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Décisions | Chambre civile

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C/20870/2016

ACJC/651/2019 du 30.04.2019 sur OTPI/786/2018 ( OO ) , CONFIRME

Descripteurs : MESURE PROVISIONNELLE ; LIMITATION(EN GÉNÉRAL); POUVOIR DE DISPOSER
Normes : CPC.268; CC.960.al1.let1; LP.285
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/20870/2016 ACJC/651/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 30 AVRIL 2019

Entre

1) A______ LTD, sise ______, Iles Caïmans,

2) Monsieur B______, domicilié _____, ______ (GE),

appelants d'une ordonnance rendue par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance du canton de Genève le 20 décembre 2018, comparant tous deux par Me Christian Pirker, avocat, rue des Maraîchers 36, 1205 Genève, en l'étude duquel ils font élection de domicile,

et

Madame C______, née ______ [nom de jeune fille], p.a. Mme D______, ______ (GE), intimée, comparant par Me Eric Beaumont, avocat, rue De-Candolle 16, 1205 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. Par acte déposé le 10 octobre 2016, A______ LTD (ci-après : A______) et B______ ont saisi le Tribunal de première instance d'une requête en mesures superprovisionnelles et provisionnelles à l'encontre de C______, tendant à ce qu'il soit fait interdiction à cette dernière d'aliéner, céder ou grever à quelque titre que ce soit l'appartement sis 1______, à E______(GE), dont elle est propriétaire, et à ce qu'il soit ordonné au Conservateur du Registre foncier de procéder à l'inscription d'une restriction du droit d'aliéner, céder ou grever ladite part de propriété par étages, jusqu'à l'inscription au Registre foncier de la décision judiciaire sur l'action révocatoire qu'ils entendaient déposer, portant sur la donation par F______ de ¾ de ce bien à sa fille, C______, et sur la restitution de cet objet dans le patrimoine de ce dernier. La procédure a été enregistrée sous le numéro C/2______/2016.

Cette requête était fondée sur les art. 261 ss CPC.

A______ et B______ ont fait valoir que la donation de F______ à sa fille avait eu pour conséquence de diminuer ses actifs et que celle-ci ne pouvait ignorer l'intention dolosive de son père à leur égard, en raison de sa situation financière déjà précaire au moment de cette donation.

b. C______ s'est opposée à la requête.

Elle a allégué avoir entretenu des relations sporadiques avec son père et ignorer tout de ses affaires et de sa vie en général, de sorte qu'elle n'avait pas pu reconnaître une prétendue intention dolosive de celui-ci à l'égard de ses créanciers. Elle n'avait, par ailleurs, nullement l'intention d'aliéner l'appartement litigieux, dans lequel sa grand-mère vivait toujours. Son époux était un sportif de haut niveau et elle le suivait dans ses activités, raison pour laquelle elle était administrativement domiciliée chez sa grand-mère à E______.

c. Par ordonnance du 11 octobre 2016, le Tribunal a rejeté la requête de mesures superprovisionnelles.

d. Par ordonnance OTPI/701/2016 rendue le 29 décembre 2016, il a rejeté la requête de mesures provisionnelles.

Il a retenu que les parties requérantes avaient échoué à rendre vraisemblable le bien-fondé de leur prétention au fond, dans la mesure où l'acte dont elles entendaient solliciter la révocation avait eu lieu plus d'un an avant la saisie. Elles n'avaient pas non plus rendu vraisemblable que C______, qui n'entretenait manifestement pas de contacts réguliers avec son père, aurait agi de concert avec celui-ci dans le but de léser ses créanciers.

e. Par acte expédié le 16 janvier 2017, A______ et B______ ont appelé de cette ordonnance et produit de nouvelles pièces, soit, notamment, un relevé de poursuites daté du 19 juin 2014 et deux attestations de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) établies les 25 novembre 2014 et 23 avril 2015 concernant F______.

f. Par arrêt ACJC/537/2017 rendu le 12 mai 2017, la Cour a confirmé l'ordonnance du 29 décembre 2016.

Elle a déclaré irrecevables lesdites pièces nouvelles, ainsi que les allégués de fait s'y rapportant, au motif qu'elles auraient pu être produites devant le premier juge.

