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Décisions | Chambre civile

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C/5073/2018

ACJC/1253/2022 du 13.09.2022 sur JTPI/7287/2021 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5073/2018-19 ACJC/1253/2022

ARRÊT

 

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 13 septembre 2022

 

Entre

1)             LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 1______ DE LA COMMUNE DE A______, représentée par M. B______, ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juin 2021, comparant par
Me Jacques ROULET, avocat, Roulet Avocats, rond-point de Plainpalais 2,
1205 Genève, en l’étude duquel elle fait élection de domicile.

2)             LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 2______ DE LA COMMUNE DE A______, représentée par M. C______, ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juin 2021, comparant par
Me Jacques ROULET, avocat, Roulet Avocats, rond-point de Plainpalais 2,
1205 Genève, en l’étude duquel elle fait élection de domicile.

3)             LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 3______ DE LA COMMUNE DE A______, représentée par Mme D______, ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juin 2021, comparant par
Me Jacques ROULET, avocat, Roulet Avocats, rond-point de Plainpalais 2,
1205 Genève, en l’étude duquel elle fait élection de domicile.

4)             LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 4______ DE LA COMMUNE DE A______, représentée par M. E______, ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juin 2021, comparant par
Me Jacques ROULET, avocat, Roulet Avocats, rond-point de Plainpalais 2,
1205 Genève, en l’étude duquel elle fait élection de domicile.

et

1)             Monsieur F______, domicilié ______, intimé, comparant par
Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

2)             Monsieur G______, domicilié ______, intimé, comparant par
Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

3)             Madame H______, domiciliée c/o Mme I______, ______, intimée, comparant par Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

4)             Monsieur J______, domicilié p.a. Mme K______, ______, intimé, comparant par Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

5)             Madame K______, domiciliée ______, intimée, comparant par
Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.           Par jugement du 3 juin 2021, communiqué pour notification le lendemain et reçu par les parties le 7 juin 2021, le Tribunal de première instance a débouté la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 1______ de la Commune de A______ [GE], la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 2______ de la Commune de A______, la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 3______ de la Commune de A______ et la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 4______ de la Commune de A______ (ci-après : Les Communautés) de leurs conclusions, a arrêté les frais judiciaires à 18'840 fr. tout en les compensant avec les avances fournies, a condamné les Communautés conjointement et solidairement à payer le montant de 450 fr. à F______, G______, H______, J______ et K______ (ci-après : Les membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______) pris conjointement et solidairement, et enfin a condamné les Communautés conjointement et solidairement à verser 10'000 fr. au titre de dépens aux membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ pris conjointement et solidairement.

B.            a. Par acte expédié au greffe de la Cour le mercredi 7 juillet 2021, les Communautés appellent de ce jugement, sollicitant son annulation. Elles concluent (i) au constat de la nullité de l'acte du 16 mai 2003 modifiant l'assiette de la servitude RS 5______, (ii) à la modification du registre foncier en ce que la servitude RS 5______ soit rétablie dans son tracé original selon le plan de servitude annexé à la mutation 6______/98 établi le 4 août 1998 et modifié le 28 avril 1999, précédant la modification actée en 2003, (iii) à ce qu'il soit dit que ladite servitude ne permet pas aux propriétaires des parcelles dominantes d'en faire un chemin d'accès automobile à une construction en habitat groupé ou ordre contigu au sens des articles 59 al. 3 et 4 LCI, (iv) à ce qu'il soit fait interdiction aux membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ d'user de ladite servitude comme accès automobile principal planifié aux constructions projetées dans la demande préalable d'autorisation de construire formée auprès du Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie N° DP 7______ et (v) à ce qu'il soit dit que l'usage de ladite servitude est limité à un chemin d'accès automobile pour des constructions totalisant un maximum de 15 places de parking pour l'ensemble des fonds dominants, (vi) avec suite de frais.

b. Par réponse du 6 octobre 2021, les membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ ont conclu au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais.

c. Les parties ont respectivement répliqué le 27 octobre 2021 et dupliqué le 23 novembre 2021, persistant chacune dans leurs conclusions respectives.

d. La cause a été gardée à juger par avis du greffe de la Cour du 24 novembre 2021.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.      Les Communautés sont toutes quatre des communautés de copropriétaires par étages dont les droits ont pour objet des parcelles situées sur la partie Sud du lieu-dit les L______, sur lesquelles ont été érigées trois barrettes d'immeubles disposées en fer à cheval – trois immeubles côté Ouest, trois immeubles côté Est et deux immeubles côté Sud –correspondant aux adresses numéros ______ à ______ de la route 8______ à A______.

b.      Le registre foncier et le cadastre font ressortir ce qui suit à ce propos:

-          la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 1______ de la Commune de A______ est propriétaire de la parcelle 1______, commune de A______, sur laquelle sont érigés les immeubles sis aux ______, ______, ______ et ______ de la route 8______, formant respectivement la barrette Ouest et le côté Ouest de la barrette Sud;

-          la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 2______ de la Commune de A______ est propriétaire de la parcelle 2______, commune de A______, sur laquelle sont érigés les immeubles sis aux ______ et ______ de la route 8______, formant la partie supérieure de la barrette Est;

-          la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 3______ de la Commune de A______ est propriétaire de la parcelle 3______, commune de A______, sur laquelle est érigé l'immeuble sis au ______ route 8______, formant la partie inférieure de la barrette Est;

-          la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 4______ de la Commune de A______ est propriétaire de la parcelle 4______, commune de A______, sur laquelle est érigé l'immeuble sis au ______ route 8______, formant le côté Est de la barrette Sud;

-          la parcelle 20______, commune de A______, est dépendante des parcelles 2______, 3______, 4______ et 1______ précitées: elle comprend (i) la partie centrale du fer à cheval, ouvert vers le Nord, par laquelle on accède aux immeubles, puis (ii) une zone de verdure entourant partiellement le fer à cheval constitué par les trois barrettes d'immeubles, en ses côtés Ouest, Sud et Sud-Est.

c.       Les membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ sont, quant à eux, propriétaires de plusieurs parcelles situées au Nord du groupe d'immeubles précité (supra, lit a):

-          K______ et à J______ sont propriétaires de la parcelle 9______, commune de A______, jouxtant le groupe d'immeubles précité par le Nord;

-          G______ est propriétaire de la parcelle 10______, commune de A______, jouxtant elle aussi le groupe d'immeubles précité par le Nord;

-          G______ est également propriétaire de la parcelle 11______, commune de A______, jouxtant la précédente par le Nord;

-          H______ est propriétaire des parcelles 12______ et 13______, commune de A______, jouxtant la précédente par l'Ouest tout en s'étirant vers le Nord;

-          F______ est propriétaire de la parcelle 14______, commune de A______, jouxtant les précédentes par l'Ouest;

-          G______ est par ailleurs propriétaire de la parcelle 15______, commune de M______, située à l'Ouest de la précédente dont elle est toutefois séparée par une rivière (N______);

-          F______ est propriétaire des parcelles 16______ et 17______, commune de A______, longeant la parcelle 12______ par l'Ouest tout en s'étirant vers le Nord.

d.      La servitude originelle faisant l'objet du litige a été inscrite le ______ juin 2000 et porte le numéro original Pj 18______. Elle figure au registre des servitudes sous numéro RS 5______ et porte sur un "passage à pied et pour tous véhicules" avec une assiette définie selon le plan de servitude 19______ établi par O______, ingénieur et géomètre officiel, le 4 août 1998. L'assiette de cette servitude – avant sa modification survenue en 2003 (infra, lit h) – (i) débute au Sud-Ouest de la parcelle 20______ sur laquelle elle longe le Sud des parcelles 1______, 4______ et 3______ en direction de l'Est, (ii) avant de former un coude remontant vers le Nord toujours en longeant la parcelle 3______ par l'extérieur jusqu'à la hauteur du coude formé par le chemin 21______ et (iii) se continue au-delà vers le Nord sur la parcelle 2______ de laquelle elle longe les limites par l'intérieur, d'abord en direction Nord puis (iv) en formant un coude à 90° en direction Ouest, (v) avant de stopper son cours à l'orée de la jonction des parcelles 9______ et 10______.

e.           La constitution de cette servitude résulte d'un acte de Me P______, notaire à Genève, passé le 17 septembre 1998 (ainsi que les 14, 16 et 21 décembre 1999) entre les membres de l'Hoirie de Q______ [soit l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______] – à savoir R______ (née [nom de famille de Q______] et au décès de laquelle (______ 2016) succéderont plus tard, notamment, J______ et K______, S______ (au décès duquel succéderont plus tard, notamment, F______, G______ et H______ née [nom de famille de Q______/S______]) et T______ –, par lequel ceux-ci (i) ont procédé à des divisions et réunions de parcelles réparties sur plus de 85'000 m2 comprenant les parcelles devenues à ce jour propriété de l'ensemble des parties appelantes et intimées et (ii) ont constitué d'un commun accord – en sus d'une servitude de passage à pied (public) au profit de la commune de A______ (Pj 18______ et RS 22______) – la servitude de passage à pied et pour tous véhicules litigieuse sus-évoquée, au profit et sur diverses parcelles ayant fait l'objet de cette division-réunion et dont l'assiette renvoyait au plan de servitude 19______, "les comparants, ou du moins les propriétaires des parcelles grevées, s'engageant d'ores et déjà à approuver, en cas de nécessité, de nouveaux plans apportant de légères modifications, à la demande d'un service administratif, l'assiette des deux servitudes constituées ci-dessus".

