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Décisions | Chambre civile

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C/15297/2022

ACJC/195/2024 du 13.02.2024 sur JTPI/8961/2023 ( SDF ) , CONFIRME

Descripteurs : PROTECTION DE L'UNION CONJUGALE;LOGEMENT DE LA FAMILLE;OBLIGATION D'ENTRETIEN;CONJOINT
Normes : CC.176.al1.ch1; CC.176.al2; CPC.107.al1.letf
En fait
En droit
Par ces motifs

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15297/2022 ACJC/195/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 13 FEVRIER 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 16ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 15 août 2023, représenté par Me Karin GROBET THORENS, avocate, GTHC Avocates,
rue Verdaine 13, case postale, 1211 Genève 3,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par
Me Mourad SEKKIOU, avocat, rue Rodolphe-Toepffer 8, 1206 Genève.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/8961/2023 rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale le 15 août 2023, notifié aux parties le 18 août suivant, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a attribué à B______ la jouissance exclusive de la villa conjugale (ch. 1 du dispositif), condamné A______ à contribuer à l’entretien de son épouse par le versement en sa faveur, par mois et d’avance, d’une contribution d’entretien de 1'775 fr. avec effet au 1er février 2023, ainsi que le paiement direct, en mains des tiers concernés, de toutes les charges courantes liées à la villa conjugale (ch. 2) et condamné l'époux, pour le cas où il résilierait le contrat de travail conclu par le truchement de C______ Sàrl avec B______, à verser à celle-ci une contribution d’entretien supplémentaire de 1'405 fr. par mois, due à compter du mois suivant celui pour lequel serait versé son dernier salaire (ch. 3).

Le premier juge a arrêté les frais judiciaires à 1'000 fr., mis à la charge des parties pour moitié chacune et compensés avec l’avance de 200 fr. fournie par B______, celle-ci étant condamnée à payer 300 fr. et A______ 500 fr. à l’Etat de Genève, soit, pour lui, les Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 4), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B. a. Par acte expédié le 28 août 2023 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a appelé de ce jugement, dont il a sollicité l'annulation des chiffres 1 à 3 de son dispositif.

Il offre de verser une contribution à l'entretien de son épouse de 1'360 fr. par mois, sous imputation des sommes déjà payées à ce titre, et réclame l'attribution en sa faveur de la jouissance du domicile conjugal, avec suite de frais judiciaires et dépens.

A cette occasion, il a produit des pièces nouvelles, à savoir les comptes de la société C______ Sàrl pour l'année 2022 (pièce B) et l'avis de taxation de cette société pour l'année 2022 établi en juin 2023 (pièce C).

Préalablement, il a requis la suspension du caractère exécutoire du jugement, requête qui a été admise par la Cour par ACJC/1182/2023 du 14 septembre 2023 s'agissant du chiffre 2 du dispositif en tant qu'il porte sur l'obligation d'entretien pour la période allant du 1er février au 14 août 2023.

b. B______ a conclu à l'irrecevabilité de la pièce B et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. Par réplique spontanée du 2 octobre 2023, A______ a fait valoir un fait nouveau et produit de nouvelles pièces, soit des documents datés de septembre 2023 relatifs à la résiliation du bail d'un appartement loué à un tiers et dont l'épouse est propriétaire (pièces D et E), ainsi que des justificatifs de paiements de charges en faveur de son épouse pour les mois de février à septembre 2023 (pièces F à M). Il a persisté dans ses conclusions.

d. Par duplique spontanée du 9 octobre 2023, B______ a conclu à l'irrecevabilité de la réplique spontanée précitée et des pièces F à L. Elle a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions.

e. Par dupliques spontanées des 23 et 26 octobre 2023, les parties ont persisté dans leurs explications et conclusions respectives.

f. Elles ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courriers du 15 novembre 2023.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. A______, né le ______ 1953, et B______, née le ______ 1961, tous deux de nationalité suisse, se sont mariés le ______ 1996 à Genève, sans conclure de contrat de mariage.

Leurs deux enfants, aujourd’hui majeurs, sont respectivement nés le ______ 1997 et le ______ 2001, et ne vivent plus avec eux.

b. Depuis la prise de sa retraite en janvier 2019, A______ habite principalement dans un chalet en Valais, pour ne revenir séjourner que quelques jours par mois dans la villa conjugale à Genève, où l’épouse est demeurée.

c. Par requête déposée au Tribunal le 12 août 2022 (au moyen du formulaire mis à disposition par l'Office fédéral de la justice), valablement complétée le 6 février 2023, B______ a sollicité le prononcé de mesures protectrices de l’union conjugale pour une durée indéterminée.

