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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/261/2025

ACPR/483/2025 du 25.06.2025 sur JTPM/210/2025 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE;LIBÉRATION CONDITIONNELLE
Normes : CP.61; CP.62; CP.62a; CP.62b; CP.62c

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/261/2025 ACPR/483/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 25 juin 2025

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocate,

recourant,

 

contre la décision rendue le 11 avril 2025 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 22 avril 2025, A______ recourt contre la décision du 11 avril 2025, notifiée le 15 suivant, par laquelle le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a ordonné sa libération conditionnelle de la mesure de traitement pour jeune adulte (art. 61 CP), avec effet au jour de son placement au CAAD, mais au plus tard le ______ avril 2025, et lui a fixé un délai d'épreuve de trois ans, assorti de diverses règles de conduite.

Le recourant conclut à sa libération définitive de la mesure et à l'allocation d'une indemnité pour les frais indispensables pour son recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Par jugement du 2 juillet 2015 rendu dans la procédure P/1______/2014, le Tribunal correctionnel a condamné A______, né le ______ avril 1995, à une peine privative de liberté de 24 mois pour brigandage, tentative de brigandage, violation de domicile, vol, dommages à la propriété, vol d'usage d'un véhicule automobile, conduite sans autorisation, conduite en état d'incapacité de conduire, dérobade et conduite en état d'ébriété. Il a également ordonné une mesure applicable aux jeunes adultes au sens de l'art. 61 CP.

a.b. Selon l'expertise psychiatrique du 23 janvier 2015, ordonnée dans le cadre de la procédure précitée, A______ souffrait de trouble schizo-affectif et de syndrome de dépendance à des substances psycho-actives multiples. Compte tenu du risque de récidive, un traitement institutionnel en milieu fermé était indiqué, les troubles psychiques de l'intéressé étant le facteur principal du risque de récidive. Un tel traitement pouvait, dans un premier temps, être mis en œuvre au sein de l’établissement Curabilis puis, une fois l'état mental de l'intéressée stabilisé, se poursuivre dans le cadre d’une mesure pour jeunes adultes.

b. A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon dès le 9 décembre 2014 et transféré à l'établissement fermé La Brenaz le 12 octobre 2015.

c. Dans le cadre de son incarcération, A______ a fait l'objet des condamnations suivantes, en lien avec son comportement en détention :

- une peine privative de liberté de 60 jours, par ordonnance pénale du Ministère public du 8 février 2018, pour tentative de violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires;

- une peine privative de liberté de 180 jours, par ordonnance pénale du Ministère public du 8 mai 2018, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et tentative de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires;

- une peine privative de liberté de 150 jours, par ordonnance pénale du Ministère public du 17 décembre 2018, pour tentative de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires;

- une peine privative de liberté de 2 mois, par jugement du Tribunal de police du 23 août 2019, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires;

- une peine privative de liberté de 3 mois, par arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 29 juin 2020, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires.

Toutes ces peines ont été suspendues au profit de la mesure thérapeutique institutionnelle.

d. Par jugement du 21 février 2017, le TAPEM a levé la mesure au sens de l'art. 61 CP – faute d'établissement approprié – au profit d'une mesure thérapeutique institutionnelle (art. 59 CP), pour une durée initiale de deux ans, avec la précision qu'il lui appartiendrait de se prononcer, le moment venu, sur la libération conditionnelle de cette mesure.

e. Selon l'expertise psychiatrique effectuée le 29 mai 2020 par le Centre Universitaire romand de médecine légale (ci-après : CURML) dans le cadre de l'examen annuel de la mesure, A______ présentait un trouble mixte de la personnalité (antisociale et émotionnellement labile), séquellaire d'un trouble de l'attachement et du développement de l'enfant et de troubles mentaux et du comportement liés à l'utilisation de drogues multiples, et d'un syndrome de dépendance. Il présentait un risque moyen de récidive, en raison de l'effet protecteur de la prise en charge en milieu institutionnel.

f. Par jugement du 26 juin 2020, confirmé par arrêt ACPR/539/2020 rendu le 6 août 2020 par la Chambre de céans, le TAPEM a ordonné la poursuite de la mesure thérapeutique institutionnelle.

g. Par jugement du 19 octobre 2020, le TAPEM a levé la mesure institutionnelle au sens de l'art. 59 CP et a ordonné une mesure applicable aux jeunes adultes (art. 61 CP), pour une durée de 4 ans, soit jusqu'au 13 octobre 2024.

