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C/16867/2024

ACJC/377/2025 du 14.03.2025 sur OSQ/35/2024 ( SQP ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16867/2024 ACJC/377/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 14 MARS 2025

 

Entre

A______ LIMITED, sise ______, (Grande-Bretagne), recourante contre un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 9 décembre 2024, représentée par Me Christian LUSCHER, avocat, CMS von Erlach Partners SA, esplanade de Pont-Rouge 9, case postale 1875, 1211 Genève 26,

et

Monsieur B______, domicilié ______ (VD), intimé, représenté par Me Andrew GARBARSKI, avocat, Bär & Karrer SA, quai de la Poste 12, case postale, 1211 Genève 3.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement OSQ/35/2024 du 9 décembre 2024, notifié aux parties le 12 décembre 2024, statuant par voie de procédure sommaire, le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal) a déclaré recevable l'opposition formée par B______ contre l'ordonnance de séquestre rendue le 26 juillet 2024 dans la cause C/16867/2024 (ch. 1 du dispositif), admis cette opposition (ch. 2), révoqué en conséquence l'ordonnance de séquestre précitée (ch. 3), mis les frais judiciaires – arrêtés à 4'000 fr. – à la charge de A______ LIMITED, compensé ces frais avec les avances fournies par les parties, condamné A______ LIMITED à verser 2'000 fr. à B______ à titre de restitution de son avance (ch. 3), condamné A______ LIMITED à verser 8'000 fr. à B______ à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B.            a. Par acte déposé le 23 décembre 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ LIMITED recourt contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation.

Principalement, elle conclut au rejet de l'opposition formée par B______ contre l'ordonnance de séquestre rendue le 26 juillet 2024 dans la cause C/16867/2024, au maintien dudit séquestre tel qu'exécuté par l'Office des poursuites du district C______ à hauteur de 8'610'000 fr. et à être dispensée de fournir des sûretés, avec suite de frais judiciaires et dépens.

b. A titre préalable, A______ LIMITED a sollicité l'octroi de l'effet suspensif à son recours.

Par décision ES/131/2024 du 23 décembre 2024, la présidente de la Cour a constaté que la requête de suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement entrepris était dénuée d'objet, conformément à l'art. 278 al. 4 LP.

c. Dans sa réponse, B______ conclut principalement au rejet du recours, à la confirmation du jugement entrepris en ce sens que le séquestre ordonné le 26 juillet 2024 est révoqué et à ce qu'il soit ordonné à A______ LIMITED de fournir de sûretés d'un montant minimum de 861'000 fr., avec suite de frais judiciaires et dépens,

A titre préalable, B______ conclut à la réformation de la décision ES/131/2024 du 23 décembre 2024, en ce sens qu'il soit constaté que le recours ne déploie pas d'effet suspensif. Il conclut également à l'irrecevabilité de plusieurs allégués de fait du recours, en tant qu'ils comportent des pseudo-nova.

d. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

e. Par plis du greffe du 22 janvier 2025, elles ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure:

a. A______ LIMITED (ci-après: A______) est une société de droit anglais ayant son siège à L______ [Royaume-Uni].

Elle a été créée pour fournir des services non financiers aux clients privés et aux familles. Elle fait partie d'un groupe comptant d'autres sociétés (ci-après: le groupe A______).

b. B______, originaire de Taïwan, possède la nationalité britannique. Il est domicilié à D______ (VD) depuis le 3 juin 2022.

c. Il est l'actionnaire unique de E______ LIMITED et de F______ GROUP HOLDINGS, sociétés constituées respectivement le 18 décembre 2014 et le 9 avril 2015 et toutes deux incorporées aux Iles Caïmans.

Ces entités sont administrées par la société G______/H______ LIMITED. Précédemment et jusqu'au 5 mars 2018, F______ GROUP HOLDINGS était administrée par un membre du conseil d'administration de A______.

d. B______ est devenu client du groupe A______ en 2014.

d.a Le 8 décembre 2014, B______ et deux sociétés du groupe A______ ont conclu un contrat intitulé Investment Advisory Agreement
(ci-après: IAA 2014), par lequel les secondes s'engageaient à fournir au premier des services de conseil en investissement.

Les honoraires dus en vertu de l'IAA 2014 ont été intégralement payés.

d.b Le 19 janvier 2016, un nouveau contrat intitulé Investment Advisory Agreement (IAA 2016) a été conclu entre I______ LIMITED (ci-après I______) et E______ LIMITED, portant sur la fourniture de divers services de conseils en investissement, avec effet rétroactif au 11 février 2015.

Le contenu de ce contrat ne diffère pas substantiellement de l'IAA 2014, qui a été résilié d'un commun accord.

e.a Parallèlement, le 11 décembre 2014, B______ et A______ ont conclu un contrat intitulé Supply of Services Agreement (ci-après: SoSA 2014), portant sur la fourniture de services de family office, soit notamment des services liés à la gestion de la maison et du personnel de maison, des services de conciergerie, de relations publiques, de communication, de sécurité, de gestion du parc automobile et d'assurances.

e.b Le 14 décembre 2018, un nouveau Supply of Services Agreement (ci-après: SoSA 2018) a été conclu entre A______ et F______ GROUP HOLDINGS, en remplacement de B______, avec effet rétroactif au 1er janvier 2017.

Le contenu de ce contrat ne diffère pas substantiellement du SoSA 2014, qui a été résilié d'un commun accord. En particulier, B______ a continué à bénéficier des services rendus par A______.

f. Les relations entre les parties se sont tendues en 2020, lorsque B______ a fait appel à une société tierce, G______/J______ LIMITED, pour examiner ses investissements auprès de A______.