Sur le fond, elle a considéré qu'aucun élément du dossier ne permettait de retenir, même sous l'angle de la vraisemblance, une mise en danger des expectatives des appelants dans le cadre de l'action révocatoire.

En effet, C______ avait expressément déclaré n'avoir nullement l'intention de vendre la part de propriété par étages concernée et les parties adverses n'avaient apporté aucun indice permettant de retenir que cette dernière aurait été sur le point de se dessaisir de ce logement. L'imminence d'une telle vente était d'autant moins vraisemblable que la grand-mère paternelle de C______ vivait encore dans cet appartement, que l'aïeule disposait d'un droit d'usufruit sur ce bien, qu'il n'avait pas été allégué que ce droit risquerait de prendre fin avant l'issue de la procédure révocatoire et que F_____ bénéficiait d'un usufruit de second rang.

Même en cas de vente de ce bien, A______ et B______ n'avaient pas rendu vraisemblables les prétendues difficultés qu'ils auraient à obtenir la restitution en argent prévue à l'art. 291 LP. La situation financière de l'intimée ne ressortait d'aucun élément du dossier. C______ ne pouvait dès lors être considérée comme insolvable et le prix de vente qu'elle obtiendrait ne serait pas nécessairement inférieur au prix de réalisation par l'Office des poursuites.

B. a. Par acte déposé le 14 mars 2017, A______ et B______ ont formé une action révocatoire à l'encontre de C______.

Ils ont conclu, avec suite de frais et dépens, à ce que :

- soit prononcée la révocation de la donation de F______ faite en faveur de C______ sur les ¾ de la part de propriété par étages
n° 3_____-45, correspondant à 16.04% de la propriété par étages constituée sur la parcelle de base n° 3______ de la commune de E______(n° 4),

- il soit ordonné à C______ de restituer cette part de copropriété à F______ de façon à permettre la saisie et la réalisation de cet immeuble pour couvrir les créances de A______ et de B______ (n° 5),

- il soit ordonné au Conservateur du Registre foncier de procéder aux rectifications découlant de cette révocation, ainsi qu'à l'inscription d'une restriction au droit d'aliéner, de céder ou de grever à quelque titre que ce soit cet appartement jusqu'à la saisie par l'Office des poursuites (n° 6 et 7),

- il soit ordonné à l'Office des poursuites de procéder à la saisie et à la réalisation de cet immeuble pour couvrir les créances de A______ et de B______ (n° 8), et

- subsidiairement, soit ordonnée la restitution de la valeur en argent de ce bien immobilier dans le patrimoine de F______ (n° 9).

A titre préalable, ils ont, notamment, conclu à ce qu'il soit dit qu'ils sont consorts simples (n° 1), à ce qu'il soit procédé à l'inscription au Registre foncier de l'interdiction d'aliéner la part de propriété litigieuse (n° 2) et à ce qu'il soit dit que la procédure valait validation des mesures prises dans la procédure C/2______/2016 (n° 3).

A______ et B______ ont fondé leurs prétentions sur les art. 285 et ss LP.

Ils ont fait valoir que C______ ne pouvait ignorer l'intention dolosive de F_____ lors de la donation en raison de la situation financière déjà précaire de celui-ci, dont elle avait nécessairement connaissance, père et fille ayant été domiciliés à la même adresse entre 2007 et 2011.

A l'appui de leur demande, ils ont produit le relevé de poursuites daté du 19 juin 2014 et les deux attestations de l'OCPM établies les 25 novembre 2014 et 23 avril 2015 concernant F_____ précités (cf. supra let. A.e).

b. Dans sa réponse du 19 juin 2017, C______ s'est opposée à la demande.

