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Décisions | Chambre civile

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C/23044/2020

ACJC/1676/2022 du 20.12.2022 sur JTPI/3429/2022 ( OS ) , RENVOYE

Normes : CPC.317.al1; CO.135.ch2; CO.60.al1.leta
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23044/2020 ACJC/1676/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 20 décembre 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 21ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 mars 2020, comparant par Me Thierry STICHER, avocat, VS AVOCATS, boulevard
Georges-Favon 14, 1204 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

1) B______ SA, sise ______ [ZH], intimée, comparant par Me Philippe EIGENHEER, avocat, DGE Avocats, rue Bartholoni 6, case postale, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

2) C______ SA, sise ______ [VD], autre intimée, comparant par Me Thierry ULMANN, avocat, REYMOND ALMANN & ASSOCIES, route des Jeunes 4, 1227 Les Acacias, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/3429/2022 du 18 mars 2022, notifié le 24 du même mois aux parties, le Tribunal de première instance, statuant dans le cadre d'une action en responsabilité civile intentée à la suite d'un accident de travail, a admis l'exception de prescription soulevée par B______ SA (ch. 1 du dispositif), déboutant en conséquence A______ de ses conclusions en paiement à l'encontre de ladite société (ch. 2), a mis les frais judiciaires en lien avec cette procédure, arrêtés à 1'260 fr. et compensés à due concurrence avec les avances versées par A______, à la charge de ce dernier (ch. 3) et l'a condamné à payer à B______ SA des dépens de 1'500 fr. TTC (ch. 4).

Le Tribunal a en revanche rejeté l'exception de prescription soulevée par C______ SA (ch. 5) et a réservé la suite de la procédure opposant A______ à cette dernière (ch. 6) ainsi que la décision sur les frais en lien avec ladite procédure (ch. 7).

Enfin, les parties ont été déboutées de toutes autres conclusions (ch. 8).

B. a. Par acte expédié le 28 avril 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé appel à l'encontre de ce jugement. Il a conclu à ce que la Cour de céans annule les chiffres 1 à 4 de son dispositif et, cela fait, rejette l'exception de prescription soulevée par B______ SA, réserve la suite de la procédure les opposant ainsi que la décision sur les frais, confirme pour le surplus le jugement attaqué et condamne B______ SA aux frais de la procédure d'appel.

A l'appui de son écriture, A______ a allégué un fait nouveau (allégué no 141), à savoir qu'il a retiré l'ensemble des poursuites qu'il avait initiées à l'encontre de B______ SA à compter de 2006, et a produit plusieurs pièces nouvelles destinées à l'établir (pièces nos 36 à 41).

b. Dans son mémoire de réponse du 9 juin 2022, B______ SA a conclu, à la forme, à l'irrecevabilité du nouvel allégué no 141 formulé par A______ ainsi que des pièces nouvelles nos 36 à 41 produites à l'appui de celui-ci et, au fond, au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de A______ aux frais.

c. Par mémoire de réponse du 13 juin 2022, C______ SA a déclaré s'en remettre à justice dans la mesure où l'appel portait uniquement sur la partie du litige relative à B______ SA.

d. A______ a répliqué le 29 juin 2022 et C______ SA et B______ SA ont dupliqué le 29 juillet 2022, respectivement le 20 septembre 2022, persistant dans leurs conclusions respectives.

e. Par plis séparés du 11 octobre 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______, né le ______ 1947, était employé par la société D______ SA (désormais C______ SA) en qualité de conducteur des travaux.

b. Dans le courant de l'année 2003, la société E______ SA (désormais B______ SA) a été mandatée pour la réalisation de travaux, notamment de maçonnerie, dans un magasin à F______ (Genève).

c. C______ SA est intervenue sur ce chantier.

d. Le 25 août 2003, A______ a été victime d'un accident sur le chantier. Il a chuté d'une échelle et a subi une commotion cérébrale avec perte de connaissance ainsi qu'une plaie au cuir chevelu. Il a été emmené au service des urgences des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) où aucun traumatisme majeur du système nerveux ou locomoteur n'a été objectivé. Il a pu rentrer chez lui le lendemain.

L'accident n'a pas été annoncé à la police.

e. Immédiatement après l'accident, A______ s'est plaint de sensations vertigineuses, de difficultés de mémoire et de concentration, de fatigue et de fatigabilité, ainsi que de céphalées. La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a pris en charge le cas.

f. A______ a repris son activité professionnelle à 50% dès le 19 octobre 2003 puis à 70% dès le 13 janvier 2004. Il a été licencié le 28 janvier 2005 avec effet au 31 mars suivant. A partir de cette date, la CNA a supprimé son droit à une indemnité journalière.

g. Le 16 septembre 2005, A______ a annoncé à la CNA une rechute de son état de santé. Celle-ci a confié une expertise au Dr G______, spécialiste en neurologie.