h. Le 2 novembre 2020, A______ a été transféré au Centre éducatif de C______.

i. Par jugement du 29 novembre 2022, le TAPEM a ordonné la libération conditionnelle de la mesure (art. 61 CP), avec effet plus tard le 30 avril 2023, et fixé à A______ un délai d'épreuve de 3 ans à compter de sa libération conditionnelle effective, assorti de règles de conduite, notamment l'obligation de résider dans un lieu de vie agréé par le Service de la réinsertion et du suivi pénal (ci-après : SRSP), l'abstinence aux produits toxiques et la poursuite d'un suivi psychothérapeutique et médicamenteux.

j. Par jugement du 27 avril 2023, le TAPEM a constaté que le concerné continuait de remplir les conditions pour la libération conditionnelle et que rien ne justifiait de revenir sur cette décision définitive et exécutoire.

k. Par arrêt AARP/193/2024 rendu le 11 juin 2024, la Chambre pénale d'appel et de révision a ordonné la réintégration de l'intéressé dans l'exécution de la mesure au sens de l'art. 61 CP. Vu son âge, cette mesure serait limitée au jour de son trentième anniversaire (art. 61 al. 4 CP), charge à l'autorité d’exécution d’anticiper cette date et les aménagements devant accompagner la sortie de A______ afin de prévenir une dégradation telle que celle constatée depuis sa libération conditionnelle.

La situation de l'intéressé s'était en effet détériorée, puisqu'il avait notamment tenu un discours délirant et proféré des menaces d’aller "poignarder des gens dans la rue" pour pouvoir retourner en détention. Il avait commencé à consommer du crack et consommait toujours de l'alcool, du cannabis, de l'ecstasy et de la MDMA. Le 1er novembre 2023, un incident était survenu au Service de probation et d’insertion (SPI), à la suite duquel la procédure P/2______/2023 avait été ouverte pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires.

l. Il ressort de l'extrait de casier judiciaire suisse, dans sa teneur du 13 mars 2025, que la procédure P/2______/2023 est en cours contre l'intéressé au Tribunal de police.

m. Le 17 juin 2024, A______ a réintégré le Centre éducatif de C______.

n. Par décision du Service de l'application des peines et des mesures (SAPEM) du 15 octobre 2024, A______ a pu bénéficier de conduites sécurisées et de conduites accompagnées, dans la mesure où son comportement au sein du centre précité était satisfaisant.

o. Le 17 décembre 2024, le Centre d'accueil pour adultes en difficulté (ci-après : CAAD) a préavisé favorablement le placement de l'intéressé en son sein à sa sortie du Centre éducatif de C______.

p. Selon les rapports des 21 janvier et 10 mars 2025 du Centre éducatif de C______, A______ était bien intégré, capable de respecter les règles et participait aux tâches quotidiennes de la vie du groupe. Il était en attente d'une place au CAAD.

q. Dans son préavis du 13 mars 2025, le SRSP, au vu de l'ensemble du dossier et en application de l'art. 62b al. 2 CP, a estimé que les conditions de la libération conditionnelle étaient réunies et il préavisait favorablement la libération définitive de la mesure ordonnée à l'endroit de A______, avec effet au jour de son placement au CAAD, mais au plus tard le ______ avril 2025, jour de ses 30 ans.

L'intéressé avait adopté un bon comportement tout au long de son placement, se montrant respectueux des règles, des horaires et des intervenants. Il avait pu développer des stratégies de gestion de la frustration et des conflits. Il était compliant au suivi et à son traitement médicamenteux. Sa consommation de toxiques avait diminué et il avait conscience de sa fragilité et de son besoin d'aide. Il pourrait bénéficier du soutien de sa curatrice et de l'encadrement du CAAD.

r. Le 18 mars 2025, le Ministère public a fait siens les conclusions et le préavis du SRSP.

s. Par ordonnance du 20 mars 2025, le TAPEM a ordonné une défense d'office en faveur de A______ et désigné Me B______ à cet effet.

t. Par courrier du 8 avril 2025, A______ a informé le TAPEM avoir obtenu une place au CAAD. C'était pour lui une grande satisfaction de lire le préavis positif du SAPEM [sic, recte : SRSP]. Il était impatient d'intégrer cette nouvelle structure dès que possible et appuyait, "bien évidemment" ledit préavis.

