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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2027/2020

JTAPI/986/2024 du 04.10.2024 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/391/2025

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR
Normes : LEI.30.al1.letb; OASA.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2027/2020

JTAPI/986/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 4 octobre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______ et Madame B______, représentés par Me Mattia DEBERTI, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1968, et Madame B______, née le ______ 1968, sont ressortissants de Macédoine.

2.             Le 6 juin 2016, M. A______ a été entendu par la police en qualité de prévenu d'infraction à la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr – 142.20 ; devenue la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration[LEI]), avec prise d'emploi, et infractions à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01). Lors de son audition, il a notamment déclaré qu'il était arrivé en Suisse en juin 2015 et qu'il travaillait pour l'entreprise C______ Sàrl en qualité d'ouvrier depuis août 2015. Il a aussi indiqué que sa mère et ses deux enfants majeures vivaient à Genève, mais que sa femme résidait en Macédoine. Il était venu en Suisse pour la première fois en 1986 comme étudiant et exerçait une activité professionnelle saisonnière depuis 1987, rentrant en Macédoine tous les neuf mois.

3.             Par ordonnance pénale du 26 octobre 2016, M. A______ a été condamné par le Ministère public en raison d'infractions à la LCR et à la LEtr.

4.             Le 28 février 2017, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) a prononcé une interdiction d'entrée sur le territoire Suisse (ci-après: IES) jusqu'au 27 février 2020 à l'encontre de M. A______.

5.             Par décision du 27 mars 2017, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse de M. A______, laquelle n'a fait l'objet d'aucun recours.

6.             Par courrier du 27 avril 2017, sous la plume de leur conseil, les époux A______ et B______, agissant également pour le compte de leur fils D______, né le ______ 1998, ont formulé une demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur.

7.             Par formulaire du 19 décembre 2018, les intéressés ont transmis à l'OCPM un formulaire de demande d'autorisation de séjour sous l'angle de l'opération « Papyrus », mentionnant pour les époux une date d'arrivée en Suisse en 1987, avec des preuves de séjour à partir de 2008, ainsi qu'une date d'arrivée en 2007 pour leur fils.

À l'appui de la demande, ils ont notamment produit un extrait du registre des poursuites, une attestation de non-prise en charge de l'Hospice général (ci-après : HG), une attestation de connaissance de la langue française niveau A2, diverses lettres de soutien vantant les qualité personnelles et professionnelles de
M. A______, des fiches de salaire de janvier à décembre 2018 auprès de la société E______ SA, des fiches de salaire de janvier à août 2018 de la société F______ SA en qualité de peintre-plâtrier à 25%, des fiches de salaire de janvier à août 2018 pour la société C______ Sàrl et des fiches de salaire de janvier à avril 2012, de février à avril 2013 et d'avril à juin 2014 pour la société G______, ainsi qu'un un extrait de son compte individuel établi par l’office cantonal des assurances sociales daté du 11 septembre 2018 mentionnant des périodes de cotisations de 1987 à 1989, de 2008 à 2011 et de 2015 à 2017.

8.             Le 25 octobre 2019, l'OCPM a requis la production de documents complémentaires, notamment des justificatifs de séjour pour les années 2009 à 2017 pour Mme B______.

9.             Le même jour, l'OCPM a requis de l'office des poursuites des extraits globaux concernant les intéressés, lesquels leur ont été fournis en date du 31 octobre 2019, faisant état de dettes supérieures à CHF 10'000.-.

10.         Par courrier du 20 décembre 2019, l'OCPM a informé les intéressés de son intention de refuser leur demande d'autorisation de séjour, leur octroyant un délai de 30 jours pour formuler leurs observations, ce qu'ils ont fait par courrier du 18 février 2020.

11.         Par décision du 3 juin 2020, l'OCPM a refusé de régulariser les conditions de séjour de M. A______ et Mme B______ et a prononcé leur renvoi de Suisse.

A teneur des pièces produites, ils n'avaient pas été en mesure de valider la durée de leur séjour, soit de dix ans minimum à Genève pour une famille sans enfant scolarisé. Leur situation ne répondait pas au critère de l'opération Papyrus. Le séjour de M. A______ était démontré à satisfaction que pour les années 2009 à 2011 et de 2015 à 2019. Aucun justificatif pour les années 2012 à 2014 n'avait été fourni, hormis des fiches de salaires dont les cotisations sociales n'apparaissaient pas sur l'extrait AVS fourni. De plus, M. A______ avait annoncé dans un rapport de police du 6 juin 2016 qu'il était arrivé en Suisse en 2015.