Dans son rapport d'expertise du 25 janvier 2006, ce médecin a diagnostiqué un traumatisme cranio-cérébral mineur résultant de l'accident du 25 août 2003, un état anxio-dépressif en partie réactionnel, un discret syndrome post-commotionnel persistant surchargé d'importants facteurs psychiques et une hypoacousie bilatérale ancienne. Il a indiqué qu'il n'y avait pas d'incapacité de travail d'origine accidentelle mais que l'atteinte à la santé due à la maladie entrainait une incapacité de travail de 50% dans une activité ne comprenant pas trop de contrainte temporelle et psychique, relativement structurée et répétitive. Il a relevé que l'incapacité de travail en relation de causalité naturelle avec l'événement accidentel avait cessé au plus tard le 31 mars 2005 et qu'il n'y avait plus d'incapacité au regard des seules suites de l'accident lors de l'expertise.

h. Selon un rapport médical du 17 mai 2011, A______ s'est, le 9 mai 2011, soumis à une évaluation neuropsychologique dont les résultats demeuraient globalement superposables à ceux de 2004, 2006 et 2008. L'aggravation de la symptomatologie qui avait été constaté en 2005 pouvait s'expliquer par la présence de probables troubles thymiques liés à une surcharge professionnelle. La capacité de travail de A______, initialement évaluée d'une façon trop optimiste, s'était stabilisée à 60% dès janvier 2006.

i. Après une longue procédure initiée au mois de juillet 2005, A______ s'est finalement vu octroyer une demi-rente invalidité entre le 1er août 2004 et le 30 novembre 2012, date à laquelle il a atteint l'âge de la retraite. Il a également perçu une rente invalidité à 58% de son institution de prévoyance du 25 août 2005 au 30 novembre 2012.

j. Le 30 décembre 2005, A______ a informé B______ SA que sa responsabilité civile pouvait être engagée dans l'accident du 25 août 2003. Elle lui demandait de bien vouloir signer une déclaration de renonciation à la prescription à défaut de quoi elle serait contrainte d'initier une poursuite contre elle.

k. Le 8 mars 2006, B______ SA a signé une première déclaration de renonciation à se prévaloir de l'exception de prescription contre les prétentions que soulèverait A______ à la suite de l'accident survenu le 25 août 2003. Il était indiqué que la déclaration ne valait aucunement reconnaissance de responsabilité et qu'il était renoncé à la prescription uniquement dans la mesure où celle-ci n'était pas acquise au jour de la signature de la déclaration, laquelle était valable jusqu'au 31 décembre 2006.

Une déclaration identique a été signée en décembre 2006, valable jusqu'au 31 décembre 2007.

l. Le 11 décembre 2007, une troisième déclaration de renonciation à la prescription, d'une teneur similaire aux précédentes, a été signée par B______ SA pour une durée d'une année, soit jusqu'au 31 décembre 2008. Cette déclaration stipulait en sus que sa validité était subordonnée au retrait de la poursuite no 1______ notifiée le 18 janvier 2007 à B______ SA.

m. Le 16 décembre 2008, B______ SA a signé une déclaration de renonciation à se prévaloir de l'exception de prescription, identique aux deux premières, valable jusqu'au 31 décembre 2009.

n. D'autres déclarations, valables jusqu'au 31 décembre de l'année suivante, ont été signées les 8 décembre 2009, 26 novembre 2010, 15 décembre 2011, 18 décembre 2012 et 5 décembre 2013.

o. Le 22 décembre 2014, A______ a initié la poursuite no 2______ contre B______ SA.

p. Le 10 décembre 2015, B______ SA a signé une nouvelle déclaration au contenu identique aux précédentes, précisant en outre que cette dernière n'était établie que dans le but d'éviter la notification d'un commandement de payer et qu'une future prolongation serait subordonnée à la remise par A______, d'ici au 30 novembre 2016, d'une explication écrite des éventuelles prétentions qu'il entendait formuler à son encontre. Ce document était valable jusqu'au 31 décembre 2016.

q. Le 27 décembre 2016, A______ a initié la poursuite no 3______ contre B______ SA.

r. Le 15 décembre 2017, A______ a introduit une nouvelle poursuite no 4______ contre B______ SA.

s. Le 29 novembre 2018, B______ SA a signé une déclaration de renonciation à se prévaloir de l'exception de prescription, laquelle précisait qu'elle n'était établie que dans le but d'éviter la notification d'un commandement de payer, qu'elle était valable du 22 décembre 2014 au 31 décembre 2019 pour autant que la prescription ne fût pas déjà acquise au jour de la signature et que sa validité était subordonnée au retrait des poursuites no 2______ du 22 décembre 2014, no 3______ du 27 décembre 2016 et no 4______ du 15 décembre 2017.

t. Le 27 décembre 2019, A______ a déposé une réquisition de poursuite, enregistrée sous no 5______, contre B______ SA.

u. Le 13 janvier 2020, B______ SA a signé une dernière déclaration de renonciation, similaire à la précédente, avec une validité du 20 décembre 2019 au 31 décembre 2020 subordonnée au retrait et à la radiation de la poursuite no 5______ du 27 décembre 2019. Il était en outre précisé que la déclaration valait interruption de la prescription pour autant que celle-ci n'était pas déjà acquise.

v. Parallèlement, C______ SA a également signé des déclarations de renonciation à invoquer l'exception de prescription contre les prétentions de son ancien employé A______ à la suite de l'accident du 25 août 2003 le 5 décembre 2006, le 11 décembre 2007, le 16 décembre 2008, le 1er décembre 2009, le 1er décembre 2010, le 14 décembre 2011, le 14 décembre 2012, le 10 décembre 2013, le 18 novembre 2014, le 4 décembre 2015, le 5 décembre 2016, le 21 novembre 2017 et le 29 novembre 2018.

w. Le 23 décembre 2019, A______ a transmis à C______ SA une nouvelle déclaration de renonciation à la prescription pour signature et retour avant le 27 décembre 2019. Il l'avisait que, sans nouvelle de sa part dans ce délai, il serait contraint de lui faire notifier un commandement de payer.

