Décisions | Chambre civile
ACJC/630/2023 du 02.05.2023 sur OTPI/801/2022 ( SDF ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/5699/2022 ACJC/630/2023 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 2 MAI 2023 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'une ordonnance rendue par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 décembre 2022, comparant par Me Eve DOLON, avocate, rue Charles-Bonnet 2, 1206 Genève, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile,
et
Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Virginie JORDAN, avocate, JordanLex, rue de la Rôtisserie 4, 1204 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.
A. a. Les époux B______ et A______ se sont mariés le ______ 2004 à Genève.
De cette union sont issus les enfants C______, né le ______ 2007, D______, né le ______ 2009 et E______, née le ______ 2015.
b. Les époux se sont séparés en 2021.
Depuis lors, les relations entre les époux sont réglées par des mesures protectrices de l'union conjugale, prononcées par jugement JTPI/7749/2021 du Tribunal de première instance du 14 juin 2021 et par arrêt ACJC/177/2022 rendu le 4 février 2022 par la Cour de justice.
La garde des enfants a été attribuée à B______.
Un large droit de visite a été réservé à A______ (ch. 3 du dispositif du jugement), soumis à la condition que ce dernier fournisse toutes les deux semaines les résultats de tests sanguins prouvant son abstinence à l'alcool (ch. 5 du dispositif du jugement). A______ a en outre été exhorté à poursuivre son suivi thérapeutique en lien avec son sevrage éthylique (ch. 6 du dispositif du jugement) et une curatelle de surveillance et d'organisation des relations personnelles a été instaurée (ch. 7 du dispositif du jugement).
Ces modalités du droit de visite ont été confirmées par la Cour de justice, qui avait alors retenu que le conditionnement du droit de visite à la présentation, toutes les deux semaines, de tests PEth (analyse d'un marqueur PEth, dont la concentration est un marqueur d'une consommation d'alcool) ne contrevenait pas au principe de proportionnalité. Il avait été rendu vraisemblable que A______ rencontrait une fragilité face à l'alcool. La présentation régulière de tests PEth apparaissait ainsi appropriée pour s'assurer qu'il était en mesure de prendre soin des enfants. Cette mesure allait en outre contribuer à rassurer B______ quant à la capacité de son époux à maitriser sa consommation d'alcool.
B. a. Le 25 mars 2022, B______ a saisi le Tribunal d'une demande en divorce.
Elle a notamment conclu à l'attribution en sa faveur de la garde exclusive des enfants et à l'octroi d'un large droit de visite en faveur du père, dont l'exercice serait subordonné à la production, toutes les deux semaines, des résultats de tests sanguins prouvant son abstinence à l'alcool.
b. Par requête de mesures provisionnelles du 3 octobre 2022, A______ a conclu à ce que son droit de visite ne soit plus subordonné à la délivrance de tests sanguins négatifs toutes les deux semaines.
Il a fait valoir qu'il ne buvait plus d'alcool depuis plus de deux ans, que ces tests n'étaient pas fiables et produisaient parfois des faux positifs en fonction des aliments consommés, générant ainsi des angoisses pour lui et pour ses enfants à l'idée qu'ils ne puissent se voir.
c. Dans ses deux attestations établies les 9 juin et 30 septembre 2022, la Dre F______, responsable du Centre G______, spécialisé dans les problématiques d'addiction à l'alcool, a indiqué que A______ se présentait régulièrement au centre, y était suivi depuis plus d'une année, était collaborant et impliqué dans son suivi, continuait à se présenter régulièrement à la consultation et effectuait les analyses demandées. L'évolution des résultats d'analyses démontrait une stabilité à long terme du comportement du patient envers la consommation d'alcool et témoignait d'une absence de rechute. Le médecin estimait ainsi que le patient était stabilisé et que les analyses effectuées tous les 15 jours, qui engendraient des coûts importants, ne se justifiaient plus sur le plan médical.
d. Dans ses observations du 21 octobre 2022, B______ a conclu au rejet de cette requête de mesures provisionnelles, relevant l'absence de toute urgence, contestant le manque de fiabilité allégué et préconisant au contraire une intensification de ces tests pour détecter une éventuelle rechute.
e. Les parties ont fait usage de leur droit de répliquer, persistant dans leurs conclusions respectives.