Elle a allégué que, depuis le divorce de ses parents lorsqu'elle avait trois ans et durant toute sa vie, elle n'avait eu que très peu de contacts avec son père. Enfant, elle ne s'était rendue qu'une seule fois chez lui, n'était jamais partie en vacances avec lui et ne le voyait qu'à raison d'une à deux heures chez ses grands-parents paternels lors des rares exercices du droit de visite. Elle pouvait rester plusieurs mois, voire une année sans avoir de ses nouvelles. A l'âge adulte, c'était uniquement à l'occasion des visites chez sa grand-mère paternelle qu'elle rencontrait parfois son père. Elle n'avait jamais habité avec lui.

c. Dans leurs écritures du 18 mai 2018, A______ et B______ ont persisté dans leur conclusion préalable en inscription au Registre foncier de l'interdiction d'aliéner la part de propriété litigieuse et précisé qu'elle était fondée sur l'art. 960 al. 1 ch. 1 CC.

d. Dans sa réponse du 5 novembre 2018, C______ a conclu au rejet de la requête.

e. Par ordonnance OTPI/786/2018 rendue le 20 décembre 2018, notifiée aux parties le lendemain, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures provisionnelles, a rejeté la requête formée par A______ et B______ à l'encontre de C______ en inscription au Registre foncier de l'interdiction d'aliéner la part de propriété litigieuse (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 960 fr., mis à la charge de A______ et de B______ et compensés avec l'avance fournie par ces derniers (ch. 2), condamné A______ et B______, conjointement et solidairement, à verser à C______ la somme de 1'000 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

C. a. Par acte expédié le 27 décembre 2018 au greffe de la Cour de justice, A______ et B______ appellent de cette ordonnance, dont ils sollicitent l'annulation.

Ils reprennent leurs conclusions de première instance tant préalables (n° 1 et 2 de la demande) que principales et subsidiaires (n° 4 à 11 de la demande), concluant en sus au renvoi de la cause au premier juge.

b. C______ conclut, avec suite de frais et dépens, à l'irrecevabilité des conclusions préalables et subsidiaires de l'appel et, sur le fond, à ce qu'il soit dit que les ch. 2 et 3 de l'ordonnance entreprise sont entrés en force et, pour le surplus, à ce que cette décision soit intégralement confirmée.

Elle produit le procès-verbal d'une audience tenue le 28 janvier 2019 par le Tribunal dans la présente procédure.

c. Par réplique du 20 février et duplique du 4 mars 2019, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

d. Les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courrier du 6 mars 2019.


 

D. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. Situation financière de F______

a.a. Entre 1996 et 2014, F_____ a fait l'objet d'une trentaine de poursuites pour un montant total de l'ordre de 600'000 fr. Du 30 septembre 2010 au 1er août 2017, une quarantaine de poursuites ont été ouvertes à son encontre pour un montant total de l'ordre de 1'150'000 fr. Des actes de défaut de biens ont été délivrés à ses créanciers du 20 octobre 1998 au 28 août 2017.

a.b. Le 11 août 2014, F_____ a attesté par écrit être confronté à des difficultés financières depuis 2012, ce qui l'avait conduit à des opérations irrégulières au préjudice de A______ et de B______.

a.c. En 2015, A______ et B______ ont initié chacun une poursuite à l'encontre de F_____ pour respectivement 346'226 fr. et 44'876 fr., ce qui a donné lieu à une saisie en octobre 2015. Selon le procès-verbal y afférent, ce dernier ne possédait que le strict nécessaire. Le 24 février 2016, deux actes de défaut de biens portant sur les montants précités ont été établis.

a.d. Sur requête de A______ et B______ du 28 juillet 2017, l'Office des poursuites a dressé le 24 août 2017 la liste des quarante-et-un commandements de payer notifiés à F_____ du 2 novembre 2010 au 7 août 2017 dans le cadre des procédures clôturées moins de cinq ans auparavant. Il en ressort le nom de la personne à qui chacun de ces actes a été délivré, à savoir F______, la mère de celui-ci, D______, ou une fiduciaire. A cette liste ont été joints les procès-verbaux des notifications intervenues jusqu'au 9 mars 2015 pour la plus ancienne, faute pour les procès-verbaux antérieurs d'être disponibles aux archives.

b. Donation de F_____ à C______

b.a. Les parents de F______, G______ et D______, étaient copropriétaires d'une part de propriété par étages située sur une parcelle de la commune de E______, sise 1______ (ci-après : le bien).

b.b. Par testament du 20 octobre 1997, G_____ a institué pour seuls héritiers son fils, à raison de trois quarts de sa succession, et sa petite-fille, à concurrence d'un quart. L'usufruit de l'entier de sa succession était dévolu à son épouse, laquelle demeurait dans le bien.

b.c. G_____ est décédé le ______ 2011.

b.d. Par acte du 20 décembre 2012, D______ a cédé à son fils et sa petite-fille sa part de copropriété sur le bien. Un droit d'usufruit a été inscrit en sa faveur au Registre foncier.