M. A______ n'était également pas dans une situation financière satisfaisante, dès lors qu'il cumulait des dettes consolidées pour un montant largement supérieur à CHF 10'000.-.

M. A______ ne remplissait également pas les critères d'un cas de rigueur, car il n'avait pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable. Son intégration correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour.

Il n'invoquait pas ni ne démontrait l'existence d'obstacles au retour dans son pays d'origine. Le dossier ne faisait pas non plus apparaitre que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigé.

12.         Par acte du 6 juillet 2020, sous la plume de leur conseil, M. A______ et Mme B______ (ci-après : les recourants) ont formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) concluant à titre principal à son annulation et à l'octroi d'une autorisation de séjour dans le cadre de l'opération Papyrus, subsidiairement, à l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur et, plus subsidiairement, au renvoi du dossier à l'OCPM pour nouvelle décision au sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens.

La demande de régularisation avait été formulée le 27 avril 2017, de sorte que le droit des étrangers dans son ancienne version était applicable.

S'il n'avait pas eu d'activité professionnelle auprès d'un employeur acceptant de le déclarer aux assurances sociales pendant la période entre 2012 et 2014, il avait résidé à Genève et avait continué d'y travailler. Il ressortait de ses documents médicaux qu'il avait toujours bénéficié d'une assurance maladie depuis sa prise de domicile définitive à Genève en 2008. C'était à tort que l'autorité intimée n'avait pas pris en considération les éléments probants de catégorie A produits.

Depuis son arrivée à Genève, il n'avait jamais émargé à l'aide sociale. Il s'était acquitté de ses dettes pour un montant de CHF 18'010.75.- et s'était engagé au paiement mensuel d'un montant de CHF 2'000.- afin de procéder au rachat de l'ensemble de ses actes de défauts de bien le plus rapidement possible. Son engagement était cautionné par son employeur, ce qui démontrait sa volonté de reprendre sa situation financière en mains. Il en était de même de son épouse qui s'était elle aussi acquittée de ses actes de défauts de bien d'un montant total de CHF 2'001.90.-.

M. A______ avait produit plusieurs attestations de personnes qui avaient été amenées à le côtoyer tant sur le plan professionnel que privé. Ces dernières relevaient qu'il était une personne respectueuse avec une volonté sincère de s'intégrer à Genève. De plus, l'ensemble de ses proches, soit sa mère, ses enfants, ses frères et sœurs ainsi que ses neveux et nièces résidaient en Suisse depuis de nombreuses années, et certains étaient même devenus suisses. Les relations de M. A______ et Mme B______ avec Genève étaient donc très étroites. Ils ne disposaient plus d'aucunes attaches sociales ou professionnelles en Macédoine, pays qu'ils avaient quittés douze ans auparavant.

A l'appui de leur recours, ils ont notamment produit un décompte de prestations d'assurance maladie 2013, un carnet de vaccination indiquant un seul rappel le 19 juin 2013, un certificat d'assurance maladie 2014 et une attestation d'ouverture d'un compte individuel AVS auprès de l'OCAS en février 2014.

13.         Le 23 juillet 2020, l'OCPM a dénoncé la situation de M. A______ au Ministère public pour des soupçons sur l'authenticité des décomptes et certificats de salaire établis par l'entreprise G______ car les taux de cotisations AVS appliqués étaient erronés et les prélèvements des charges sociales n'apparaissaient pas sur l'extrait de compte individuel AVS. La procédure pénale P/1_______/2020 a été ouverte.

14.         Le 14 septembre 2020, l'OCPM a transmis ses observations, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet du recours.

Si les recourants avaient réussi à démontrer le séjour de leur fils D______ entre 2008 et 2013, tel n'était pas le cas pour eux-mêmes pour la période de 2012 à 2014. Les fiches de salaire émises au nom de l'entreprise G______ pour les années 2012 à 2014 semblaient avoir été produites pour les besoins de la cause. Il était ainsi pour le moins surprenant de relever que le taux de cotisations AVS correspondait à celui des années 2016 à 2019, et non pas à celui des années 2012 à 2014. Une dénonciation pénale avait été adressée au Ministère public.