Le même jour, A______ a introduit une poursuite à l'encontre de C______ SA, enregistrée sous nos 6______ et 7______.

x. Le 11 février 2020, C______ SA a signé une déclaration de renonciation à la prescription, valable du 30 décembre 2019 au 31 décembre 2020.

Le même jour, A______ a retiré les poursuites susmentionnées (nos 6______ et 7______).

D. a. Par demande en paiement déposée en vue de conciliation le 11 novembre 2020 et introduite devant le Tribunal de première instance le 4 mars 2021, A______ a conclu, sous suite de frais, à la condamnation de B______ SA et de C______ SA, prises conjointement et solidairement, à lui payer un montant de 30'000 fr. à titre de tort moral en lien avec l'accident du 25 août 2003. Il a réservé ses droits pour les autres postes du dommage en lien avec cet accident.

A______ a fondé son action contre B______ SA sur l'article 55 CO, à savoir la responsabilité de l'employeur pour le fait d'auxiliaires, soumise au délai de prescription relatif d'une année selon l'article 60 al. 1 aCO, respectivement à la prescription de plus longue durée du droit pénal selon l'article 60 al. 2 aCO. Il a allégué que l'échelle de quatre mètres située au sous-sol du chantier de laquelle il avait chuté avait été installée par un des employés ou auxiliaires de B______ SA, qui ne l'avait pas fixée de manière conforme aux normes en vigueur. S'agissant de C______ SA, il s'est fondé sur la responsabilité de l'employeur selon les articles 328 al. 2 et 101 CO, dont le délai de prescription est de 10 ans (art. 127 CO), reprochant à ladite société de ne pas avoir pris les mesures de sécurité appropriées, respectivement de ne pas avoir veillé à leur respect.

Relativement à la prescription de ses prétentions, A______ a allégué avoir, de 2006 à 2020, interrompu celle-ci par l'intermédiaire de poursuites ou de déclarations de renonciation à la prescription des sociétés responsables (allégué no 32) et a produit les documents concernés (pièces nos 31 et 32), soit les déclarations de renonciation à la prescription signées par B______ SA et C______ SA ainsi que les réquisitions de poursuite et commandements de payer dans les poursuites dirigées contre ces sociétés.

b. B______ SA, après avoir requis préalablement la limitation de la procédure à la question de la prescription, a conclu, sous suite de frais, au déboutement de A______ de toutes ses conclusions. S'agissant de l'allégué no 32 de A______, elle s'est positionnée comme suit: "Admis quant à l'existence des documents cités. Contesté pour le surplus".

Elle a soutenu que le délai relatif de prescription d'une année de l'art. 60 al. 1 aCO avait commencé à courir le 13 janvier 2004, date de la stabilisation de l'état de santé de A______, et était en conséquence déjà arrivé à échéance lors de la signature, le 8 mars 2006, de la première déclaration de renonciation à la prescription. En outre, la prescription plus longue de l'action pénale prévue à l'art. 60 al. 2 aCO n'entrait pas en ligne de compte. Une infraction pénale n'était pas réalisée, aucune investigation n'ayant été menée sur les circonstances de l'accident, et ladite prescription ne s'appliquait pas en matière de responsabilité de l'employeur pour ses auxiliaires.

c. C______ SA a également conclu, sous suite de frais, au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, se prévalant notamment de la prescription des prétentions de ce dernier à son égard.

d. Par ordonnance ORTPI/1076/2021 du 29 septembre 2021, le Tribunal a limité la procédure à la question de la prescription des prétentions de A______ à l'égard de chacune de ses parties adverses.

e. A______ a contesté que sa créance soit prescrite.

f. Lors de l'audience du 10 février 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

A l'issue de cette audience, le Tribunal a gardé la cause à juger sur la prescription.

g. Aux termes du jugement entrepris, le Tribunal a considéré, s'agissant des points qui demeurent litigieux en appel, que dans la mesure où B______ SA avait soulevé l'exception de prescription, il appartenait à A______ d'alléguer les faits de nature à paralyser cette exception et de produire les moyens de preuves propres à établir ces faits. La prétention de A______ à l'encontre de B______ SA, fondée sur l'art. 55 CO, se prescrivait, conformément à l'art. 60 al. 1 aCO, dans un délai d'un an à compter du jour de la connaissance du dommage et de la personne qui en était l'auteur. Comme il convenait, eu égard à la brièveté du délai, de ne pas se montrer trop exigeant à l'égard du lésé, il y avait lieu d'admettre que A______ avait eu connaissance de son dommage le 25 janvier 2006 lors de l'établissement de l'expertise médicale relative à l'évolution de son état de santé. Il ressortait en outre de la procédure que A______ disposait des informations nécessaires pour agir en justice contre B______ SA le 30 décembre 2005, date à laquelle il avait informé celle-ci de l'éventuel engagement de sa responsabilité dans l'accident du 25 août 2003. Ainsi, le délai de prescription d'une année ayant commencé à courir le 26 janvier 2006, il n'était pas échu lors de la signature de la première déclaration de renonciation le 8 mars 2006.