Par acte du même jour, F_____ a fait don à sa fille de la nue-propriété des droits indivis qu'il détenait sur le bien (ci-après : la donation). Un droit d'usufruitier de second degré lui a été concédé.

C______ est, ainsi, devenue seule nue-propriétaire du bien et D______ a continué à y être domiciliée.

Selon C______, ces donations concrétisaient le souhait de sa grand-mère de lui léguer cet appartement, ses grands-parents paternels l'ayant élevée à la place de son père.

c. Domiciles de F_____ et C______

c.a. En avril 2007, C______, âgée de 20 ans, a signé en qualité de locataire un contrat de bail portant sur un appartement situé au 4______ à E______.

Elle allègue y avoir habité de 2007 à mai 2011 avec son compagnon, devenu son époux, ______ de profession. En raison des engagements professionnels de ce dernier, ils avaient déménagé régulièrement depuis mai 2011 (d'abord à Neuchâtel, puis dans le Valais en février 2012, à H______(GE) en décembre 2012, à [l'adresse] 5______ à E______ en novembre 2013 et en Argovie de 2014 à ce jour), raison pour laquelle elle s'était administrativement domiciliée chez sa grand-mère au 1______ à E______depuis le 1er août 2013. Selon une attestation de l'OCPM du 12 mai 2016, C______ était domiciliée "p.a. D______, 1______ à E______".

C______ allègue également n'avoir jamais habité dans l'appartement sis 4______ avec son père, mais le lui avoir sous-loué lors de son départ en 2011, ce dernier étant alors domicilié à I______ [France]. Elle avait, lors d'un repas chez sa grand-mère et en présence de son père, évoqué son futur départ à Neuchâtel et son besoin de trouver un locataire pour son appartement. En 2011-2012, elle ne voyait son père que lors des repas chez sa grand-mère, à l'occasion desquels son père n'avait jamais parlé de sa situation financière. Elle n'avait aucun autre contact avec lui, hormis peut-être un message une fois. Elle ne connaissait pas sa situation financière et n'avait jamais reçu de courrier ou communication destinée à son père. Celui-ci avait été présent lors de la cérémonie religieuse de son mariage en 2016. Il n'avait, en revanche, pas été invité au repas qui avait suivi, ni à la cérémonie civile en 2015. Elle n'avait eu connaissance de la situation financière de son père que lorsque la décision sur mesures superprovisionnelles lui avait été notifiée.

c.b. Selon les deux attestations de l'OCPM des 25 novembre 2014 et 23 avril 2015 (cf. supra let. A.e et B.a), F_____était alors "sans domicile connu". Ces deux attestations indiquent sous la rubrique "domicile": "p.a. C______, 4______ à E______".

A teneur d'une attestation de l'OCPM du 4 septembre 2017, F_____ était domicilié au 1______ à E______.

E. Aux termes de l'ordonnance entreprise, le Tribunal a retenu que la requête en inscription au Registre foncier d'une restriction du droit d'aliéner s'inscrivait dans le cadre de mesures provisionnelles fondées sur l'art. 960 al. 1 ch. 1 CC et l'art. 261 al. 1 CPC et que l'objet du litige de la procédure C/2______/2016 et de la présente procédure étaient identiques, quand bien même les bases légales invoquées étaient différentes. Or, les seuls éléments nouveaux invoqués par A______ et B______ dans le cadre de leur nouvelle requête reposaient sur les deux attestations établies par l'OCPM en date des 25 novembre 2014 et 23 avril 2015, lesquelles étaient connues par les parties requérantes depuis 2014, soit avant l'introduction de la procédure C/2______/2016, et ne pouvaient, par conséquent, être considérés comme nouveaux au sens de l'art. 268 CPC.

