Décisions | Sommaires
ACJC/988/2023 du 24.07.2023 sur JTPI/4436/2023 ( SML ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/21367/2022 ACJC/988/2023 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU LUNDI 24 JUILLET 2023 |
Entre
A______, sise ______, Algérie, recourante contre un jugement rendu par la 26ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 13 avril 2023, comparant par Me Bastien GEIGER, avocat, Woodtli Lévy Brutsch & Geiger, rue Prévost-Martin 5, case postale 60, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,
et
Madame B______, domiciliée ______[GE], intimée, comparant en personne.
A. Par jugement JTPI/4436/2023 du 13 avril 2023, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a rejeté la requête en mainlevée provisoire de l'opposition formée par B______ au commandement de payer, poursuite n° 1______ (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 150 fr., compensés avec l'avance effectuée par A______, laissés à la charge de cette dernière (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).
En substance, le Tribunal a considéré que A______ n'avait pas démontré avoir correctement exécuté sa prestation au-delà du mois de mai 2022, de sorte que la mainlevée provisoire ne pouvait être prononcée sur la base du contrat produit.
B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 27 avril 2023, A______ forme recours contre ce jugement, qu'elle a reçu le 17 avril 2023, dont elle sollicite l'annulation. Cela fait, elle conclut au prononcé de la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, sous suite de frais et dépens.
Elle allègue des faits nouveaux et produit une nouvelle pièce, soit un courrier adressé par B______ au Tribunal le 9 mars 2023 et ses annexes. Ce courrier ne figure pas dans le dossier du Tribunal et il n'apparaît pas qu'il aurait été transmis à A______ par celui-ci.
b. Par réponse expédiée le 17 mai 2023, B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris.
c. Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 6 juin 2023 de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits suivants ressortent de la procédure.
a. Le 25 février 2019, B______ (alors B______ [nom de mariée]) a signé avec C______ Sàrl (ci-après : C______) un contrat n° 2______ de mise à disposition de matériel et/ou d'abonnement de télésurveillance et/ou maintenance pour une durée de 60 mois au prix de 128 fr. 20 par mois.
L'article 14 du contrat prévoit que "le client autorise expressément C______ à céder ou mettre en garantie le contrat de plein droit et sans autres formalités que celles prévues ci-dessous, étant entendu que cette cession ou mise en garantie ne modifie en rien les formes et conditions dudit contrat. Tout moyen tel qu'une simple lettre ou l'avis de prélèvement qui sera émis pourra tenir lieu de notification au client d'une cession du contrat et de la créance correspondante en principal et en accessoire (intérêts, clauses indemnitaires), ce que le client reconnaît. Le paiement des factures sera en outre tenu pour reconnaissance par le client de la cession intervenue".
Selon l'article 10, en cas de retard de paiement des mensualités, C______ ou son cessionnaire sera fondé à réclamer au client pour chaque rappel et impayés, sommation, mise en demeure, une taxe de 10 fr. à 30 fr. au titre de frais administratifs ainsi qu'un intérêt moratoire de 5 % par mois.
b. Le même jour, les parties ont signé un document aux termes duquel il était convenu que C______ avait cédé sans garantie de l'existence du matériel et de la recouvrabilité, durant toute la période contractuelle, tous les droits et biens de ce contrat à A______ et que tous les paiements dus au titre de ce contrat devaient être effectués en main de A______.
c. B______ ne s'est plus acquittée des redevances à compter de juin 2022, selon un relevé de compte du contrat daté du 12 octobre 2022.
d. D'après l'historique produit par A______, l'alarme a fonctionné jusqu'au 5 mai 2022.
e. Le 5 octobre 2022, un commandement de payer, poursuite n° 1______, a été notifié à B______, à la requête de A______, portant sur les sommes de 128 fr. 20 plus intérêts à 7 % dès le 1er juin 2022 pour la mensualité du mois de juin 2022, de 128 fr. 20 plus intérêts à 7 % dès le 1er juillet 2022 pour la mensualité du mois de juillet 2022, de 128 fr. 20 plus intérêts à 7 % dès le 1er août 2022 pour la mensualité du mois d'août 2022, de 128 fr. 20 plus intérêts à 7 % dès le 1er septembre 2022 pour la mensualité du mois de septembre 2022 ainsi que de 30 fr. de frais de rappel.
B______ y a fait opposition.
f. Le 25 octobre 2022, A______ a requis du Tribunal le prononcé de la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer précité, sous suite de frais et dépens.
g. Lors de l'audience du 13 mars 2023 devant le Tribunal, A______ a persisté dans sa requête et déposé des pièces démontrant que l'alarme avait fonctionné jusqu'au mois de mai 2022.
