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Décisions | Chambre civile

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C/8389/2020

ACJC/696/2021 du 01.06.2021 sur JTPI/10574/2020 ( OS ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 02.06.2021, rendu le 20.08.2021, DROIT CIVIL, 5A_548/2021
Normes : CC.256
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8389/2020 ACJC/696/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 1ER JUIN 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 2ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 septembre 2020, comparant par Me Olivier PETER, avocat, PETER MOREAU SA, rue des Pavillons 17, case postale 90, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

Et

1) Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant en personne,

2) Le mineur C______, domicilié chez sa mère, Madame A______, ______, autre intimé, représenté par sa curatrice, Madame D______, Service de protection des mineurs, boulevard Saint-Georges 16, 1205 Genève.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/10574/2020 du 3 septembre 2020, le Tribunal de première instance a dit que B______, né le ______ 1938 à E______ (Espagne), de nationalité espagnole, n'était pas le père de l'enfant C______, né à Genève le ______ 2013, dont la mère est A______ (chiffre 1 du dispositif), ordonné la rectification en ce sens des registres de l'Etat civil (ch. 2), mis les frais judiciaires, arrêtés à 960 fr., à la charge des parties à raison d'un tiers chacune, en laissant la part des frais du mineur à la charge de l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision ultérieure de l'assistance judiciaire (ch. 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B. a. Par acte expédié le 7 octobre 2020 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut à ce que la Cour rejette l'action en désaveu de paternité déposée le 23 avril 2020 pour le compte de l'enfant C______ par sa curatrice.

Elle a déposé des pièces nouvelles.

b. Le 18 décembre 2020, la curatrice de l'enfant a persisté dans son préavis du 12 septembre 2019 ayant abouti au dépôt de l'action en désaveu et conclu à la confirmation du jugement entrepris.

c. Par réplique, A______ a maintenu ses conclusions d'appel.

d. B______ ne s'est, quant à lui, pas déterminé.

e. Les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger, par avis du greffe de la Cour du 22 mars 2021.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. A______, née le ______ 1976, de nationalité malgache, et B______, né le ______ 1938, de nationalité espagnole, se sont mariés le ______ 2002 à F______ (GE).

b. Durant le mariage, A______ a donné naissance à deux enfants, G______, né le ______ 2008, et C______, né le ______ 2013.

Ces derniers sont inscrits au registre de l'Etat civil comme étant les enfants de B______.

c. Les époux ont divorcé au mois de novembre 2013.

d. Le 22 février 2014,A______ s'est remariée avec H______, né le ______ 1992, de nationalité malgache, à Madagascar.

Il n'est pas contesté que H______ est le père biologique de l'enfant C______.

e. Au mois de septembre 2015, H______ a rejoint son épouse à Genève, où ils ont vécu ensemble avec les enfants G______ et C______ jusqu'au mois de mai 2018. Leur union a ensuite été dissoute par jugement de divorce rendu le 10 avril 2019 par le Tribunal de première instance de I______ (Madagascar).

f. Durant la vie commune,H______ s'est rendu coupable de lésions corporelles simples pour avoir asséné des fessées ainsi que des coups de ceinture aux enfants G______ et C______, au niveau des pieds, des fesses et du dos, leur occasionnant de vives douleurs. Selon lui, il s'agissait d'une question d'éducation, pratiquée à Madagascar lorsque les enfants se comportaient mal.

Il a été condamné pour ces faits par ordonnance pénale rendue le 24 avril 2020 par le Ministère public de Genève.

g. Depuis la séparation intervenue en mai 2018, H______ n'a plus revu C______ jusqu'au printemps 2019. A une date indéterminée, il a repris contact avec lui et a pu voir C______ 30 à 60 minutes après l'école plusieurs fois par semaine.

h. Au vu de la violence à laquelle les enfants avaient été exposés durant la vie commune, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant a instauré une curatelle d'assistance éducative en faveur des mineurs G______ et C______ afin de les préserver au mieux des éventuels manquements de leurs père et mère et de soutenir ces derniers dans leurs fonctions parentales.