Elle a, s'agissant des conclusions litigieuses en appel, conclu à ce que les époux soient autorisés à vivre séparés, à ce que la jouissance du domicile conjugal lui soit attribuée, à ce que son époux soit condamné à lui verser une contribution à son entretien de 4'000 fr. par mois, ainsi qu'à prendre en charge les frais d'entretien et les intérêts hypothécaires du domicile conjugal, la contribution devant être augmentée à 5'500 fr. si elle devait être licenciée par C______ Sàrl.

d. Dans sa réponse écrite du 27 mars 2023, A______ a offert de verser une contribution à l'entretien de son épouse de 500 fr. par mois.

e. Le Tribunal a entendu les parties à trois reprises en audiences des 6 octobre 2022, 8 février 2023 et 10 mai 2023. Lors de cette dernière, elles ont plaidé, répliqué et dupliqué par oral; l'épouse a réduit ses prétentions en entretien à 2'910 fr. par mois pour autant qu'elle continuait à percevoir le salaire versé par C______ Sàrl, respectivement à 4'410 fr. en cas de licenciement; les parties, ont, pour le surplus, persisté dans leurs conclusions respectives.

La cause a été gardée à juger à l'issue de celle-ci.

f. Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a attribué la jouissance exclusive du domicile conjugal à l'épouse, au motif que A______ n'avait pas rendu vraisemblable qu’il était confronté à un manque de liquidités nécessitant d’être comblé au moyen de la vente à bref délai de cette villa et qu'il était également propriétaire, seul ou avec son épouse, d'autres immeubles en Valais pouvant être vendus en cas de nécessité financière. S'agissant de l'épouse, elle ne disposait en l’état pas d'une solution de logement alternative ni de revenus suffisants pour prendre à bail un nouveau logement à Genève. L’usage de la villa apparaissait ainsi plus utile à cette dernière et il semblait plus raisonnable d’attendre de l'époux qu'il continue de résider principalement ou exclusivement en Valais, que d’exiger en l’état de celle-là qu’elle entreprenne de déménager du logement conjugal.

S'agissant de l'entretien de l'épouse, le premier juge a retenu que A______ disposait d'un montant mensuel d'environ 3'550 fr. (6'375 fr. de revenus, comprenant 10'000 fr. de bénéfice net annuel de C______ Sàrl pour 2'825 fr. de charges), et que B______ faisait face à un déficit de l'ordre de 555 fr. par mois (1'405 fr. de revenus pour 1'960 fr. de charges), de sorte que l'épouse pouvait prétendre à la couverture de son déficit, ainsi qu'à un montant de 1'220 fr. à titre de la moitié de l'excédent ([(7'780 fr. de revenus du couple – 4'785 fr. de charges du couple) – 555 fr.] / 2), soit une contribution à son entretien de 1'775 fr. par mois (555 fr. + 1'220 fr.) avec effet au 1er février 2023, date proche de celle à laquelle B______ avait formulé ses conclusions en entretien. Cette contribution devait être majorée de 1'405 fr. par mois, correspondant au salaire versé à l'épouse par C______ Sàrl, pour le cas où A______ résilierait son contrat de travail y relatif. Cette contribution ayant pour effet d’égaliser les ressources mensuelles disponibles des parties, il leur appartiendrait de s’entendre avec leurs enfants majeurs, singulièrement avec l’aînée, en vue de répartir entre eux l’entretien qu’ils estimaient leur être encore dû.

D. La situation personnelle et financière des parties se présente de la manière suivante :

a. Les époux sont copropriétaires pour moitié chacun de :

- un chalet à D______ (Valais), composé de deux appartements séparés remis à bail à des tiers pour une durée indéterminée, chacun pour un loyer de 1'250 fr. par mois, et

- un second chalet à D______, composé de l’appartement où l'époux réside à titre principal et d’un studio remis à bail à un tiers pour un loyer de 780 fr. par mois.


 

L’époux est seul propriétaire de :

- la villa conjugale, dans laquelle les époux sont officiellement domiciliés depuis 1997, et

- un appartement à E______ (Valais), remis à bail à un tiers pour une durée indéterminée pour un loyer de 1'250 fr. par mois.

L’épouse est, quant à elle, seule propriétaire d’un autre appartement à E______, remis à bail à un tiers pour une durée indéterminée pour un loyer de 1'280 fr. par mois, dont le bail a été résilié par le locataire pour le 31 décembre 2023.

b. En mars 2019, l’époux a constitué la société C______ Sàrl, ayant son siège à l’adresse de la villa conjugale, dont il est l’unique associé, gérant et signataire, par le truchement de laquelle :

-     sont encaissés la totalité des revenus locatifs précités, totalisant 5'810 fr. par mois, tirés des immeubles dont les époux sont ensemble ou séparément propriétaires,

-     sont payées la totalité des charges (y compris les intérêts hypothécaires), dont la nature, la composition et les montants totaux sont ignorés, relatifs auxdits immeubles remis à bail, et

-     est versé à l’épouse un salaire, tel que déclaré et établi par certificat ad hoc, de l’ordre de 1'405 fr. nets par mois.

Aucun des deux époux n’entend, en l’état, remettre en cause cette manière de structurer et gérer en commun leurs patrimoines, leurs charges et leurs revenus immobiliers par l'intermédiaire de C______ Sàrl.

Courant 2022, les époux ont envisagé, voire se sont mis d’accord sur le principe, de mettre en location la villa conjugale pour s’en partager le loyer, moyennant prise à bail par l’épouse d’un autre logement, ce dont ils avaient informé le Tribunal lors de l'audience du 6 octobre 2022.