Le Tribunal a toutefois considéré que la prescription n'avait pas valablement été interrompue jusqu'au dépôt de la demande en paiement le 11 novembre 2020. Les conditions et réserves assortissant les déclarations de renonciation à la prescription pouvaient, conformément à l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_487/2018 du 30 janvier 2019, être retenues bien qu'elles n'aient pas été alléguées si elles étaient établies par les pièces produites. Par ailleurs, dans la mesure où B______ SA a contesté l'allégation de A______ relative à l'interruption de la prescription, il incombait à celui-ci de prouver que la prescription avait été valablement interrompue. A teneur de la déclaration de renonciation à la prescription du 11 décembre 2007, sa validité était subordonnée au retrait de la poursuite notifiée le 18 janvier 2007. Or, A______ n'avait pas démontré avoir procédé à ce retrait. Il en résultait que la prescription n'avait pas été valablement interrompue par cette déclaration. Le délai de prescription était en conséquence venu à échéance une année après la notification de la poursuite, soit le 19 janvier 2008. Dans la mesure où les déclarations de renonciation signées ultérieurement étaient soumises à la condition que la prescription ne fût pas acquise, elles n'avaient pas pu interrompre celle-ci. Au demeurant, la déclaration de renonciation du 13 janvier 2020 était conditionnée au retrait et à la radiation de la poursuite introduite le 27 décembre 2019. Or, là également, A______ n'avait pas démontré avoir satisfait à cette condition. A______ avait en conséquence échoué à démontrer que B______ SA avait valablement renoncé à se prévaloir de la prescription jusqu'à l'introduction de la procédure en paiement.

Enfin, le Tribunal a retenu que la prescription de plus longue durée du droit pénal ne s'appliquait pas puisque, même à supposer que des actes objectivement punissables aient été commis, ils étaient le fait d'un employé de B______ SA n'ayant pas la qualité d'organe de celle-ci. Or, la prescription de l'action pénale ne pouvait être invoquée en matière de responsabilité de l'employeur pour ses auxiliaires ou employés. La prétention de A______ à l'égard de B______ SA était dès lors prescrite.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel formé est recevable pour avoir été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ) dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 145 al. 1 let. a et 311 CPC) à l'encontre d'une décision partielle (le jugement querellé mettant fin à la procédure à l'égard de B______ SA), laquelle est immédiatement attaquable (art. 308 al. 1 let. a CPC; Jeandin, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 8 ad art. 308 CPC); le jugement entrepris statue, par ailleurs, sur un litige de nature patrimoniale dont la valeur litigieuse est, compte tenu de la somme réclamée, supérieure à 10'000 fr. (art. 91 et 308 al. 2 CPC).

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans les limites posées par les maximes des débats et de disposition, applicables au présent contentieux (art. 55 et 58 CPC). La procédure simplifiée est applicable (art. 243 al. 1 CPC).

1.3 Etant donné que seule l'admissibilité de l'exception de prescription soulevée par B______ SA est litigieuse en appel, ladite société sera, dans un but de simplification, désignée ci-après comme l'intimée.

2. L'appelant allègue, à l'appui de son appel, un fait nouveau (allégué no 141), à savoir qu'il a retiré l'ensemble des poursuites initiées à l'encontre de l'intimée à compter de 2006, et produit plusieurs pièces nouvelles destinées à l'établir (pièces nos 36 à 41). Il soutient que ces éléments nouveaux sont recevables dans la mesure où la question du retrait des poursuites engagées à l'encontre de l'intimée a été abordée pour la première fois dans le cadre du jugement entrepris, cette question n'ayant pas fait l'objet de développement en première instance. Il ne pouvait ainsi se douter que le premier juge en tiendrait compte pour rendre le jugement querellé.

L'intimée conteste la recevabilité de l'allégué nouveau et des pièces nouvelles de l'appelant. Elle soutient que dans la mesure où celui-ci avait déjà connaissance des éléments concernés, il était en mesure de s'en prévaloir en première instance déjà. L'appelant ne motivait au demeurant pas de manière suffisante les motifs pour lesquels il ne lui était pas possible d'en faire état auparavant. En tout état, l'appelant n'avait pas fait preuve de la diligence requise, le thème de la prescription avait été abordé dès le début de la procédure et elle avait contesté dans son mémoire de réponse son allégué selon lequel la prescription avait été interrompue de 2006 à 2020 par l'intermédiaire de poursuites ou de déclarations de renonciation à la prescription. Cette contestation était suffisamment précise au regard de l'allégué peu détaillé de l'appelant.

2.1

2.1.1 La Cour examine d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], 3ème éd., 2016, n. 26 ad art. 317 CPC).

Aux termes de l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1 et la référence).

S'agissant des pseudo nova (unechte Noven), soit ceux qui existaient déjà au début des délibérations de première instance, il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le fait ou le moyen de preuve n'a pas pu être introduit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 42 consid. 4.1). Dans le système du CPC, tous les faits et moyens de preuve doivent en principe être apportés dans la procédure de première instance; la diligence requise suppose donc qu'à ce stade, chaque partie expose l'état de fait de manière soigneuse et complète et qu'elle amène tous les éléments propres à établir les faits jugés importants (arrêts du Tribunal fédéral 5A_756/2017 du 6 novembre 2017 consid. 3.3; 5A_445/2014 du 28 août 2014 consid. 2.1; 4A_334/2012 du 16 octobre 2012 consid. 3.1).