i. Par courrier du 15 mai 2019 adressé au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, H______ a déclaré reconnaître l'enfant C______ comme étant son fils biologique et s'engager à le reconnaître officiellement dès que cela serait juridiquement possible. Il s'engageait également à assumer son rôle de père et ses responsabilités.

j. D______, juriste titulaire de mandats au Service de protection des mineurs (SPMi), a été nommée, par ordonnance du 23 mai 2019 confirmée par décision du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du 12 novembre 2019, aux fonctions de curatrice du mineur C______ aux fins d'introduire une action en désaveu de paternité à l'encontre de B______.

k. Selon le rapport de la curatrice du 12 septembre 2019, il est dans l'intérêt de l'enfant que le désaveu soit prononcé et que H______ puisse reconnaître son fils.

La curatrice a relevé que H______ s'était engagé et demandait à pouvoir reconnaître C______, de sorte qu'un nouveau lien juridique serait établi dès le désaveu. L'enfant était conscient que son père n'était pas B______, mais H______, qu'il appelait d'ailleurs "papa". Ce dernier s'impliquait davantage dans la vie de C______ et les actes de violence ne s'étaient plus reproduits. Le désaveu n'aurait dès lors pas d'impact négatif sur la situation familiale de l'enfant. D'un point de vue administratif, le désaveu ne mettrait pas en danger la situation de C______ à Genève, la mère de l'enfant étant au bénéfice d'un permis C. La reconnaissance de l'enfant permettrait, en revanche, de régulariser la situation de H______, lequel faisait l'objet d'une procédure d'expulsion, et permettrait ainsi à l'enfant de pouvoir continuer à voir son père. Enfin, on pouvait penser qu'à la suite de la reconnaissance, H______ obtiendrait un permis, ce qui lui permettrait de trouver un emploi stable et pérenniser ses revenus de sorte à pouvoir contribuer de façon régulière, dans la mesure de ses moyens, à l'entretien de son fils.

La mise en place de mesures ad hoc serait toutefois nécessaire pour que H______ puisse construire une relation solide avec C______ et les accompagner dans leurs relations personnelles, au vu notamment des inquiétudes émises par la mère. D'autre part, l'attachement de B______ pour C______ étant fort et réciproque, il était souhaitable que ce lien ne soit pas rompu par le désaveu et que B______ puisse continuer à passer du temps avec C______, au besoin par l'instauration d'un droit de visite tiers.

l. Le 8 janvier 2020, l'intervenant auprès de l'Action éducative en milieu ouvert (AEMO) a établi un rapport pour la période de septembre 2019 à janvier 2020.

Il a constaté que l'enfant C______ avait une faible tolérance à la frustration et pouvait entrer dans des crises de larmes et de colère durant lesquelles il était difficile de le récupérer. Un travail restait à faire pour lui trouver une activité qui lui permette de s'épanouir et canaliser son énergie, ainsi que pour proposer des stratégies éducatives à la mère lorsque l'enfant est en crise. L'évolution de l'aîné était, quant à elle, réjouissante. G______ allait mieux, il s'exprimait davantage, faisait preuve d'un bon développement dans l'apprentissage de son autonomie et avait de très bons retours sur son travail et son comportement à l'école.

H______ souhaitait s'engager davantage auprès de son fils, qu'il désirait reconnaître, afin de prouver qu'il pouvait être un père présent et concerné par le bien-être de son enfant. Il souhaitait également s'engager dans le processus AEMO. Durant les trois premiers mois, H______ était souvent présent et se manifestait beaucoup, étant demandeur de pistes pour apprendre à gérer ses émotions lorsque les enfants étaient agités et qu'il fallait être ferme tout en étant bienveillant, sans déborder physiquement. Des contacts réguliers avaient eu lieu. H______ avait effectué un bon travail avec l'éducateur sur l'intégration des valeurs éducatives suisses ou plus largement européennes. Malheureusement, ce travail s'était interrompu après quelques semaines de collaboration, en novembre 2019, après que l'aîné des enfants a rapporté avoir reçu des coups de ceintures de la part de H______ alors même que ce dernier s'était engagé à ne plus utiliser la violence comme moyen de gérer les conflits intrafamiliaux. Informé de ces faits, le SPMi a demandé à H______ de ne plus se présenter au domicile de son ex-épouse en attendant la décision du Tribunal concernant sa reconnaissance en paternité.