L'acte passé le 17 septembre 1998 donnait par ailleurs acte à S______ et T______, attributaires des parcelles sur lesquelles le projet de construction d'un groupe d'immeubles aux L______ en était au stade du dépôt de la demande d'autorisation de construire définitive (les immeubles A, B, C, D, E et F, constituant le "projet U______"), de ce que les comparants consentaient au projet (y compris R______, non concernée par cette réalisation). S______ et T______ s'engageaient réciproquement l'un vis-à-vis de l'autre "à concéder les servitudes nécessaires à la réalisation desdits immeubles", les mêmes droits et obligations s'étendant à la partie de l'ensemble des parcelles sur laquelle était envisagée par ailleurs l'édification d'autres constructions (immeubles G et H) venant agrandir le complexe des L______ "si ces derniers immeubles sont effectivement construits".

f.       L'autorisation de construire sollicitée (concernant les immeubles A à F érigés sur les parcelles des Communautés) sera octroyée le 22 juillet 1999 avec la mention que "[une partie du lieu-dit des] L______ sera maintenu en zone verte, non constructible". Ouvert en mai 2000, le chantier s'est achevé en 2002, année au cours de laquelle les différents lots de PPE furent commercialisés.

g.      Les actes de vente y relatifs ont été instrumentés pour partie par Me V______, notaire à Genève – à l'instar de celui passé le 19 avril 2002 entre T______ (vendeur) d'une part, W______ et B______ (acheteurs) d'autre part, lequel portait sur un appartement de 6 pièces en attique situé sur la parcelle 1______, commune de A______ –, pour partie par Me G______, notaire à Genève. Cet acte mentionne (i) que l'acquéreur "déclare avoir reçu une liste détaillée de toutes les servitudes intéressant tant lesdits droits de copropriété que l'immeuble comme tel", (ii) que le vendeur "se réserve le droit d'épurer, de constituer et de modifier, à ses frais, tant sur l'immeuble comme tel, que sur les droits de copropriété présentement vendus, toutes servitudes en charge ou en droit indispensables à la bonne exploitation de la copropriété et au bon fonctionnement des immeubles faisant partie des 'L______', soit les immeubles A, B, C, D, E, F, G et H, " et (iii) que l'acquéreur "donne tous pouvoirs et procurations nécessaires au vendeur pour le représenter aux fins de signer tous actes et pièces relatifs à l'épuration, la création ou la modification desdites servitudes, soit aux fins d'effectuer et d'inscrire lesdites opérations au registre foncier". Cette dernière procuration a été insérée dans tous les actes de vente liés à la commercialisation des lots de PPE, qu'ils aient été instrumentés par Me V______ ou par Me G______ en sa qualité de notaire.

L'acte de vente du 19 avril 2002 prévoyait par ailleurs l'acceptation par l'acquéreur de ce que l'immeuble serait administré par X______, à Genève, pour une durée de cinq ans dès réception de l'immeuble.

h.      Un acte valant modifications des deux servitudes sus-évoquées (supra, lit e et f) a été instrumenté les 27 mars, 8 et 25 avril et 6 mai 2003 par Me V______ entre les comparants suivants :

-          Les membres de l'Hoirie de S______ (supra, lit e), à savoir ses enfants (F______, G______ et H______) et I______, sa veuve, tous représentés par Me G______ (par ailleurs associé en l'Etude de notaires de Me V______), en leur qualité de propriétaires des parcelles 23______ et 24______ devenues depuis lors les parcelles 16______, 12______, 17______, 14______, 13______, 11______ et 10______, commune de A______;

-          R______ (supra, lit e) propriétaire de la parcelle 9______, commune de A______;

-          Y______ (sous-directeur de X______) et T______, représentant les copropriétaires par étages ayant des droits sur les parcelles 2______, 3______, 4______, 1______ et 20______, commune de A______;

-          La Commune de A______ représentée par son conseil administratif (pour ce qui concerne la modification de la servitude de passage à pied [supra, lit e]).

i.        L'assiette de la servitude de passage à pied et pour tous véhicules figurant au RS sous N° 5______ (supra, lit d et e) a été modifiée "en ce sens qu'elle s'exercera désormais sur la surface figurée par le symbole C2 au nouveau plan de servitude N° 1" dressé le 20 septembre 2002 par O______, ingénieur-géomètre officiel. La modification de l'assiette précédente (supra, lit d) s'opère sur trois volets, ce qui ressort des plans de report de servitude établis le 22 août 2017 par cet ingénieur-géomètre officiel, produits par les Communautés sous pièce 37 de leur chargé du 2 juillet 2019:

-          la largeur de l'assiette préexistante a été modifiée à certains endroits, consacrant dans la plupart des cas un élargissement ainsi que cela prévaut surtout dans la remontée vers le Nord (supra, lit d § ii et iii) où l'on passe de 4,5 m à 5,65-5.8 m, de 3,48 m à 5,71 m (coude du chemin 21______) puis de 4,5 m à 5,11-5,54 m; le départ de l'assiette côté route 8______ consacre quant à lui un élargissement de 5,75 m à 6,12 m;

-          l'emprise de l'assiette sur le Nord de la parcelle 2______ (supra, lit d § iv) est fortement diminuée puisque le rectangle précédemment formé par l'assiette qui longeait la limite de la parcelle 2______ en direction Ouest est remplacé par un triangle évanescent direction Nord-Ouest ayant concrètement pour conséquence un report partiel de cette partie de l'assiette de la servitude sur la parcelle 10______;

-          l'assiette se prolonge au-delà de la précédente (supra, lit d § v) en direction Nord, à cheval sur les parcelles 10______ et 9______ avant de former un coude à 90° direction Ouest de façon à longer la limite Nord de la parcelle 9______ à l'intérieur de celle-ci.

Cette modification de la servitude RS 5______ a été inscrite au registre foncier en 2003 sous Pj 25______.

j.        Le notaire ayant instrumenté l'acte valant modification de la servitude RS 5______ (supra, lit i) en a adressé une copie à Y______ par pli du 18 août 2003 en invitant ce dernier "en votre qualité de mandataire et/ou représentant de tous les copropriétaires des 'L______'" à "faire parvenir à chacun d'eux lors d'un prochain mailing ou d'une prochaine assemblée, copie de cet acte pour le bon ordre de leurs et de vos dossiers".

k.      Les parcelles appartenant aux membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ (supra, lit c) ont fait l'objet de la demande préalable d'autorisation de construire DP 7______/1, à l'exception de la parcelle 9______, commune de A______ appartenant à K______ et à J______. Déposée en mai 2016, cette demande préalable d'autorisation de construire visait la construction de trois habitats groupés au sens de l'art. 59 al. 4 lit b de la Loi genevoise sur les constructions et les installations diverses (LCI; RSGe L 5 05) et d'un parking souterrain; elle n'a pas abouti dès lors que le Département compétent, par courrier du 7 mai 2018, a confirmé son refus d'admettre le principe d'un report des droits à bâtir entre la parcelle 15______ et les autres parcelles concernées par le projet.

l.        Les copropriétaires d'étage se sont ouverts de la situation induite par la modification de la servitude RS 5______ survenue en 2003 auprès de X______ par pli recommandé de leur conseil daté du 23 février 2017, semble-t-il à l'occasion de la procédure administrative, réclamant une copie de l'acte de modification de servitude (supra, lit h) et l'identité de l'administrateur des copropriétés l'ayant signé pour leur compte.