Selon B______, l'analyse effectuée par la société précitée a révélé que le groupe A______ avait mis en œuvre un mécanisme complexe pour s'enrichir à son détriment et lui avait causé un préjudice considérable par le biais d'investissements effectués dans les fonds dudit groupe.

g. Plusieurs factures d'honoraires dans le cadre de l'IAA 2016 et du SoSA 2018 étant impayées, A______ et I______ ont formé le 14 octobre 2021 une demande d'arbitrage à L______ (LCIA n° 1______ et 2______) à l'encontre de E______ LIMITED et de F______ GROUP HOLDINGS.

La compétence du Tribunal arbitral se fondait sur des clauses arbitrales contenues dans le SoSA 2018 et l'IAA 2016, modifiées dans un Submission Agreement du 5 août 2021 conclu entre les mêmes parties.

h. Le 22 novembre 2023, le Tribunal arbitral a rendu une sentence arbitrale dont le dispositif se traduit comme suit:

" 1. La demande de I______ à l'encontre de E______ LIMITED pour des honoraires en vertu de l'IAA est admise pour un montant de USD 81'357'633.23.

2.    En ce qui concerne les honoraires dus à I______ après le 1er avril 2021, un compte sera établi selon l'accord des parties ou, à défaut, selon les instructions du Tribunal.

3.    Les demandes reconventionnelles de E______ LIMITED sont rejetées, à l'exception de la demande reconventionnelle relative aux K______.

4.    La demande reconventionnelle relative aux K______ aboutit pour un montant de USD 38'800'000.-.

5.    La demande reconventionnelle (4) est compensée par la demande (1), ce qui laisse une somme nette due par E______ LIMITED à I______ de USD 42'557'633.23.

6.    Des intérêts seront payés au taux de 3 % au-dessus du taux de base de la [banque] M______ sur la somme de USD 42'557'633.23 à partir du 12 février 2022 jusqu'au paiement.

7.    La demande de A______ à l'encontre de F______ GROUP HOLDINGS en vertu du SoSA est admise pour un montant de GBP 1'785'561.69.

8.    Des intérêts seront payés au taux de 4 % au-dessus du taux de base de la [banque] N______ sur la somme de GBP 1'785'561.- à partir du 31 décembre 2022 et jusqu'au paiement."

i. Par courrier du 23 novembre 2023, A______ et I______ ont demandé à E______ LIMITED et à F______ GROUP HOLDINGS de leur confirmer que les paiements dus selon la sentence arbitrale susvisée, finale et immédiatement exécutoire, seraient effectués au plus tard le 27 novembre 2023.

j. Le 24 novembre 2023, E______ LIMITED et F______ GROUP HOLDINGS ont répondu qu'une telle demande était déraisonnable.

k. Le 29 novembre 2023, G______/H______ LIMITED a décidé, par voie de résolutions écrites, de mettre en liquidation volontaire les sociétés E______ LIMITED et F______ GROUP HOLDINGS pour cause d'insolvabilité, les intéressées n'étant pas en mesure d'acquitter les montants fixés par la sentence arbitrale du 22 novembre 2023.

Il était précisé que B______, ayant droit économique desdites sociétés, avait confirmé par écrit qu'il n'entendait pas financer leur redressement.

l. Le 19 janvier 2024, le Tribunal arbitral a rendu une sentence finale sur la question laissée en suspens des frais de procédure, des honoraires d'avocat et des intérêts.

Le dispositif de cette sentence se traduit comme suit:

" 1. Le compte prévu au paragraphe (2) de la disposition PFA [la sentence arbitrale du 22 novembre 2023] concernant les frais dus par E______ LIMITED à I______ du 1er octobre 2021 au 12 février 2022 est quantifié à USD 2'307'784.05.

2.    Les intérêts dus au titre du paragraphe (6) de la disposition PFA, du 12 février 2022 au 22 décembre 2023, s'élèvent à USD 4'910'742.79 et continueront à courir à 3% au-dessus du taux de base de la M______ jusqu'au paiement.

3.    Les intérêts au titre du paragraphe (8) de la disposition PFA, du 31 décembre 2022 au 22 décembre 2023, s'élèvent à GBP 150'818.81 et continueront à courir à 4% au-dessus du taux de base de la M______ jusqu'au paiement.

4.    Les intérêts sur la somme allouée en vertu du paragraphe (1) ci-dessus s'élèveront à 3 % au-dessus du taux de base de la M______ à partir du 22 décembre 2023 jusqu'au paiement.

5.    Les requérantes ont le droit de récupérer 75 % de leurs frais de justice inter-parties auprès des défendeurs, quantifiés à GBP 4'827'750.-. Les défendeurs sont condamnés à payer aux demandeurs GBP 130'574.89 à titre de frais d'arbitrage."

m. Le 2 février 2024, B______ a agi à l'encontre de I______ devant la Grand Court des Iles Caïmans afin de faire constater qu'il avait une personnalité distincte de E______ LIMITED et qu'il ne pouvait être tenu pour responsable des dettes de cette société en vertu du droit des Iles Caïmans.

Par jugement du 2 juillet 2024, la Grand Court des Iles Caïmans a constaté que B______ n'était pas responsable, en vertu du droit des Iles Caïmans, des obligations de E______ LIMITED en lien avec les sentences arbitrales des 22 novembre 2023 et 19 janvier 2024.

I______ a formé appel de ce jugement.

n. Le 30 novembre 2023, à la requête de A______ et de I______, le Tribunal de première instance (ci-après le Tribunal) a ordonné un séquestre des biens de B______, fondé sur la sentence arbitrale du 22 novembre 2023.