Il était difficile d'imaginer qu'au vu de la « culture balkanique », les recourants se furent trouvés en Suisse, laissant leur fille H______ habiter sans ses parents en Macédoine. Ce n'était qu'en 2015 qu'elle était arrivée en Suisse, suite à son mariage. Tout laissait à croire que l'enfant D______ avait terminé sa scolarité et avait vécu à Genève auprès de sa grand-mère paternelle pendant que ses parents se trouvaient en Macédoine entre 2012 et 2014.

Ils ne remplissaient donc pas les conditions d'une autorisation de séjour tant sous l'angle de l'opération « Papyrus » que du cas de rigueur.

15.         Le 2 novembre 2020, les recourants ont répliqué, persistant dans leurs conclusions et leur argumentation.

Si l'OCPM relevait une incohérence dans les fiches de salaire produites pour les années 2012 à 2014, il avait néanmoins travaillé pour le compte de cette société durant cette période. Il n'était d'ailleurs pas inhabituel que les fiches de salaires fussent rédigées ultérieurement, l'essentiel étant que l'intéressé eut effectivement travaillé pour le compte de cette entreprise.

Leur fille H______ était arrivée en Suisse en 2008 avec le reste de sa famille. Elle avait été scolarisée à Genève de 2008 à 2009. Elle n'avait pas quitté la Suisse depuis, étant précisé que l'attestation d'achat d'abonnement TPG démontrait sa présence à Genève entre 2012 et 2015. Entre 2009 et 2011, elle avait rencontré l'homme qui allait devenir son mari, de sorte qu'elle n'avait eu aucune raison de quitter la Suisse. A suivre l'argument de la « culture balkanique » avancé par l'OCPM, excluant la possibilité que des parents pussent vivre loin de leur fille et du fait que cette dernière avait démontré sa présence en Suisse de manière discontinue de 2008 à 2015, il en était de même pour eux.

16.         Le 16 novembre 2020, l'OCPM a proposé la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur la dénonciation adressée le 23 juillet 2020 au Ministère public, en raison du fait qu'un doute subsistait quant à l'authenticité des fiches de salaires produites pour les années 2012 à 2014.

17.         Par courrier du 30 novembre 2020, les recourants ont informé le tribunal qu'ils ne s'opposaient pas à la suspension de la procédure.

18.         Par décision du 1er décembre 2020 (DITAI/491/2020), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans la procédure pénale P/1______/2020.

19.         Le 9 juin 2021, l'OCPM a informé le tribunal que la procédure pénale précitée était encore en cours, le Ministère public ne lui ayant rien communiqué.

20.         Le 16 juin 2021, les recourants ont indiqué au tribunal que le Ministère public ne les avait pas encore convoqués.

21.         Par décision du 1er novembre 2021, l'OCPM a séparé la demande du fils des recourants, D______, de la leur et a considéré qu'il remplissait les conditions de l'opération Papyrus, lui délivrant ainsi un permis de séjour.

22.         Par courriers respectifs des 15 et 16 décembre 2021, les recourants et l'OCPM ont sollicité du tribunal la prolongation de la suspension, la procédure pénale n'ayant pas encore été instruite par le Ministère public. L'OCPM demandait aux recourants de transmettre toute information complémentaire éventuelle en leur possession.

23.         Par décision du 21 décembre 2021 (DITAI/609/2021), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure.

24.         Le 22 avril 2022, M. A______ a été entendu par les services de police dans le cadre de l'instruction de la procédure pénale P/1______/2020.

Il a notamment déclaré qu'il était revenu en Suisse fin 2007 auprès de sa famille. Il résidait alors en Macédoine avec sa femme et ses enfants, lesquels étaient arrivés en Suisse un mois avant lui. Il n'avait plus jamais quitté Genève depuis. Sa femme avait pu voyager à deux reprises en Macédoine pour des vacances d'une durée d'un mois chacune. Concernant son IES, il en était conscient mais était resté en Suisse et avait continué de travailler.

Sa mère habitait à Genève et vivait avec lui. Ses enfants ne vivaient pas avec lui, mais résidaient à Genève.

Sa femme avait des problèmes de santé.

25.         Par courriers respectifs des 9 et 16 janvier 2023, les recourants et l'OCPM ont sollicité du tribunal la prolongation de la suspension, la procédure pénale étant toujours pendante.