m.    Une rencontre a été tenue le 24 avril 2017 dans les bureaux de X______, suivie le même jour d'un pli adressé à cette régie par le conseil des copropriétaires d'étages, lesquels considèrent (i) que la modification de la servitude a été opérée au détriment de ses mandants et (ii) que le procédé relève d'un abus du pouvoir de représentation dès lors qu'une telle modification – opérée "au seul profit des propriétaires voisins soit de la Hoirie F___/G___/H___/J___/K______" – était exorbitante au cadre de la procuration conférée en faveur de la partie venderesse par les acquéreurs à l'occasion de la commercialisation des lots de PPE intervenue en 2002 (supra, lit g).

n.      Divers échanges de correspondance se sont tenus par la suite entre le conseil des copropriétaires d'étages, X______ et Me V______, notaire ayant instrumenté l'acte valant modification de la servitude RS 5______ (supra, lit h):

-          X______ a affirmé n'avoir pas retrouvé de documents en relation avec la modification de la servitude survenue en 2003 ou desquels il résulterait que la gérante des copropriétés avait été au courant (pli du 15 mai 2017 au conseil des copropriétaires d'étage);

-          le notaire a indiqué, quant à lui, au même conseil (pli du 30 juin 2017) que X______ était au courant des opérations de modification de la servitude auxquelles Y______ avait activement participé en négociant puis en signant l'acte (supra, lit h), le notaire se référant au surplus à son pli adressé à celui-ci le 18 août 2003 (supra, lit j);

-          les copropriétaires d'étage ont fait part à X______ de leur intention de tenir une assemblée générale extraordinaire pour chacune des quatre copropriétés en date du 29 août 2017 pour autoriser les administrateurs à introduire une action judiciaire contre les membres de la famille [de Q______] et décider du maintien ou non de la gérance au profit de X______ (pli du 25 juillet 2017 à ce dernier);

-          les quatre assemblées générales extraordinaires se sont tenues comme annoncé, en date du 29 août 2017, chacune décidant (i) de résilier le mandat de gérance de X______ et (ii) de donner pouvoir à l'administrateur de la PPE d'agir judiciairement en rectification du registre foncier et en négation du droit de faire usage de la servitude pour desservir un habitat groupé de 48 nouveaux logements, ce dont X______ a été informé par pli di 30 août 2017.

o.      Au bénéfice d'une autorisation de procéder délivrée le 8 avril 2019 à la suite d'une requête de conciliation déposée le 1er mars 2018, les Communautés ont introduit une action en rectification du registre foncier couplée avec une action négatoire par demande reçue le 2 juillet 2019 au greffe du Tribunal de première instance. Elles ont conclu (i) au constat de la "nullité de l'acte du 16 mai 2003 modifiant l'assiette de la servitude RS 5______", (ii) à la modification du registre foncier en ce sens que l'assiette de cette servitude soit rétablie telle qu'elle existait avant sa modification en 2003, (iii) au constat que cette servitude n'habilite pas les propriétaires des parcelles dominantes à en faire un chemin d'accès automobile à une construction en habitat groupé ou ordre contigu au sens des art. 59 al. 3 et 4 LCI, (iv) à ce qu'il soit fait interdiction aux défendeurs d'user de cette servitude comme accès automobile principal planifié aux constructions visées par la demande préalable d'autorisation de construire portant N° DP 7______, (v) au constat que l'usage de cette servitude est limité à un chemin d'accès automobile pour des constructions totalisant un maximum de 15 places de parking pour l'ensemble des fonds dominants, (vi) le tout avec suite de frais.

Elles se sont prévalues de l'absence de pouvoir de représentation de Y______ et T______ lorsqu'ils ont signé l'acte de modification de servitude, ce qui le rendrait nul et dépourvu d'effet; elles ont estimé en outre qu'indépendamment de l'assiette de la servitude, celle-ci n'a pas été envisagée comme pouvant servir de chemin d'accès à une construction en habitat groupé ou en ordre contigu à l'instar de ce que prévoyait la demande préalable d'autorisation DP 7______, un tel usage constituant une aggravation inadmissible de la servitude pour les fonds servants.

p.      Dans leur mémoire réponse du 21 octobre 2019, les membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ ont conclu à un déboutement complet avec suite de frais. Selon eux, l'acte litigieux a été instrumenté conformément aux règles de l'art par des représentants habilités à agir comme ils l'avaient fait, les modifications de l'assiette s'avérant finalement favorables aux Communautés; de plus, le fait que la servitude RS 5______ soit utilisée pour accéder aux parcelles visées par la procédure en autorisation de construire DP 7______ constituait une évolution prévisible de l'utilisation d'un tel passage.

q.      Un deuxième échange d'écritures a été ordonné, donnant lieu à une réplique suivie d'une duplique reçues par le greffe respectivement les 3 février et 2 mars 2020, par lesquelles les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

r.       Le premier juge – après un transport sur place effectué le 2 juin 2020 – a procédé à l'audition des témoins et des parties:

aa.  Entendue comme témoin le 28 octobre 2020, Z______, copropriétaire domiciliée au ______ route 8______ (parcelle 2______, commune de A______), a déclaré connaître l'existence d'une servitude de passage à pied et pour tout véhicule formant un coude sur l'ensemble de la copropriété, actuellement vouée au passage d'un agriculteur avec ses engins. Elle se souvient avoir signé un acte de vente similaire à celui du 19 avril 2002 (supra, lit g) et indique n'avoir pas été informée d'une modification de la servitude en 2003 (alors qu'elle était copropriétaire depuis un an), dont elle a appris l'existence au moment du projet de construction. Cette problématique n'a jamais été abordée lors d'une assemblée générale des copropriétaires auxquelles X______ a participé avant le changement de régie.

bb. Egalement copropriétaire domiciliée au ______ route 8______, AA______ a été entendue comme témoin le 28 octobre 2020. Ayant acquis son bien en janvier 2009, elle connaît la servitude de passage à pied ou pour tout véhicule qui forme un coude au Sud-Ouest de la copropriété. Elle a appris lors d'une assemblée générale des copropriétaires tenue en 2016 que la servitude avait été modifiée par rapport aux actes d'origine, une modification dont X______ lui a indiqué n'avoir pas trouvé trace dans ses archives (ni vote ni information aux copropriétaires).

cc.   AB______, qui a géré les copropriétés afférentes à la résidence des L______ entre 2003 et 2009 alors qu'elle travaillait pour X______, a été entendue comme témoin le 28 octobre 2020. Elle se souvient de l'existence de la servitude de passage à pied et à véhicule qui était utilisée par un paysan exploitant le champ voisin (passage en tracteur) au décès duquel elle a entendu parler d'un projet de construction de villas. Elle indique n'avoir été au courant ni de la modification de la servitude ni d'une information donnée aux copropriétaires à ce sujet (la question n'a pas été abordée lors des assemblées de copropriétaires tenues entre 2003 et 2009), ne se souvenant pas non plus avoir reçu un acte notarié à ce sujet de la part de Me V______ ni qu'une autre personne de X______ l'ait reçu.

dd. P______, ancien notaire ayant instrumenté l'acte à l'origine de la constitution de la servitude du 17 septembre 1998 (supra, lit e), a été entendu comme témoin le 28 octobre 2020. Son acte tendait à partager l'ensemble des parcelles qui constituaient "[les L______]" et fixait les servitudes nécessaires entre les parcelles dans l'optique de futures constructions. Par ailleurs, une procuration à l'instar de celle prévue par l'acte de vente du 19 avril 2002 (supra, lit g § iii [le PV du 28 octobre 2020, p. 8 in fine, vise en réalité la pièce 26 chargé demandeurs et non 23 chargé défendeurs]) était usuelle pour autant qu'il s'agisse d'une simple adaptation de la servitude ("on doit rester prudent et on ne peut évidemment modifier tout un réseau de servitudes sans demander l'avis des parties").

ee.   O______, géomètre ayant fait les plans successifs relatifs à l'assiette de la servitude RS 5______, a été entendu comme témoin le 28 octobre 2020. La servitude originelle a été conçue et inscrite au registre foncier sur la base des plans fournis par les architectes en charge de la promotion, mais avant la construction des bâtiments. Une fois ceux-ci érigés, en 2002, des relevés ont été faits et il a été constaté que le tracé tel que fixé au départ avait été légèrement décalé. La modification avait pour but de faire correspondre l'assiette de la servitude à la réalité "à savoir l'implantation des clôtures correspondant au passage effectif et des bordures", un procédé usuel dans ce type de promotions. A ce titre, l'élargissement à 5,71m au coude du chemin 21______ (supra, lit i premier tiret) correspondait "à la réalité en fonction de l'implantation des clôtures". Outre ce volet et celui portant sur l'emprise de l'assiette sur le Nord de la parcelle 2______ évoqué par le témoin (supra, lit i, deux premiers tirets), un troisième volet portait sur la modification du tracé grevant entre elles les parcelles appartenant aux membres de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ (supra, lit i, troisième tiret).