m. Par acte du 23 avril 2020, le mineur C______, représenté par sa curatrice, a formé une action en désaveu de paternité à l'encontre de B______ et A______.

Il a allégué que H______ était son père biologique, ce qui était admis tant par sa mère que par ce dernier, et que, selon le rapport de sa curatrice du 12 septembre 2019, il était dans son intérêt que le désaveu soit prononcé afin que H______ puisse le reconnaître.

n. A______ s'est opposée à cette action.

Elle a exposé que H______, bien qu'il ait eu connaissance de son lien biologique avec C______, n'avait pas demandé à être reconnu comme son père ni au moment de sa naissance, ni durant la vie commune. Par ailleurs, C______ avait été victime de violence de la part de H______, ainsi que cela ressortait de l'ordonnance pénale du 24 avril 2020. Partant, l'action en désaveu ne pouvait être considérée comme étant dans l'intérêt de l'enfant.

o. Les parties ont été entendues par le Tribunal lors de l'audience de comparution personnelle du 19 juin 2020.

A______ a persisté dans son opposition. Elle a réitéré ses craintes par rapports au comportement violent dont H______ avait déjà fait preuve. Elle avait peur que l'action en désaveu aboutisse car elle ne souhaitait pas que le père biologique de l'enfant puisse obtenir un droit de visite sur son fils, avec le risque qu'il l'emmène à l'étranger. Elle a ajouté que B______ avait des rapports très étroits avec C______ et son frère G______, dont le lien de fraternité devait également être préservé. H______ n'avait, pour sa part, jamais entamé de démarches pour voir son fils. En outre, B______ recevait des compléments de rentes AVS en faveur des enfants. La rente de 626 fr. par mois pour C______ serait ainsi perdue si l'action en désaveu devait aboutir. C______ perdrait également d'éventuelles expectatives successorales. Une telle action était ainsi, selon elle, disproportionnée dans les effets qu'elle allait induire (bouleversement dans la vie de l'enfant et suppression de la rente AVS en sa faveur), au vu du but qu'elle poursuivait, à savoir la "vérité biologique".

B______ s'en est rapporté à la décision du Tribunal, confirmant toutefois être resté très proche des deux enfants.

La curatrice a persisté dans les termes de sa requête, indiquant que les éléments d'opposition exposés par la mère étaient déjà connus lors de l'établissement du préavis du 12 septembre 2019 et avaient été pris en considération dans la pesée des intérêts, qui s'était néanmoins révélée favorable au dépôt de l'action. Elle a précisé que le désaveu de paternité n'impliquait nullement la fin des contacts entre C______ et B______, si la mère ne s'y opposait pas. Un droit de visite pour les tiers pourrait même être demandé en sa faveur auprès du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant. Par ailleurs, des mesures de protection et d'encadrement pourraient être prises pour éviter tout risque envers le mineur dans le cadre d'un éventuel droit de visite de son père biologique. Il était essentiel que la "vérité biologique" corresponde à ce qui est mentionné dans les actes de l'Etat civil. De plus, C______ et son frère savaient déjà qu'ils n'avaient pas le même père biologique, de sorte que le désaveu ne changerait rien à leurs liens affectifs. B______ n'était d'ailleurs vraisemblablement pas le père de G______ non plus, selon les informations en mains du SPMi. Pour le surplus, la curatrice a indiqué que l'enfant C______ n'avait pas été entendu avant d'introduire l'action. Cela étant, la personne en charge du mandat d'assistance éducative était en contact étroit avec lui et les informations circulaient au sein du SPMi.