26.         Par décision du 23 janvier 2023 (DITAI/32/2023), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure.

27.         Le 30 janvier 2024, les recourants ont une nouvelle fois sollicité la prolongation de la suspension de la procédure, la procédure pénale étant encore pendante.

28.         Le 5 février 2024, sans nouvelle du Ministère public, l'OCPM a requis du tribunal qu'il prononce un acte d'instruction afin de savoir si un jugement pénal avait été rendu ou non à ce jour. Dans la négative, il demandait que « la procédure administrative soit reconduite en application de l'art. 78 let. a LPA ».

29.         Le 14 février 2024, le Ministère public a transmis au tribunal le jugement rendu par le Tribunal de police le 6 février 2024, lequel déclarait valable l'ordonnance pénale du 22 avril 2022 à l'encontre du recourant et l'opposition formée contre celle-ci par ce dernier le 2 mai 2022, l'acquittait des chefs de faux dans les titres, de séjour illégal, d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation, de tentative d'induire en erreur les autorités et classait la procédure s'agissant des séjours et activités lucratives reprochés antérieurs au 7 février 2017.

30.         Le 29 février 2024, sur demande du tribunal, les recourants lui ont transmis une copie de l'ordonnance pénale du 22 avril 2022.

31.         Le 20 mars 2024, prenant note du jugement du Tribunal de police du 6 février 2024, lequel acquittait le recourant notamment des chefs de faux dans les titres et de tentative d'induire en erreur les autorités, l'OCPM a indiqué que cela n'était néanmoins pas de nature à apporter une conclusion différente à la décision querellée. Les années 2012 à 2014 demeuraient non prouvées à satisfaction de droit.

32.         Le 4 avril 2024, les recourants ont transmis leurs observations finales.

Lors de l'audience du 6 février 2024, le Tribunal de police avait procédé à l'audition de leur fils D______, en qualité de témoins, lequel avait confirmé avoir vécu à Genève de 2012 à 2014 avec ses deux parents au domicile familial et que son père avait un emploi à cette période, tout en précisant qu'il était le seul à en avoir un et ainsi à subvenir aux besoins de sa famille. Il était ainsi démontré qu'il résidait à Genève de 2012 à 2014.

Il continuait de s'efforcer de redresser au mieux sa situation financière du mieux qu'il pouvait et selon ses moyens.

Ils vivaient à Genève depuis 2007 avec toute leur famille, notamment leur deux enfants H______ et D______, sa mère, et ses frères et sœurs. Il était ainsi disproportionné d'exiger leur retour en Macédoine, ce d'autant qu'ils étaient aujourd'hui âgés de 55 ans.

33.         Le 10 juillet 2024, les recourants ont transmis au tribunal des extraits du registre des poursuites actualisés ainsi que des attestations de participation aux examens de langue.

34.         Le 30 juillet 2024, les recourants ont transmis au tribunal les résultats de leur test de connaissance de la langue français, le recourant disposant d'un niveau B1 à l'oral, et la recourante d'un niveau A1.

35.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (cf. ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; 134 V 418 consid. 5.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_641/2018 du 3 août 2018 consid. 3 ; 2C_53/2017 du 21 juillet 2017 consid. 5.1 ; 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1218/2017 du 22 août 2017 consid. 3b et l'arrêt cité ; ATA/590/2017 du 23 mai 2017 consid. 2b ; ATA/1050/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3b). La contestation ne peut donc excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1218/2017 du 22 août 2017 consid. 3b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5 et les arrêts cités ; ATA/1145/2015 du 27 octobre 2015 consid. 4b).

6.             En l'espèce, l'objet du litige se limite à examiner la demande de régularisation des conditions de séjour des recourants, sans prendre en compte la situation de leur fils D______. En effet, bien que la demande déposée en 2017 le concernait également, ce dernier n'était à ce moment pas encore majeur. Depuis, il a obtenu le 1er novembre 2021 une autorisation de séjour pour cas de rigueur après un examen de sa situation indépendamment de celle de ses parents, dès lors qu'il est devenu majeur le 10 janvier 2016. Il convient dès lors d'examiner uniquement la situation des recourants.

7.             Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une révision de la LEtr, devenue la LEI. Selon l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont régies par l'ancien droit (arrêts du Tribunal fédéral 2C_94/2020 du 4 juin 2020 consid. 3.1 ; 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1 ; ATA/1331/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3a).

