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Décisions | Chambre civile

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C/16854/2020

ACJC/1023/2021 du 12.08.2021 sur JTPI/8808/2021 ( SDF )

Normes : cpc.315.al5
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16854/2020 ACJC/1023/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 12 AOÛT 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 17ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 juin 2021, comparant par Me Alexandra LOPEZ, avocate, @lex Avocats, rue de Contamines 6, 1206 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant en personne.

 


Attendu, EN FAIT, que par jugement JTPI/8808/2021 du 29 juin 2021, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a annulé le chiffre 6 du dispositif du jugement JTPI/3997/2010 rendu le 23 mars 2010 par le Tribunal dans la cause C/1______/2009-3 (chiffre 1 du dispositif) et, cela fait, a donné acte à B______ de son engagement à verser en mains de A______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, un montant de 150 fr. à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______, jusqu'à la majorité de celle-ci (ch. 2), donné acte à B______ de son engagement à prendre en charge la moitié des frais relatifs à la demi-pension du cheval de l'enfant C______, à concurrence d'un montant de 250 fr., par mois (ch. 3), statué sur les frais judiciaires et les dépens (ch. 4 et 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6);

Que le Tribunal a notamment retenu que la situation financière de B______, qui réalisait un revenu net mensuel de 10'000 fr. par mois lors du prononcé du jugement JTPI/3997/2010 lui donnant acte de son engagement à verser une contribution de 1'000 fr. par mois pour l'entretien de sa fille, s'était modifiée puisqu'il avait connu une période de chômage et était arrivé en fin de droit de chômage à mi-octobre 2020, époque à partir de laquelle il ne percevait plus aucun revenu. Il disposait d'une fortune de 600'000 fr., qui constituait ses seules ressources, de sorte que le rendement de celle-ci pouvait être estimée à un montant mensuel de 1'500 fr. Ses charges incompressibles s'élevaient à 3'552 fr. 65 correspondant à 1'200 fr. de base OP, 1'916 fr. de loyer, 366 fr. 65 de prime d'assurance-maladie de base et 70 fr. de frais de transport;

Que s'agissant de la question de l'imputation d'un revenu hypothétique à B______, le Tribunal a considéré que celui-ci, qui atteindrait l'âge de 60 ans le 13 août 2021, ne faisait pas état de problèmes de santé et disposait d'une bonne expérience professionnelle dans le domaine des services généraux, qui recouvrait l'entretien d'immeubles, la construction d'espaces bureaux, la santé et la sécurité au travail et avait, en outre, suivi des formations complémentaires durant sa période de chômage, dans le but de pouvoir travailler au sein de régies. Il pouvait ainsi être attendu de lui qu'il exerce une activité lucrative, compte tenu de la charge de son enfant mineure. Cependant, indépendamment des recherches de travail infructueuses qu'il alléguait avoir accomplies depuis deux ans et demi, compte tenu de son âge et du marché du travail actuellement notoirement difficile, il n'était pas vraisemblable qu'il puisse trouver un emploi, que ce soit dans son domaine de compétence ou dans un domaine moins qualifié, de sorte qu'aucun revenu hypothétique ne pouvait lui être imputé;

Que le Tribunal a encore relevé que B______ s'était acquitté de la contribution mensuelle de 1'000 fr. mise à sa charge par jugement du 23 mars 2010 et avait payé en sus une part des frais d'équitation de C______, malgré la diminution sensible de ses revenus pendant sa période de chômage (8'349 fr 90) et offrait encore de verser certains montants à titre de contribution à l'entretien de sa fille (150 fr. pour l'enfant et 250 fr. à titre de participation aux frais d'équitation de cette dernière), de sorte qu'il ne pouvait être retenu qu'il essayait de se soustraire à ses obligations. Il convenait de lui donner acte du versement de ces sommes, qui n'entamait pas de manière excessive sa fortune;

Que le Tribunal a retenu que A______ réalisait un revenu mensuel net de 5'813 fr. 50 en qualité d'assistante de direction, pour des charges incompressibles de 3'565 fr. 55 composés de 1'350 fr. de montant de base OP, de 1'600 fr. de loyer (80%), de 325 fr. 20 de prime d'assurance-maladie de base, de 220 fr. 35 de frais médicaux non remboursés et de 70 fr. de frais de transport. Les charges incompressibles de C______ s'élevaient quant à elles à 701 fr. 25, après déduction des allocations d'études, soit 600 fr. de montant de base OP, 51 fr. 90 de prime d'assurance-maladie de base, 16 fr. de frais médicaux non remboursés et 33 fr. 35 de frais de transport, les frais de vacances, l'argent de poche et les frais d'équitation, en l'absence d'un excédent, ne pouvant être pris en considération;

Que le Tribunal a considéré que A______ était en mesure de couvrir ses charges et celles de l'enfant C______, calculées sur la base du minimum vital du droit des poursuites, au moyen de son propre revenu;

Que par acte expédié au greffe de la Cour le 26 juillet 2021, A______ a formé appel de ce jugement et conclu, principalement, à son annulation et à la confirmation du jugement JTPI/3997/2010 rendu le 23 mars 2010 entre les parties et, subsidiairement, à la condamnation de B______ à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de C______, la somme mensuelle de 1'000 fr. jusqu'à sa majorité, voire au-delà en cas d'études sérieuses et régulièrement suivies;