A l'issue de l'audience, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives.

p. Dans le jugement entrepris, le Tribunal est parvenu au constat que les intérêts de l'enfant commandaient de prononcer le désaveu. Celui-ci permettrait à l'enfant de maintenir des relations personnelles avec son père biologique et n'engendrait pas de bouleversement identitaire chez l'enfant, ni d'impact particulier sur la fraterie ou sur les relations entre l'enfant et B______, lesquelles pourraient subsister. L'argument financier lié à la perte de la rente AVS ne pouvait conduire, à lui seul, au rejet de l'action.

EN DROIT

1. 1.1 La décision querellée, qui est finale et rendue dans une affaire non patrimoniale, est susceptible d'appel au sens de l'art. 308 al. 1 CPC.

Interjeté dans le délai et selon les formes prévus par la loi (art. 311 CPC), l'appel est recevable.

1.2 La procédure simplifiée est applicable (art. 295 CPC).

Le tribunal établit les faits d'office, sans être lié par les conclusions des parties (art. 296 al. 1 et 3 CPC).

L'établissement des faits d'office impose au juge de tenir compte des faits même si les parties ne les ont pas invoqués. L'obligation d'un juge d'établir d'office les faits ne dispense cependant pas les parties d'une collaboration active lors de la procédure et d'étayer leurs propres thèses. Il leur incombe ainsi de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 130 III 102 consid. 2.2; 133 III 507 consid. 5.4, JdT 2007 I 130).

1.3 L'appelante a produit des pièces nouvelles devant la Cour.

1.3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte que s'ils ont été invoqués ou produits sans retard (a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (b).

Dans les causes de droit de la famille concernant des enfants mineurs, eu égard à l'application des maximes d'office et inquisitoire illimitée, tous les faits et moyens de preuve nouveaux sont admis en appel, même si les conditions prévues par l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réalisées (ATF 144 II 349 consid. 4.2.1).

1.3.2 Les pièces nouvelles produites en appel sont donc recevables.

1.4 La Cour dispose d'un pouvoir d'examen complet en fait et en droit (art. 310 CPC).

2. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir procédé à une mauvaise appréciation des intérêts en cause. Selon elle, les intérêts du mineur commandent à maintenir la situation actuelle et à rejeter la requête en désaveu.

2.1 Selon l'art. 256 al. 1 CC, la présomption de paternité peut être attaquée par l'enfant si la vie commune des époux a pris fin pendant sa minorité. L'action de l'enfant doit être intentée au plus tard une année après qu'il a atteint l'âge de la majorité (art. 256c al. 2 CC).

Lorsque l'enfant a été conçu pendant le mariage, le demandeur doit établir que le mari n'est pas le père (art. 256a al. 1 CC).

Le seul fait que le père légal de l'enfant ne soit pas son père biologique ne constitue pas un motif suffisant pour que la contestation de la paternité doive être considérée comme conforme à l'intérêt de l'enfant (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5C_130/2003 du 14 octobre 2003; SJ 1966 p. 590; décision de l'Autorité de surveillance du Tribunal tutélaire de Genève du 28 juin 2011, DAS/127/11 consid. 4.2).

Il convient de procéder à une pesée des intérêts de l'enfant, en comparant sa situation avec et sans le désaveu. Il doit être tenu compte des conséquences d'ordre tant psycho-social que matériel, par exemple la perte du droit à l'entretien et des expectatives successorales (ATF 121 III 1 consid. 2c). Il ne sera pas dans l'intérêt de l'enfant d'introduire une telle action lorsqu'il est incertain que le mineur puisse avoir un autre père légal, lorsque la contribution d'entretien serait notablement moindre, lorsque la relation étroite entre l'enfant et ses frères et sœurs serait sérieusement perturbée et lorsqu'il n'y a pas lieu d'admettre que l'enfant serait en mesure d'entretenir une relation positive sur le plan socio-psychique avec son géniteur (arrêts du Tribunal fédéral 5A_593/2011 du 10 janvier 2012 consid. 3.1.1; 5A_128/2009 du 22 juin 2009 consid. 2.3 et les références citées).