La prise en considération de pseudo nova est admissible en procédure d'appel lorsque seule la lecture du jugement attaqué leur confère une pertinence (arrêt du Tribunal fédéral 4A_540/2014 du 18 mars 2015 consid. 3.1), lorsqu’une thématique est abordée pour la première fois (arrêts du Tribunal fédéral 5A_697/2020 du 22 mars 2021 consid. 3; 4A_360/2017 du 30 novembre 2017 consid. 8.1; 4A_305/2012 du 6 février 2013 consid. 3.3) ou lorsque le comportement de la partie adverse en première instance a permis de croire qu'il n'était pas nécessaire de les présenter (arrêts du Tribunal fédéral 5A_697/2020 du 22 mars 2021 consid. 3; 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 5.4).

2.1.2 Conformément à la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), applicable au présent litige (cf. consid. 1.2), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès (ATF 123 III 60 consid. 3a). Les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions (fardeau de l'allégation subjectif), produire les moyens de preuve qui s'y rapportent (fardeau de l'administration de la preuve) et contester les faits allégués par la partie adverse (fardeau de la contestation; ATF 144 III 519 consid. 5.1).

Les faits pertinents allégués doivent être suffisamment motivés (charge de la motivation des allégués). Les exigences quant au contenu des allégués et à leur précision dépendent, d'une part, du droit matériel, soit des faits constitutifs de la norme invoquée et, d'autre part, de la façon dont la partie adverse s'est déterminée en procédure (ATF 144 III 519 consid. 5.2.1.1).

Dans un premier temps, le demandeur doit énoncer les faits concrets justifiant sa prétention sans qu'il ait toutefois besoin de les exposer dans les moindres détails. Un fait est suffisamment allégué s'il est introduit en procédure avec l'indication des traits ou contours essentiels qui le caractérisent usuellement dans la vie courante. L'allégué doit tout de même être suffisamment précis pour que la partie adverse puisse indiquer dans quelle mesure elle le conteste, voire présenter déjà ses contre-preuves. Dans un second temps, si la partie adverse a contesté des faits, le demandeur est contraint d'exposer de manière plus détaillée le contenu de l'allégation de chacun des faits contestés (fardeau de la motivation; ATF 144 III 519 consid. 5.2.1.1; 136 III 322 consid. 3.4.2 = JdT 2011 II 537; 127 III 365 consid. 2b; Chabloz, Petit commentaire CPC, 2020, n. 5 à 7 ad art. 55 CPC).

2.1.3 Aux termes de l'art. 8 CC, chaque partie doit prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. Celui qui prétend être titulaire d'un droit doit prouver les faits générateurs dont dépend la naissance du droit. En revanche, celui qui invoque l'extinction d'un droit ou conteste sa naissance ou sa mise en application a le fardeau de la preuve des faits destructeurs ou dirimants. Il s'agit là d'une règle générale qui, d'une part, peut être renversée par des règles légales concernant le fardeau de la preuve et qui, d'autre part, doit être concrétisée dans le cas d'espèce (ATF 139 III 13 consid. 3.1.3.1; 130 III 321 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_317/2021 du 12 octobre 2021 consid. 3).

Il appartient au débiteur d'alléguer et de prouver les faits qui sous-tendent la prescription. Le créancier peut opposer le fait que la prescription a été empêchée, suspendue ou interrompue. Il s'agit d'un fait dirimant qu'il appartient au créancier d'alléguer et de prouver (Grobéty, La suspension conventionnelle de la prescription et sa mise en œuvre procédurale, in: PJA 2021 p. 720, p. 723;
cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_487/2018 du 30 janvier 2019 consid. 4.3.1).

Une déclaration de renonciation à la prescription peut être soumise à une condition suspensive, soit à la survenance d'un évènement futur et incertain (Pichonnaz, Commentaire romand CO I, 3ème éd., 2021, n. 1, 3, 14 et 36 ad art. 151 CO et n. 25 ad art. 141 CO). L'existence d'une condition suspensive doit être démontrée par le débiteur et sa réalisation par le créancier (Pichonnaz, op. cit., n. 61 et 62 ad art. 151 CO et les références citées).

2.2 En l'espèce, contrairement à ce que soutient l’intimée, l’appelant a suffisamment motivé les raisons pour lesquelles il n’a pas été en mesure d’introduire devant le premier juge les faits et moyens de preuve nouveaux invoqués en appel. Il ne se contente en effet pas de soutenir que la nécessité d’alléguer le retrait des poursuites engagées à l’encontre de l’intimée n’est apparue que lors du prononcé du jugement querellé, mais explique également que cette question n’a été abordée par aucune des parties en première instance.

Il n’est pas contesté par les parties que le retrait par l’appelant des poursuites qu’il a initiées à l’encontre de l’intimée constitue un pseudo nova dont l’invocation n’est admissible en seconde instance que pour autant qu’il soit démontré que, malgré la diligence requise, il n’a pas pu être allégué devant l’autorité précédente.