C. Dans sa décision querellée, le TAPEM retient que le Ministère public et le SRSP s'étaient prononcés en faveur de la "libération conditionnelle". L'état de A______ justifiait de lui donner l'occasion de faire ses preuves en liberté (art. 62 al. 1 CP), la poursuite du placement au Centre éducatif de C______ n'apportant "rien de plus". Son besoin de consolider ses acquis et de maintenir la stabilisation de son état pour éviter une rechute justifiait de subordonner la libération conditionnelle à des règles de conduite consistant en l'obligation de résider dans un lieu de vie agréé par le SRSP, de poursuivre un traitement psychothérapeutique et médicamenteux, de se soumettre à des tests inopinés d'abstinence et de compliance médicamenteuse, ainsi que d'avoir une activité occupationnelle ou professionnelle correspondant à ses aptitudes.

D. a. Dans son recours, A______ expose que malgré la "sortie sèche" le 30 avril 2023, avec un état psychique et physique qui s'était fortement détérioré de semaine en semaine, il n'avait commis aucune infraction grave, mis à part "l'incident" survenu en novembre 2023 au SPI. N'arrivant plus à survivre avec les CHF 10.- qu'il recevait quotidiennement et ayant très faim, il était allé au SPI pour obtenir un rendez-vous "en haussant le ton". Sans aucun cadre ni traitement médical, il n'y avait eu aucune infraction du type de celles déjà commises, malgré le trouble schizo-affectif dont il souffrait et un traitement médicamenteux "très intermittent" entre avril 2023 et juin 2024. Or, l'expertise du 23 janvier 2025 (sic, recte : 2015) retenait un risque de récidive élevé compte tenu de son trouble et du syndrome de dépendance à des substances psychoactives multiples. Ceci démontrait "à souhait" qu'avec un cadre structurant, le risque de récidive était totalement nul. Le placement au CAAD était intervenu à sa demande motivée, pour être éloigné de Genève.

Les art. 62b et 61 al. 4 CP avaient été violés, de même que le principe de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Son transfert au CAAD devait intervenir au plus tard le ______ avril 2025, la mesure pour jeune adulte ne pouvant exister au-delà de ses 30 ans, selon le texte clair de l'art. 61 al. 4 in fine CP. Contrairement à ce qu'avait retenu le TAPEM, le SRSP s'était prononcé pour une libération définitive de la mesure, ce qui respectait le texte de la loi. Le TAPEM ne pouvait pas par un "tour de passe-passe" prononcer une libération conditionnelle assortie de règles de conduite "draconiennes" durant trois ans, ce qui violait la loi de manière crasse et était profondément choquant et arbitraire. Il se trouvait depuis 10 ans dans le système des meures pénales et il avait eu un parcours exemplaire depuis sa réintégration à C______. Il devait être libéré définitivement de la mesure fondée sur l'art. 61 CP.

b. Le TAPEM maintient les termes de sa décision et renonce à formuler des observations.

c. Le Ministère public s'en rapporte à justice tant sur la recevabilité du recours que sur le fond.

d. A______ n'a pas répliqué.

EN DROIT :

1.             En tant qu'il concerne la mesure prévue par l'art. 61 CP, le recours contre le jugement du TAPEM est recevable (N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 2e éd., Zurich 2013, n. 4 ad art. 365). Il a, par ailleurs, été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 393 et 396 CPP), concerne une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 20 al. 1 let. c et 393 al. 1 let. b CPP et art. 128 al. 1 let. a LOJ) et émane de la personne visée par la mesure qui a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision entreprise (art. 105 al. 1 let. f et 382 CPP).


 

2.             Le recourant fait grief au TAPEM d'avoir violé les art. 61 al. 4 et 62b CP.

2.1.       À teneur de l'art. 61 al. 1 CP, si l'auteur avait moins de 25 ans au moment de l'infraction et qu'il souffre de graves troubles du développement de la personnalité, le juge peut ordonner son placement dans un établissement pour jeunes adultes aux conditions suivantes : l'auteur a commis un crime ou un délit en relation avec ces troubles (let. a); il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ces troubles (let. b).

La privation de liberté entraînée par l'exécution de la mesure ne peut excéder 4 ans. En cas de réintégration à la suite de la libération conditionnelle, elle ne peut excéder 6 ans au total. La mesure doit être levée au plus tard lorsque l'auteur atteint l'âge de 30 ans (al. 4), cette règle valant "dans tous les cas" (R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2e éd., Bâle 2021, n. 32 ad art. 61 CP). Lorsque l'auteur a atteint cette limite d'âge, la fin de la mesure est donc obligatoire (M. NIGGLI, Basler Kommentar zur StGB und JStGB, 4e éd., Bâle 2019, n. 73 ad art. 61 CP).