Plus longue est la période qui s'est écoulée depuis la naissance, plus grand est l'intérêt au maintien du lien de filiation établi (RMA [ancien RDT] 2010 p. 125).

Il ne doit être fait droit à la procédure en désaveu que si celle-ci est conforme aux intérêts bien compris de l'enfant. Ce dernier pourra en effet toujours agir seul une fois capable de discernement (Meier/Stettler, Droit de la filiation, 6eme éd., 2019, n. 101, p. 67 ; RDT 1998, p. 248 ; décision de l'Autorité de surveillance du Tribunal tutélaire de Genève du 28 juin 2011 DAS/127/11 consid. 4.2).

2.2 En l'espèce, durant les premières années de sa vie, l'enfant C______ a vécu avec son frère et sa mère, divorcée de son premier mari, avant de faire ménage commun avec ces derniers et son père biologique. L'enfant a ainsi connu et tissé des liens avec H______ durant la vie commune. Il n'est d'ailleurs pas contesté qu'il l'appelle "papa". Si H______ n'a certes plus revu son fils pendant une année après la séparation d'avec l'appelante, il a confirmé son souhait, aussi bien devant le SPMi que l'AEMO, de reconnaître officiellement C______ dès que cela serait possible et de s'engager davantage dans la vie de celui-ci. Ayant repris contact au mois de mai 2019, il l'a revu plusieurs fois par semaine et s'est montré impliqué dans le processus d'assistance éducative des enfants, participant de manière active et assidue avant l'interruption survenue au mois de novembre 2019. Partant, contrairement à ce que soutient l'appelante, l'action en désaveu n'a pas pour seul et unique but d'établir la "vérité biologique", mais s'inscrit dans un cadre plus large tendant à rétablir les relations entre H______ et son fils.

Il convient toutefois d'examiner si cette démarche est conforme aux intérêts de l'enfant.

A titre liminaire, il sied de relever que la présence de H______ dans la vie de son fils revêt une certaine importance dès lors qu'elle peut jouer un rôle déterminant dans le processus de construction identitaire et le développement personnel de l'enfant.

Comme l'a relevé à juste titre le Tribunal, l'action en désaveu n'est pas susceptible de perturber l'équilibre familial de l'enfant dans la mesure où celui-ci connait la véritable identité de son père biologique, qu'il appelle d'ailleurs "papa" et qu'il a déjà vécu avec lui entre ses deux et cinq ans, contrairement à son père légal avec lequel il n'a jamais vécu. Il s'ensuit que l'instauration du lien paternel juridique avec H______ correspond à la situation de fait telle que vécue par l'enfant. Par ailleurs, l'appelante ne conteste pas le fait que B______ pourra continuer à voir C______. Ne s'étant lui-même pas opposé à l'action en désaveu et ayant maintenu des liens étroits avec les deux enfants, il y a lieu de penser que celui-ci continuera de voir et de traiter de manière égale G______ et C______, comme par le passé. Quant aux relations de l'enfant avec son frère, il sied de relever qu'elles pourront perdurer de la même manière dès lors qu'ils sont tous les deux sous la garde de leur mère. Le fait qu'ils auront un père juridique différent et qu'ils ne porteront plus le même patronyme, alors qu'ils savent tous deux qu'ils ne sont pas issus du même géniteur, n'est pas suffisant pas admettre un impact bouleversant sur la fraterie. Dans ce contexte, la stabilité de l'enfant et son équilibre psycho-social ne font pas obstacle à l'action en désaveu.

Concernant les violences passées, il y a lieu de mettre en balance, dans le cadre de la pesée des intérêts à effectuer, les risques d'exposer l'enfant à de nouvelles atteintes à son intégrité et son intérêt à construire et développer un lien avec son père biologique.