ff.    Entendu comme témoin le 28 octobre 2020 (p. 12s), Y______ a déclaré connaître "la promotion des L______" pilotée par X______, ayant succédé au sein de cette entité à la personne responsable du département des promotions. Il a indiqué s'être essentiellement occupé de "faire signer les actes de vente ainsi que les servitudes" sans toutefois se souvenir de ce que la servitude litigieuse avait fait l'objet d'une modification. Dans le contexte d'une promotion, l'assiette des servitudes est cependant ajustée à la réalité du terrain une fois les bâtiments terminés.

gg.  Me V______, notaire ayant instrumenté l'acte valant modification de la servitude litigieuse (supra, lit h et i), a été entendue comme témoin le 4 novembre 2020. Elle avait vérifié le pouvoir de représentation des signataires, condition nécessaire à l'acceptation de l'acte par le registre foncier. Le procédé consistant à prévoir une procuration dans le cadre d'une promotion immobilière en vue de faciliter la modification ultérieure d'une telle servitude voire en créer d'autres, sur la base du fonctionnement du complexe, était courant. Dans le cas d'espèce la modification du tracé de la servitude – à la fois "conforme à ce que l'on voit dans le contexte des promotions" et "en tous cas pas de manière flagrante contraire aux intérêts des copropriétaires" – entrait dans le contexte de la procuration. Le témoin ne se trouvait pas dans un conflit d'intérêts du fait que G______ figurait parmi les signataires de l'acte.

hh. Entendu comme témoin le 4 novembre 2020, AC______, architecte du projet ayant donné lieu à la demande préalable d'autorisation de construire DP 7______/1 (supra, lit k), a indiqué que la desserte des trois habitats groupés par le Nord, c’est-à-dire par l'avenue 26______, n'était pas possible si bien que l'accès par la servitude de passage litigieuse constituait l'unique solution. Dans le cas contraire une telle possibilité aurait été utilisée pour accélérer le démarrage du projet au vu de la levée de boucliers survenue en rapport avec la servitude.

ii.      B______, administrateur de la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 1______ de la Commune de A______, a été entendu en qualité de partie le 4 novembre 2020. La servitude de passage est actuellement utilisée "pour desservir les trois ou quatre parcelles du fond de la copropriété et pour bénéficier à l'agriculteur"; elle a "une vocation uniquement agricole". Il n'avait pas vraiment compris la portée de la procuration contenue dans l'acte de vente qu'il avait lui-même signé en qualité d'acquéreur le 19 avril 2002 (supra, lit g) et n'avait jamais été informé de la modification de la servitude "ni par la régie ni par personne", dont il avait appris l'existence à l'occasion des procédures administratives lancées à l'encontre du projet lié à la DP 7______/1 (supra, lit k): "J'ai eu connaissance d'un projet de construction d'immeubles et que le trafic allait passer par notre chemin". Tous les intervenants lui avaient confirmé que le chemin litigieux était agricole, ce qui lui avait été répété par un représentant de X______ alors qu'il était chez le notaire. Il ne se souvenait pas avoir vu l'extrait du RS 5______ qui ne faisait nulle part état d'une vocation agricole de cette servitude.

jj.     C______, administrateur de la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 2______ de la Commune de A______, a été entendu en qualité de partie le 4 novembre 2020. Il avait acquis son appartement par acte de vente instrumenté par G______ en sa qualité de notaire, lequel lui avait indiqué "que ce chemin était destiné au paysan qui exploitait les terrains derrière la promotion". Il avait appris la modification de la servitude "lorsque l'autre projet a démarré"; il n'aurait par ailleurs jamais imaginé qu'on prévoie un accès par le bas pour desservir un projet de 50 logements [sur une partie des L______] alors que le chemin 26______ "me paraît suffisant à cet effet".

kk. E______, administrateur de la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 4______ de la Commune de A______, a été entendu en qualité de partie le 4 novembre 2020. Il avait "signé l'acte d'achat avec Me G______" et ne se souvenait pas avoir reçu des explications sur la servitude litigieuse dont il avait toutefois eu connaissance par le biais d'un plan du cadastre. Un représentant de X______ lui avait dit qu'elle était destinée à un paysan. Il n'en avait appris la modification qu'au moment de la survenance du projet de nouveaux bâtiments et avait été "choqué d'apprendre que l'on avait utilisé cette servitude pour desservir les futures constructions d'autant que 7 portails donnent directement sur ce chemin".

ll.      G______ a été entendu en qualité de partie le 4 novembre 2020. La servitude litigieuse avait pour vocation de valoriser l'ensemble [des L______] dont la famille avait hérité de Q______ et qui était en zone 5 villa. La procuration stipulée dans les actes de vente était usuelle et visait à permettre "un réglage fin des servitudes constituées"; en l'occurrence la modification n'avait pas eu d'incidence matérielle sur le tracé de la servitude "puisqu'elle est fondée sur un relevé effectué par le géomètre et correspondant à la réalité du terrain". Il n'avait jamais été question d'une servitude à vocation agricole, ce qui ressortait de son intitulé. Un passage par le chemin 26______ était impossible, a fortiori du fait qu'il nécessiterait de franchir des parcelles privées non grevées de servitudes de passage. Le partage de l'Hoirie Q______ opéré en 1998 (supra, lit e) avait abouti à l'attribution des parcelles appartenant aujourd'hui aux Communautés à l'oncle et au père de G______; son oncle les avait conservées pour en faire lui-même la promotion tandis que son père les avait vendues à des sociétés mises en œuvre par X______. G______, notaire, ne pouvait instrumenter lui-même les actes de mise en valeur de la promotion (promesses de vente puis ventes [supra, lit g]) auxquels son oncle était partie; il pouvait en revanche instrumenter les actes du même type s'agissant des aliénations opérées par les sociétés précitées auxquelles son père avait cédé ses droits et avec lesquelles il n'avait aucun lien. La liste des servitudes était envoyée préalablement à la signature des actes aux acheteurs, puis passée en revue lors de la séance; la servitude litigieuse y était mentionnée avec son intitulé – à savoir passage à pied et pour tous véhicules – et G______ n'avait jamais évoqué une destination agricole, ce qui serait allé à l'encontre de l'intitulé clair de la servitude. Cette servitude "était prévue pour les futures constructions et n'avait pas de vocation agricole". Le projet de construction DP 7______/1 était devenu sans objet vu la décision de refus du département compétent (supra, § B lit k), mais "il y aura forcément des développements dans le futur".

D. Dans son jugement, le Tribunal a retenu que la modification de la servitude consacrait pour l'essentiel une adaptation du registre foncier à la réalité du terrain faisant suite à la réalisation de la promotion ayant donné naissance aux immeubles appartenant aux Communautés. Partant, l'acte instrumenté au printemps 2003 par Me V______ n'avait pas été stipulé par des représentants sans pouvoirs et n'était en conséquence pas frappé de nullité. De plus, la finalité de la servitude consistait notamment à assurer un accès en faveur des immeubles appelés à être érigés le moment venu au Nord des parcelles appartenant aux Communautés si bien qu'un projet de construction tel que celui qui avait fait l'objet de la demande préalable d'autorisation de construire DP 7______/1 ne constituait pas une aggravation de la servitude au sens de l'art. 739 CC.

EN DROIT

1. 1.1 A teneur de l'art. 308 al. 1 let. a CPC, l'appel est recevable contre les décisions finales de première instance pour autant que, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions soit de Frs 10'000 au moins. En l'occurrence le jugement querellé est une décision finale (art. 236 CPC) portant sur une valeur litigieuse largement supérieure à 10'000 fr., ce que les parties ne contestent pas.

1.2 Selon l'art. 311 al. 1 CPC l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée. A Genève, l'instance d'appel est la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 1 let. a LOJ).

En l'occurrence, l'appel a été déposé dans le délai et selon la forme prescrits par la loi, de sorte qu'il est formellement recevable.

1.3 La Cour de céans dispose d'un pouvoir de cognition complet tant en fait qu'en droit (art. 310 CPC). Elle revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen, dans les limites posées par les maximes des débats (art. 55 al. 1 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) applicables à la présente procédure si bien que les griefs développés par les appelantes sont recevables.