Dans sa demande en paiement, l’appelant a exposé avoir interrompu la prescription de sa créance par l’intermédiaire de poursuites ou de déclarations de renonciation à la prescription et a produit les documents concernés (allégué no 32 et pièces nos 31 et 32). Dans ses déterminations, l'intimée a admis l’existence des poursuites et des déclarations de renonciation, mais a contesté que la prescription ait été interrompue. Dans la partie en droit de son écriture, elle a motivé sa position en faisant valoir que, lors de la signature le 8 mars 2006 de la première déclaration de renonciation à la prescription, le délai de prescription d’un an de l’art. 60 al. 1 aCO était déjà échu. Ainsi, dès lors que la validité de ladite déclaration de renonciation était soumise à la condition que la prescription ne soit pas déjà acquise, celle-ci n’avait pas été interrompue. L’intimée, à qui incombait le fardeau d'alléguer leur existence, n’a en revanche pas fait mention que certaines des déclarations de renonciation étaient conditionnées au retrait des poursuites précédemment engagées ni n'a, à aucun moment, soutenu que ces conditions suspensives ne se seraient pas réalisées. Ainsi, à défaut pour l'intimée de s'être prévalue desdites conditions, il y a lieu d'admettre que l'appelant pouvait considérer que leur réalisation n'était pas litigieuse et partant se contenter de détailler le contenu de son allégation relative à l'interruption de la prescription en fonction des arguments soulevés par l'intimée dans son écriture. Il ne saurait en conséquence être considéré que l'appelant n'a pas fait preuve de la diligence requise en n'alléguant et en ne prouvant qu'au stade de l'appel le retrait des poursuites engagées à l'encontre de l'intimée. La nécessité de se prévaloir de ce fait et de le démontrer n'est en effet apparue qu'à la suite du prononcé du jugement entrepris relevant l'existence, pourtant non alléguée, de la condition suspensive du retrait des poursuites et examinant si sa réalisation était établie. L'allégué no 141 de l'appelant ainsi que les pièces nouvelles nos 36 à 41 produites à l'appui seront dès lors jugées recevables.

La situation traitée dans l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_487/2018 ne saurait être considérée comme étant similaire au cas d'espèce. D'une part, cet arrêt n'examine pas les conditions de recevabilité de pièces nouvelles produites en appel. D'autre part, la réserve assortissant les déclarations de renonciation litigieuses retenue hors allégués par le juge, à savoir que celles-ci valaient pour autant que la prescription ne fût pas déjà acquise, ne constituait pas une condition suspensive. Enfin, la preuve de l'existence d'une déclaration de renonciation n'avait pas été apportée pour une partie de la période concernée.

3. Il convient en conséquence d'examiner si, au regard des éléments nouveaux introduits en appel, le raisonnement du premier juge selon lequel l'appelant a échoué à démontrer que la prescription de sa créance a valablement été interrompue demeure correct.

3.1 Selon l'art. 135 ch. 2 CO, la prescription est interrompue, notamment, lorsque le créancier fait valoir ses droits par des poursuites, par une requête de conciliation, ou par une action devant un tribunal.

S’agissant de la renonciation du débiteur à exciper de la prescription pour une durée déterminée, le Tribunal fédéral a considéré, dans le cas où la déclaration de renonciation suivait une proposition du créancier indiquant qu’une telle renonciation serait préférable aux "notifications rituelles en la matière", que le débiteur acceptait d’être placé dans la même situation que si les notifications évitées avaient eu lieu, de sorte que la renonciation équivalait à une interruption du délai de prescription (ATF 112 II 231 consid. 3e/bb).

L’interruption du délai de prescription fait partir un nouveau délai, dès le jour qui suit celui où l’acte interruptif a eu lieu (art. 137 al. 1 CO; Pichonnaz, Commentaire romand CO I, 3ème éd., 2021, n. 1 ad art. 137 CO).

3.2 Il n'est pas contesté par les parties que les déclarations de renonciation signées par l'intimée équivalent à une interruption de la prescription ni que celle-ci, pour autant qu'elle ne soit pas intervenue avant le 8 mars 2006 (cf. consid. 4 ci-dessous) a valablement été interrompue jusqu'au 19 janvier 2008 (soit une année après la notification du commandement de payer du 18 janvier 2007).

Le 11 décembre 2007, l'intimée a signé une déclaration de renonciation à la prescription pour une durée d'une année, soit jusqu'au 31 décembre 2008, dont la validité était subordonnée au retrait de la poursuite no 1______. Selon les pièces nouvellement produites, la poursuite concernée a été retirée par courrier du 12 décembre 2007. Ainsi, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, ladite déclaration a déployé ses effets.

La prescription a par la suite valablement été interrompue par la signature de déclarations de renonciation à la prescription les 16 décembre 2008, 8 décembre 2009, 26 novembre 2010, 15 décembre 2011, 18 décembre 2012, 5 décembre 2013 et 10 décembre 2015, lesquelles étaient valables jusqu'au 31 décembre de l'année suivante, ainsi que par l'introduction des poursuites nos 2______, 3______ et 4______ les 22 décembre 2014, 27 décembre 2016 et 15 décembre 2017.

La déclaration de renonciation à la prescription du 29 novembre 2018, valable selon son texte du 22 décembre 2014 jusqu'au 31 décembre 2019, était subordonnée au retrait des trois poursuites susmentionnées. Ces poursuites ayant, à teneur des pièces nouvellement produites, été radiées le 21 février 2019, la prescription a valablement été interrompue par ladite déclaration.