2.2. Selon l’art. 62 CP, l’auteur est libéré conditionnellement de l’exécution institutionnelle de la mesure dès que son état justifie de lui donner l’occasion de faire ses preuves en liberté (al. 1). Le délai d’épreuve est de 1 an à 5 ans en cas de libération conditionnelle de la mesure prévue à l’art. 59 CP, et de 1 à 3 ans en cas de libération conditionnelle d’une des mesures prévues aux art. 60 et 61 CP (al. 2). La personne libérée conditionnellement peut être obligée de se soumettre à un traitement ambulatoire pendant le délai d’épreuve. L’autorité d’exécution peut ordonner, pour la durée du délai d’épreuve, une assistance de probation et lui imposer des règles de conduite (al. 3).

2.3. L’art. 62a CP prescrit que si, durant le délai d’épreuve, la personne libérée conditionnellement commet une infraction dénotant la persistance du danger que la mesure devait écarter, le juge qui connaît de la nouvelle infraction peut, après avoir entendu l’autorité d’exécution, ordonner la réintégration, lever la mesure et en ordonner une autre pour autant que les conditions soient réunies, lever la mesure et ordonner l’exécution d’une peine privative de liberté pour autant que les conditions soient réunies (al. 1). S’il est sérieusement à craindre qu’en raison de son comportement durant le délai d’épreuve, la personne libérée conditionnellement ne commette une infraction prévue à l’art. 64 al. 1 CP, le juge qui a ordonné la mesure peut ordonner sa réintégration à la requête de l’autorité d’exécution (al. 3). La réintégration ne peut excéder 5 ans pour la mesure prévue à l’art. 59 CP, et 2 ans pour les mesures prévues aux art. 60 et 61 CP (al. 4), étant rappelé qu'en tout état, la mesure pour jeune adulte doit être levée au plus tard lorsque l’auteur atteint l’âge de 30 ans (art. 61 al. 4 CP).

La réintégration dans une mesure suppose que les conditions de celle-ci soient réalisées. La possibilité d'ordonner une autre mesure prévue à l'art. 62a al. 1 let. b CP est utilisée avec retenue en pratique. En effet, lors du prononcé initial de la mesure, il n'y avait souvent qu'un seul type de mesure qui paraissait approprié ; une indication pour plusieurs mesures constituerait ici une exception (arrêt du Tribunal fédéral 6B_578/2019 du 4 juillet 2019 consid. 1.1).

2.4. L’auteur est libéré définitivement lorsque la durée maximale prévue aux art. 60 et 61 est atteinte et si les conditions de la libération conditionnelle sont réunies (art. 62b al. 2 CP).

À l’échéance de la durée maximale, la mesure doit être levée en cas d’échec. Tel est le cas lorsque les conditions d’une libération conditionnelle selon l’art. 62 al. 1 CP ne sont pas remplies à ce moment-là (art. 62c al. 1 let. b CP). L’exécution d’une peine résiduelle ou la prise d’une autre mesure au sens de l’art. 62c al. 2 à 6 CP, peut encore être envisagée si les conditions sont remplies. En revanche, si un pronostic favorable au sens de l’art. 62 al. 1 CP peut être posé, il y aura libération définitive (M. NIGGLI, op. cit., n. 77 ad art. 61 CP).

2.5. En l'espèce, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré, le 11 avril 2025, que l'occasion devait être donnée au recourant de faire ses preuves en liberté, à savoir hors du cadre de l'institution de C______, au sein de laquelle le placement n'apporterait "rien de plus", moyennant toutefois des règles de conduite, autrement dit une libération conditionnelle de la mesure fondée sur l'art. 61 CP. Le TAPEM a suivi en cela le préavis du SRSP, que le Ministère public a fait sien, selon lequel il ne préavisait favorablement que si les conditions de la libération conditionnelles étaient réunies. Si l'intéressé a, aux dires du SRSP, adopté un bon comportement tout au long de son placement au Centre éducatif de C______, dès le 17 juin 2024, ce qui ressort des rapports des 21 janvier et 10 mars 2025 dudit Centre – se montrant respectueux des règles, des horaires et des intervenants, ayant développé des stratégies de gestion de la frustration et des conflits, se montrant compliant au suivi et à son traitement médicamenteux, ayant diminué sa consommation de toxiques et conscience de sa fragilité et de son besoin d'aide – il n'en demeure pas moins qu'une sortie était préconisée moyennant le soutien de sa curatrice et l'encadrement du CAAD.

