Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/798/2025 du 02.10.2025 sur ONMMP/3011/2025 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/1626/2024 ACPR/798/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du jeudi 2 octobre 2025 |
Entre
A______, représenté par Mes Lezgin POLATER et Guillaume TATTEVIN, avocats, ARCHIPEL, ruelle du Couchant 11, case postale 6009, 1211 Genève 6,
recourant,
contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 24 juin 2025 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a. Par acte expédié le 7 juillet 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 24 juin précédent, notifiée le lendemain, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur sa plainte.
Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à l'ouverture d'une instruction, avec des actes d'enquête qu'il énumère.
b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'500.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a. A______, né le ______ 1947, diamantaire/joailler expérimenté, était titulaire de la raison individuelle B______, fondée en 2006 et active dans l'achat, la vente et l'expertise de bijoux et pierres précieuses.
Son fils, C______, né le ______ 1982, disposait d'une procuration individuelle.
Ensemble, ils étaient co-titulaires, depuis 2013, d'un bail portant sur une arcade commerciale sise à la rue 1______ no. ______, et où ils exerçaient concurremment leur activité.
b. Le ______ 2017, l'entreprise individuelle de A______ a été radiée du Registre du commerce.
c.a. En réponse à plusieurs démarches de sa part, après avoir découvert la radiation de son entreprise individuelle, A______ a reçu, en août 2023:
- du Registre du commerce, copie d'un courrier du 30 novembre 2016, supposément signé de sa main, demandant la radiation de son entreprise individuelle;
- de la Caisse de compensation H______ [ci-après la H______], des échanges, survenus entre 2016 et 2018, de courriels, envoyés à et depuis l'adresse électronique "A______@gmail.com", ainsi qu'un courrier (du 18 août 2017) signé et comportant son nom en en-tête, dans lesquels il était fait mention de cette radiation;
- de D______ SA, société ayant supposément transporté pour lui, entre 2013 et 2014, des bijoux et autres marchandises précieuses, un courriel (du 10 août 2023) comportant la liste des services effectués "au bénéfice de M. A______"; puis un autre, du même jour, précisant que les informations précédemment communiquées ne concernaient pas "la société B______ et M. A______".
c.b. Selon ses dires, A______ a également appris l'existence, le 17 octobre 2023, d'une convention du 5 mars 2019, signée, d'une part, par E______ SA (propriétaire) et, d'autre part, par lui et C______, à teneur de laquelle les deux devaient recevoir, solidairement, CHF 1.5 million (TVA en sus) après la restitution des locaux concernés par le bail.
Ladite convention a été soumise à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, qui l'a ratifiée le 14 mars 2019, sans tenir d'audience. À teneur du procès-verbal de conciliation, A______ et C______, agissant en qualité de parties demanderesses, étaient représentés par le même avocat, Me F______.
d.a. Le 16 janvier 2024, A______ a porté plainte contre C______ des chefs d'abus de confiance, escroquerie, gestion déloyale et faux dans les titres.
Il soupçonnait son fils d'avoir imité sa signature sur les courriers des 30 novembre 2016 et 18 août 2017, ainsi que sur la convention du 5 mars 2019. À propos de celle-ci, il n'avait perçu aucun montant de E______ SA.
Il avait appris de D______ SA que, entre les deux courriels du 10 août 2023, celle-ci avait reçu comme consigne de son fils de ne plus communiquer avec lui, raison pour laquelle la société s'était soudainement dédite.
C______, exerçant dorénavant une activité concurrente, s'était indûment approprié son stock de marchandises et avait commencé à le vendre sans son autorisation et sans lui reverser la moindre contrepartie.
Enfin, il n'avait jamais utilisé l'adresse électronique "A______@gmail.com". Son seul message à la H______ remontait au 28 mars 2018 et avait la teneur suivante: "Malgré la radiation au registre du commerce du ______/2017 relative à l'entreprise individuelle "A______ B______", je vous confirme que je continue mon activité indépendante. Je vous prie dorénavant de m'adresser tout courrier à mon adresse : no. ______ rue 2______, [code postal] G______ [GE]".
d.b. Avec sa plainte, A______ a produit un rapport d'expertise privée du 24 novembre 2023, à teneur de laquelle il n'était pas l'auteur des signatures (et paraphes) figurant sur la lettre du 30 novembre 2016, ainsi que sur la convention du 5 mars 2019.
e. Entendu par la police, C______ a expliqué que la relation avec son père s'était dégradée avec la naissance de son fils, en 2013. À cette période, il avait, en outre,
ouvert sa propre boutique, sous forme d'une raison individuelle (A______, fondée le ______ 2013), devenue par la suite une société à responsabilité limitée (A______ SÀRL, fondée le ______ 2019). La radiation de l'entreprise individuelle de son père ne découlait que de la décision de ce dernier, lequel avait rédigé et signé le courrier du 30 novembre 2016.