Tous deux ont depuis lors changé d’avis concernant le sort de la villa, que l’époux souhaite désormais vouloir vendre afin de disposer de plus de liquidités et que l’épouse refuse de quitter. Lors de la dernière audience tenue par le premier juge, cette dernière a expliqué avoir son centre de vie à Genève, ce qui n'a pas été contesté par A______.

c. B______ a arrêté toute activité professionnelle à la naissance des enfants. Plus tard, elle a travaillé quelques heures par semaine en tant qu'animatrice au parascolaire, activité dont elle a été licenciée il y a plusieurs années.

Le salaire d'environ 1'405 fr. nets par mois qu'elle perçoit de C______ Sàrl constitue son seul revenu, abstraction faite des allocations de formation destinées à son fils cadet majeur. Elle a expliqué qu'elle effectuait de petites tâches administratives pour C______ Sàrl (ce qui est admis par son époux), mais que son salaire correspondait essentiellement au loyer perçu pour la location de son appartement à E______.

Le Tribunal a arrêté son minimum vital selon le droit de la famille à environ 1'960 fr. par mois, comprenant la prime d'assurance-maladie LAMal (530 fr.) et LCA (190 fr.), ses frais de transports publics (40 fr.) et le montant de base selon les normes OP (1'200 fr.).

Lors de l'audience tenue le 6 octobre 2022 par le Tribunal, elle a déclaré qu'elle ne percevait pas d'autre montant de son époux, lequel "pa[yait] les charges quotidiennes".

Selon la déclaration fiscale pour l'année 2021, B______ ne dispose d'aucune fortune mobilière.

d. A______ perçoit, depuis sa retraite prise en janvier 2019, un total de rentes AVS et LPP - abstraction faite de celles destinées à son fils cadet majeur - de l’ordre de 5'505 fr. nets par mois, et un salaire d'environ 40 fr. nets par mois pour une activité accessoire.

Le Tribunal a retenu qu'à ces revenus s’ajoutait le bénéfice net de C______ Sàrl qu'il a arrêté à environ 10'000 fr. par année, soit 830 fr. par mois, sur la base des déclarations de l'époux lors de l'audience tenue par le Tribunal le 6 octobre 2022, selon lesquelles le bénéfice net de la société s'élevait à "un peu moins de CHF 10'000.- par an". Dans ses écritures de première instance du 27 mars 2023, il a allégué que la société n'avait généré que très peu de bénéfices au cours des dernières années et qu'il n'avait perçu aucun revenu à ce titre. A l'appui de celles-ci, il a, notamment, produit les comptes de la société pour l'année 2021 (faisant état d'un bénéfice net de 9'820 fr. 03), un courrier établi le 25 février 2023 par la fiduciaire de la société, selon lequel la société avait essuyé une perte de 13'074 fr. 49 en 2020 (en raison d'importants travaux de rénovation sur un des chalets), puis un bénéfice net de 9'820 fr. 03 en 2021 et de 4'100 fr. 11 en 2022, et la déclaration fiscale des époux pour l'année 2021, dans laquelle n'apparaît aucun revenu tiré de l'activité de la société C______ Sàrl.

En première instance, son minimum vital selon le droit de la famille a été arrêté à 2'825 fr. par mois, comprenant les frais relatifs au domicile conjugal non payés par C______ Sàrl (la prime d'assurance-bâtiment et RC-ménage (125 fr.), les frais de SIG pour le gaz de chauffage (455 fr.), les frais d'entretien des drains, fosses et canalisations (45 fr.) et de la chaudière à gaz (35 fr.), soit un total de 660 fr., mais retenu au montant admis par l'époux de 590 fr.), les frais relatifs au chalet qu'il occupe à D______ non payés par C______ Sàrl (la prime d'assurance-bâtiment et ménage (85 fr.), les impôts fonciers communaux et cantonaux (25 fr.), la taxe de séjour (75 fr.) et les diverses taxes communales (55 fr. par mois), soit un total de 240 fr.), la prime d'assurance-maladie LAMal (530 fr.), la prime d'assurance-protection juridique (30 fr.), les frais de transports publics (35 fr.), son forfait de télécommunication (50 fr.), les impôts (150 fr.) et le montant de base OP
(1'200 fr.).

Dans ses écritures de réponse du 27 mars 2023, l'époux a allégué qu'il s'acquittait de l'intégralité des charges de son épouse et des enfants majeurs du couple (sans produire de justificatifs) et qu'au vu de ses revenus insuffisants, il était contraint de puiser dans sa fortune, constituée majoritairement de l'héritage de sa mère. Il ressort des pièces produites (déclaration fiscale pour l'année 2021 et relevé bancaire pour le mois de mai 2023) qu'il disposait d'une fortune mobilière de 124'000 fr. à la fin de l'année 2021 (20'000 fr. de parts sociales et 104'000 fr. de liquidités) et qu'un de ses comptes présentait à cette date un solde d'environ 85'000 fr., alors qu'il n'était plus créditeur que d'environ 54'000 fr. au début du mois de mai 2023.

e. S'agissant des deux enfants majeurs des époux, l’aînée, âgée de 26 ans, poursuit ses études en quatrième année de ______ et n'est pas indépendante financièrement. Son père a allégué pourvoir à son entretien à hauteur d'environ 2'780 fr. par mois, ce qu’aucun élément de preuve ne vient étayer.