Par surabondance de moyens, le Tribunal a relevé que A______ et B______ fondaient leur légitimité sur des éléments postérieurs à la période pendant laquelle père et fille avaient eu la même adresse, puisque les actes de défaut de biens de 2016 étaient fondés sur une reconnaissance de dette de 2014 et sur une créance de 2014, et qu'ils n'alléguaient pas une quelconque proximité entre père et fille à cette époque, de sorte qu'ils n'avaient pas rendu vraisemblable une intention dolosive de C______ à leur encontre en 2012. En outre, il ne ressortait pas de la procédure que les juges saisis dans la cause C/2______/2016 avaient procédé à une appréciation grossièrement inappropriée de la situation, notamment s'agissant de la mise en danger des expectatives des parties requérantes.

EN DROIT

1. 1.1. Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles si la valeur litigieuse est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC).

Selon l'art. 91 al. 1 CPC, la valeur litigieuse est déterminée par les conclusions. Toutefois, lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal détermine la valeur litigieuse si les parties n'arrivent pas à s'entendre sur ce point ou si la valeur qu'elles avancent est manifestement erronée (art. 91 al. 2 CPC).

En l'espèce, les mesures provisionnelles sollicitées visent à interdire à l'intimée d'aliéner ou de grever un bien immobilier, dont les parties n'ont pas indiqué la valeur. Il n'est toutefois pas contesté que la valeur litigieuse de 10'000 fr. est atteinte. Il y a donc lieu d'admettre que la valeur vraisemblable de la part de propriété par étages concernée est de 10'000 fr. au moins, de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

Interjeté dans les délai et forme utiles (art. 130, 131, 145 al. 2 let. b et 314
al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.2. L'instance d'appel revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC), avec administration restreinte des moyens de preuve, la cognition du juge est toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF 131 III 473 consid. 2.3; ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1).

2. Les appelants concluent, préalablement, à ce qu'il soit dit qu'ils sont consorts simples.

2.1. L'intérêt digne de protection à l'exercice d'une voie de droit est une condition de recevabilité de la requête (art. 59 al. 2 let. a CPC). Faute d'intérêt pour agir, le juge n'entre pas en matière (ATF 127 III 41 c. 4c, in JT 2000 II 98; 116 II 196 c. Ib, in JT 1990 I 596). Le demandeur doit obtenir un avantage, factuel ou juridique, du résultat de la procédure (arrêts du Tribunal fédéral 5A_282/2016 du
17 janvier 2017 consid. 3.2.1; 4P.239/2005 du 21 novembre 2005 consid. 4.1).

2.2. Pour le recours comme pour l'appel, la motivation est une condition de recevabilité prévue par la loi et qui doit être examinée d'office (arrêt du Tribunal fédéral 5A_82/2013 du 18 mars 2013 consid. 3.2, 3.4 et 4.3). Il incombe au recourant de motiver son appel (art. 311 al. 1 CPC), c'est-à-dire de démontrer le caractère erroné de la décision attaquée. La Cour applique certes le droit d'office (art. 57 CPC); cependant, elle ne traite en principe que les griefs soulevés, à moins que les vices juridiques soient tout simplement évidents (arrêts du Tribunal fédéral 4A_258/2015 du 21 octobre 2015 consid. 2.4.3; 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 3.1).

2.3. En l'espèce, les appelants ne développent aucune critique à l'encontre de la décision entreprise en lien avec leur conclusion précitée, laquelle ne paraît pas avoir de portée propre et sur laquelle le Tribunal a statué implicitement. Ils ne font en particulier valoir aucune utilité factuelle et/ou juridique à ce qu'il soit fait droit à celle-ci. Partant, cette conclusion est irrecevable.

3. Les appelants reprennent également leurs conclusions de première instance sur le fond, lesquelles sont irrecevables. En effet, la présente procédure d'appel ne porte que sur les mesures provisionnelles requises du premier juge et rejetées par celui-ci, tandis que se poursuit devant le Tribunal l'instruction relative aux conclusions de fond qui n'ont donc pas encore été tranchées.