Le Tribunal a gardé la cause à juger le 29 novembre 2022.
C. Par ordonnance OTPI/801/2022 rendue le 2 décembre 2022, le Tribunal a débouté A______ des fins de sa requête de mesures provisionnelles, réservé la décision finale quant au sort des frais judiciaires, dit qu'il n'était pas alloué de dépens et débouté les parties de toutes autres conclusions.
Le Tribunal a considéré que les relations entre les parties avaient été réglées par jugement du 14 juin 2021 confirmé par la Cour le 4 février 2022 s'agissant des modalités du droit de visite réservé au père. Les circonstances prévalant lorsque ces mesures avaient été prononcées ne s'étaient pas modifiées de manière importante et durable, de sorte que les mesures provisionnelles requises ne s'avéraient pas nécessaires.
D. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 19 décembre 2022, A______ a appelé de cette ordonnance, qu'il a reçue le 8 décembre 2022. Il a conclu à son annulation et, cela fait, à ce que les chiffres 5 et 6 du dispositif du jugement JTPI/7749/2021 rendu le 14 juin 2021 par le Tribunal, confirmés par la Cour par arrêt du 4 février 2022 soient annulés, à ce qu'il soit dit que désormais, son droit de visite s'exercerait sans analyse ni remise de tests PEth et au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, sous suites de frais et dépens.
Il a produit des pièces nouvelles.
b. Dans sa réponse du 18 janvier 2023, B______ a conclu à l'irrecevabilité de l'appel, à son rejet et à la confirmation de l'ordonnance entreprise. Elle a, à titre préalable, sollicité la production par son époux des tests PEth effectués depuis septembre 2022, la mise en œuvre d'une expertise visant à déterminer si son époux est abstinent à l'alcool et à tout autre stupéfiant auprès d'un expert spécialiste en alcoologie et l'exécution d'une analyse de la paroi nasale et d'une mèche de cheveux de son époux concernant l'absence de toute consommation de stupéfiant.
c. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions d'appel.
d. Par avis du greffe du 22 février 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
E. Des pièces produites par l'appelant en appel résultent les éléments suivants :
a. Dans son attestation établie le 14 décembre 2022, la Dre F______ a indiqué que le suivi auprès du Centre ne se justifiait plus et qu'il pouvait être arrêté. Au départ, l'évaluation effectuée n'avait relevé aucun des critères permettant de poser le diagnostic d'une addiction, mais le Centre avait accepté la demande de suivi du patient pour lui permettre de fournir les tests qui lui étaient demandés dans la procédure judiciaire. Les analyses effectuées démontraient une absence d'abus d'alcool durant une période soutenue. D'un point de vue médical, il n'y avait plus aucune raison de continuer ce suivi. Aucun élément médical ne justifiait plus le remboursement des analyses par l'assurance-maladie.
b. Le 19 décembre 2022, les collaboratrices du Service de protection des mineurs chargées de la curatelle de surveillance des relations personnelles entre les enfants et leur père ont informé le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant de ce que le père leur avait transmis les analyses PEth avec beaucoup de régularité depuis le jugement rendu par le Tribunal le 14 juin 2021, que les résultats étaient négatifs, que les médecins de la Fondation H______ avaient à plusieurs reprises attesté de l'absence de consommation d'alcool par A______ et indiqué que ces analyses n'étaient plus nécessaires au vu du sa bonne évolution. Les curatrices ont ainsi recommandé au Tribunal de protection de supprimer l'injonction faite au père de fournir les analyses sanguines prouvant son abstinence à l'alcool tout en maintenant la curatelle de surveillance des relations personnelles.
1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions sur mesures provisionnelles (art. 276 et 308 al. 1 let. b CPC), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).
En l'espèce, le litige porte sur les modalités d'exercice du droit de visite réservé au père, soit une affaire de nature non pécuniaire dans son ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 5A_433/2016 du 15 décembre 2016 consid. 2; 5A_765/2012 du 19 février 2013 consid. 1.1), de sorte que la voie de l'appel est ouverte indépendamment de la valeur litigieuse.