Par jugement OSQ/10/2024 du 23 mai 2024, statuant sur opposition de B______, le Tribunal a admis cette opposition et révoqué l'ordonnance de séquestre du 30 novembre 2023.

Il a considéré que le séquestre ne pouvait pas être requis conjointement par des titulaires de deux créances distinctes.

o. Un recours formé par A______ et I______ à l'encontre du jugement susvisé a été retiré, ce dont la Cour de justice a pris acte par arrêt du 9 septembre 2024.

p. Le 27 mai 2024, B______ a déposé au Tribunal deux mémoires préventifs à l'encontre de A______.

q. Par acte du 18 juillet 2024, A______ a saisi le Tribunal d'une nouvelle requête en séquestre dirigée contre B______, fondée sur l'art. 271 al. 1 ch.  6 LP.

Se prévalant de la sentence arbitrale partielle du 22 novembre 2022 et de la sentence arbitrale finale du 19 janvier 2024, elle a requis le séquestre des biens de celui-ci auprès de divers établissements bancaires, ainsi que "les éventuels comptes bancaires détenus par la société F______ GROUP HOLDINGS", à hauteur de:

-       2'050'930 fr. 05, soit la contre-valeur de GBP 1'785'561.69 selon le taux de change au jour du dépôt de la requête, avec intérêts à 9.25% à partir du 31 décembre 2022, jusqu'au paiement.

-       173'233 fr. 35, soit la contre-valeur de GBP 150'818.81 selon le taux de change au jour du dépôt de la requête, correspondant au montant des intérêts du 31 décembre 2022 au 22 décembre 2023 relatif à la somme susmentionnée de GBP 1'785'561.69, sur laquelle les intérêts à 9.25 % continuaient à courir, jusqu'au paiement.

-       5'548'215 fr. 88, soit la contre-valeur de GBP 4'827'750.- selon le taux de change au jour du dépôt de la requête.

-       150'061 fr. 14, soit la contre-valeur de GBP 130'574.89 selon le taux de change au jour du dépôt de la requête.

Elle a notamment allégué que la conclusion du SoSA 2018 et le changement de partie au contrat avaient eu lieu sur requête urgente de B______, qui invoquait des questions d'optimisation fiscale, car il souhaitait s'installer à l'étranger. B______ avait cependant continué à bénéficier de ses services comme par le passé. Il détenait l'intégralité du capital de la société F______ GROUP HOLDINGS, qu'il utilisait selon son bon vouloir, de sorte qu'il convenait de n'opérer aucune distinction entre celle-ci et lui-même.

r. Par ordonnance du 18 juillet 2024, le Tribunal a transmis à A______ les mémoires préventifs déposés par B______ le 27 mai 2024 et lui a imparti un délai au 26 juillet 2024 pour se déterminer.

A______ a déposé des déterminations au greffe dans le délai imparti.

s. Le 26 juillet 2024, le Tribunal a ordonné le séquestre requis, à l'exception des éventuels comptes détenus par F______ GROUP HOLDINGS.

t. Le 19 août 2024, l'Office des poursuites du district C______ (VD) a notifié à B______ un procès-verbal de séquestre n°3______, daté du 16 août 2024.

Il a fixé l'assiette du séquestre à 9'000'000 fr.

u. Par acte du 29 août 2024, B______ a formé opposition au séquestre.

Préalablement, il a conclu à ce que le Tribunal ordonne à A______ de fournir des sûretés d'un montant de 861'000 fr., sous peine de caducité du séquestre.

Principalement, il a conclu à l'admission de l'opposition, à la révocation de l'ordonnance de séquestre et à la communication de cette révocation à l'Office des poursuites du district C______, ainsi qu'aux établissements bancaires concernés.

Il a notamment reproché aux animateurs du groupe A______ d'avoir profité de sa vulnérabilité et de l'avoir amené à faire appel à leurs services alors qu'il se trouvait dans une situation délicate, compte tenu du gel de ses avoirs à l'initiative des autorités taiwanaises. Il a contesté que les sentences arbitrales rendues à l'encontre de E______ LIMITED et de F______ GROUP HOLDINGS lui soient personnellement opposables.

v. Dans ses déterminations du 28 octobre 2024, A______ a conclu au rejet de l'opposition et à la confirmation du séquestre, sous suite de frais.

w. Les parties ont persisté dans leurs conclusions lors de l'audience du 4 novembre 2024, à l'issue de laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger.

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que le cas de séquestre invoqué supposait l'existence d'un titre de mainlevée définitive contre le débiteur séquestré. En l'occurrence, les sentences rendues par le tribunal arbitral londonien, susceptibles en elles-mêmes de constituer un tel titre, n'avaient pas été rendues à l'encontre de B______, qui n'avait pas pris part aux procédures concernées. Faute d'identité entre le débiteur désigné dans les titres de mainlevée produits et la personne contre laquelle le séquestre était requis, le cas de séquestre invoqué n'était pas réalisé.