4. Les appelants reprochent au Tribunal d'avoir retenu que les mesures provisionnelles en inscription au Registre foncier d'une restriction du droit d'aliéner requises dans la procédure C/2______/2016 et celles requises dans la présente procédure avaient le même objet.

Ils soutiennent que les procédures sont différentes quant à l'inscription requise et à la source juridique, puisque la première, fondée sur l'art. 261 CPC, tendait à un blocage, à savoir une interdiction faite par le juge au propriétaire de disposer de l'immeuble, tandis que la seconde, fondée sur l'art. 960 CC, qui est une lex specialis, tend à l'annotation d'une restriction du droit d'aliéner, qui n'empêche pas la propriétaire de disposer de son immeuble, l'acquéreur se voyant cependant opposer le rapport juridique annoté.

4.1. Selon l'art. 261 al. 1 CPC, le Tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).

Selon l'art. 262 CPC, le Tribunal peut ordonner toute mesure provisionnelle propre à prévenir ou à faire cesser le préjudice, notamment les mesures suivantes : l'interdiction (let. a), l'ordre de cessation d'un état de fait illicite (let. b), l'ordre donné à une autorité qui tient un registre ou à un tiers (let. c), la fourniture d'une prestation en nature (let. d) ou le versement d'une prestation en argent, lorsque la loi le prévoit (let. e).

4.2. Le demandeur à une action révocatoire (art. 285 ss LP) peut faire garantir, par voie de mesure provisionnelle avant ou après le dépôt de l'action au fond
(art. 261 ss CPC), son droit par l'annotation d'une restriction au droit d'aliéner prévue à l'art. 960 CC (ATF 81 III 98, in JT 1956 II 16; par analogie, arrêt du Tribunal fédéral 5A_808/2014 du 18 février 2015 et les réf. cit.).

L'annotation ne bloque pas le feuillet au registre foncier (ATF 91 II 412, in JT 1966 I 354).

Le blocage du registre foncier est une interdiction faite au conservateur de procéder à des opérations sur un feuillet. Il a pour conséquence que le conservateur doit, en principe, refuser de donner suite à une réquisition. Destiné à maintenir un état de choses existant, il fait donc obstacle à tout acte de disposition du propriétaire sur son immeuble. Le blocage se distingue de l'annotation de restriction du droit d'aliéner (art. 960 al. 1 CC) par le fait que cette dernière n'empêche pas le propriétaire de disposer de son immeuble mais l'effet de l'acte accompli malgré l'annotation est tenu en échec par le rapport juridique annoté s'il entre en conflit avec lui (Mooser, CR-CC II, n. 32 et 34 ad intro. aux
art. 942-977 CC).

Le blocage du Registre foncier ne peut être ordonné ou mis en oeuvre d'office par le conservateur que si la loi le prévoit (Mooser, op. cit., n. 32 et 34 ad intro art. 942-977 CC; Steinauer, Droits réels, tome I, p. 239 n° 647), tel le blocage résultant de mesures provisionnelles dans une procédure civile en application de l'art. 178 al. 3 CC.

4.3. En l'espèce, contrairement à ce que soutiennent les appelants, les mesures provisionnelles en inscription au Registre foncier d'une restriction du droit d'aliéner requises dans la procédure C/2______/2016 et celles requises dans la présente procédure tendaient toutes deux à l'inscription d'une annotation au registre foncier.

Par ailleurs, quand bien même les appelants avaient fondé leur première requête de mesures provisionnelles, formulée indépendamment du fond, sur
les art. 261 ss CPC, cette requête constituait, tout comme celle faisant l'objet de la présente procédure, une mesure provisionnelle régie par les art. 261 ss CPC et fondée sur l'art. 960 CC.

C'est, ainsi, à raison que le premier juge a retenu que l'objet du litige de ces deux procédures était identique.

5. A bien les comprendre, les appelants font grief au Tribunal d'avoir considéré que la requête n'était fondée sur aucun fait nouveau au sens de l'art. 268 CPC.