1.2 L'appel, écrit et motivé, est introduit dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision (art. 130, 131, 142 al. 3, 248 let. d, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC).
Pour satisfaire à cette exigence de motivation, il ne suffit pas à l'appelant de renvoyer aux moyens soulevés en première instance, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1).
1.3 En l'espèce, l'appel a été formé le lundi 19 décembre 2022 contre l'ordonnance reçue le 8 décembre 2022, soit dans le délai de dix jours prévu par la loi. Il satisfait par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'intimée, aux exigences de motivation, l'appelant formulant des critiques précises à l'encontre de l'ordonnance querellée en reprochant au premier juge d'avoir violé son droit d'être entendu, d'avoir considéré que les circonstances ne s'étaient pas modifiées depuis le jugement rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale et d'avoir retenu que les mesures provisionnelles requises n'étaient pas nécessaires.
L'appel est en conséquence recevable.
2. Les mesures provisionnelles sont soumises à la procédure sommaire au sens propre (art. 248 let. d, 271 et 276 al. 1 CPC). La cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (arrêt du Tribunal fédéral 5A_937/2014 du 26 mai 2015 consid. 6.2.2). Les moyens de preuve sont limités à ceux qui sont immédiatement disponibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_476/2015 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2).
3. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).
La maxime inquisitoire et la maxime d'office régissent les questions relatives aux enfants (art. 277 al. 3 et 296 al. 1 et 3 CPC). La maxime inquisitoire ne dispense pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs thèses (ATF 131 III 91 consid. 5.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_565/2016 du
16 février 2017 consid. 4.1.2).
4. Les parties produisent des pièces nouvelles.
4.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).
Lorsque la procédure est soumise à la maxime inquisitoire illimitée, les parties peuvent présenter des nova en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).
4.2 Les pièces produites par les parties concernent les droits parentaux, soumis à la maxime inquisitoire illimitée. Elles sont donc recevables.
5. L'intimée sollicite à titre préalable la production par son époux de tests PEth effectués depuis septembre 2022, la mise en œuvre d'une expertise visant à déterminer si l'appelant est abstinent à l'alcool et à tout autre stupéfiant auprès d'un expert spécialiste indépendant en alcoologie, ainsi que l'injonction à son époux de se soumettre à une vérification de la paroi nasale et à un prélèvement d'une mèche de cheveux à faire analyser en vue de déterminer l'absence de consommation d'alcool.
5.1 L'instance d'appel peut administrer des preuves (art. 316 al. 3 CPC).
Cette disposition ne confère pas au recourant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves. L'instance d'appel peut renoncer à ordonner une mesure d'instruction en procédant à une appréciation anticipée des preuves, notamment lorsque celle-ci est manifestement inadéquate, porte sur un fait non pertinent ou n'est pas de nature à ébranler la conviction qu'elle a acquise sur la base des éléments déjà recueillis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1-4.3.2; 130 III 734 consid. 2.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_86/2016 du 5 septembre 2016 consid. 5.2.2).
L'autorité jouit d'un large pouvoir d'appréciation en la matière (ATF 142 III 413 consid. 2.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_37/2017 du 10 juillet 2017 consid. 3.1.2).
5.2 En l'espèce, la Cour s'estime suffisamment renseignée pour statuer sur l'adaptation des modalités du droit de visite sur la base des différentes attestations médicales produites par l'appelant dans le cadre de la présente procédure sur mesures provisionnelles, limitée à l'examen de la vraisemblance des faits. Il n'y a, dans ces circonstances, pas lieu d'ordonner les mesures probatoires sollicitées par l'intimée.
6. L'appelant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, reprochant au premier juge de n'avoir pas motivé sa décision.
6.1 Le droit d'être entendu garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH comprend entre autres le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_19/2020 du 18 mai 2020 consid. 6). Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité n'a pas satisfait à son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1; 133 III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 5A_609/2012 du 12 septembre 2012 consid. 3.1).
6.2 En l'espèce, le Tribunal a débouté l'appelant des fins de sa requête de mesures provisionnelles en retenant que de telles mesures n'apparaissaient pas nécessaires puisque les circonstances ne s'étaient pas modifiées de manière importante et durable depuis le prononcé des mesures protectrices de l'union conjugale. Le premier juge a ainsi exposé les motifs l'ayant conduit à rejeter la requête de l'appelant, qui a été en mesure de contester la décision querellée en connaissance de cause. Le droit d'être entendu de l'appelant a ainsi été respecté.