Le cadet, âgé de 23 ans, étudie à l'école F______; le Tribunal a retenu qu'il est vraisemblablement en mesure de pourvoir à son entretien au moyen des allocations de formation (415 fr.) et les rentes AVS et LPP (1'490 fr.), dont il allait bénéficier jusqu’à l’âge de 25 ans.

Lors de la dernière audience tenue par le Tribunal, l'épouse a confirmé que les charges liées aux enfants étaient prises en charge par le père, elle-même reversant à son fils les allocations qu'elle percevait pour lui; elle a estimé que son époux s'acquittait d'environ 1'500-1'600 fr. pour chacun d'eux.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC, dans les causes dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Dès lors qu'en l'espèce, le litige porte sur le montant de la contribution à l'entretien de l'épouse, il est de nature pécuniaire (ATF 133 III 393 consid. 2).

En l'espèce, en vertu de l'art. 92 al. 2 CPC, la capitalisation du montant de la contribution d'entretien restée litigieuse au vu des dernières conclusions des parties devant le premier juge excède 10'000 fr.

Les jugements de mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de 10 jours à compter de la notification de la décision motivée ou de la notification postérieure de la motivation (art. 239, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC).

L'appel ayant été formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi et devant l'autorité compétente (art. 130 al. 1 et 314 al. 1 CPC), il est recevable.

1.2 Il en est de même des écritures subséquentes des parties, ces dernières ayant dûment fait usage de leur droit inconditionnel de répliquer dans les dix jours suivant la notification de l'écriture précédente (art. 316 al. 2 CPC; sur le droit inconditionnel à la réplique spontanée : cf. ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_120/2019 du 21 août 2019 consid. 2.2; 5A_174/2016 du 25 mai 2016 consid. 3.2).

1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La présente cause est soumise aux maximes de disposition (art. 58 al. 1 CPC; ATF 128 III 411 consid. 3.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_693/2007 du 18 février 2008 consid. 6) et inquisitoire limitée (art. 272 CPC; ATF 129 III 417 précité; arrêt du Tribunal fédéral 5A_245/2019 du 1er juillet 2019 consid. 3.2.1).

1.4 Les mesures protectrices de l'union conjugale sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve et limitation du degré de la preuve à la simple vraisemblance. Il suffit donc que les faits soient rendus plausibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_508/2011 du 21 novembre 2011 consid. 1.3; ATF 127 III 474 consid. 2b/bb). Il incombe à chaque époux de communiquer tous les renseignements relatifs à sa situation personnelle et économique, accompagnés des justificatifs utiles, permettant ensuite d'arrêter la contribution en faveur de la famille (Bräm/Hasenböhler, Zürcher Kommentar, 1998, n. 8-10 ad art. 180 CC).

La cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2010, n. 1901; Haldy, La nouvelle procédure civile suisse, 2009, p. 71). Tous les moyens de preuve sont en principe admissibles (art. 254 al. 2 let. c CPC), étant précisé que ceux dont l'administration ne peut intervenir immédiatement ne doivent être ordonnés que dans des circonstances exceptionnelles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_905/2011 du 28 mars 2012 consid. 2.5).

1.5 La Cour applique le droit d'office (art. 57 CPC). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante et, partant, recevable. Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

1.6 L'appelant a produit de nouvelles pièces en appel.

L'intimée conclut à l'irrecevabilité du moyen invoqué par l'appelant consistant à dire qu'il participerait à l'entretien quotidien de son épouse, dès lors qu'il n'aurait pas été invoqué en première instance, ainsi qu'à l'irrecevabilité des nouvelles pièces produites en appel par son époux, dès lors que les pièces B et F à I auraient pu être produites devant le premier juge et que les pièces J à L auraient pu être déposées avec le mémoire d'appel. Elle allègue, en appel, que son époux fait valoir pour la première fois en appel qu'il assumerait l'entretien quotidien de son épouse. Elle allègue également qu'elle vivrait dans le "dénuement le plus total", devant "survivre" avec le faible salaire qu'elle perçoit de C______ Sàrl.

L'appelant considère, pour sa part, que les pièces F à L - qui tendent à démontrer qu'il a pourvu à l'entretien de son épouse - sont recevables, dès lors qu'avant de répondre à l'appel, cette dernière n'était jamais revenue sur ses déclarations du 6 octobre 2022 devant le premier juge selon lesquelles elle avait admis que l'appelant payait ses charges quotidiennes. Lesdites pièces attesteraient du contraire et permettraient de mettre à jour la mauvaise foi de l'intimée.

1.6.1 L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Ces conditions sont cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1).

S'agissant des vrais nova ("echte Noven"), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1 et les références citées). Un vrai nova est introduit sans retard s'il l'est dans un délai de dix jours, respectivement d'une à deux semaines (arrêt du Tribunal fédéral 4A_707/2016 du 29 mai 2017 consid. 3.3.2). Une partie qui dispose déjà d'un délai pour déposer un mémoire peut attendre la fin de ce délai, car la procédure ne s'en trouve pas retardée (arrêts du Tribunal fédéral 5A_790/2016 du 9 août 2018 consid. 3.4; 4A_707/2016 précité consid. 3.3.2).