8.             En l'occurrence, la requête qui se trouve à l'origine de la décision querellée ayant été réceptionnée par l’OCPM le 27 avril 2017, la loi dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2019 reste donc applicable au litige.

9.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

10.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, dont la teneur n'a pas changé le 1er janvier 2019, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

11.         L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur avant le 1er janvier 2019 - étant précisé que le nouveau droit n’est pas plus favorable et que la jurisprudence développée sous l’ancien droit reste applicable (ATA/344/2021 du 23 mars 2021 consid. 7a) -, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

12.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C 754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A 718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ; C_5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; C_6726/2013 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/181/2019 du 26 février 2019 consid. 13d ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

13.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse et la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2584/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.3 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 5.6 ; F-736/2017 du 18 février 2019 consid. 5.6 et les références citées ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6b ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’intéressé, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/577/2021 du 1er juin 2021 consid. 2c).

14.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; 2A.166/2001 du 21 juin 2001 consid. 2b/bb ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017 ; ATA/287/2016 du 5 avril 2016).

15.         La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). Le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet donc pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles (ATAF 2007/16 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ég., sous l'ancien droit, ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1).

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée de séjour en Suisse, soit une période de sept à huit ans (ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6c ; ATA/1306/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269 et les références citées). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7f ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). En règle générale, la durée du séjour illégal en Suisse ne peut être prise en considération dans l’examen d’un cas de rigueur, car, comme indiqué plus haut, si tel était le cas, l’obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte récompensée (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; ATA/608/2021 du 8 juin 2021 consid. 7d). Néanmoins, si le séjour illégal d'un étranger a toujours été implicitement toléré par les autorités chargées de l'exécution du renvoi (communes ou cantons), cet aspect doit être favorablement pris en compte (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7f ; ATA/425/2017 du 11 avril 2017 consid. 6a). On ne saurait par ailleurs inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l'intéressé est seulement tolérée en Suisse ; en particulier, après la révocation de l'autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n'emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (arrêt du Tribunal fédéral 2C_926/2010 du 21 juillet 2011 ; cf. aussi ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7f ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 270).

16.         L'intégration professionnelle de l'intéressé doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d ; ATA/882/2014 du 11 novembre 2014 consid. 6d et les arrêts cités). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a notamment retenu en faveur d'un étranger installé depuis plus de onze ans en Suisse, qu'il y avait développé des liens particulièrement intenses dans les domaines professionnel (création d'une société à responsabilité limitée, emploi à la délégation permanente de l'Union africaine auprès de l'ONU) et social (cumul de diverses charges auprès de l'Eglise catholique) (arrêt 2C_457/2014 du 3 juin 2014 consid. 4 et les références citées).

17.         Lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu'une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Aussi, les relations d'amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l'étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; C-7467/2014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

18.         L'opération « Papyrus » a consisté en un processus de régularisation des personnes séjournant à Genève sans titre de séjour, élaboré par le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé, à présent département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : DSPS), « dans le strict respect du cadre légal en vigueur (art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA » ; cf. communiqué de presse du 21 février 2017 : https://demain.ge.ch/actualite/operation-papyrus-presentee-aux-medias-21-02-2017). Le DSPS a ainsi précisé - en tenant compte de la marge d'appréciation possible (cf. brochure officielle publiée en février 2017 : https://demain.ge.ch/document/brochure-papyrus) - les critères objectifs et cumulatifs permettant aux personnes concernées de demander la légalisation de leur séjour selon ce programme, soit : un séjour continu de cinq ans pour les familles avec enfants scolarisés ou de dix ans pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires, le séjour devant être documenté ; une intégration réussie (niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ; une absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal) ; une indépendance financière complète.

Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (cf. ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b).

Il ne s'agissait ainsi pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse, ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voyait pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur, parce qu'elle séjournait et travaillait illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation était constitutive d'un cas de rigueur, en raison, notamment, de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (cf. ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 10b ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8a ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a ; ATA/1694/2019 du 19 novembre 2019 consid. 4d ; ATA/1234/2019 du 13 août 2019 consid. 6b ; ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités). Ainsi, l'opération « Papyrus » ayant été un processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emportait en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères pouvaient entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (cf. ATA/847/2020 du 24 août 2021 consid. 10b ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8a ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

Il convient de préciser que les critères appliqués dans le cadre de l’opération « Papyrus » étaient les critères prévus dans les dispositions légales en matière de régularisation des cas de rigueur (cf. ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 10b).