Ce grief formel n'est pas fondé.
7. L'appelant reproche au Tribunal d'avoir maintenu les modalités contraignantes du droit de visite, subordonné à la présentation des résultats de tests sanguins, alors que les médecins du centre médical spécialisé dans les problématiques d'addiction à l'alcool avaient attesté de la stabilité de son comportement face à l'alcool et préconisé l'arrêt des analyses effectuées.
7.1.1 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC). Autrefois considéré comme un droit naturel des parents, le droit aux relations personnelles au sens de cette disposition est désormais conçu comme un droit-devoir réciproque qui sert en premier lieu les intérêts de l'enfant (ATF 131 III 209 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 5A_497/2017 du 7 juin 2018 consid. 4.1; 5A_618/2017 du 2 février 2018 consid. 4.2; 5A_184/2017 du 9 juin 2017 consid. 4.1). A cet égard, il est unanimement reconnu que le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et qu'il peut jouer un rôle décisif dans le processus de recherche d'identité de l'enfant (ATF 130 III 585 consid. 2.2.2; 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_887/2017 du 16 février 2018 consid. 5.3; 5A_184/2017 du 8 juin 2017 consid. 4.1; 5A_586/2012 du 12 décembre 2012 consid. 4.2).
Si les relations personnelles compromettent le développement de l'enfant, si les père et mère qui les entretiennent violent leurs obligations, s'ils ne se sont pas souciés sérieusement de l'enfant ou s'il existe d'autres justes motifs, le droit d'entretenir ces relations peut leur être retiré ou refusé (art. 274 al. 2 CC). Ce refus ou ce retrait ne se justifie que si le bien de l'enfant l'exige impérieusement et qu'il est impossible de trouver une réglementation du droit de visite qui sauvegarde ses intérêts. Il existe un danger pour le bien de l'enfant si son développement physique, moral ou psychique est menacé par la présence, même limitée, du parent qui n'a pas l'autorité parentale. Conformément au principe de la proportionnalité, il importe en outre que ce danger ne puisse être écarté par d'autres mesures appropriées. (ATF 122 III 404 consid. 3b).
7.1.2 Le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires; les dispositions régissant la protection de l'union conjugale sont applicables par analogie (art. 276 al. 1 CPC). Les mesures ordonnées par le tribunal des mesures protectrices de l'union conjugale sont maintenues; le tribunal du divorce est compétent pour prononcer leur modification ou leur révocation (art. 276 al. 2 CPC).
Les mesures protectrices de l'union conjugale demeurent en vigueur même au-delà de l'ouverture de la procédure de divorce. Une fois que des mesures provisionnelles ont été ordonnées, elles ne peuvent être modifiées qu'aux conditions de l'art. 179 CC (ATF 137 III 614 consid. 3.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_15/2014 du 28 juillet 2014 consid. 3 et 5A_562/2013 du
24 octobre 2013 consid. 3.1). Aux termes de cette disposition, le juge prononce les modifications commandées par les faits nouveaux et rapporte les mesures prises lorsque les causes qui les ont déterminées n'existent plus. La modification des mesures provisoires ne peut être obtenue que si, depuis leur prononcé, les circonstances de fait ont changé d'une manière essentielle et durable (ATF 129 III 60 consid. 2 et 141 III 376 consid. 3.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_787/2017 du 28 novembre 2017 consid. 5.1; 5A_617/2017 du 28 septembre 2017 consid. 3.1 ; 5A_403/2016 du 24 février 2017 consid. 3.1 et 5A_732/2015 du 8 février 2016 consid. 2).
7.2 En l'espèce, dans le cadre de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, le Tribunal puis la Cour ont considéré qu'il apparaissait approprié, compte tenu de la vraisemblable fragilité à l'alcool de l'appelant, de subordonner l'exercice de son droit de visite à la présentation régulière de tests sanguins afin de s'assurer qu'il était en mesure de prendre soin des enfants.