Il ne s'était jamais approprié le stock de son père. Il avait effectivement eu des contacts avec D______ SA, car la société pensait qu'il était à l'origine de la demande d'informations de A______. La confusion était "normale" compte tenu de la proximité entre leurs patronymes. Pour des raisons de confidentialité, il avait demandé à D______ SA de ne pas communiquer à son père des informations le concernant. Il n'était pas impliqué dans les échanges litigieux avec la H______ et son père prenait – sciemment – ses propres décisions.
Concernant le bail, il en était le locataire et son père le garant. A______ avait signé la convention du 5 mars 2019 avec E______ SA mais n'avait toutefois pas perçu la somme versée, soit CHF 1'616'500.-, laquelle avait été créditée sur le compte de son entreprise individuelle A______. Cet argent était destiné à son activité et avait été intégralement utilisé à cette fin. Il n'en avait pas bénéficié à titre privé.
f. Par courriers des 10 avril et 14 mai 2025 au Ministère public, A______ a expliqué que C______ affichait sur ses réseaux sociaux un bracelet lui appartenant. En outre, il avait découvert qu'un diadème, réalisé par ses soins, figurait dans un catalogue pour une vente aux enchères à venir. Enfin, l'adresse électronique enregistrée pour récupérer les accès à "A______@gmail.com" était "C______@fr**.**".
C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public constate que A______ savait son entreprise individuelle radiée dès le 28 mars 2017, à teneur de son courriel à la H______. Dès lors, les déclarations de l'intéressé apparaissaient contradictoires, surtout que celui-ci ne pouvait pas ignorer, six ans durant, que sa raison individuelle n'existait plus. Aucune raison ne justifiait ainsi d'attendre six ans pour porter plainte s'il n'était pas l'auteur du courrier au Registre du commerce du 30 novembre 2016. Concernant la convention du 5 mars 2019, A______ intervenait dans la procédure civile comme demandeur. À teneur de l'accord amiable, le précité et son fils devaient recevoir la somme concernée de manière solidaire, de sorte que les rapports internes entre eux relevait du Code des obligations. Dans ces circonstances, le motif pour lequel C______ aurait utilisé la somme reçue n'était pas pertinente et il n'existait pas de "pièces accablantes" au dossier. Enfin, l'expertise graphologique, n'ayant au demeurant qu'une valeur d'allégué, ne permettait pas de conclure que C______ était à l'origine de signatures litigieuses.
D. a. Dans son recours, A______ explique qu'il pensait, en 2017, à une erreur administrative – corrigée depuis – en lien avec la radiation de son entreprise individuelle et, par ses agissements, C______ lui avait dissimulé la vérité. Son fils avait justement profité d'une position de confiance pour abuser de sa position et s'approprier sa marchandise. Les conclusions de l'expertise graphologique étaient suffisantes pour justifier l'ouverture d'une instruction, quand bien même le Ministère public ne porterait pas ses soupçons sur C______. Enfin, son activité avait initialement permis à l'arcade sise à la rue 1______ no. ______ d'être exploitée et dans ces circonstances, rien n'expliquait que la somme versée sur la base de la convention du 5 mars 2019 l'eût été au seul bénéfice de C______.
A______ produit avec son recours:
- une ordonnance du Tribunal de première instance du 21 mai 2025, bloquant la vente aux enchères du diadème;
- une lettre de Me F______, expliquant que C______ s'était opposé à la remise du dossier archivé en l'étude concernant le bail avec E______ SA;
- copie du dossier en question, comprenant les divers courriers envoyés par Me F______, desquels il ressort, en substance, que A______ n'a pas participé activement aux négociations avec E______ SA, qui avait résilié le bail, mais qu'il semble avoir reçu, en copie, plusieurs documents en lien avec celles-ci, en particulier, le 6 mars 2019, par courriel, un exemplaire signé de la convention du 5 mars 2019.
b. Le Ministère public maintient les termes de son ordonnance.
c. A______ n'a pas répliqué.
EN DROIT :
1. 1.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 396 al. 1 CPP) et concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).
1.2. Seule dispose de la qualité pour agir la partie qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).
1.2.1. Selon l'art. 118 al. 1 CPP, on entend par partie plaignante (art. 104 al. 1 let. b CPP) le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale. La notion de lésé est définie à l'art. 115 CPP; il s'agit de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction, c’est-à-dire le titulaire du bien juridique protégé par la disposition pénale qui a été enfreinte (ATF 147 IV 269 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1B_418/2022 du 17 janvier 2023 consid. 3.1).