2. Dans un premier grief, les appelantes reprochent au premier juge d'avoir procédé (i) à une constatation incomplète des faits voire (ii) à une mauvaise appréciation des preuves. Le premier juge se serait limité à mentionner l'acte notarié valant modification de la servitude litigieuse passé au printemps 2003 (supra, en fait, § C lit h), sans toutefois décrire en quoi consistait cette modification, une omission d'autant plus malvenue que l'objet du litige porte précisément sur la péjoration de la situation juridique des appelantes induite par ladite modification et son incidence sur le pouvoir de représentation des personnes y ayant consenti au nom des appelantes. A titre subsidiaire, les appelantes estiment qu'une appréciation des preuves sur la base des pièces de la procédure doit mener au constat d'un élargissement de l'assiette de la servitude stipulé à leur détriment, la largeur de certains tronçons de la servitude du passage étant passée par endroit de 5,75 à 6,12 mètres, de 3,46 et 4,5 à 6,12 mètres, ou encore de 4,5 à 5,54 mètres.

2.1 Le contenu de la servitude telle qu'envisagé originellement ressort de l'acte de constitution passé le 17 septembre 1998 par devant Me P______, notaire, emportant notamment constitution de la servitude de passage à pied et pour tous véhicules litigieuse inscrite le ______ juin 2000 au registre des servitudes sous numéro RS 5______ avec une assiette définie selon le plan de servitude 19______ établi le 4 août 1998 par l'ingénieur et géomètre officiel O______. La constitution de ce droit réel limité (résultant d'un acte notarié passé entre le 17 septembre 1998 et la fin décembre 1999) est intervenue dans le cadre du partage des parcelles constituant à l'époque [les] "L______ " et visait à fixer les servitudes nécessaires entre les parcelles dans l'optique de futures constructions (témoin P______). Cette constitution de servitude a eu lieu avant que ne soit érigé le complexe d'immeubles constituant les trois barrettes situées sur la partie Sud du lieu-dit les L______, une promotion dont le chantier a été ouvert en mai 2000 pour s'achever en 2002, année au cours de laquelle furent commercialisés les lots de PPE.

Le dossier fait ressortir que la servitude litigieuse cumulait deux finalités, à savoir (i) organiser le passage à pied et pour tous véhicules à partir de la route 8______ (située au Sud de l'ensemble des parcelles appartenant aux parties) en relation avec les trois barrettes d'immeubles situées sur la partie Sud du lieu-dit les L______ (supra, en fait, § C lit b) et (ii) assurer la continuation dudit passage au profit de chacune des parcelles sises au Nord de ce groupe d'immeubles (supra, en fait, § C lit c). Cette finalité explique la constitution de servitudes croisées, étant précisé que – s'agissant des parcelles propriété des Communautés – l'assiette grève exclusivement la parcelle 2______ et la parcelle dépendante 20______.

2.2 Pour ce qui touche aux appelantes, l'assiette de la servitude grève exclusivement la parcelle 2______ et la parcelle dépendante 20______. Elle a été dessinée et inscrite sur la base des plans fournis par l'architecte en charge de la promotion, mais avant la construction des immeubles. Une fois ceux-ci érigés, les géomètres ont procédé aux relevés du tracé tel qu'effectivement implémenté sur le terrain, à savoir le passage effectif délimité par les clôtures et les bordures, si bien que le tracé de l'assiette sur les parcelles 2______ et 20______ tel qu'il résulte de la servitude modifiée concrétise une adaptation du registre foncier à la réalité du terrain, un procédé usuel dans le cadre de promotions de ce type. Ces éléments ressortent du témoignage de O______, le géomètre ayant fait les plans relatifs à la servitude originelle et à la modification de celle-ci, ainsi que l'a relevé à juste titre le premier juge (consid. C, p. 18 § 3).

Le fait que cette adaptation du registre foncier à la réalité du terrain consacre effectivement une situation d'élargissement de certaines parties du tracé par rapport à ce qui avait été conçu originellement – étant relevé par ailleurs qu'une partie des modifications consacre une diminution de l'empiètement de l'assiette de la servitude sur les parcelles des appelantes (supra, en fait, § C lit i 2e tiret) – ne permet pas à lui seul de retenir une péjoration de la situation juridique de ces dernières. Il en va de même du volet de ces modification portant sur le tracé de l'assiette grevant entre elles les parcelles appartenant aux intimés (supra, en fait, § C lit i 3e tiret), qui à lui seul ne modifie en rien la charge imposée par ces fonds dominants (et les parcelles issues de la division de certains d'entre eux) sur les parcelles grevées 2______ et 20______.

Les données factuelles dont se prévalent les appelants sous ch. 8 de leur appel ressortent de leur pièce 37 s'agissant de l'ampleur des élargissements que consacre la modification de la servitude (supra, en fait, § C lit i): elles ne modifient pas les constats auxquels est parvenu le premier juge et que la Cour fait siens, à savoir que pour l'essentiel la servitude modifiée se limite à consacrer une adaptation du registre foncier à la réalité du terrain issue des modalités de la réalisation de la promotion opérée par les appelantes, ainsi que cela prévaut habituellement en de telles circonstances.

Les appelantes reviennent par ailleurs longuement sur l'appréciation des faits relatifs à l'assiette de la servitude litigieuse dans le cadre de leur deuxième grief consacré à la question de l'existence d'une procuration valable (mémoire d'appel, en droit, ch. 18 à 24 notamment). Outre les constatations sus-évoquées (supra, consid. 2.1 et 2.3), la Cour entend relever ce qui suit:

- l'affirmation selon laquelle "la modification opérée ne s'est de loin pas limitée à une prétendue adaptation au tracé réel" (mémoire d'appel, en droit, ch. 20 § 2) ne trouve aucune assise dans le dossier. Elle contredit le témoignage de O______, géomètre officiel ayant fait à la fois les plans de la servitude originelle et ceux de la servitude modifiée (supra, ch. 2.2), tandis que les appelants ne produisent aucune pièce qui tendrait à établir une quelconque discrépance entre l'assiette ainsi modifiée et le tracé prévalant sur le terrain en relation avec les parcelles 2______ et 20______. Entendu en qualité de partie, G______ a, lui aussi, souligné que le tracé de l'assiette modifiée était fondé sur un relevé effectué par un géomètre et correspondait à la réalité du terrain. Ainsi et contrairement à ce dont se prévalent les appelantes, la comparaison des tracés respectifs ressortant de leur pièce 37 (relevés du géomètre officiel portant sur les deux tracés successifs) ne permet nullement de déduire que l'assiette modifiée sur les parcelles 2______ et 20______ se distancerait du tracé effectif du chemin litigieux.

- L'élargissement de l'assiette à certains endroits – qui résulte de l'implémentation de la servitude à laquelle ont procédé à l'époque (c’est-à-dire lors de la réalisation de leur propre promotion qui a débuté en mai 2000 pour se terminer courant 2002, année au cours de laquelle furent commercialisés les différents lots de PPE) les propriétaires des parcelles appartenant aujourd'hui aux communautés appelantes – constitue précisément l'objet de ces modifications par lesquelles les parties prenantes s'étaient alors distancées quelque peu de l'assiette originelle établie in abstracto (à savoir avant la construction des immeubles), ainsi que cela se vérifie usuellement en pratique dans ce genre de circonstances, pour aménager concrètement ce passage (témoignages O______, Y______ et V______).

- Quant aux modifications du tracé de la servitude originelle ayant fait l'objet de l'intervention de G______ (mémoire d'appel, en droit, ch. 20 dernier §), elles se rapportaient exclusivement à la partie Nord du tracé de la servitude grevant entre elles les parcelles appartenant aux défendeurs –
à savoir "la modification du tracé sur les parcelles de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______" – et ne touchaient pas l'assiette grevant les parcelles 2______ et 20______, à l'exception de la diminution de l'emprise de l'assiette sur le Nord de la parcelle 2______ favorable aux appelantes (supra, § B lit l deuxième et troisième tiret), ainsi que cela ressort du témoignage de O______. Les appelantes ne sauraient en tirer la conclusion que l'intervention de G______ aurait aussi visé une modification de l'assiette de la servitude grevant les parcelles 2______ et 20______ allant au-delà d'une simple adaptation à la réalité du terrain, ainsi qu'elles le prétendent.