19.         L'octroi d'une autorisation de séjour dans un cas individuel d'une extrême gravité est soumis au SEM (art. 99 LEI ; art. 85 al. 1 et 2 et 86 al. 5 OASA ; art. 5 let. d de l'ordonnance du DFJP relative aux autorisations soumises à la procédure d'approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers du 13 août 2015 - RS 142.201.1), ce qui suppose que l'autorité cantonale se soit au préalable déclarée disposée à octroyer une autorisation de séjour à l'étranger concerné (cf. Directives et commentaires du SEM, Domaine des étrangers, état au 1er juin 2024, ch. 5.6.).

20.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

21.         Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d'un droit à l'autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d'un pouvoir d'appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l'inverse aurait pour effet de déduire de l'art. 96 LEI un droit à l'obtention ou au renouvellement de l'autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

22.         En l'espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, on doit parvenir à la conclusion que l'OCPM n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que les recourants ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA pour la reconnaissance d'un cas de rigueur, y compris sous l'angle particulier de l'opération « Papyrus ».

Concernant l'appréciation de la durée de leur séjour en Suisse, il sera d'emblée rappelé qu'en principe la procédure pénale et la procédure administrative suivent leur logique propre et les autorités parallèlement compétentes ne sont pas liées par les constatations et par les interprétations juridiques de l'autre. Ce n'est que dans la mesure où il peut aboutir à des contradictions que ce principe doit être nuancé. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés rendus sur la bases des mêmes faits (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 629). Il en découle que bien que l'autorité judiciaire pénale ait acquitté le recourant notamment du chef de faux dans les titres concernant les fiches de salaires produites pour les années 2012 à 2014, cela n'empêche pas le juge administratif d'aboutir à une autre interprétation juridique de ces éléments. Ce dernier doit opérer un examen approfondi de la valeur probante des justificatifs de séjour en vue de déterminer le séjour effectif des intéressés en Suisse, et non juger de l'authenticité des preuves apportées sous l'angle pénal. En l'occurrence, bien que le recourant ait été acquitté de toute infraction pénale par jugement du Tribunal de police du 6 février 2024, force est de constater qu'il existe des éléments semant le doute quant à la détermination de leur date d'arrivée à Genève. D'une part, le recourant n'a pas été constant dans ses déclarations. En effet, lors de son audition par les services de police du 6 juin 2016, il avait déclaré résider en Suisse depuis 2015 et que sa femme vivait en Macédoine. En revanche, à l'appui de sa demande de régularisation, il a déclaré qu'il serait en réalité arrivé à Genève fin 2007 pour y séjourner régulièrement. Ses déclarations doivent ainsi être relativisées. D'autre part, la comparaison des fiches de salaire de la société G______ produites avec le décompte individuel AVS du recourant, lequel n'indique aucun versement de cotisation pour la période 2012 à 2014, sème le doute quant à la présence effective du recourant en Suisse durant cette période.

Quoiqu'il en soit, même dans l'hypothèse qui leur serait la plus favorable, soit à considérer que les recourants résident en Suisse de manière continue depuis 2008, voire même fin 2007 comme l'a allégué le recourant lors de son audition par les services de police du 6 juin 2016 – y compris durant la période entre 2012 et
2014 –, la plus ancienne preuve de leur séjour remonte à l'année 2008, comme ils l'indiquaient déjà dans le formulaire « Papyrus », de sorte qu'au jour de leur demande de régularisation, soit le 27 avril 2017, ils totalisaient une durée de séjour continu inférieure à la durée minimale de dix années exigée dans le cadre de l'opération « Papyrus ». À cela s'ajoute qu'au moment du dépôt de sa demande de régularisation, le recourant faisait l'objet d'une IES prononcée à son encontre le 28 février 2017, valable jusqu'au 27 février 2020. Par ailleurs, nonobstant le critère de la durée de séjour, le recourant a fait l'objet d'une condamnation pénale (ordonnance pénale du 26 octobre 2016) notamment pour des infractions à la LCR, infractions qui ne relèvent pas du séjour illégal, de sorte qu'il ne remplit de toute façon pas la condition d'absence de condamnation pénale. Les recourants ne remplissaient ainsi pas tous les critères stricts et cumulatifs de l’opération « Papyrus » et ne peuvent par conséquent pas s'en prévaloir.