B______ a exposé qu'elle était au milieu d'un litige qui ne la concernait pas.
Sur quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.
1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). Selon l'art. 251 let. a CPC, la procédure sommaire est applicable aux décisions rendues en matière de mainlevée d'opposition.
Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).
1.2 Interjeté dans le délai prévu par la loi, et selon la forme requise, le recours est recevable.
1.3 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).
2. La recourante a allégué des faits nouveaux et produit de nouvelles pièces, car ne figurant pas au dossier du Tribunal transmis à la Cour, et qui sont partant irrecevables dans le cadre d'une recours (art. 326 al. 1 CPC).
Eussent-ils été recevables qu'ils ne modifieraient en rien la solution.
3. La recourante fait grief au Tribunal de ne pas avoir prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition en considérant qu'elle n'avait pas effectué sa prestation postérieurement au mois de mai 2022. Elle soutient (nouvellement) qu'un tiers aurait déconnecté le système d'alarme de l'intimée, qu'elle était prête à continuer de fournir. L'intimée aurait conclu un nouveau contrat avec ce tiers.
3.1 Selon l'art. 82 al. 1 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire.
Constitue une reconnaissance de dette au sens de cette disposition, en particulier, l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant (ATF 132 III 140 consid. 4.1.1 et les arrêts cités) -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 139 III 297 consid. 2.3.1 et la jurisprudence mentionnée).
Un contrat écrit justifie en principe la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme d'argent incombant au poursuivi lorsque les conditions d'exigibilité de la dette sont établies (arrêt du Tribunal fédéral 5A_465/2014 du 20 août 2014 consid. 7.2.1.2) et, en particulier dans les contrats bilatéraux, lorsque le poursuivant prouve avoir exécuté les prestations dont dépend l'exigibilité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_367/2007 du 15 octobre 2007 consid. 3.1 et les références). Un contrat bilatéral ne vaut ainsi reconnaissance de dette que si le poursuivant a rempli ou garanti les obligations légales ou contractuelles exigibles avant le paiement dont il requiert le recouvrement, ou au moment de ce paiement, c'est-à-dire s'il a exécuté ou offert d'exécuter sa propre prestation en rapport d'échange (cf. ATF 116 III 72; cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_326/2011 du 6 septembre 2011 consid. 3.3 [prêt]). Il est rappelé à cet égard que selon l'art. 82 CO, celui qui poursuit l'exécution d'un contrat bilatéral - ou synallagmatique - doit avoir exécuté ou offrir d'exécuter sa propre obligation, à moins qu'il ne soit au bénéfice d'un terme d'après les clauses ou la nature du contrat.
Ainsi, la mainlevée provisoire peut être accordée sur la base d'un contrat bilatéral dans les quatre hypothèses suivantes : le poursuivi prétend que la contre-prestation n'a pas été exécutée ou n'a pas été exécutée correctement ; le poursuivi prétend que la contre-prestation n'a pas été exécutée ou n'a pas été exécutée correctement mais cette allégation est manifestement sans consistance ; le poursuivi prétend que la contre-prestation n'a pas été exécutée ou n'a pas été exécutée correctement mais le créancier peut prouver qu'il a accompli ce qui lui incombait ; le poursuivi doit s'exécuter le premier en vertu du contrat (Abbet, in La mainlevée de l'opposition, n. 145 ad art 82 CC).
3.2 En l'espèce, comme l'a justement retenu le premier juge sur la base des documents versés à la procédure à teneur du dossier en mains de la Cour, la recourante n'a pas démontré avoir fourni sa prestation au-delà du 5 mai 2022. Celle-ci ne le conteste d'ailleurs pas. Les explications qu'elle fournit à cet égard sont irrecevables, car nouvelles. Elles ne sont étayées par aucune pièce.
Le contrat produit ne vaut ainsi par titre de mainlevée provisoire.
Le recours, infondé, sera rejeté.
4. La recourante, qui succombe, sera condamnée aux frais de recours, arrêtés à 225 fr., compensés avec l'avance fournie acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).
Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui comparaît en personne, n'a répondu au recours que par un simple courrier et n'en a pas sollicité.
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La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable le recours interjeté le 27 avril 2023 par A______ contre le jugement JTPI/4436/2023 rendu le 13 avril 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21367/2022–26 SML.
Au fond :
Le rejette.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais du recours à 225 fr., les met à la charge de A______, et dit qu'ils sont compensés avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.
Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.
Siégeant :
Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.
La présidente : Pauline ERARD |
| La greffière : Mélanie DE RESENDE PEREIRA |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.