1.2.2. L'art. 251 CP (faux dans les titres) protège, en tant que bien juridique, d'une part la confiance particulière placée dans un titre ayant valeur probante dans les rapports juridiques et, d'autre part, la loyauté dans les relations commerciales (ATF 142 IV 119 consid. 2.2). Le faux dans les titres peut également porter atteinte à des intérêts individuels s'il vise précisément à nuire à un particulier. Tel est le cas lorsque le faux est l'un des éléments d'une infraction contre le patrimoine; la personne dont le patrimoine est menacé ou atteint a alors la qualité de lésé (ATF 148 IV 170 consid. 3.5.1; ATF 140 IV 155 consid. 3.3.3; arrêt du Tribunal fédéral 7B_61/2023 du 3 juin 2025 consid. 3.2).
1.2.3. Les infractions contre le patrimoine protègent le détenteur des biens/avoirs menacés (ATF 148 IV 170 consid. 3.3.1).
1.2.4. Le recourant est tenu d'établir (cf. art. 385 CPP) l'existence d'un tel intérêt, en particulier lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (arrêts du Tribunal fédéral 7B_54/2024 du 7 février 2025 consid. 2.2.1; 7B_851/2024 du 30 janvier 2025 consid. 3.2.1).
1.3. Il sied de distinguer les accusations du recourant contre le mis en cause.
1.3.1. Pour les infractions visées aux art. 137, 146 et 158 CP, le recourant serait touché dans son patrimoine par les faits dénoncés, de sorte que son recours est recevable sur ce volet.
1.3.2. Le recourant reproche ensuite au mis en cause d'avoir imité sa signature sur des courriers envoyés au Registre du commerce, en particulier celui du 30 novembre 2016, demandant la radiation de son entreprise individuelle.
Malgré l'impératif qui lui incombe, le recourant ne consacre aucun développement pour démontrer en quoi ladite radiation lui aurait causé un préjudice quelconque ou serait susceptible de le faire. En théorie, cela n'entraine pas d'incidence légale particulière puisque l'entreprise individuelle – qui n'a pas de personnalité propre – est étroitement liée à son propriétaire. En pratique, on peine à comprendre quel désavantage en a découlé pour le recourant, dès lors que celui-ci a, selon ses dires, continué son activité professionnelle presque six ans durant, bien que sa raison individuelle ne fût plus inscrite au Registre du commerce.
On peut toutefois supputer que, dans les accusations du recourant, les démarches visant à radier son entreprise individuelle s'inscriraient dans le cadre plus global des actes préjudiciables à son patrimoine.
Dans cette mesure, un intérêt juridiquement protégé peut être reconnu au recourant sur ce volet.
1.3.3. Tel n'est en revanche pas le cas s'agissant de la convention du 5 mars 2019.
Il est établi que le propriétaire a résilié le bail de l'arcade sise à la rue du Rhône.
Ainsi, si le recourant reproche au mis en cause d'avoir imité sa signature sur le document litigieux, dont il prétend n'avoir eu connaissance pour la première fois que le 17 octobre 2023, il n'allègue en tous cas pas qu'il se serait opposé à la solution amiable trouvée. Celle-ci prévoit, au demeurant, le versement en sa faveur, solidairement avec son fils, de CHF 1.5 million (plus TVA), dès la libération des locaux.
Qu'il n'ait pas perçu ce montant relève des rapports internes avec son fils et le recourant n'allègue pas, ni – a fortiori – ne démontre, avoir entamé des démarches pour récupérer la somme qu'il estime lui être due.
Compte tenu de ce qui précède, le recourant n'a pas démontré à satisfaction de droit disposer d'un intérêt juridique pour ce complexe de faits.
Partant, le recours est irrecevable sur ce point.
1.4. Les pièces nouvelles sont recevables (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2).
2. Le recourant reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte.
2.1. À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.
2.1.1. Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; ATF 138 IV 86 consid. 4.1).
2.1.2. Les conditions à l'ouverture de l'action pénale comprennent également l'existence d'une plainte pénale valable pour les infractions poursuivies sur plainte (ATF 136 III 502 consid. 6.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 7B_77/2022 du 12 décembre 2023 consid. 3.1).
2.2. Selon l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. La détermination du dies a quo se fait en tenant compte des circonstances du cas d'espèce. Le délai pour porter plainte ne commence à courir que lorsque le lésé a connu l'infraction et l'auteur de celle-ci (ATF 130 IV 97 consid. 2).
2.3.1. L'infraction d'abus de confiance (art. 138 CP) réprime le comportement de quiconque, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, s’approprie une chose mobilière appartenant à autrui et qui lui a été confiée ou quiconque, sans droit, emploie à son profit ou au profit d’un tiers des valeurs patrimoniales qui lui ont été confiées.
L'infraction d'escroquerie (art. 146 CP) réprime quant à elle le comportement de quiconque dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, induit astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou la conforte astucieusement dans son erreur et détermine de la sorte la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers.