A cet égard, il ressort du dossier que H______ a entrepris un travail sérieux avec l'AEMO, soucieux de remédier à ses manquements, et semble désormais conscient des besoins des enfants, en particulier du fait que les méthodes éducatives en cours selon ses explications à Madagascar, à l'origine des maltraitances, sont contraires à leur bien-être. Les actes de violence ne s'étaient d'ailleurs plus reproduits jusqu'au mois de novembre 2019, période à laquelle l'aîné des enfants a relaté un nouvel incident. Les enfants semblent cependant aller globalement bien, poursuivant leur scolarité sans problème particulier. Bien que le comportement de H______ ne doit pas être négligé ni minimisé, il semble évoluer positivement. Par ailleurs, afin de prévenir tout nouveau débordement physique et de préserver au mieux le bien-être des enfants, les relations personnelles entre H______ et son fils pourront être limitées et surveillées par des mesures d'assistance et d'encadrement.

Ainsi, au vu de l'évolution de la situation et des mesures qui peuvent être mises en place pour accompagner H______ dans son rôle de père, on ne saurait retenir que ce dernier représente une mise en danger de C______ d'une intensité telle qu'elle imposerait le rejet de l'action.

En outre, il ressort du dossier qu'en cas de rejet de l'action en désaveu, H______ serait menacé d'expulsion du territoire suisse, de sorte que l'enfant perdrait la possibilité de voir son père et de construire une relation stable avec lui. Si l'action en désaveu doit certes servir les seuls intérêts de l'enfant, force est en l'occurrence de constater que ceux-ci se recoupent avec ceux de son père et commandent ce dernier puisse rester à Genève, aux côtés de son fils, sous peine d'engendrer une rupture totale des relations père-fils.

Enfin, concernant l'aspect financier, selon les faits rapportés par la curatrice, H______ a travaillé jusqu'au mois de novembre 2019 et est actuellement activement à la recherche d'emploi, percevant des indemnités de chômage de l'ordre de 3'000 fr. par mois, lui permettant de participer de manière informelle aux frais de son fils. Ainsi, compte tenu de sa pleine capacité de gain et de ses obligations d'entretien qui découleront du lien de filiation établi une fois la reconnaissance effectuée, il sera contraint de participer aux coûts de l'enfant. Contrairement à l'avis de l'appelante, bien que les charges de H______ ne soient pas établies, on ne saurait conclure à l'impossibilité pour ce dernier de verser une quelconque contribution d'entretien pour C______. La perte du droit à la rente AVS perçue en faveur de l'enfant pourra dès lors, à tout le moins partiellement, être compensée. Quant aux expectatives successorales en lien avec B______, on en ignore la composition et l'étendue. De plus, elles pourront, cas échéant, être remplacées par celles de H______. La détérioration de la situation de l'enfant sur ce point n'est, à défaut de tout élément, pas établie. D'autre part, comme l'a relevé le Tribunal, le désaveu de paternité de B______ n'empêche pas ce dernier, s'il le souhaite, d'entreprendre d'autres démarches, telle qu'une donation ou un legs, en faveur de C______. Le fait que ces démarches n'aient pas de caractère contraignant n'apparaît pas déterminant dès lors qu'aucun élément n'indique que B______, qui semble vouloir maintenir les rapports tels que ceux qui prévalaient jusqu'alors, y serait opposé ou réticent.

En définitive, au vu des éléments qui précèdent, la Cour retiendra, avec le Tribunal, que l'enfant dispose d'un intérêt prépondérant à développer des relations père-fils avec son père biologique et à ce que le lien de filiation soit établi avec ce dernier.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé.

3. Les frais judiciaires de l'appel seront mis à charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 32 et 35 RTFMC) et entièrement compensés avec l'avance de même montant fournie par cette dernière, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens, les intimés n'en ayant pas requis.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 7 octobre 2020 par A______ contre le jugement JTPI/10574/2020 rendu le 3 septembre 2020 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8389/2020.

Au fond :

Confirme le jugement querellé.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 1'000 fr., à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance fournie par cette dernière, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.