Il ne pouvait être fait exception à ce qui précède que si l'opposant séquestré se prévalait de façon abusive de la dualité existant entre sa personne et le débiteur recherché. En l'occurrence, la créancière séquestrante avait cependant librement accepté de résilier le contrat qui la liait à l'opposant pour en conclure un nouveau, de contenu identique, avec une société détenue par celui-ci. Elle avait alors accepté ladite société comme unique cocontractante et comme seule débitrice de ses honoraires, tout en continuant à fournir des prestations et des services en faveur de l'opposant. Elle n'avait pas exigé que ce dernier se porte garant des engagements de sa société et avait accepté, en toute connaissance de cause, le risque lié à une éventuelle insolvabilité de celle-ci. Lorsque les relations s'étaient tendues, la créancière n'avait agi que contre la société en question, reconnaissant par là sa personnalité juridique distincte et le fait qu'elle était sa seule débitrice. La créancière ne rendait pas vraisemblable que l'opposant aurait bénéficié de libéralités ou de transferts de sa société, ni qu'en raison de sa position dominante, il aurait forcé celle-ci à se dessaisir de ses actifs à son profit, ou encore qu'il aurait planifié son insolvabilité dans le but de porter préjudice aux créanciers sociaux. L'opposant n'avait par ailleurs aucune obligation d'injecter davantage d'argent dans sa société pour éviter sa mise en liquidation.

Dans ces conditions, l'existence d'un abus de droit commis par l'opposant ne pouvait pas être retenue et celui-ci n'avait pas à répondre des dettes de sa société. L'opposition qu'il avait formée devait ainsi être admise et le séquestre prononcé à son encontre devait être levé.

EN DROIT

1.             1.1 Le jugement entrepris étant une décision sur opposition à séquestre, seule la voie du recours est ouverte (art. 278 al. 3 LP; art. 309 let. b ch. 6 et art. 319 let. a CPC).

En matière de séquestre, la procédure sommaire est applicable (art. 251 let. a CPC). Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 33 al. 2, 278 al. 1 LP et 321 al. 2 CPC).

Déposé selon la forme et dans le délai requis par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et al. 3, 145 al. 2 let. b CPC), le recours est en l'espèce recevable, ce qui n'est pas contesté.

1.2 La cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC et 278 al. 3 LP).

La procédure de séquestre est soumise dans toutes ses phases aux maximes de disposition et des débats (art. 58 al. 2 CPC; art. 255 CPC a contrario) et la procédure sommaire est applicable (art. 251 let. a CPC).

2.             A titre préalable, l'intimé sollicite la réformation de la décision rendue par la Cour de céans le 23 décembre 2024, en ce sens que la requête d'effet suspensif formée par la recourante soit rejetée et qu'il soit constaté que le recours ne déploie pas d'effet suspensif.

L'intimé perd cependant de vue, d'une part, que la décision susvisée n'est pas susceptible d'un recours devant la Cour et, d'autre part, que dans ladite décision, la Cour n'a pas accordé d'effet suspensif au recours, mais a constaté que la requête de la recourante en ce sens était dénuée d'objet, en vertu de l'art. 278 al. 4 LP. Cette disposition, qui prévoit que l'opposition et le recours n'empêchent pas le séquestre de produire ses effets, n'offre pas à l'autorité de recours la possibilité d'autoriser l'exécution anticipée de la décision entreprise. Nonobstant l'admission de l'opposition par le Tribunal, le recours a pour objet un séquestre précédemment autorisé; la disposition susvisée est donc pleinement applicable, contrairement à ce que soutient l'intimé. En tout état, la question peut demeurer ouverte, vu l'issue du présent recours.

3.             L'intimé conteste ensuite la recevabilité de plusieurs allégués de fait présentés par la recourante, au motif qu'ils constitueraient des pseudo nova. La recourante soutient pour sa part que les allégués en question auraient été soumis au premier juge, soit dans ses propres écritures, soit dans celles de l'intimé lui-même.

3.1 Par exception au principe général de l'art. 326 al. 1 CPC, l'art. 278 al. 3 LP prévoit que, dans le cadre d'un recours contre une décision rendue sur opposition à séquestre, les parties peuvent alléguer des faits nouveaux et produire, à l'appui de ces faits, des moyens de preuve nouveaux (art. 326 al. 2 CPC).

Cette disposition vise tant les faits et moyens de preuves survenus après les dernières plaidoiries dans la procédure d'opposition au séquestre (vrais nova) que ceux qui existaient déjà avant (pseudo nova; ATF 145 III 324 consid. 6.6 et 6.6.4).

L'invocation devant l'autorité de recours de pseudo nova n'est toutefois admissible que pour autant que les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC, applicables par analogie, soient réalisées (ATF 145 III 324 consid. 6.6.2). La partie qui entend se prévaloir de pseudo nova doit ainsi démontrer n'avoir pas pu le faire avant la procédure de recours bien qu'elle ait fait preuve de la diligence requise (cf. ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

3.2 La constatation manifestement inexacte des faits, au sens de l'art. 320 CPC, équivaut à l'arbitraire, soit lorsque la constatation des faits ou l'appréciation des preuves est manifestement insoutenable ou en contradiction évidente avec la situation de fait, ou encore repose sur une inadvertance manifeste ou heurte de façon choquante le sentiment de la justice (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 2509 et 2938 p. 452 et 519 et réf. citées).