- Les communautés appelantes se prévalent par ailleurs de ce que les modifications litigieuses "n'étaient pas opérées dans un souci de bon fonctionnement des immeubles des appelantes mais bien dans le
cadre de modifications globales en prévision de constructions plus importantes que prévues initialement sur les parcelles de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______
" (mémoire d'appel, en droit, ch. 21 § 1). Cette affirmation, nullement démontrée, demeure sans véritable portée et tend à occulter le fait que lesdites modifications – pour ce qui touche aux parcelles 2______ et 20______ – consacraient des adaptations du registre foncier à la réalité résultant de l'édification des trois barrettes d'immeubles appartenant aux appelantes; on peine à comprendre qu'à ce stade les propriétaires concernés, maîtres d'œuvre de leur propre promotion, aient eu à l'esprit de privilégier à leur détriment des contingences autres que celles liées à la bonne facture de ladite promotion lorsqu'ils ont aménagé concrètement le tracé de la servitude, étant rappelé que les parcelles 3______, 4______ et 1______ (fonds dominants propriété des Appelantes N° 1, 3 et 4) bénéficient aussi de l'assiette litigieuse (pièce 11 défendeurs, p. 29). A vrai dire seule la modification de la partie Nord de l'assiette de la servitude concernant les parcelles restées en mains de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______ pourrait avoir été conçue dans cette perspective; toutefois elle ne constitue pas à elle seule une aggravation de la situation des parcelles appartenant aux appelants qui, en qualité de fonds servants, voient leur situation inchangée dans la mesure où ces parcelles étaient déjà grevées au profit de l'ensemble des parcelles de l'Hoirie F___/G___/H___/J___/K______: on ne voit pas en quoi un aménagement interne de l'assiette de la servitude entre ces fonds dominants pourrait avoir, à elle seule, une incidence sur la charge imposées aux parcelles 2______ et 20______.

2.3 Ce grief tombe ainsi à faux. Au surplus, la préoccupation principale des appelantes se rapporte en réalité à la perspective d'un accroissement du passage des véhicules susceptible d'être induite par l'aboutissement d'un projet immobilier mené par les intimés sur leurs parcelles, une problématique qui n'est pas tant liée à l'assiette de la servitude litigieuse (mise en œuvre dans sa version modifiée depuis près de vingt ans) qu'à son utilisation au profit des fonds dominants dans la perspective de nouvelles constructions au Nord de leurs parcelles.

3. Les appelantes reprochent au premier juge de ne pas avoir retenu la nullité de l'acte valant modification de servitude instrumenté les 27 mars, 8 et 25 avril et 6 mai 2003 par Me V______ (supra, en fait, § C lit h) et de ne pas avoir ordonné la modification du registre foncier en ce sens que la servitude RS 5______ soit rétablie dans son tracé originel. Les représentants des ayant-droits sur les parcelles 2______ à 20______ auraient agi à l'insu des appelantes en abusant de leur pouvoir de représentation; les modifications ainsi consenties l'auraient été au détriment des appelantes et des copropriétaires en PPE. Il en résulterait la nullité de l'acte avec pour conséquence que l'inscription au registre foncier en résultant, dépourvue de cause juridique valable, devant être rectifiée pour en revenir à la situation précédente.

3.1.1 L'art. 32 al. 1 CO prévoit que "les droits et les obligations dérivant d'un contrat fait au nom d'une autre personne par un représentant autorisé passent au représenté". Cette disposition vise la représentation directe et prévoit deux conditions cumulatives: (i) le représentant agit expressément au nom d'autrui et (ii) il dispose des pouvoirs nécessaires à ces fins. L'accomplissement de ces deux conditions est nécessaire pour que les droits et obligations stipulés passent au représenté (CR CO I – C. Chappuis, art. 32 N 20). Ces principes soulèvent la problématique de l'étendue des pouvoirs du représenté qui, lorsque ceux-ci découlent d'un acte juridique, est déterminée par cet acte-même (art. 33 al. 2 CO). A supposer que le représenté sorte de ce cadre, il y a dépassement ou excès de pouvoirs: l'acte accompli l'est alors sans pouvoirs et la seconde condition posée par l'art. 32 al. 1 CO n'est pas remplie, ce qui renvoie aux règles relatives à la représentation sans pouvoir, à savoir aux art. 38 et 39 CO (CR CO I – C. Chappuis, art. 33 N 17). Seule une ratification par le représenté peut guérir les effets d'une représentation ainsi viciée (art. 38 al. 1 CO); à défaut d'une telle guérison, l'acte est invalide et ne déploie aucun effet pour le représenté.

3.1.2 La constitution et la modification de droits réels présuppose l'existence d'une cause juridique valable: pour ce qui tient aux droits réels immobiliers, l'art. 965 al. 1 CC prévoit qu'aucune inscription au registre foncier ne peut avoir lieu sans la légitimation préalable du requérant quant à son droit de disposition et au titre sur lequel se fonde l'opération. Si une inscription est faite sans cause légitime, celui dont les droits réels sont ainsi lésés peut en exiger la radiation ou la modification sous réserve des droits des tiers de bonne fois (art. 975 al. 1et 2 CC). Une inscription est faite indument lorsque le titre d'acquisition n'est pas valable, ce qui ouvre la voie à l'action en rectification du registre foncier (CR CC II – M. Mooser, art. 975 N 21).

3.2.1 Il est constant qu'à l'occasion de la passation de l'acte valant modification de la servitude litigieuse au printemps 2003 par devant Me V______, les copropriétaires des parcelles 2______ à 20______ étaient représentés pour certains par Y______ (sous-directeur de X______), pour d'autres par T______. Chacun des copropriétaires avait, à l'occasion de l'acquisition de ses parts de PPE lors de leur commercialisation en 2002 par S______ (plus précisément les sociétés auxquelles il avait cédé ses droits sous le pilotage de X______ ainsi que cela ressort de l'audition de G______) et T______ – tous deux attributaires des parcelles 2______ à 20______ sur lesquelles a été réalisée la promotion (supra, en fait, § C lit e) – donné procuration à son vendeur "pour le représenter aux fins de signer tous actes et pièces relatifs à l'épuration, la création ou la modification" des servitudes "en charge ou en droit indispensables à la bonne exploitation de la copropriété et au bon fonctionnement des immeubles faisant partie des L______". Cette procuration avait été insérée dans tous les actes de vente liés à la commercialisation des lots de PPE (supra, en fait, § C lit g).

3.2.2 Les appelantes reprochent au premier juge de n'avoir pas procédé aux constatations nécessaires à établir de façon précise le contenu de la modification de la servitude souscrite à leur détriment par Y______, respectivement T______, au printemps 2003, ce qui empêchait le tribunal de statuer sur la problématique de la validité de l'acte. Or, il a été retenu (supra, consid. 2) que ce grief n'était pas fondé, la Cour ayant en outre constaté (art. 310 lit b CPC) que les modifications incriminées, s'agissant de l'assiette grevant les parcelles 2______ et 20______, ont consisté à transcrire le tracé effectif du chemin tel que précédemment implémenté par les appelantes (ou plus précisément par les propriétaires précédents) lors de la réalisation de la promotion. Cette transcription n'apportait en réalité aucun changement de la charge concrètement imposée à ces deux parcelles.

3.2.3 Sur le plan juridique et indépendamment de l'absence d'incidence concrète sus-évoquée de la modification de l'assiette de la servitude, qui concrétise une situation mise en place depuis près de vingt ans, il est vrai que l'assiette modifiée selon l'acte passé au printemps 2003 par devant Me V______ consacre des élargissements de l'assiette par certains endroits (supra, en fait, § C lit i). Or, ainsi que l'a retenu le premier juge en se fondant sur le témoignage de O______, géomètre officiel, ces changements n'ont pas eu pour conséquence des modifications fondamentales de l'assiette et n'excèdent pas ce qui prévaut ordinairement dans le cadre de la réalisation d'une promotion de ce type, à l'issue de laquelle les parties adaptent l'assiette d'une servitude de passage déjà inscrite à la réalité (jugement querellé, consid. C, p. 18 § 3). Ce constat dans son ensemble est en outre confirmé par divers témoignages:

- P______, notaire, a souligné le caractère admissible de procurations données par avance dès lors qu'il s'agit d'une simple adaptation de l'assiette de la servitude et non pas de la modification de tout un réseau de servitudes (supra, en fait, § C lit r/dd).

- Y______, intervenu à la signature des servitudes au nom de X______, s'est lui aussi référé à la pratique consistant à ajuster après coup l'assiette des servitudes à la réalité du terrain une fois les bâtiments terminés (supra, en fait, § C lit d/ff).

- Me V______ a relevé (i) que le procédé sus-évoqué est courant en vue de faciliter la modification ultérieure de servitudes – voire-même en créer d'autres – sur la base du fonctionnement concret de la promotion réalisée et (ii) qu'en l'espèce les modifications consenties entraient dans le contexte de la procuration tel qu'envisagé (supra, en fait, § C lit d/gg).

