 février 2025 et a autorisé B______ à requérir l’expulsion par la force publique, dès le 3 février 2025, moyennant l’intervention d’un huissier judiciaire (ch. 3), arrêté et réparti les frais judiciaires (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) ;
Que les parties sont les parents de trois enfants majeurs, dont les deux plus jeunes ont manifesté le souhait de continuer de vivre avec leur mère après la séparation parentale ;
Que le Tribunal a considéré, faisant usage de son pouvoir d’appréciation, que la jouissance du logement conjugal devait revenir à l’épouse, ce qui lui permettrait de continuer d’y vivre avec les deux plus jeunes enfants des parties ;
Que s’agissant de la situation financière des parties, le Tribunal a retenu que l’épouse travaillait à 100% en qualité d’enseignante ; que l’époux était employé pour sa part au sein de [l'organisation internationale] C______ ; que le salaire perçu par l’épouse est supérieur à celui réalisé par l’époux ;
Attendu que le 8 novembre 2024 A______ a formé appel contre le jugement du 28 octobre 2024, concluant à l’annulation des chiffres 1, 2, 3, 4 et 5 de son dispositif et cela fait à l’attribution en sa faveur de la jouissance exclusive du domicile conjugal ;
Que préalablement, l’appelant a conclu à l’octroi de l’effet suspensif ;
Que sur ce point, il a soutenu que l’intimée occupait le studio situé au dernier étage de la maison familiale ; qu’à défaut d’octroi de l’effet suspensif, il risquait de subir un préjudice difficilement réparable ; qu’il craignait en effet que l’intimée ne cesse de s’acquitter des intérêts hypothécaires « dans une optique purement chicanière » et cesse d’entretenir l’immeuble et le jardin ; qu’un déménagement pèserait par ailleurs sur ses finances et était susceptible de mettre en péril son projet de rachat de la maison, ce qui entraînerait des conséquences dommageables tant pour lui que pour les enfants ;
Que dans ses écritures du 22 novembre 2024, l’intimée a conclu au rejet de la requête d’effet suspensif ;
Qu’elle a soutenu que l’appelant avait quitté le domicile conjugal le 12 novembre 2024 et n’y était pas revenu, sans indiquer où il résidait ; que lorsqu’il s’y trouvait encore, il n’utilisait pas la maison mais demeurait cloîtré dans sa chambre ;
Considérant, EN DROIT, que l'appel n'a pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC), telles les mesures protectrices de l'union conjugale (ATF 134 III 667 consid. 1.1) ;
Que toutefois, l'exécution des mesures provisionnelles peut exceptionnellement être suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable (art. 315 al. 5 CPC) ;
Que saisie d'une demande d'effet suspensif au sens de l'art. 315 al. 5 CPC, l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références citées; 137 III 475 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_514/2012 du 4 septembre 2012 consid. 3.2.2) ;
Que l'autorité cantonale doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels ; elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2015 du 28 août 2015 consid. 5) ;
Qu’en l’espèce, il appartenait à l’appelant de rendre vraisemblable qu’à défaut d’octroi de l’effet suspensif, il risquerait de subir un dommage difficilement réparable, ce qu’il n’a pas fait ;
Que l’appelant s’est en effet contenté d’affirmer que l’intimée, dans un but purement chicanier, pourrait décider de ne pas s’acquitter des intérêts hypothécaires ;
Que l’intimée exerce à plein temps le métier d’enseignante et perçoit de ce fait un salaire supérieur à celui de l’appelant, qui devrait lui permettre de s’acquitter des intérêts hypothécaires ; qu’il sera également rappelé que les enfants des parties ou à tout le moins certains d’entre eux n’ont pas encore définitivement quitté le domicile familial, de sorte qu’il est douteux que l’intimée veuille prendre le risque d’une vente forcée de celui-ci ;
Que l’appelant n’expose pas en quoi le fait que l’intimée, par hypothèse, cesse d’entretenir l’immeuble et le jardin, le temps que la Cour rende son arrêt, serait susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable ;
Qu’enfin, la question de l’éventuel rachat, par l’appelant, de la part de copropriété de l’intimée sera examinée dans le cadre d’une éventuelle procédure de divorce, de sorte que l’argument, non établi, selon lequel un déménagement de l’appelant mettrait en péril son projet de rachat ne saurait être pris en considération à ce stade ;
Qu’au vu de ce qui précède, la requête de restitution de l’effet suspensif sera rejetée ;
Qu’il sera statué sur la question des frais et dépens dans l’arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).
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La Chambre civile :
Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire du jugement entrepris :
Rejette la requête tendant à suspendre le caractère exécutoire du jugement JTPI/13140/2024 rendu le 28 octobre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/189/2024.
Dit qu'il sera statué sur les frais et dépens de la présente décision dans l’arrêt au fond.
Siégeant :
Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente ; Madame Emilie FRANÇOIS, greffière.
Indications des voies de recours :
La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF - RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.