L'appréciation des preuves n'est pas déjà arbitraire du fait qu'elle ne coïncide pas avec la présentation des faits de la partie recourante, mais seulement lorsqu'elle est manifestement insoutenable. Tel est en particulier le cas lorsque le juge du fond ignore des moyens de preuves pertinents, se trompe manifestement sur leur sens ou leur portée ou les néglige sans motifs, ou lorsqu'il tire des constatations insoutenables des preuves administrées. Il faut démontrer clairement et en détails, dans le recours, en quoi l'appréciation des preuves est arbitraire. Il ne suffit notamment pas de citer quelques preuves qui devraient être appréciées autrement que dans la décision attaquée et de soumettre à l'autorité supérieure sa propre appréciation, dans une critique appellatoire, comme si celui-ci pouvait examiner librement les faits (arrêt du Tribunal fédéral 4A_215/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

3.3 En l'espèce, il est exact l'état de fait présenté par la recourante dans son recours diffère sur plusieurs points de celui retenu par le Tribunal. Il n'est toutefois pas nécessaire de déterminer dans quelle mesure les allégués concernés constitueraient des pseudo nova, au sens des principes rappelés ci-dessus, comme le soutient l'intimé. A supposer que lesdits allégués aient été déjà formulés devant le Tribunal, et qu'ils soient par hypothèse recevables au regard de l'art. 317 CPC, comme l'expose la recourante, celle-ci ne démontre pas en quoi leur omission dans le jugement entrepris, totale ou partielle, consacrerait une constatation manifestement inexacte des faits, au sens de l'art. 320 CPC, dont la prise en compte conduirait à une solution différente. La plupart des allégués litigieux ne portent d'ailleurs pas réellement sur des faits, mais sur des questions de formulation (par exemple à propos des services compris dans la notion de family office), sur des avis subjectifs (tels que ses motifs de croire à l'intention de ses parties adverses de se soustraire à leurs obligations) ou sur des considérations d'ordre juridique (telles que l'absence de droit de l'intimé à se prévaloir de l'indépendance juridique d'une société qu'il contrôle).

Dans tous les cas, les allégués concernés sont donc irrecevables; la Cour se fondera dès lors sur les faits constatés par le premier juge, tels que repris ci-dessus.

4.             Sur le fond, la recourante reproche au Tribunal de ne pas avoir retenu que l'intimé se prévalait de façon abusive de la dualité existant entre sa personne et la société F______ GROUP HOLDINGS. Elle soutient qu'en raison de cet abus, les conditions du séquestre seraient réalisées et que l'opposition du précité devrait être écartée.

4.1 Selon l'art. 272 al. 1 LP, le séquestre est autorisé par le juge du for de la poursuite ou par le juge du lieu où se trouvent les biens, à condition que le créancier rende vraisemblable que sa créance existe (ch. 1), qu'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).

La procédure d'opposition au séquestre (art. 278 LP) a le même objet que la procédure de séquestre, à savoir les conditions d'autorisation de celui-ci (art. 272 LP; ATF 140 III 466 consid.4.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_228/2017 du 26 juin 2017 consid. 3.1). Le juge réexamine en contradictoire la réalisation des conditions du séquestre qu'il a ordonné. L'opposant doit tenter de démontrer que son point de vue est plus vraisemblable que celui du créancier séquestrant. Le juge doit revoir sa cause dans son entier et tenir compte de la situation telle qu'elle se présente au moment de la décision sur opposition. Il s'agit d'une procédure sommaire au sens propre; elle présente les trois caractéristiques de la simple vraisemblance des faits, l'examen sommaire du droit et une décision provisoire (ATF 140 III 466 consid. 4.2.3).

4.1.1 Comme cas de séquestre, la loi prévoit notamment que le créancier d'une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur qui se trouvent en Suisse lorsque le créancier possède contre le débiteur un titre de mainlevée définitive (art. 271 al. 1 ch. 6 LP).

Toute décision étrangère portant condamnation à payer une somme d'argent ou à constituer des sûretés et exécutable en Suisse selon une convention internationale – en particulier la Convention de New-York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères (CNY, RS 0.277.12) – constitue un titre de mainlevée définitive (Abbet, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd., 2022, n. 36 ad art. 81 LP).

Le créancier qui invoque le cas de séquestre de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP n'a pas à rendre vraisemblable sa créance, laquelle découle du titre produit (arrêts du Tribunal fédéral 5A_824/2020 du 12 février 2021 consid. 3.4.2.2; 5A_521/2018 du 12 août 2019 consid. 3.3).

4.1.2 Lorsqu'une personne fonde une personne morale, notamment une société anonyme, il faut en principe considérer qu'il y a deux sujets de droit distincts avec des patrimoines séparés: la personne physique d'une part et la société anonyme d'autre part. Il en va ainsi même en présence d'une société anonyme à actionnaire unique ("Einmanngesellschaft"), bien que ce genre de structure ne corresponde pas à la société anonyme type, telle que la voulait le législateur, c'est-à-dire une société de caractère capitaliste et collectiviste qui exerce une activité commerciale ou industrielle. Ce genre de société anonyme, création de la pratique, est néanmoins toléré en droit suisse et, malgré l'identité économique entre la société et l'actionnaire, on les traite en principe comme des sujets de droit distincts, avec des patrimoines séparés (ATF 144 III 541 consid. 8.3.1 et les références citées).

Toutefois, dans des circonstances particulières, un tiers peut être tenu des engagements d'un débiteur avec lequel il forme une identité économique En effet, selon le principe de la transparence, on ne peut pas s'en tenir sans réserve à l'existence formelle de deux personnes juridiquement distinctes lorsque tout l'actif ou la quasi-totalité de l'actif d'une personne morale appartient soit directement, soit par personnes interposées, à une même personne, physique ou morale; malgré la dualité de personnes à la forme, il n'existe pas deux entités indépendantes, la personne morale étant un simple instrument dans la main de son auteur, qui, économiquement, ne fait qu'un avec elle. On doit admettre que, conformément à la réalité économique, il y a identité de personnes et que les rapports de droit liant l'une lient également l'autre; ce sera le cas chaque fois que le fait d'invoquer la diversité des sujets constitue un abus de droit, notamment en détournant la loi, en violant un contrat ou en portant une atteinte illicite aux intérêts d'un tiers (art. 2 al. 2 CC; ATF 144 III cité consid. 8.3.1 et les références).