Il ressort des attestations établies les 9 juin, 30 septembre et 14 décembre 2022 par les médecins du Centre G______, spécialisé dans les problématiques d'addiction à l'alcool, que l'appelant s'était régulièrement présenté au Centre depuis plus d'une année, était impliqué dans son suivi, continuait à se présenter régulièrement à la consultation et effectuait les analyses demandées. L'évolution des résultats d'analyses avait démontré une absence d'abus d'alcool durant une période soutenue, une stabilité à long terme du comportement du patient envers la consommation d'alcool et témoignait de l'absence de rechute. La Dre F______ estimait ainsi que le patient était stabilisé et qu'il n'y avait plus aucune raison médicale de poursuivre ce suivi.
Il s'avère ainsi que les circonstances se sont modifiées depuis le prononcé des mesures protectrices de l'union conjugale, puisque les analyses auxquelles l'appelant s'est depuis lors régulièrement soumis ont permis aux médecins du centre spécialisé d'attester qu'il avait fait preuve d'une stabilité à long terme de son comportement envers la consommation, qu'il n'a pas présenté de rechute et que la réalisation d'examens tous les 15 jours ne se justifiait plus sur le plan médical. Ces circonstances conduisent à revoir les modalités contraignantes adoptées lors du prononcé des mesures protectrices de l'union conjugale. En effet, s'il était alors apparu adéquat d'exiger de l'appelant qu'il présente les résultats de tests sanguins avant d'exercer son droit de visite sur les enfants pour s'assurer qu'il soit en mesure d'en prendre soin, une telle restriction du droit des relations personnelles ne se justifie plus au regard des circonstances actuelles. C'est, du reste, également dans le sens d'une levée de cette injonction que les curatrices ont saisi le Tribunal de protection le 19 décembre 2022. Il apparaît dans ces circonstances approprié de renoncer aux mesures subordonnant l'exercice des relations personnelles à la présentation des résultats d'analyses sanguines, ainsi qu'à l'exhortation faite à l'appelant de poursuivre son suivi thérapeutique.
Enfin, contrairement à ce que soutient l'intimée, il apparaît nécessaire d'adapter ces modalités du droit de visite dans la présente procédure de mesures provisionnelles sans attendre l'issue de la procédure de divorce, dès lors que les restrictions du droit de visite actuellement en place sont de nature à nuire au bon déroulement des relations personnelles entre les enfants et leur père, nécessaires au bon développement de ces derniers.
Il convient, partant, d'annuler le chiffre premier du dispositif de l'ordonnance attaquée déboutant l'appelant des fins de sa requête de mesures provisionnelles et, cela fait, de modifier le jugement rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale le 14 juin 2021 en rapportant les mesures prévues aux chiffres 5 et 6 du dispositif de ce jugement, soumettant l'exercice du droit de visite à la condition que l'appelant fournisse toutes les deux semaines les résultats de tests sanguins prouvant son abstinence à l'alcool et l'exhortant à poursuivre son suivi thérapeutique en lien avec son sevrage éthylique.
8. 8.1 Lorsque l'autorité d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).
Dans l'ordonnance entreprise, le Tribunal a renvoyé sa décision sur les frais des mesures provisionnelles à la décision finale en application de l'art. 104 al. 3 CPC. Il n'y a pas lieu de revoir ce point, que les parties n'ont pas remis en cause en appel.
8.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et compensés avec l'avance versée par l'appelant, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).
Vu la nature familiale du litige, ils seront répartis à parts égales entre les parties, qui conserveront à leur charge leurs propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre l'ordonnance OTPI/801/2022 rendue le 2 décembre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5699/2022.
Au fond :
Annule le chiffre 1 de cette ordonnance et, statuant à nouveau :
Modifie le jugement JTPI/7749/2021 rendu le 14 juin 2021 par le Tribunal de première instance en ce sens qu'il est mis fin aux mesures prévues par les chiffres 5 et 6 de son dispositif.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge des parties à raison de la moitié chacune et les compense avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.
Condamne en conséquence B______ à verser à A______ la somme de 400 fr. à titre de remboursement frais judiciaires d'appel.
Dit que chaque partie assume ses propres dépens d'appel.
Siégeant :
Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.
|
|
|
Indication des voies de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.