Qu'elle a conclu préalablement à la suspension du caractère exécutoire du dispositif du jugement attaqué; qu'elle indique réaliser un revenu de 5'813 fr. 50 qui, additionné à la contribution de 1'000 fr. par mois fixée sur mesures protectrices en 2010, lui permet tout juste de couvrir ses charges et celles de sa fille, estimées respectivement à 5'515 fr. 80 pour elle-même et 2'652 fr. 15 pour C______, ces dernières étant relativement élevées compte tenu de la pratique de l'équitation par l'enfant depuis de nombreuses années, décidée d'un commun accord entre les parties; l'interruption du versement de la contribution d'entretien de 1'000 fr. par mois en faveur de l'enfant C______ exposerait A______ à d'importantes difficultés financières, de sorte qu'il convenait de suspendre le caractère exécutoire du jugement entrepris;

Qu'elle a également allégué que B______ disposerait d'une situation financière plus confortable que celle exposée en procédure (notamment héritage avec son frère d'un appartement à Genève vendu en 2018 pour une somme de 2'500'000 fr., revenus complémentaires de 157'547 fr. en 2018), et que la décision de ne plus travailler jusqu'à l'âge de la retraite relèverait plus d'un choix personnel et stratégique, que d'une incapacité à retrouver un emploi, un revenu hypothétique au moins équivalent aux indemnités qu'il percevait du chômage devant lui être imputé;

Que par ailleurs, elle a relevé que le premier juge avait retenu un montant d'impôts mensuels de 1'646 fr. à charge de B______ qui, si ce dernier ne devait pas retrouver du travail, serait bien inférieur à ce montant, de sorte que celui-ci était à même de s'acquitter de la contribution à l'entretien de sa fille;

Qu'invité à se déterminer, B______ s'est opposé à la requête d'effet suspensif; il a indiqué qu'il recherchait toujours du travail mais que son âge, soit 60 ans prochainement, ne facilitait pas ses recherches; il subissait un déficit, ses charges de 3'552 fr. 65 par mois, retenues par le premier juge, n'étant pas couvertes; il proposait de verser 150 fr. par mois dès le 9 août 2021 pour sa fille et s'engageait à verser la différence de 850 fr. par mois si la demande d'effet suspensif était acceptée, dans les deux jours ouvrables suivant la décision, et de verser le montant original (1'000 fr. par mois) jusqu'à la décision finale de la Cour, les sommes perçues en trop, cas échéant, devant lui être remboursées par l'appelante à l'issue de la procédure d'appel.

Considérant, EN DROIT, que la Cour est saisie d'un appel au sens de l'art. 308 CPC;

Que l'ordonnance querellée portant sur des mesures provisionnelles, l'appel n'a pas d'effet suspensif ex lege (art. 315 al. 4 let. b CPC);

Qu'à teneur de l'art. 315 al. 5 CPC, l'exécution de mesures provisionnelles peut exceptionnellement être suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable, notion permettant de tenir compte également d'un préjudice de fait et s'examinant à l'aune de l'efficacité du jugement à rendre à l'issue de la procédure ordinaire, qui en serait compromise (ATF 138 III 378 consid. 6.3; arrêt du Tribunal fédéral 4P.5/2002 du 8 avril 2002 consid. 3a);

Que, saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité cantonale d'appel doit procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_514/2012 du 4 septembre 2012 consid. 3.2.2);

Que l'autorité cantonale doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 138 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_941/2018 du 23 janvier 2019 consid. 5.3.2 et les références citées);

Qu'en l'espèce, l'appelante réalise un revenu mensuel net de 5'813 fr. 50 pour des charges incompressibles telles que retenues par le Tribunal de 3'565 fr. 55 pour elle-même et de 701 fr. 25 pour C______, de sorte qu'elle parvient à couvrir son minimum vital du droit des poursuites, ainsi que celui de l'enfant; que si elle reprend dans son acte d'appel les charges mensuelles exposées devant le premier juge, elle ne conteste pas le calcul effectué par ce dernier des charges incompressibles des membres de son foyer, ni ne prétend ne pas pouvoir les couvrir au moyen de son revenu;

Qu'il n'est par ailleurs pas contesté que la situation financière de l'intimé s'est, quant à elle, modifiée depuis le prononcé des mesures protectrices de 2010; que celui-ci a en effet connu une longue période de chômage et est parvenu en fin de droit à mi-octobre 2020; que depuis cette période, l'intimé ne réalise aucun revenu et puise dans sa fortune pour subvenir à son entretien, ce qui n'est également pas contesté par l'appelante;

Qu'il n'y a cependant pas lieu à ce stade d'imputer un revenu hypothétique à l'intimé, cette question, analysée par le Tribunal, devant être à nouveau examinée par la Cour sur le fond; que, par ailleurs, l'appelante se méprend en indiquant que le Tribunal aurait retenu à tort une somme de 1'646 fr. concernant les impôts de l'intimé, alors qu'aucun montant n'a été retenu dans le jugement entrepris concernant ce poste;

Que, quoi qu'il en soit, la situation financière de l'appelante, qui couvre les charges incompressibles de son foyer, n'est pas mise en péril par le versement de la contribution d'entretien fixée par le Tribunal, alors que l'intimé ne couvre pas ses propres charges avec ses revenus;

Que l'appelante ne justifie ainsi pas de l'existence d'un préjudice difficilement réparable en cas de refus d'octroi de l'effet suspensif au jugement contesté, étant précisé que l'intimé s'est toujours conformé aux décisions judiciaires rendues et que rien ne laisse supposer qu'il en irait différemment s'il devait être condamné à verser une contribution d'entretien différente de celle fixée par le premier juge au terme de la procédure d'appel;
Que la pesée des intérêts en présence conduit ainsi à rejeter la requête de suspension du caractère exécutoire du jugement attaqué;

Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec la décision au fond (art. 104 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire du jugement
entrepris :

Rejette la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire du jugement JTPI/8808/2021 rendu le 29 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/16854/2020-17.

Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt rendu sur le fond.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente ad interim; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

La présidente ad interim:

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 





 

 

 

Indication des voies de recours :

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1
et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF - RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.