3.2.4 De plus et contrairement à ce que soutiennent les appelantes, il n'est pas établi que X______ (plus précisément son sous-directeur Y______) aurait agi au détriment des intérêts de celles-ci dans le but de préserver ceux de la famille [de Q______] (mémoire d'appel, en droit, ch. 15). Cela semble peu vraisemblable puisque X______ assumait à l'époque les fonctions d'administrateur des immeubles appartenant aux appelantes (supra, en fait, § B lit g): ce représentant était dès lors d'autant mieux placé pour agir dans le sens bien compris de la défense des intérêts des titulaires de parts de PPE, qu'il devait apprécier avec une prudence accrue au vu de ses fonctions de gérant des immeubles de la promotion. Le fait – établi – que X______ a par la suite manqué à son devoir d'informer les copropriétaires de ces modifications, doit certes être déploré même si le dossier n'établit pas que cette omission ait été volontaire. En tout état de cause, cet épisode ne saurait remettre en cause l'existence de pouvoirs de représentation valables en faveur de Y______ et de T______ lors de la signature, au printemps 2003, de l'acte ayant abouti à la modification de la servitude litigieuse.

3.3 Au vu de l'ensemble de ces constatations, c'est à raison que le premier juge a retenu que Y______ et T______ avaient tous deux agi en vertu de pouvoirs de représentation valablement reçus, sans les outrepasser, ce qui emporte les conséquences prévues par les art. 32 al. 1 et 33 al. 2 CO. Il en découle que l'inscription de la servitude RS 5______ opérée en 2003 au registre foncier sous Pj 25______ a été opérée en vertu d'une cause juridique valable, ce qui ferme aux appelantes la voie de l'action en rectification du registre foncier dans la mesure où les exigences posées par l'art. 975 al. 1 et 2 CC ne sont pas réunies.

4. Les appelantes reprochent au premier juge d'avoir ignoré la problématique liée à l'aggravation de la servitude du fait que son utilisation actuelle est limitée au passage d'un tracteur quelque fois par année (les fonds dominants étant actuellement voués à une utilisation agricole) alors que, dans un futur proche tel qu'envisagé par les intimés, son utilisation pourrait impliquer 306 à 465 passages de véhicules par jour, à savoir une intensité largement supérieure à l'accroissement prévisible de l'utilisation auquel on pourrait raisonnablement s'attendre (qui se rapporte au passage de quelques véhicules lié à l'implémentation de quatre à cinq villas).

4.1.1 Le propriétaire d'un bien-fonds grevé d'une servitude peut exercer l'action négatoire de l'art. 641 al. 2 CC à l'encontre du propriétaire du fonds dominant qui excéderait son droit et porterait ainsi une atteinte directe au fonds grevé: le propriétaire d'une chose peut en effet repousser toute usurpation (action négatoire), à savoir tout trouble direct, illicite, actuel ou imminent, portant atteinte à la maîtrise de son droit (P.-H. Steinauer, Les droits réels, t. I, 4e éd. 2007, N 1032). L'action négatoire peut aussi être introduite pour éviter qu'une atteinte, actuellement terminée, ne se reproduise, avec l'exigence que cette atteinte doit être imminente (ATF 51 II 397 consid. 3; P.-H. Steinauer, op. cit., N 1039). Le propriétaire d'un fonds grevé d'une servitude peut aussi introduire une action en constatation de droit afin de faire établir le contenu de la servitude dont son bien-fonds est grevé (TF, arrêt du 14.11.2011, 5A_325/2011, consid. 2.1.2 et références).

4.1.2 La détermination du contenu de la servitude s'opère en application de l'art. 738 al. 1 CC: l'inscription fait règle, en tant qu'elle désigne clairement les droits et les obligations dérivant de la servitude. L'étendue de celle-ci peut être précisée, dans les limites de l'inscription, soit par son origine, soit par la manière dont la servitude a été exercée pendant longtemps, paisiblement et de bonne foi (al. 2). Le juge doit dès lors se reporter en priorité à l'inscription au registre foncier; à supposer que celle-ci soit peu claire, incomplète ou sommaire, la servitude doit être interprétée selon son origine, à savoir l'acte constitutif déposé comme pièce justificative au registre foncier (ATF 137 III 145 consid. 3.1). Le contrat de servitude et le plan sur lequel est reportée l'assiette de la servitude constituent à cet égard des pièces justificatives (art. 942 al. 2 CC). A supposer que le titre d'acquisition ne permette pas de déterminer le contenu de la servitude, son étendue peut alors être précisée par la manière dont ladite servitude a été exercée paisiblement et de bonne foi (art. 738 al. 2 CC). L'acte constitutif doit être interprété de la même manière que toute déclaration de volonté, à savoir, s'agissant d'un contrat, selon la réelle et commune intention des parties (art. 18 CO), respectivement, pour le cas où celle-ci ne peut être établie, selon le principe de la confiance; toutefois, vis-à-vis des tiers qui n'étaient pas parties au contrat constitutif de la servitude, ces principes d'interprétation sont limités par la foi publique attachée au registre foncier (art. 973 CC; ATF 137 III 145 consid. 3.2.2), lequel comprend non seulement le grand livre, mais aussi les pièces justificatives dès lors qu'elles précisent la portée de l'inscription (art. 971 al. 2 et 738 al. 2 CC; TF, arrêt du 20.1.2022, 5A_470/2021, consid. 3.1.2). Ce dernier principe interdit de prendre en considération, dans la détermination de la volonté subjective, les circonstances et motifs personnels qui ont été déterminants dans la formation de la volonté des constituants, du moins dans la mesure où ils ne résultent pas de l'acte constitutif ce qui les rend inopposables au tiers s'étant fondé de bonne foi sur le registre foncier (ATF 130 III 554 consid. 3.1).

4.1.3 Dans les limites de l'inscription et du but primitif de la servitude, le propriétaire du fonds servant peut toutefois se voir imposer certaines modifications dans l'exercice de la servitude: l'art. 739 CC prévoit que les besoins nouveaux du fonds dominant n'entraînent aucune aggravation de la servitude. Il est en effet dans la nature des choses que l'exercice d'une servitude s'aggrave ou s'atténue au gré des circonstances; à ce titre, le seul fait que les besoins du fonds dominant conduisent à un usage accru de la servitude n'est pas déterminant (TF, arrêt du 20.1.2022, 5A_470/2021, consid. 3.1.1). Lorsque le but poursuivi est le même, l'aggravation que le propriétaire du fonds servant n'est pas tenu de tolérer doit être notable (ATF 139 III 404, consid. 7.3), ce qui suppose la survenance de circonstances que les parties n'avaient raisonnablement pas en vue lors de la constitution de la servitude (ATF 139 III 404 consid. 7.3). Pour en juger, l'interprétation du contrat constitutif de servitude est à cet égard décisive: il s'agit alors de mettre l'intérêt du fonds dominant et la charge du fonds servant en balance avec les intérêts respectifs actuels, lesquels doivent être déterminés sur la base de données objectives (TF, arrêt du 20.1.2022, 5A_470/2021, consid. 3.1.1). Le principe selon lequel une aggravation minime de la charge causée par les besoins nouveaux du fonds dominant doit être tolérée ne s'applique cependant que si l'usage nouveau de la servitude reste dans les limites du but en vue duquel cette servitude a été constituée (TF, arrêt du 20.1.2022, 5A_470/2021, consid. 3.1.1).

4.2 En fondant leur argumentation sur l'action négatoire de l'art. 641 al. 2 CC, les appelantes estiment qu'elles peuvent se prévaloir d'un trouble illicite, actuel ou imminent. Si la question pouvait éventuellement se poser dans la perspective d'une mise en œuvre de la demande d'autorisation de construire DP 7______ alors que cette procédure administrative était pendante, tel n'est plus le cas dès lors que cette procédure n'a pas abouti à la suite du refus du Département compétent d'admettre un report de droits à bâtir (supra, lit B § o). Les intimés ont fait part de leur intention d'étudier un nouveau projet de mise en valeur de leurs parcelles (audition G______), une situation qui dans son état actuel ne saurait remplir le critère de l'imminence d'un trouble au sens de l'art. 641 al. 2 CC, ce qui exclut une action négatoire à ce stade. Du reste les appelantes n'y concluent pas nonobstant l'ambigüité de leur argumentation juridique sur ce point (mémoire d'appel, en droit, ch. 28), une ambigüité reprise en partie par le premier juge (jugement querellé, consid. D).

Rien n'empêche toutefois les appelantes d'agir en constatation de droit en vue de faire établir le contenu et l'étendue de la servitude dont leurs bien-fonds sont grevés. En vertu de l'art. 738 al. 1 CC, il convient de se référer en premier lieu à l'inscription, laquelle fait règle, en tant qu'elle désigne clairement les droits et les obligations découlant de la servitude, puis à l'acte constitutif de servitude.