La prescription a finalement été interrompue par le dépôt, le 27 décembre 2019, d'une réquisition de poursuite, laquelle a fait partir un nouveau délai d'une année.

La demande en paiement en vue de conciliation ayant été déposée le 11 novembre 2020, il y a lieu d'admettre, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, que l'appelant a valablement interrompu la prescription de sa créance à l'égard de l'intimée, soit par l'introduction de poursuites soit par des déclarations de renonciation à la prescription.

En tout état, même en admettant que la recevabilité des éléments nouveaux invoqués en appel aurait dû être niée, le retrait des poursuites mentionnées dans les déclarations de renonciation du 11 décembre 2007 et 29 novembre 2018 peut être déduit des pièces produites. En effet, postérieurement à la déclaration de renonciation du 11 décembre 2007, dont la validité était subordonnée au retrait de la poursuite no 1______, l'intimée a signé plusieurs autres déclarations de renonciation, lesquelles ne faisaient plus mention de la poursuite concernée. En outre, la déclaration de renonciation du 29 novembre 2018, dont la validité était également subordonnée au retrait de poursuites introduites, ne mentionnait pas celle indiquée dans la déclaration de renonciation du 11 décembre 2007. Il pouvait ainsi en être conclu que la poursuite no 1______ avait été retirée par l'appelant. Le même raisonnement peut être appliqué concernant le retrait des poursuites mentionnées dans la déclaration de renonciation du 29 novembre 2018.

Reste à examiner si, comme le soutient l'intimée à titre subsidiaire, la prescription était déjà acquise lors de la signature de la première déclaration de renonciation le 8 mars 2006.

4. L'intimée fait valoir que l'état de santé de l'appelant à la suite de l'accident du 25 août 2003 s'est stabilisé le 13 janvier 2004 dès lors qu'il a, dès cette date et jusqu'à son licenciement, repris son emploi à 70% sans fluctuation dans son taux d'activité. Une amélioration de son état de santé avait au demeurant été constatée en janvier 2006. En outre, il ressortait du rapport médical du 11 mai 2011 que l'état neuropsychologique de l'appelant était globalement superposable à celui de 2004, 2006 et 2008. Le délai de prescription d'un an de l'art. 60 al. 1 aCO avait donc commencé à courir le 13 janvier 2004, de sorte que les prétentions de l'appelant à son encontre étaient prescrites lors de la signature, le 8 mars 2006, de la première déclaration de renonciation à la prescription, dont la validité était soumise à la condition que la prescription ne soit pas déjà acquise. De surcroît, ni l'appelant ni le premier juge n'expliquaient les raisons pour lesquelles l'appelant n'aurait eu connaissance de l'engagement de sa responsabilité dans l'accident qu'en date du 30 décembre 2005, de sorte qu'il y avait lieu d'admettre qu'il était en possession de l'information depuis l'accident.

4.1 A juste titre, les parties ne contestent pas que la prétention en tort moral élevée par l'appelant à l'encontre de l'intimée sur la base de l'art. 55 al. 1 CO est soumise à la prescription de l'ancien art. 60 al. 1 CO (cf. art. 49 al. 1 Tit. fin. CC).

Aux termes de l'art. 60 al. 1 aCO, l'action en réparation du dommage résultant d'un acte illicite se prescrit par un an à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne qui en est l'auteur, et, dans tous les cas, par dix ans dès le jour où le fait dommageable s'est produit.

Le lésé connaît suffisamment le dommage lorsqu'il apprend, touchant son existence, sa nature et ses éléments, les circonstances propres à fonder et à motiver une demande en justice (ATF 136 III 322 consid. 4.1; 131 III 61 consid. 3.1.1). Le lésé n'est pas admis à différer sa demande jusqu'au moment où il connaît le montant absolument exact de son préjudice, car le dommage peut devoir être estimé selon l'art. 42 al. 2 CO (ATF 131 III 61 consid. 3.1.1;
114 II 253 consid. 2a; 111 II 55 consid. 3a). Le dommage est suffisamment défini lorsque le lésé détient assez d'éléments pour qu'il soit en mesure de l'apprécier (ATF 111 II 55 consid. 3a; 109 II 433 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_495/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2.1).

Le délai de l'art. 60 al. 1 aCO part du moment où le lésé a effectivement connaissance du dommage et non de celui où il aurait pu découvrir l'importance de sa créance en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances (ATF 136 III 322 consid. 4.1; 111 II 55 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_495/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2.1).

Lorsque l'ampleur du préjudice dépend d'une situation qui évolue, le délai de prescription ne court pas avant le terme de cette évolution. Tel est le cas notamment du préjudice consécutif à une atteinte à la santé dont il n'est pas possible de prévoir d'emblée l'évolution avec suffisamment de certitude (ATF 112 II 118 consid. 4; 108 Ib 97 consid. 1c; 92 II 1 consid. 3). En particulier, la connaissance du dommage résultant d'une invalidité permanente suppose que, selon un expert, l'état de santé du lésé soit stabilisé sur le plan médical et que son taux d'incapacité de travail soit fixé au moins approximativement; le lésé doit en outre savoir, sur la base des rapports médicaux, quelle peut être l'évolution de son état (arrêt du Tribunal fédéral 4A_495/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2.2).