Il n'y a pas non plus lieu de retenir un séjour sans interruption d’une longue durée, au sens défini plus haut ; il a en effet été effectué à la faveur d’une tolérance des autorités depuis le dépôt de sa demande le 27 avril 2017, étant rappelé que les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance - par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne sont pas déterminantes (cf. ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_104/2021 du 28 avril 2021 consid. 3.3). À cela s'ajoute qu'au moment du dépôt de sa demande de régularisation, le recourant faisait l'objet d'une IES prononcée à son encore valable jusqu'au 27 février 2020, et à laquelle il ne s'est pas conformée, ce qui a pour effet que la durée de son séjour doit être relativisée. Il n'en va pas différemment de son épouse. En tout état, la durée du séjour n’est qu’un critère parmi d’autres et le simple fait de séjourner en Suisse pendant de longues années, même légalement, ne permet pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles qui font ici défaut.

Le recourant ne peut pas se prévaloir d’une intégration socio-professionnelle exceptionnelle. L’emploi qu’il exerce dans le domaine du bâtiment en tant que peintre-plâtrier ne témoigne pas d’une ascension professionnelle remarquable et il n’a pas acquis des qualifications spécifiques susceptibles de justifier l'admission d'un cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Il ne peut pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable. Il a non seulement séjourné et travaillé illégalement en Suisse durant plusieurs années, ce qui est en soi déjà répréhensible (arrêts du Tribunal fédéral administratif F-989/2022 du 17 mai 2023 consid. 8.6 ; F- 5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.5), mais il a également fait l’objet de la condamnation pénale susmentionnée. Concernant Mme B______, aucun élément du dossier, ni aucune déclaration des recourants, ne permet de retenir que celle-ci pourrait se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle remarquable, ni même qu'elle aurait exercé une quelconque activité professionnelle depuis son arrivée sur le territoire.

Sur le plan social, bien qu’ils aient produit un document attestant d’un niveau de français B1 pour le recourant et A1 pour la recourante, ils n’ont pas démontré avoir noué avec la Suisse des liens dépassant en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’un étranger ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays. Il ne faut également pas perdre de vue que le recourant est criblé de dettes pour un montant dépassant les CHF 140'000.-. Bien qu'il en ait déjà remboursé quelques-unes, son extrait récent du registre des poursuites du 10 juillet 2024 démontre notamment qu'en mars 2024 il en a contracté de nouvelles, toujours en lien avec son assurance maladie. La nature des dettes joue également en défaveur du recourant, dès lors qu’une partie de celles-ci concerne des montants dus à l’assurance maladie (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4.5).

De plus, les recourants ont passé leur enfance et leur adolescence, soit les périodes cruciales pour l’intégration socio-culturelle, et le début de leur vie d’adulte dans leur pays d'origine. Si une partie des membres de leur famille vit certes en Suisse, notamment la mère du recourant, ses frères et sœurs ainsi que leurs enfants majeurs, il n'en demeure pas moins qu'ils ont conservé des attaches avec leur patrie, ce dont témoigne notamment la très récente demande de visa de retour formulée par la recourante début septembre 2024. Ils pourront le cas échéant également maintenir des relations familiales avec leurs proches en Suisse par le biais des moyens de communication modernes ou par des séjours touristiques.

En tout état, le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée, susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Or, il ne ressort pas du dossier que les liens que les recourants ont pu se créer en Suisse dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’étrangers ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays. Ils ne peuvent en tous cas pas se prévaloir d’une intégration sociale remarquable.

Ni l'âge des recourants, ni la durée de leur séjour sur le territoire, ni encore les inconvénients pratiques auxquels ils pourront éventuellement se heurter en cas de retour dans leur pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faille considérer qu'ils se trouveraient dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n'a pas établi.

Il ressort de ce qui précède que l'autorité intimée n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer les autorisations de séjour sollicitées.

23.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/631/2023 du 13 juin 2023 consid. 3.1).

24.         Les recourants n'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé leur renvoi de Suisse. Il n'apparaît en outre pas que l'exécution de cette mesure ne serait pas possible, serait illicite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

25.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

26.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

27.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 6 juillet 2020 par Monsieur A______ et Madame B______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 3 juin 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Monsieur A______ et Madame B______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 700.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

 

 

La greffière