En ce qui concerne les pseudo nova ("unechte Noven"), à savoir les faits et moyens de preuves qui étaient déjà survenus à la fin de l’audience des débats principaux de première instance, il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

Des faux nova sont excusables lorsque le comportement de la partie adverse en première instance a permis de croire qu'il n'était pas nécessaire de les présenter (arrêts du Tribunal fédéral 5A_697/2020 du 22 mars 2021 consid. 3; 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 5.4; Bastons Bulleti, PC- CPC, 2021, n° 14 ad art. 317 CPC) ou lorsqu'un thème est abordé pour la première fois en appel (arrêts du Tribunal fédéral 5A_621/2012 précité; 4A_360/2017 du 30 novembre 2017 consid. 8.1; 4A_305/2012 du 6 février 2013 consid. 3.3; Bastons Bulletti, ibid.).

1.6.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que l'avis de taxation de C______ Sàrl établi en juin 2023 (pièce C), les documents relatifs à la résiliation de la location de l'appartement valaisan de l'épouse datant de septembre 2023 (pièces D et E) et les pièces justificatives relatives à des paiements en faveur de cette dernière intervenus en septembre 2023 (pièce M) n'auraient pu être produits en première instance et sont donc recevables.

S'agissant des comptes de la société C______ Sàrl pour l'année 2022 (pièce B), l'appelant ne prétend pas avoir été dans l'impossibilité de les établir et de les produire avant que la cause ait été gardée à juger par le Tribunal le 10 mai 2023, de sorte que cette pièce est irrecevable, faute pour ce dernier d'avoir fait preuve de la diligence requise.

La question de la recevabilité des pièces F à L et du moyen y relatif peut rester ouverte, ceux-ci n'étant pas en tout état pas utiles pour la solution du litige, tel que cela ressort de ce qui suit (cf. infra consid. 1.7.3 et 3.5).

1.7 L'appelant offre de verser une contribution à l'entretien de son épouse de 1'360 fr. et sollicite que soient imputées les sommes déjà versées à ce titre.

Il considère que l'ajout dans le dispositif de l'imputation des montants déjà versés pour l'entretien de son épouse ne la prive pas de ce à quoi elle aurait droit et vise à prévenir qu'il ne soit contraint de payer les mêmes frais à double au vu du dies a quo fixé par le Tribunal au 1er février 2023.

1.7.1 La Cour examine d'office la recevabilité des conclusions nouvelles en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2016, n. 26 ad art. 317 CPC).

Selon l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b). L'art. 227 al. 1 CPC autorise la modification de la demande si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et présente un lien de connexité avec la dernière prétention ou, à défaut d'un tel lien, si la partie adverse consent à la modification de la demande.

Une réduction (ou une restriction) des conclusions ne constitue en revanche pas une conclusion nouvelle au sens de l'art. 317 al. 2 CPC. Elle est donc admissible en tout temps, soit jusqu'aux délibérations (arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.2.1). Il en va notamment ainsi lorsqu'une partie conclut en première instance à ce qu'aucune contribution d'entretien ne soit allouée et ne demande en appel plus qu'une limitation de la contribution dans le temps (arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2013 du 26 avril 2013 consid. 3.2 résumé in CPC Online, art. 317 CPC).

1.7.2 Des contributions doivent être déduits les montants dont l'intimé s'est d'ores et déjà acquitté à titre d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral 5A_454/2017 du 17 mai 2018 consid. 5.3, non publié in ATF 144 III 377).

1.7.3 In casu, dès lors que l'appelant a offert de verser une contribution de 500 fr. par mois en première instance, sa conclusion d'appel tendant à ce que la contribution d'entretien fixée par le premier juge à 1'775 fr. soit réduite à 1'360 fr. par mois doit être considérée comme une réduction de conclusion, admissible en tout temps.

Quant à l'imputation des montants déjà versés, il s'agit de l'expression formelle du résultat auquel le Tribunal aurait dû parvenir afin d'éviter à l'appelant le risque d'avoir à payer à double des frais relatifs à l'entretien quotidien de l'intimée, dont celle-ci avait admis bénéficier et dont le principe n'avait plus été remis en cause en première instance.

2. L'appelant réclame l'attribution en sa faveur de la jouissance du domicile conjugal.

Il soutient que son épouse n'a pas démontré un intérêt concret à demeurer dans cette maison, dont il est l'unique propriétaire, que le fait qu'elle y soit demeurée ne constitue pas un intérêt prépondérant, qu'elle avait déclaré en audience devant le premier juge qu'elle avait accepté de ne plus y habiter, qu'elle pourrait occuper l'appartement - dont elle est propriétaire à E______ et qui est libre de locataire depuis le 1er janvier 2024 -, et que la situation financière du couple - qui le contraindrait à puiser dans sa fortune pour assumer les besoins de toute la famille, notamment de leurs enfants majeurs à hauteur d'au moins 1'500 fr. chacun comme l'a admis son épouse - s'oppose à ce qu'elle demeure dans le domicile conjugal vu le besoin urgent de dégager des liquidités. Il relève que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, il ne peut vendre les deux chalets, qui appartiennent en copropriété aux époux, et que l'appartement dont il est seul propriétaire à E______ est actuellement loué pour une durée indéterminée.