Au vu du parcours du recourant, de la protection de l'intérêt public et de l'objectif de réinsertion sociale de l'intéressé, une levée pure et simple de la mesure n'est pas envisageable. En effet, le recourant a, en 2023, tenu un discours délirant et proféré des menaces d'aller "poignarder des gens dans la rue" dans le but de retourner en détention pour pouvoir à nouveau bénéficier d'un encadrement. Une procédure pénale (P/2______/2023) est par ailleurs toujours en cours devant le Tribunal de police du chef de violence ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, à la suite d'un incident au SPI le 1er novembre 2023, au cours duquel le recourant dit qu'il aurait simplement "haussé le ton" pour obtenir davantage d'argent pour s'acheter à manger. Par ailleurs, dans son arrêt AARP/193/2024 du 11 juin 2024, soit il y a une année, la Chambre pénale d'appel et de révision a rappelé qu'il était nécessaire de prévoir, avant le 30ème anniversaire du recourant, les aménagements nécessaires pour accompagner sa sortie et prévenir une dégradation telle que constatée depuis sa libération conditionnelle [soit entre le jugement du TAPEM du 29 novembre 2022 et ledit arrêt du 11 juin 2024 – qui a ordonné sa réintégration dans la mesure (art. 61 CP)]. Partant, le pronostic n'est favorable que si le recourant est suffisamment encadré.

C'est précisément ce que permet en premier lieu l'entrée prévue au CAAD au plus tard le ______ avril 2025, au sujet duquel le recourant disait au TAPEM par courrier du 8 avril 2025 à quel point il était impatient de l'intégrer. Aussi, et précisément dans le but d'assurer le cadre nécessaire pour se prémunir d'une dégradation de la situation du recourant, la libération conditionnelle de la mesure de l'art. 61 CP pouvait être ordonnée – avant le 30ème anniversaire du recourant –, y compris avec des règles de conduite, comme décidé par le TAPEM.

À cet égard, la plupart des règles de conduite imposées par cette autorité au recourant lui sont favorables, et sont même en partie souhaitées par ce dernier. Tel est le cas de son placement au CAAD, mais aussi de la psychothérapie. Seule l'interdiction de consommation d'alcool et de stupéfiants apparait contraignante. Toutefois, l'étendue des contrôles peut être aménagée avec l'autorité d'exécution (SRSP) et ceux-ci ont pour but la préservation de l'intérêt public et la réinsertion sociale du recourant, au vu des actes commis. Quant à l'obligation d'avoir une activité occupationnelle ou professionnelle correspondant à ses aptitudes, elle s'avère difficilement critiquable et le recourant n'indique pas en quoi elle ne serait pas adéquate. Enfin, il se justifie de maintenir une tel cadre pendant la durée du délai d'épreuve, fixée à 3 ans.

En cas de récidive dans ce délai, la réintégration dans la mesure de l'art. 61 CP ne pourrait certes pas être prononcée, puisque le recourant a atteint l'âge de 30 ans le ______ avril 2025, mais le juge pourrait examiner la nécessité de prononcer une autre mesure, pour adulte cette fois-ci (art. 62a CP).

Il s'ensuit que quand bien même le recourant a désormais atteint l'âge de 30 ans, la libération conditionnelle de la mesure de l'art. 61 CP, avec des règles de conduite, ne viole ni l'art. 61 al. 4 CP, ni le principe de la proportionnalité.

3.             Infondé, le recours doit être rejeté.

4.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP; E 4 10.03]).

5.             Le conseil du recourant, nommé d'office par l'instance précédente le 20 mars 2025, sera confirmé en cette qualité et indemnisé pour son activité devant l'autorité de recours.

5.1. À teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, le tarif des avocats est édicté à l'art. 16 RAJ ; il prévoit une indemnisation sur la base d'un tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (art. 16 al. 1 let. c RAJ). Seules les heures nécessaires sont retenues ; elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance, et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

5.2. L'indemnité du défenseur d'office pour la procédure de recours sera fixée à CHF 432.40, TVA par 8,1% (CHF 32.40) comprise, correspondant à 2 heures de rédaction pour un recours portant sur 5 pages (y compris page de garde et conclusions).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 600.-.

Alloue à Me B______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 432.40, TVA (8.1%) incluse, à titre d'indemnité de conseil d'office de A______ pour l'instance de recours (art. 135 al. 1 CPP).

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au Ministère public ainsi qu'au Tribunal d'application des peines et des mesures.

Le communique, pour information, au Service de la réinsertion et du suivi pénal.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

Le greffier :

Sandro COLUNI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/261/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00