4.1.3 Dans un sens général, l'application du principe de la transparence a pour conséquence que le tiers peut être tenu pour responsable des engagements contractés par le débiteur. L'indépendance formelle de la personne morale n'est pas prise en considération et la réalité économique est aussi déterminante juridiquement, la personne morale et celle qui la domine étant traitées juridiquement – avant tout du point de vue de la propriété – comme une unité. Ce principe ne conduit toutefois pas à une suppression générale de la dualité juridique, mais ne peut avoir effet que dans un cas particulier, mettant en jeu une norme spécifique (ATF 144 III cité consid. 8.3.3 et les références).

On distingue la transparence directe, qui entraîne la responsabilité du sociétaire dominant, à côté de la société, pour les dettes de celle-ci, de la transparence inversée, qui entraîne la responsabilité de la société dominée, à côté du sociétaire, pour les dettes de celui-ci. En matière d'exécution forcée, il s'ensuit que, dans la poursuite de l'un, le patrimoine de l'autre peut être réalisé, dans un sens ou dans un autre (ATF 144 III cité consid. 8.3.4 et les références).

4.2 En l'espèce, il est constant que les titres de mainlevée définitive invoqués à la base du séquestre litigieux, soit les sentences arbitrales rendues les 22 novembre 2023 et 19 janvier 2024, n'ont pas été prononcées dans une cause opposant la recourante à l'intimé, mais dans un litige divisant (notamment) la recourante de la société F______ GROUP HOLDINGS, détenue par l'intimé. Il s'ensuit que la recourante ne possède pas de titre de mainlevée définitive contre le débiteur recherché, au sens de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP, et que le cas de séquestre prévu par cette disposition n'est de ce fait pas réalisé.

La recourante soutient toutefois que l'intimé se prévaudrait abusivement de la distinction entre sa personne et celle de la société susvisée, de sorte que le séquestre devrait néanmoins être ordonné à son encontre, sur la base de la disposition susvisée. A cet égard, il est vrai que le Tribunal fédéral a admis à une reprise, dans un arrêt relativement ancien et non publié, que la mainlevée pouvait être accordée contre le propriétaire d'une société, sur la base d'un jugement condamnant celle-ci, pour le motif qu'ils ne formaient manifestement qu'une seule et même entité juridique (arrêt 5P.541/1993 du 27 avril 1994 consid. 4b, cité dans l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_635/2008 du 23 janvier 2009 consid. 2.3). Dans un cas de séquestre tel que le cas d'espèce, admettre l'existence d'un titre de mainlevée définitive contre l'intimé, en application du principe de la transparence rappelé ci-dessus, pourrait cependant avoir pour conséquence que le séquestre soit ordonné à son préjudice, puis que la mainlevée définitive soit prononcée à son encontre pour les mêmes motifs dans la poursuite introduite en validation dudit séquestre (cf. art. 279 LP) et enfin qu'une saisie définitive de ses biens soit opérée en continuation de la poursuite (cf. art. 89 LP), le tout sans que les questions de l'identité économique entre l'intimé et sa société, d'une part, ni de l'abus pouvant résider dans le fait de se prévaloir de la distinction entre ces deux personnes, d'autre part, ne soient examinées dans le cadre d'une procédure au fond, devant un juge disposant d'un plein pouvoir d'examen et procédant à une administration des preuves complète. Ces questions ne seraient en effet alors abordées que dans le cadre d'incidents de la poursuite, soit sur opposition à séquestre puis sur mainlevée définitive, incidents sur lesquels le juge statue par voie de procédure sommaire, avec un pouvoir d'examen restreint et sur la base des preuves immédiatement disponibles (cf. consid. 3.1 ci-dessus).

En cela, le cas d'espèce se distingue du cas de figure plus courant, où les biens d'un tiers (i.e. détenus au nom ou par le biais de celui-ci) sont également visés dans le cadre d'un séquestre requis et dirigé contre le débiteur de l'obligation litigieuse, au motif qu'ils appartiennent en réalité audit débiteur. En pareil cas, à supposer que l'opposition du tiers au séquestre soit écartée en application du principe de la transparence susvisé, et que la mainlevée de l'opposition soit ensuite prononcée contre le débiteur principal dans la poursuite en validation du séquestre, le tiers dont les biens sont placés sous séquestre conserve la faculté d'en revendiquer la propriété dans la continuation de la poursuite, notamment dans le cadre d'une saisie opérée contre le débiteur principal (cf. art. 106 à 109 LP) ou dans la faillite de celui-ci (cf. art. 242 LP), et ce dans le cadre d'un procès ordinaire, soumis à une instruction complète (pour autant que la valeur litigieuse du bien revendiqué atteigne 30'000 fr; cf. Staehelin/Strub, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 3e éd., 2021, n. 23 ad art. 109 LP; Russenberger/Wohlgemuth, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 3e éd., 2021, n. 41 ad art. 242 LP).

En l'occurrence, le procédé choisi par la recourante, consistant à requérir et diriger le séquestre contre l'intimé – et contre l'intimé seulement, en qualité de débiteur désigné – alors qu'elle a agi au fond contre la société formellement débitrice de la créance litigieuse, sans assigner l'intimé, est donc particulièrement incisif, voire confine à l'abus de droit, puisqu'il revient in fine à priver l'intimé de la possibilité de faire valoir ses droits devant un juge du fond. Il ne s'agit pas là de réaliser le patrimoine de l'un dans la poursuite de l'autre, au sens des principes rappelés sous consid. 2.1.3 ci-dessus, mais de poursuivre le second pour les dettes de la première, ce qui est en principe inadmissible. A supposer qu'il soit licite, un tel procédé ne paraîtrait dès lors susceptible d'être autorisé qu'à des conditions extrêmement restrictives, dont la recourante ne démontre pas la réalisation en l'espèce. En ce sens, et bien que le recours puisse être rejeté pour ces motifs déjà, il sera vérifié ci-dessous que les conditions d'application du principe de la transparence invoqué par la recourante ne sont pas réunies.