2.1 Aux termes de l'art. 176 al. 1 ch. 2 CC, lorsque les époux ne parviennent pas à s'entendre au sujet de la jouissance de l'habitation conjugale, le juge attribue provisoirement le logement conjugal à l'une des parties en faisant usage de son pouvoir d'appréciation.

Il doit procéder à une pesée des intérêts en présence, de façon à prononcer la mesure la plus adéquate au vu des circonstances concrètes (ATF 120 II 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_344/2022 du 31 août 2022 consid. 3.1 et 3.2; 5A_829/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1 et les arrêts cités).

En premier lieu, le juge doit examiner à quel époux le domicile conjugal est le plus utile. Ce critère conduit à attribuer le logement à celui des époux qui en tirera objectivement le plus grand bénéfice, au vu de ses besoins concrets. A cet égard, entrent notamment en considération l'intérêt de l'enfant, confié au parent qui réclame l'attribution du logement, à pouvoir demeurer dans l'environnement qui lui est familier, l'intérêt professionnel d'un époux, qui, par exemple exerce sa profession dans l'immeuble, ou encore l'intérêt d'un époux à pouvoir rester dans l'immeuble qui a été aménagé spécialement en fonction de son état de santé. L'application de ce critère présuppose en principe que les deux époux occupent encore le logement dont l'usage doit être attribué (ATF 120 II 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_344/2022, précité; 5A_829/2016 précité).

Si ce premier critère de l'utilité ne donne pas de résultat clair, le juge doit, en second lieu, examiner à quel époux on peut le plus raisonnablement imposer de déménager, compte tenu de toutes les circonstances. A cet égard, entrent notamment en considération l'état de santé ou l'âge avancé de l'un des époux qui, bien que l'immeuble n'ait pas été aménagé en fonction de ses besoins, supportera plus difficilement un changement de domicile, ou encore le lien étroit qu'entretient l'un d'eux avec le domicile conjugal, par exemple un lien de nature affective. Des motifs d'ordre économique ne sont en principe pas pertinents, à moins que les ressources financières des époux ne leur permettent pas de conserver ce logement (ATF 120 II 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_344/2022 précité; 5A_829/2016 précité).

Si ce second critère ne donne pas non plus de résultat clair, le juge doit alors tenir compte du statut juridique de l'immeuble et l'attribuer à celui des époux qui en est le propriétaire ou qui bénéficie d'autres droits d'usages sur celui-ci (ATF 120 II 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_344/2022 précité; 5A_953/2021 du 20 avril 2022 consid. 3.1; 5A_527/2017 du 9 octobre 2017 consid. 6.1 et les réf. cit.).

2.2 En l'occurrence, le raisonnement du Tribunal est exempt de toute critique. En effet, si la fortune de l'appelant a diminué entre fin 2021 et mai 2023, celui-ci n'a pas rendu vraisemblable que cela résulterait de la prise en charge de l'entretien de la famille et qu'il serait confronté à un manque de liquidités nécessitant d’être comblé au moyen de la vente à bref délai du domicile conjugal. De plus, en cas de nécessité, il pourrait, en premier lieu, être attendu de lui qu'il vende le bien immobilier en Valais dont il est seul propriétaire.

De son côté, l'intimée ne dispose pas de revenus suffisants pour prendre à bail un appartement. Elle dispose, certes, d'un appartement à E______, libre de tout locataire depuis janvier 2024. Toutefois, il ne saurait être attendu d'elle, à tout le moins au stade des mesures protectrices de l'union conjugale, qu'elle quitte, contre son gré, Genève pour s'établir à E______, loin de son centre de vie.

Par conséquent, le chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé.

3. L'appelant remet en cause la contribution à l'entretien de son épouse fixée par le Tribunal.

Il fait valoir que sa situation financière a été mal évaluée, en particulier le montant de ses revenus, lesquels s'élèveraient à 5'545 fr. (5'505 fr. + 40 fr.), à l'exclusion des revenus découlant de l'activité de la société C______ Sàrl. Il considère, en effet, que rien ne justifie de tenir compte du bénéfice net de cette société, lequel n'a pas été allégué par sa partie adverse, que le fait que la société génère un bénéfice net ne saurait impliquer qu'il en tire un revenu et que, dans le cas contraire, les revenus moyens de la société sur trois ans n'excèderaient pas 184 fr. par année ([3'806 fr. 36 en 2022 + 9'820 fr. 03 en 2021 – 13'074 fr. 49 en 2020] / 3 ans).

Selon lui, il disposerait dès lors d'un solde disponible de 2'720 fr. (5'545 fr. – 2'825 fr. de charges personnelles), dont il offre de verser la moitié à son épouse, soit la somme de 1'360 fr. Il considère que de cette contribution doivent être déduits les montants dont il s'est d'ores et déjà acquitté (son épouse ayant admis, en première instance, qu'il assumait ses charges quotidiennes), au risque de devoir s'en acquitter deux fois, vu le dies a quo fixé au 1er février 2023 par le Tribunal.

L'appelant ne formule aucun grief à l'encontre de sa condamnation au paiement direct de toutes les charges courantes liées au domicile conjugal, ainsi qu'au paiement d'un montant supplémentaire de 1'405 fr. en cas de résiliation du contrat de travail de l'intimée.