Se rend coupable de gestion déloyale (art. 158 CP) quiconque, en vertu de la loi, d’un mandat officiel ou d’un acte juridique, est tenu de gérer les intérêts pécuniaires d’autrui ou de veiller sur leur gestion et qui, en violation de ses devoirs, porte atteinte à ces intérêts ou permet qu’ils soient lésés.
2.3.2. Ces trois infractions sont poursuivies sur plainte lorsqu'elles sont commises au préjudice des proches (art. 138 ch. 1 al. 4, 146 al. 3 et 158 ch. 3 CP), soit en particulier les parents en ligne directe (art. 110 al. 1 CP).
2.4. D'après l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres quiconque, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, crée un titre faux, falsifie un titre, abuse de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constate ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre.
2.4.1. Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait (art. 110 al. 4 1ère phrase CP).
2.4.2. Il y a faux matériel lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent. Le faussaire crée un titre qui trompe sur l'identité de celui dont il émane en réalité (ATF 128 IV 265 consid. 1.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_96/2014 du 30 juin 2014 consid. 2.3). Il existe toutefois des situations où le fait de signer d'un autre nom que le sien ne constitue pas un faux. Ainsi, il n'y a en principe pas de création d'un titre faux si l'auteur signe du nom d'autrui avec l'accord de cette personne, et cela même en cas de représentation dite cachée, l'auteur apparent du titre coïncidant alors avec l'auteur réel, soit le représenté, qui veut le titre quant à son existence et à son contenu; restent cependant réservés les cas des titres qui doivent être établis personnellement (ATF 132 IV 57 consid. 5.1.2; 128 IV 265 consid. 1.1.2 et 1.1.3).
2.5. En l'espèce, le recourant a reçu, au mois d'août 2023, divers documents du Registre du commerce, de la H______ et a échangé avec D______ SA. Les éléments ainsi recueillis fondent la plus grande partie de ses accusations – vagues – contre son fils. Compte tenu de ses démarches auprès de la société précitée, il apparaît même que ses soupçons selon lesquels le mis en cause se serait accaparé sa marchandise étaient encore plus anciens.
Quoiqu'il en soit, sa plainte date du 16 janvier 2024. Elle est ainsi tardive pour les infractions visées aux art. 138, 146 et 158 CP, vu les liens de parenté unissant le recourant et son fils.
En outre, on comprend que le recourant soupçonne le mis en cause d'être derrière l'adresse électronique "A______@gmail.com". Les messages envoyés depuis celle-ci remontent au plus tard à 2018, tandis que l'infraction d'usurpation d'identité (art. 179decies CP), pour autant qu'elle s'applique, n'est entrée en vigueur que le 1er septembre 2023. Sans autre indication, il n'existe donc pas de prévention pénale pour ces faits.
En résumé, la non-entrée en matière s'imposait pour tous les faits mentionnés supra et l'ordonnance querellée sera confirmée, par substitution de motifs.
2.6. Reste encore l'infraction de faux dans les titres, en lien avec les courriers au Registre du commerce des 30 novembre 2016 et 18 août 2017.
Le recourant allègue avoir découvert, en août 2023, la radiation de son entreprise individuelle, survenue le 1er mars 2017. Pourtant, dans le courriel du 28 mars 2018 qu'il admet avoir envoyé à la H______, il en a expressément fait mention, précisant continuer néanmoins son activité.
Ainsi, même si l'expertise graphologique privée, indépendamment de sa valeur, tend à démontrer qu'il n'a pas signé de sa main le courrier du 30 novembre 2016, aucun élément objectif ne permet d'affirmer, d'une part, que le recourant ne souhaitait pas cette radiation et, d'autre part, qu'il n'aurait pas signé celui du 18 août 2017.
Ses dénégations contraires doivent être à cet égard nuancées, tel que constaté par le Ministère public. Sans même évoquer la présomption de connaissance découlant de la publicité du Registre du commerce (art. 936b al. 1 CO), il est en effet improbable, déjà pour des raisons pratiques – par exemple les cotisations auprès de la H______, dont on note au demeurant que les échanges ont cessé après 2018 – que le recourant ait ignoré la radiation de son entreprise individuelle six ans durant. Tel n'apparaît de toute manière pas être le cas, eu égard, comme on l'a vu, à son courriel du 28 mars 2018.
3. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.
4. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 1'500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).
5. Corrélativement, aucun dépens ne lui sera alloué (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours dans la mesure de sa recevabilité.
Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'500.-.
Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.
Le greffier : Julien CASEYS |
| La présidente : Corinne CHAPPUIS BUGNON |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
P/1626/2024 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 1'415.00 |
Total | CHF | 1'500.00 |