Ils font valoir que les attestations établies par l'OCPM les 25 novembre 2014 et 23 avril 2015, qu'ils ne contestent plus avoir soumises tardivement dans la procédure C/2______/2016, ont été produites à temps dans la présente procédure. Selon eux, il serait, dès lors, "contraire au droit de les considérer comme pièces nouvelles et ainsi de ne pas les prendre en compte dans la présente procédure pour cause qu'elles n'auraient pas été produites à temps dans une autre procédure".

5.1. Les mesures provisionnelles peuvent être modifiées ou révoquées, s'il s'avère par la suite qu'elles sont injustifiées ou que les circonstances se sont modifiées (art. 268 al. 1 CPC).

Les mesures provisionnelles peuvent être modifiées s'il existe des éléments - en particulier des preuves nouvelles - ou des faits nouveaux postérieurs au premier jugement. Il en va de même si le requérant invoque des éléments dont ni le requérant ni le juge n'avaient connaissance lors du précédent prononcé (Tappy, Code de procédure civile commenté CPC, 2019, n. 5 ad art. 268 CPC).

Il ne s'agit pas de corriger le premier jugement, mais de l'adapter aux circonstances nouvelles (cf. par analogie ATF 120 II 177 consid. 3a et arrêt du Tribunal fédéral 5A_860/2013 du 29 janvier 2014 consid. 4.2 relatifs à
l'art. 179 CC).

5.2. En l'espèce, les pièces litigieuses, qui n'ont pas été soumises au premier juge dans la procédure C/2______/2016 et qui ont été écartées par la Cour en appel pour avoir été produites tardivement, ont certes été déposées à temps dans la présente procédure, de sorte qu'elles sont recevables.

Sous l'angle de l'art. 268 CPC, les éléments de fait que contiennent ces pièces ne correspondent néanmoins pas à des faits nouveaux et les appelants ne sauraient fonder leur seconde requête de mesures provisionnelles sur des pièces qu'elles ont omises de produire à temps dans la première procédure de mesures provisionnelles.

Dès lors, c'est également à raison que le premier juge a considéré que la requête de mesures provisionnelles litigieuses ne reposait sur aucun fait nouveau au sens de l'art. 268 CPC.

Il sera relevé, à titre superfétatoire, que les appelants ne font valoir aucun autre fait nouveau et que les éléments de fait ressortant des attestations précitées, qui concernent la condition de reconnaissabilité par le bénéficiaire de l'intention dolosive du débiteur au sens de l'art. 288 al. 2 LP, ne sont pas susceptibles de remettre en question le raisonnement de la Cour dans l'ACJC/537/2017 du 12 mai 2017, selon lequel aucun élément du dossier ne permettait de retenir, même sous l'angle de la vraisemblance, une mise en danger des expectatives des appelants dans le cadre de l'action révocatoire (cf. EN FAIT let. A.f).

Par conséquent, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

6. Les frais judiciaires de l'appel seront fixés à 1'440 fr. et mis à la charge des appelants, qui succombent (art. 95 et 106 al. 1 1ère phrase CPC; 13, 26
et 37 RTFMC). Ils seront entièrement compensés avec l'avance de frais du même montant versée par les appelants, laquelle reste acquise à l'État (art. 111
al. 1 CPC).

Les appelants seront également condamnés à verser 1'800 fr. à l'intimée à titre de dépens d'appel, débours et TVA compris au regard de l'activité déployée par le conseil de leur partie adverse (art. 95, 104 al. 1, 105 al. 1 et 106 al. 1 CPC; art. 20, 25 et 26 al. 1 LaCC; art. 25 al. 1 LTVA; art. 84, 85 al. 1 et 90 RTFMC).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 27 décembre 2018 par A______ LTD et B______ contre l'ordonnance OTPI/786/2018 rendue le 20 décembre 2018 par le Tribunal de première instance dans la cause C/20870/2016-5.

Au fond :

Confirme l'ordonnance entreprise.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'440 fr., les met à charge de A______ LTD et de B______, solidairement entre eux, et les compense avec l'avance de frais de même montant versée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ LTD et B______, solidairement entre eux, à verser à C______ la somme de 1'800 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN et Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.