3.1 Lorsque le juge constate que la suspension de la vie commune est fondée, il fixe la contribution pécuniaire à verser par une partie à l'autre (art. 176 al. 1 ch. 1 CC).

Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176
al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux (ATF 138 III 97 consid. 2.2; 137 III 385 consid. 3.1; 130 III 537 consid. 3.2, in SJ 2004 I 529). Tant que dure le mariage, les époux doivent ainsi contribuer, chacun selon leurs facultés, aux frais supplémentaires engendrés par l'existence parallèle de deux ménages. Si la situation financière des époux le permet encore, le standard de vie antérieur, choisi d'un commun accord, doit être maintenu pour les deux parties. Quand il n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les époux ont droit à un train de vie semblable (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_173/2013 du 4 juillet 2013 consid. 4.2; 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 4.2.3).

3.2 Dans trois arrêts publiés (ATF 147 III 265, in SJ 2021 I 316; 147 III 293; 147 III 301), le Tribunal fédéral a posé, pour toute la Suisse, une méthode de calcul uniforme des contributions d'entretien du droit de la famille - soit la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent (dite en deux étapes).

Selon cette méthode, on examine les ressources et besoins des personnes intéressées, puis les ressources sont réparties entre les membres de la famille concernés de manière à couvrir, dans un certain ordre, le minimum vital du droit des poursuites ou, si les ressources sont suffisantes, le minimum vital élargi du droit de la famille, puis l'excédent éventuel (ATF 147 III 265 consid. 7).

Les besoins sont calculés en prenant pour point de départ les lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP. Lorsque les moyens financiers le permettent, l'entretien convenable doit être étendu au minimum vital du droit de la famille. Pour les parents/adultes, les postes suivants entrent généralement dans l'entretien convenable (minimum vital du droit de la famille) : les impôts, les forfaits de télécommunication, les assurances, les frais de formation continue indispensable, les frais de logement correspondant à la situation (plutôt que fondés sur le minimum d'existence), les frais d'exercice du droit de visite, un montant adapté pour l'amortissement des dettes, et, en cas de circonstances favorables, les primes d'assurance-maladie complémentaires, ainsi que les dépenses de prévoyance privée des travailleurs indépendants. En revanche, le fait de multiplier le montant de base ou de prendre en compte des postes supplémentaires comme les voyages ou les loisirs n'est pas admissible. Ces besoins doivent être financés au moyen de la répartition de l'excédent. Toutes les autres particularités devront également être appréciées au moment de la répartition de l'excédent (ATF 147 III 265 consid. 7.2).

Lorsqu'il reste des ressources après la couverture du minimum vital de droit de la famille, l'excédent doit en principe être réparti par moitié entre les conjoints (ATF 147 III 265 consid. 7.3).

Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation et applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 140 III 337 consid. 4.2.2; 134 III 577 consid. 4; 128 III 411 consid. 3.2.2).

Le minimum vital du droit des poursuites du débirentier doit en principe être préservé (ATF 137 III 59 consid. 4.2).

3.3 L'obligation d'entretien du conjoint l'emporte sur celle de l'enfant majeur. Ce principe a été posé pour régler les situations dans lesquelles la capacité contributive de l'époux débirentier n'est pas suffisante pour couvrir à la fois les prétentions du conjoint et celles des enfants majeurs. Les frais d'entretien de l'enfant majeur découlant de l'art. 277 al. 2 CC ne doivent dès lors pas être inclus sans autre considération dans le minimum vital élargi du débirentier (ATF 132 III 209 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_36/2016 du 29 mars 2016 consid. 4.1).

3.4 Le revenu d'un indépendant est constitué par son bénéfice net, à savoir la différence entre les produits et les charges. En cas de revenus fluctuants, pour obtenir un résultat fiable, il convient de tenir compte, en général, du bénéfice net moyen réalisé durant plusieurs années (dans la règle, les trois dernières). Plus les fluctuations de revenus sont importantes et les données fournies par l'intéressé incertaines, plus la période de comparaison doit être longue. Dans certaines circonstances, il peut être fait abstraction des bilans présentant des situations comptables exceptionnelles, à savoir des bilans attestant de résultats particulièrement bons ou spécialement mauvais (ATF 143 III 617 consid. 5.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_987/2020 du 24 février 2022 consid. 4.1; 5A_20/2020 du 28 août 2020 consid. 3.3; 5A_676/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.2 et les réf. cit.).

3.5 En l'espèce, il n'est pas contesté que la situation financière des parties peut être arrêtée en tenant compte de leurs minima vitaux selon le droit de la famille au vu de leurs revenus.

Pour le surplus, la situation financière des parties est la suivante :

3.5.1 Les parties ne remettent pas en cause que l'intimée fait face à un déficit mensuel d'environ 555 fr. (1'405 fr. de revenus pour 1'960 fr. de charges; cf. supra EN FAIT let. D.c).