5.             5.1 L'application du principe de la transparence suppose premièrement, qu'il y ait identité de personnes, conformément à la réalité économique, ou en tout cas la domination économique d'un sujet de droit sur l'autre; il faut deuxièmement que la dualité soit invoquée de manière abusive, c'est-à-dire pour en tirer un avantage injustifié; tel est le cas si la dualité des sujets n'est invoquée qu'aux fins de se soustraire abusivement à l'exécution forcée (ATF 144 III cité consid. 8.3.2;
132 III 489 consid. 3.2).

5.1.1 S'agissant de l'identité économique entre la personne morale et le sociétaire, elle repose sur le fait que celui-ci peut dominer celle-là et suppose un rapport de dépendance qui peut être exercé d'une quelconque manière - autorisée ou non, à long ou à court terme, fortuitement ou de manière planifiée - et qui résulte de la possession de l'actionnariat ou d'autres causes, comme des liens contractuels ou des relations familiales ou amicales (ATF 144 III cité consid. 8.3.2 et les références).

S'agissant de l'abus de droit, il n'y a pas de définition spécifique au Durchgriff. On généralise seulement, de jurisprudence constante, qu'il n'y a pas besoin que la fondation elle-même de la personne morale poursuive des buts abusifs, mais qu'il suffit que la personne morale soit utilisée de manière abusive ou de se prévaloir de manière abusive de la dualité juridique pour ne pas remplir des obligations légales ou contractuelles. On exige également une accumulation de comportements différents et extraordinaires en ce sens qu'il en résulte une machination et atteinte qualifiée d'un tiers (ATF 144 III cité consid. 8.3.2 et les références).

5.1.2 Les cas constitutifs d'abus de droit, voire les faits sur lesquels l'examen doit porter, sont difficilement généralisables. Doctrine et jurisprudence procèdent par indices. Il s'agit notamment des cas où les sphères et patrimoines du sociétaire et de la personne morale sont confondus (abandon de l'indépendance de la personne morale par les sociétaires eux-mêmes), ceux où une structure appropriée de gestion et d'organisation fait défaut, ceux, très proches, où le sociétaire poursuit ses propres intérêts aux dépens de ceux de la personne morale, et celui de la sous-capitalisation mettant en danger le but de la personne morale (ATF 144 III cité consid. 8.3.2 et les références).

Le cas le plus fréquemment réalisé est celui où le débiteur transfère de manière abusive ses biens à une société qu'il contrôle et avec qui il forme une unité économique afin de soustraire un patrimoine à la mainmise de créanciers. De tels indices ne peuvent toutefois pas, à eux seuls, conduire à retenir que le voile social doit être levé, même en cas d'identité économique. Il faut en plus que, dans le cas concret, il en résulte un abus de droit. En particulier, l'incapacité pour une personne morale de payer ses dettes ne suffit pas à elle seule pour appliquer le principe de la transparence, même à l'égard d'un actionnaire et administrateur unique (ATF 144 III cité consid. 8.3.2 et les références).

Dans les cas de transparence directe, soit ceux qui entraînent la responsabilité du sociétaire dominant pour les dettes de celle-ci, l'application du principe de la transparence doit être admise avec retenue, parce que le créancier qui conclut librement un contrat avec une personne morale sait, en principe, qu'elle court le risque de son insolvabilité à défaut de garanties fournies par la personne physique et que, en mettant en poursuite la personne morale, il reconnaît lui-même l'existence de la personnalité de celle-ci. Il est toutefois possible d'appliquer la théorie du Durchgriff lorsque la personne physique utilise la personne morale pour éluder sciemment les obligations résultant du contrat au détriment du créancier ou que, grâce à sa position dominante, elle force la personne morale à se dessaisir de ses actifs à son profit pour les soustraire au créancier qui demanderait l'exécution du contrat (ATF 144 III cité consid. 8.3.2 et les références).

5.2 En l'espèce, il n'est pas contesté qu'il existe une identité économique entre l'intimé et la société F______ GROUP HOLDINGS, dont il détient le capital et qui lui a succédé dans les relations contractuelles avec la recourante.

La question est de savoir si l'intimé se prévaut de manière abusive de la dualité juridique entre ladite société et lui-même pour échapper à ses obligations contractuelles et/ou soustraire indûment son patrimoine à l'exécution forcée. A cet égard, la recourante soutient notamment que l'intimé aurait délibérément choisi de transférer le contrat conclu avec elle-même à la société F______ GROUP HOLDINGS, dans le but de ne plus payer ses honoraires tout en continuant à bénéficier de ses services. Elle ajoute que l'intimé aurait prétexté que ce changement était nécessaire pour des raisons fiscales, alors qu'il cherchait en réalité à se protéger de ses créanciers. Dans son recours, la recourante admet cependant qu'au moment de la conclusion du second contrat, les avoirs de l'intimé étaient gelés, ce qui l'empêchait notamment de fournir une garantie personnelle. Il apparaît ainsi que la recourante a pu délibérément accepter de conclure le second contrat avec la société susvisée, afin d'avoir pour cocontractant une personne potentiellement plus solvable que l'intimé. Le transfert du contrat à la société permettait vraisemblablement de faire en sorte que les honoraires dus à la recourante soient plus facilement réglés, ce qui a été le cas dans un premier temps. En s'accommodant de ces conditions, la recourante ne pouvait cependant pas ignorer qu'elle courait le risque que la société détenue par l'intimé se révèle elle-même insolvable; le seul fait que ladite société soit aujourd'hui en liquidation ne permet donc pas de retenir que l'intimé se prévaudrait abusivement de la dualité juridique entre sa personne et celle de sa société, conformément aux principes rappelés ci-dessus.