A cet égard, l'intitulé de la servitude inscrite le ______ juin 2000 et figurant au registre des servitudes sous numéro RS 5______ vise un "passage à pied et pour tous véhicules" et son assiette originelle ressort du plan de servitude 19______ établi le 4 août 1998 par O______ (supra, § C lit d), assiette ayant été valablement modifiée – ainsi que vient de le constater la Cour (supra, c. 3) – selon un nouveau plan dressé le 20 septembre 2002 par le même géomètre officiel (supra, en fait, § C lit i).

L'acte constitutif passé le 17 septembre 1998 par devant Me P______, qui a valeur de pièce justificative au sens de l'art. 942 al. 2 CC, indique que les comparants, membres de l'Hoirie de Q______, ont procédé à des divisions et réunions de parcelles réparties sur plus de 85'000 m2. C'est dans le contexte de cette division-réunion qu'est intervenue la constitution de la servitude litigieuse: la finalité de celle-ci consistait non seulement à organiser le passage à pied et pour tous véhicules à partir de la route 8______ en relation avec la promotion planifiée sur les parcelles appartenant aujourd'hui aux appelantes, mais encore à assurer la continuation de ce passage au profit de chacune des autres parcelles appartenant aujourd'hui aux intimés (supra, en fait, § B lit e).

Il sera observé que les parcelles des intimés sont situées en zone constructible et représentent une surface largement supérieure à celle des parcelles appartenant aux appelantes qui, sur les 85000 m2 constituant initialement les parcelles de l'hoirie de Q______, recouvrent 21058 m2 (supra, en fait, § C lit b).

Ces éléments ressortent clairement du registre foncier et doivent être tenus pour déterminants s'agissant d'établir les droits et obligations inhérents à la servitude ainsi constituée. Cela prévaut non seulement à l'égard des personnes ayant comparu le 17 septembre 1998 en vue de constituer ladite servitude mais aussi à l'égard de tout acquéreur successif des parcelles appartenant aux appelantes et des parts de PPE s'y rapportant. Contrairement à ce que laissent entendre les appelantes, aucun élément du dossier ne permet de retenir que cette servitude aurait eu une vocation agricole. Le fait que l'assiette de la servitude ait été utilisée pendant plusieurs années par un paysan qui exploitait des champs situés au Nord des parcelles des appelantes ne change rien à ce constat dans la mesure où l'on ne saurait inférer de cet usage provisoire une renonciation des intimés à se prévaloir du caractère constructible de leurs parcelles. L'affirmation de B______, administrateur de la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 1______ de la Commune de A______ entendu comme partie, à teneur de laquelle la servitude aurait une vocation uniquement agricole est contraire au contenu du registre foncier et ne repose sur aucun fondement; il en va de même de la déposition similaire de C______, administrateur de la Communauté des Copropriétaires de l'immeuble 2______ de la Commune de A______.

Au vu de ces différents éléments, la Cour fait sien le constat auquel est parvenu le premier juge dans une application correcte de l'art. 738 CC, à savoir que la finalité de la servitude litigieuse consistait bel et bien à assurer un accès en faveur des immeubles appelés à être érigés le moment venu par les intimés sur les parcelles leur appartenant.

4.3 Les appelantes se prévalent de ce que la mise en œuvre d'un projet de construction tel que celui ayant fait l'objet de la demande préalable d'autorisation de construire DP 7______/1, définitivement non aboutie, constituerait une aggravation de la servitude au sens de l'art. 739 CC. On ne saurait les suivre sur ce point. Ainsi que vient de le constater la Cour, le but poursuivi par la servitude dès sa création demeure le même, à savoir de permettre l'accès à des constructions à ériger sur les parcelles appartenant aux intimés, toutes situées en zone constructible et dont la surface est à peu près trois fois supérieure à celle des parcelles appartenant aux appelantes. Rien au dossier ne permet de retenir que les intimés auraient renoncé à cette finalité, laquelle demeure en conséquence d'actualité. Dans ces conditions il incombe aux appelantes qui se prévalent d'une aggravation de la charge de la servitude de démontrer que cette aggravation est notable et que sa survenance est liée à des circonstances que les parties ayant constitué la servitude ne pouvaient raisonnablement pas avoir en vue.

En l'espèce les appelantes ne satisfont pas au fardeau de la démonstration qui leur incombe. Comme préalablement constaté, la finalité principale de la servitude vise à permettre un accès en faveur de parcelles constructibles s'étendant sur plusieurs hectares, à la suite d'un partage au sein de l'hoirie Q______. Le fait que certains des attributaires (S______ et T______) aient pris le parti d'une valorisation rapide de leurs parcelles – commercialisées depuis lors en faveur des appelantes – ne permet pas d'inférer que les autres attributaires (les intimés) auraient par avance renoncé à en faire de même, le moment venu, dans les limites permises par les normes du droit de la construction ou encore auraient par avance consenti à ne pas utiliser l'entier de leurs droits à bâtir en vue de limiter l'incidence de la servitude litigieuse sur les parcelles 2______ et 20______. Du reste les appelantes ne l'allèguent pas, étant relevé que la mise à disposition provisoire de certaines des parcelles au profit d'un paysan pour un usage agricole ne saurait être interprétée comme une renonciation – même partielle – par les intimés à leurs droits à bâtir.

L'ATF 122 III 358 dont se prévalent les appelantes rappelle que, pour juger du caractère admissible ou non d'une aggravation de la servitude, il convient de mettre en balance l'intérêt du fonds dominant et la charge du fonds servant ayant prévalu lors de la constitution de la servitude avec les intérêts prévalant lorsque se pose la question de l'application de l'art. 739 CC (consid. 2c). En l'occurrence il s'agissait de mettre en œuvre ces principes dans l'optique d'une comparaison entre une première mise en œuvre de la servitude de passage en cause (deux habitations érigées sur le fonds dominant) et une augmentation subséquente des habitations (passage à cinq habitations). Ce contexte diffère de la présente cause en ce sens que le descriptif de la servitude litigieuse a été d'emblée envisagé de manière large et abstraite et doit se comprendre comme la possibilité donnée aux intimés, en leur qualité de propriétaires des fonds dominants, de mettre en œuvre leurs droits à bâtir de manière conforme aux dispositions de droit public applicables en matière de construction, une matière en elle-même qui n'a rien d'immuable et dont l'évolution s'agissant de l'ampleur des droits constructibles (dans un sens ou dans un autre) – n'avait rien d'improbable au moment de la constitution de la servitude. Du reste, rien n'aurait empêché les parties ayant constitué la servitude litigieuse en 1998 (supra, lit B § e) de prévoir un maximum de droits à bâtir ou une limitation des constructions possibles si elles avaient envisagé de limiter par avance la charge de la servitude litigieuse, ce qu'elles n'ont pas fait.

4.4 Au vu de l'ensemble de ces circonstances, la Cour retient que la situation prévalant lors de la constitution de la servitude ne s'est nullement modifiée depuis, ce qui exclut toute application de l'art. 739 CC.

5. 5.1 Au vu de ce qui précède, les appelantes seront déboutées des fins de leur appel et le jugement du 3 juin 2021 intégralement confirmé.

5.2 Les appelantes, qui succombent entièrement, seront condamnée aux frais (art. 106 al. 1 CPC). Les frais judiciaires d'appel (art. 95 al. 2 CPC) seront arrêtés à 10'800 fr. et entièrement compensés avec l'avance effectuée.

Les dépens d'appel (art. 95 al. 3 CPC) seront arrêtés à 12'000 fr., TVA et débours inclus, référence étant pour le surplus faite aux art. 104 CPC, 20 et 21 LaCC ainsi que 85 et 90 RTFMC.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté conjointement par LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 1______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 2______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 3______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 4______ DE LA COMMUNE DE A______ contre le jugement JTPI/7287/2021 rendu le 3 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5073/2018.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de la procédure d'appel à 10'800 fr.

Les met à la charge, conjointement et solidairement, de LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 1______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 2______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 3______ DE LA COMMUNE DE A______, et de LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 4______ DE LA COMMUNE DE A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance de frais effectuée, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 1______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 2______ DE LA COMMUNE DE A______, LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 3______ DE LA COMMUNE DE A______ et LA COMMUNAUTE DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 4______ DE LA COMMUNE DE A______, conjointement et solidairement, à verser le montant de 12'000 fr. au titre de dépens à F______, G______, H______, J______ et K______, pris conjointement et solidairement.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, juge; Monsieur Nicolas JEANDIN, juge suppléant; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.