3.5.2 L'appelant perçoit 5'505 fr. par mois de rentes AVS et LPP, ainsi qu'un revenu mensuel de 40 fr. pour une activité accessoire. S'agissant de la société C______ Sàrl, le Tribunal a considéré, en se fondant sur les déclarations de l'appelant lors de l'audience du 6 octobre 2022, que ce dernier avait admis que le bénéfice net de la société s'élevait à environ 10'000 fr. et ce, de manière régulière. Or, il n'est pas invraisemblable que l'intéressé ait voulu faire référence à l'année 2021, durant laquelle le bénéfice net a effectivement été de 9'820 fr. 03. Il ressort, par ailleurs, des pièces produites en première instance que tel n'a pas été le cas chaque année (perte de 13'074 fr. 49 en 2020 et bénéfice net de 4'100 fr. 11 en 2022). Partant, seul un montant moyen sur les années 2020 à 2022 d'environ 385 fr. par mois peut être retenu à titre de revenus complémentaires ([(0 fr. en 2020 + 9'820 fr. 03 en 2021 + 4'100 fr. 11 en 2022) / 3 ans] / 12 mois). L'appelant ne saurait être suivi lorsqu'il prétend qu'il n'a pas été rendu vraisemblable qu'il aurait effectivement perçu des revenus découlant du bénéfice net de la société. En effet, ce point importe peu, dès lors que ledit bénéfice net résulte des revenus locatifs de biens immobiliers du couple et qu'il ne saurait se prévaloir du fait qu'il aurait fait le choix de ne pas prélever le bénéfice net de cette société à responsabilité limitée, dont il est l'unique bénéficiaire. L'appelant ne saurait non plus être suivi lorsqu'il prétend qu'il ne pourrait être tenu compte du bénéfice net de C______ Sàrl faute d'allégation de son épouse en ce sens, puisque la question du montant dudit bénéfice a été instruite lors de la première audience tenue par le Tribunal.

Le minimum vital selon le droit de la famille de l'appelant s'élève à 2'235 fr. par mois, hors les frais relatifs au domicile conjugal non payés par C______ Sàrl retenus à hauteur de 590 fr. (cf. supra EN FAIT let. D.d).

L'appelant dispose, ainsi, d'un montant d'au moins 3'695 fr. par mois ([5'505 fr. + 40 fr. + 385 fr.] – 2'235 fr.).

3.5.3 Au vu de ce qui précède, en particulier de la situation financière respective des parties, l'épouse peut prétendre, en sus du paiement direct par l'appelant de toutes les charges courantes liées au domicile conjugal (590 fr.), à la couverture de son déficit (555 fr.), ainsi qu'à la moitié de l'excédent de son époux ([3'695 fr.
– (590 fr. + 555 fr.) / 2 = 1'275 fr.), soit à un montant total de 1'830 fr. Toutefois, au vu de l'absence d'appel de l'épouse et du principe de l'interdiction de la reformatio in pejus, le montant de 1'775 fr. arrêté par le Tribunal sera confirmé.

Comme l'a à raison relevé le Tribunal, cette contribution ayant pour effet d’égaliser les ressources mensuelles disponibles des parties, il leur appartiendra de s’entendre entre elles et avec leurs enfants majeurs afin de se répartir l’entretien qu’ils estimeraient être encore dû à ces derniers.

L'appelant ne remet pas en cause le dies a quo fixé au 1er février 2023 par le premier juge.

Partant, les chiffres 2 et 3 du dispositif du jugement entrepris seront confirmés.

Afin de tenir compte du fait – admis par l'épouse en première instance – que l'appelant a pourvu à l'entretien quotidien de celle-ci jusqu'à une date indéterminée et d'éviter que ce dernier ne soit amené à payer à double, il sera précisé que de ladite contribution seront déduits les montants dont il s'est d'ores et déjà acquitté à ce titre.

4. Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC). La Cour peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC) ou des circonstances particulières rendent la répartition en fonction du sort de la cause inéquitable (art. 107 al. 1 let. f CPC).

Les frais judiciaires de la procédure d'appel sont fixés à 1'000 fr. (art. 31 et 37 RTFMC), couverts par l'avance de frais opérée par l'appelant du même montant, laquelle demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Vu l'issue du litige (l'appelant succombant dans une large mesure) et le rapport inégal des forces financières entre les parties (l'appelant disposant de liquidités contrairement à l'intimée), lesdits frais judiciaires seront intégralement mis à la charge de l'appelant (art. 107 al. 1 let. f CPC).

Pour les mêmes motifs, il sera en outre condamné aux dépens de sa partie adverse, lesquels seront arrêtés à 2'000 fr., TVA et débours compris, au regard de l'activité déployée par le conseil de l'intimée (art. 95, 104 al. 1, 105 al. 1 et 106 al. 1 CPC; art. 20, 23 al. 1, 25 et 26 al. 1 LaCC; art. 25 al. 1 LTVA; 84 ss RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 28 août 2023 par A______ contre les chiffres 1 à 3 du dispositif du jugement JTPI/8961/2023 rendu le 15 août 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15297/2022-16.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Dit que de la contribution à l'entretien de B______ doivent être déduits les montants dont A______ s'est d'ores et déjà acquitté à ce titre.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont intégralement compensés avec l'avance de frais fournie par ce dernier, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 2'000 fr. à B______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame
Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités selon l'art. 98 LTF.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.