Le fait que la recourante ait concrètement fourni ses services à l'intimé ou à sa famille, ce qu'il était licite de prévoir contractuellement, ou que la société F______ GROUP HOLDINGS soit entrée en liquidation volontaire peu de temps après le prononcé de la sentence arbitrale du 22 novembre 2023, à l'issue de deux ans de procès arbitral, ne conduit pas à une autre conclusion, étant relevé que la recourante ne démontre pas que la position défendue par la société dans ledit procès aurait été insoutenable.

Comme l'a relevé le Tribunal, aucun élément concret ne permet par ailleurs de retenir que l'intimé aurait d'une quelconque manière détourné les actifs de la société susvisée à son profit, ni qu'il aurait délibérément vidé celle-ci de sa substance pour porter atteinte aux créanciers sociaux. On ne voit pas davantage sur quelle base l'intimé aurait pu être tenu de refinancer la dette de sa société de ses propres deniers pour permettre à celle-ci de faire face à ses obligations, ce que la recourante ne soutient d'ailleurs pas.

Par conséquent, faute d'abus pouvant être reproché à l'intimé, le juge de l'opposition a considéré à bon droit que le principe de la transparence (inversée) ne justifiait pas d'ordonner le séquestre des biens de celui-ci in casu et le recours sera donc rejeté pour ce motif également.

6.             L'intimé sollicite enfin que la recourante soit condamnée à fournir des sûretés en garantie du préjudice que lui aurait causé le séquestre, dont le montant soit fixé à 861'000 fr.

6.1 Aux termes de l'art. 273 al. 1 LP, le créancier répond du dommage qu'un séquestre injustifié peut causer tant au débiteur qu'aux tiers; le juge peut l'astreindre à fournir des sûretés.

Les sûretés de prévues par cette disposition sont destinées à garantir la prétention en dommages-intérêts du débiteur (ou du tiers) qui découle de l'indisponibilité frappant ses biens; au nombre des éléments pertinents pour déterminer ce préjudice éventuel figurent, notamment, la durée prévisible du procès en validation de séquestre, ainsi que les intérêts - équivalant en principe à deux années - des emprunts que le débiteur (ou le tiers) a contractés pour pallier la privation de ses avoirs (arrêt du Tribunal fédéral 5A_757/2010 du 20 avril 2011 consid. 2.2).

La fourniture de sûretés est ordonnée par le juge, soit d'office lors de l'autorisation du séquestre, soit à la demande du débiteur ou du tiers à un stade ultérieur de la procédure, lorsque des doutes apparaissent sur la vraisemblance de la créance ou sur l'existence d'un motif de séquestre (arrêt du Tribunal fédéral 5A_879/2018 consid. 4; Stoffel, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 3e éd., 2021, n. 18 ad art. 273 LP). Les sûretés ne peuvent être libérées qu'après la transformation du séquestre en une mesure d'exécution ordinaire (cf. art. 279 al. 3 LP) ou, en cas de caducité de la mesure (cf. art. 280 LP), après l'expiration d'un délai non utilisé pour introduire l'action en dommages-intérêts (Stoffel, op. cit., n. -+ 19 ad art. 273 LP).

6.2 En l'espèce, le séquestre précédemment ordonné ne donnera pas lieu à un procès en validation du séquestre, puisque l'opposition de l'intimé audit séquestre a été admise et que le recours formé par la créancière contre cette admission est présentement rejeté.

L'intimé, qui expose simplement avoir l'intention de réclamer à la recourante la réparation du préjudice que lui aurait causé le séquestre, ne fournit aucune précision sur la nature ou l'étendue dudit préjudice. Il ne soutient notamment pas avoir dû contracter un emprunt, ni prendre de quelconques mesures particulières, pour pallier l'indisponibilité temporaire de ses avoirs.

Dans ces conditions, la Cour renoncera à astreindre la recourante à fournir à ce stade des sûretés en garantie des éventuelles prétentions de l'intimé à son encontre, ainsi qu'à impartir un délai à celui-ci pour introduire action en réparation. L'intimé sera donc débouté de ses conclusions sur ce point.

7.             Les frais judiciaires du recours seront arrêtés à 3'000 fr. (art. 48 et 61 OELP) et mis à la charge de la recourante, qui succombe sur le fond du recours (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de même montant fournie par celle-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

En application de l'art. 23 LaCC, et pour tenir compte du travail effectif de l'avocat, les dépens de recours que la recourante sera condamnée à verser à l'intimé seront également fixés à 3'000 fr. (art. 84, 85, 88, 89 et 90 RTFMC), débours et TVA inclus (art. 25 et 26 LaCC).


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 23 décembre 2024 par A______ LIMITED contre le jugement OSQ/35/2024 rendu le 9 décembre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/16867/2024–13 SQP.

Au fond :

Rejette le recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 3'000 fr., les met à la charge de A______ LIMITED et les compense avec l'avance de frais de même montant fournie par celle-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ LIMITED à payer à B______ la somme de 3'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.