Quant à la connaissance de la personne auteur du dommage au sens de l'art. 60 al. 1 aCO, il s'agit plus précisément de la personne contre laquelle l'action en responsabilité pourrait être engagée. Cette connaissance n'est pas acquise dès l'instant où le lésé présume que la personne en cause pourrait devoir réparer le dommage, mais seulement lorsqu'il connaît les éléments propres à fonder et à motiver une demande en justice contre elle (ATF 131 III 61 consid. 3.1.2).

Vu la brièveté du délai, on ne saurait se montrer trop exigeant à l'égard du lésé. Le doute quant à l'existence de faits suffisants pour motiver une demande en justice doit être interprété au préjudice du responsable soulevant l'exception de prescription, qui supporte le fardeau de la preuve (ATF 111 II 55 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_495/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2.3).

4.2 En l'espèce, il ressort des pièces produites en l'état qu'à la suite de l'accident survenu le 25 août 2003, l'incapacité de travail de l'appelant a été totale. Elle s'est ensuite élevée à 50% dès le 19 octobre 2003 et enfin à 30% du 13 janvier 2004 à la fin de ses rapports de travail le 31 mars 2005. Une reprise de son activité professionnelle à son taux d'activité contractuel n'a jamais été possible. Au mois de septembre 2005, l'état de santé de l'appelant s'est péjoré. Attribuant cette péjoration à l'accident subi, l'appelant en a informé l'assurance-accident. Dans un rapport d'expertise du 25 janvier 2006 établi à la demande de celle-ci, la capacité de travail de l'appelant a été estimée à 50% et le lien de causalité avec l'accident a été examiné. Un autre rapport médical du 17 mai 2011 mentionne que la capacité de travail de l'appelant s'est stabilisée à 60% dès janvier 2006. Ainsi, contrairement à ce que soutient l'intimée, il apparaît que le taux d'activité de l'appelant a fluctué après le 13 janvier 2004, diminuant de 70%, à 50%, respectivement 60%. Certes, du mois de janvier 2004 au mois de mars 2005 à tout le moins, le degré d'incapacité de travail de l'appelant n'a fait l'objet d'aucune fluctuation. Il n'existe toutefois aucun élément au dossier démontrant que l'appelant connaissait, à ce moment-là, avec suffisamment de certitude l'évolution prévisible de son état de santé. Le fait qu'il n'ait déposé sa demande de prestations d'invalidité qu'au mois de juillet 2005 constitue un indice en ce sens. Partant, compte tenu des fluctuations intervenues dans le taux d'activité de l'appelant entre l'accident et le mois de janvier 2006 et de l'aggravation de la symptomatologie survenue en 2005 dont l'origine n'a été explicitée que dans le cadre du rapport du 25 janvier 2006, il ne saurait être retenu une stabilisation de l'état de santé de l'appelant avant le mois de janvier 2006.

Au regard de ce qui précède et dans la mesure où il convient, conformément à la jurisprudence de ne pas se montrer trop exigeant à l'égard du lésé au vu de la brièveté du délai relatif de prescription de l'art. 60 al. 1 aCO, le raisonnement du premier juge selon lequel l'appelant n'a pas eu connaissance de son dommage avant le mois de janvier 2006 n'apparaît pas critiquable.

Compte tenu de la solution retenue, la question de savoir à quelle date l'appelant a eu connaissance des personnes responsables du dommage peut demeurer indécise.

En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que les prétentions de l'appelant à l'égard de l'intimée n'étaient pas prescrites lors de la signature de la première déclaration de renonciation le 8 mars 2006.

Le grief de l'intimée à cet égard est ainsi infondé.

5. Compte tenu de ce qui précède, les chiffres 1 à 4 du dispositif du jugement querellé seront annulés et la cause renvoyée à l'autorité précédente afin qu'elle instruise et statue sur les conclusions en paiement de l'appelant à l'encontre de l'intimée.

6. 6.1 La procédure d'appel se clôturant par une décision de renvoi, l'issue finale du litige ne peut être déterminée. Le sort des frais de première instance devra en conséquence être tranché par l'autorité précédente dans le cadre du nouveau jugement à prononcer.

6.2 Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront arrêtés à 1'800 fr. (art. 13, 22 et 35 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile [RTFMC]) et mis à la charge de l'intimée qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais, d'un montant correspondant, fournie par l'appelant, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). L'intimée sera en conséquence condamnée à rembourser à l'appelant la somme de 1'800 fr. à titre de frais judiciaires avancés par lui.

L'intimée sera également condamnée à s'acquitter des dépens de l'appelant, lesquels seront arrêtés à 2'000 fr., débours et TVA inclus (art. 84, 85, 87 et 90 RTFMC, 25 et 26 LaCC).

C______ SA s'en étant remis à justice quant au bien-fondé de l'appel formé par l'appelant, il n'y a pas lieu de la condamner à participer aux frais judiciaires ni de lui allouer des dépens.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre le jugement JTPI/3429/2022 rendu le 18 mars 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23044/2020-21.

Au fond :

Annule les chiffres 1 à 4 du dispositif de ce jugement.

Rejette l'exception de prescription soulevée par B______ SA.

Renvoie la cause au Tribunal de première instance pour la suite de la procédure.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'800 fr., les met à la charge de B______ SA et dit qu'ils sont compensés avec l'avance de frais fournie par A______, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ SA à verser à A______ les sommes de 1'800 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires et de 2'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX,
Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.